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12/06/2025 | FRANCE | N°22NC00453

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 12 juin 2025, 22NC00453


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme G... B..., Mme E... H... et M. F... H... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision tacite de non-opposition, née le 30 novembre 2019 du silence gardé par le maire de la commune de Delme (57), sur la déclaration préalable de travaux déposée par M. A... C... en vue de la réalisation d'une terrasse surélevée.



Par un jugement n° 2001089 du 3 février 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.<

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Procédure devant la cour :



Par une requête et des mémoires, enregistrés le 21 fé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... B..., Mme E... H... et M. F... H... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision tacite de non-opposition, née le 30 novembre 2019 du silence gardé par le maire de la commune de Delme (57), sur la déclaration préalable de travaux déposée par M. A... C... en vue de la réalisation d'une terrasse surélevée.

Par un jugement n° 2001089 du 3 février 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 21 février 2022, le 29 avril 2022 et le 24 mai 2022, Mme G... B..., Mme E... H... et M. F... H..., représentés par la SELAS Devarenne Associés Grand Est, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 2001089 du 3 février 2022 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler la décision tacite de non-opposition à la déclaration préalable de travaux déposée par M. C... le 30 septembre 2019 en vue de réaliser une terrasse surélevée ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Delme une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le dossier de déclaration préalable de travaux est insuffisant au regard des exigences de l'article R. 431-16 et des c et d) de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme ainsi que des éléments devant permettre de vérifier, notamment au regard de l'emprise, la nécessité d'un permis de construire en l'absence de plan de masse coté dans les trois dimensions et de documents graphiques et photographiques appropriés ;

- le projet nécessite un permis de construire ;

- les dispositions de l'article UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Delme sont méconnues.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mai 2022, la commune de Delme, représentée par Me Gillig, conclut au rejet de la requête et à la condamnation des requérants à lui verser une somme de 1 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par des mémoires, enregistrés le 10 mars 2022 et le 9 mai 2022, M. A... C..., représenté par Me Savouret, sollicite, à titre principal, le rejet de la requête et, à titre subsidiaire, le prononcé d'une annulation seulement partielle de la décision tacite de non-opposition à la déclaration préalable de travaux et d'un sursis à statuer dans l'attente de la régularisation de cette décision. Il sollicite également la condamnation solidaire des requérants à lui verser une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bauer,

- et les conclusions de M. Meisse, rapporteur public.

- et les observations de Me Jacquemin, substituant Me Devarenne, représentant Mme B... et Mme et M. H... et de Me Erkel, représentant la commune de Delme.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... est le propriétaire d'une maison d'habitation située 3, rue de la Marne sur le territoire de la commune de Delme (57). Le 30 septembre 2019, il a déposé une déclaration préalable de travaux en vue de la construction d'une terrasse en bois surélevée pour cette maison. Une décision tacite de non-opposition à cette déclaration préalable est née le 30 novembre 2019, le délai d'instruction ayant été prorogé d'un mois conformément aux dispositions des articles R. 423-24 et suivants du code de l'urbanisme. Le 10 février 2020, Mme B... et Mme et M. H..., voisins de M. C..., ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler cette décision. Par la présente requête, ils relèvent appel du jugement n° 2001089 du 3 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-36 du code de l'urbanisme propre au dossier de déclaration de travaux : " Le dossier joint à la déclaration comprend : a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l'intérieur de la commune ; b) Un plan de masse coté dans les trois dimensions lorsque le projet a pour effet de créer une construction ou de modifier le volume d'une construction existante ; c) Une représentation de l'aspect extérieur de la construction faisant apparaître les modifications projetées et si le projet a pour effet de modifier celui-ci (...) ; Lorsque la déclaration porte sur un projet de création ou de modification d'une construction et que ce projet est visible depuis l'espace public ou que ce projet est situé dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques, le dossier comprend également les documents mentionnés aux c et d de l'article R. 431-10. / Aucune autre information ou pièce ne peut être exigée par l'autorité compétente. " Aux termes de l'article R. 431-10 du même code, applicable compte-tenu de la situation du projet vis-à-vis du monument historique constitué par la synagogue de Delme : " Le projet architectural comprend également : (...) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse ".

3. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

4. Les requérants soutiennent que le dossier de déclaration préalable déposé par M. C... était incomplet au regard des dispositions précitées des articles R. 431-36 et R. 431-10 du code de l'urbanisme, faute de comporter un plan de masse coté dans les trois dimensions et un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et au paysage, alors que la représentation de la terrasse projetée, qui apparaît située tantôt en dessous, tantôt au-dessus du mur séparant la propriété de M. C... de la leur, est de nature à avoir trompé le service instructeur.

5. Il ressort des pièces du dossier que le dossier de déclaration préalable comprenait des plans permettant au service instructeur de connaître les caractéristiques et les dimensions de la construction envisagée. Le dossier comportait également des documents graphiques et photographiques d'insertion du projet par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages. Eu égard à la configuration des lieux, aux dimensions modestes du projet et à sa localisation à l'arrière du bâtiment, ainsi qu'aux indications portées sur le formulaire CERFA et dans l'avis de l'architecte des bâtiments de France du 31 octobre 2019, l'absence de représentation de l'environnement lointain n'a pas été de nature à fausser l'appréciation du service instructeur sur la conformité de la construction envisagée à la réglementation applicable. Si certaines photographies font apparaître, à l'étage, une porte-fenêtre, dont la réalisation n'a pas été soumise à autorisation ou à déclaration, cette omission a été régularisée par le dépôt d'une seconde déclaration préalable le 29 juin 2020 et l'édiction d'un arrêté de non-opposition à travaux le 20 mars 2020, au demeurant non contesté par les requérants. Enfin, si les photographies de la construction achevée révèlent une discordance par rapport aux plans initialement produits, elles sont postérieures à la décision tacite de non-opposition à la déclaration préalable de travaux et n'ont, dès lors, pu être de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable à la date d'édiction de la décision litigieuse. Un permis de construire n'ayant d'autre objet que d'autoriser une construction conforme aux plans et indications fournis par le pétitionnaire, la circonstance que ces plans et indications ne seraient pas respectés n'est pas de nature à affecter la légalité de la décision de non-opposition, un tel vice d'exécution devant, le cas échéant, faire l'objet d'une action en justice devant le juge compétent. Au vu de l'ensemble de ces éléments, le moyen tiré des insuffisances du dossier de demande doit être écarté.

6. En second lieu, aux termes de l'article R. 421-14 du code de l'urbanisme : " Sont soumis à permis de construire les travaux suivants, exécutés sur des constructions existantes, à l'exception des travaux d'entretien ou de réparations ordinaires : a) Les travaux ayant pour effet la création d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol supérieure à vingt mètres carrés ; b) Dans les zones urbaines d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu, les travaux ayant pour effet la création d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol supérieure à quarante mètres carrés ; toutefois, demeurent soumis à permis de construire les travaux ayant pour effet la création de plus de vingt mètres carrés et d'au plus quarante mètres carrés de surface de plancher ou d'emprise au sol, lorsque leur réalisation aurait pour effet de porter la surface ou l'emprise totale de la construction au-delà de l'un des seuils fixés à l'article R. 431-2 ; c) Les travaux ayant pour effet de modifier les structures porteuses ou la façade du bâtiment, lorsque ces travaux s'accompagnent d'un changement de destination entre les différentes destinations et sous-destinations définies aux articles R. 151-27 et R. 151-28 ; d) Les travaux nécessaires à la réalisation d'une opération de restauration immobilière au sens de l'article L. 313-4. /(...) ". Aux termes de l'article R. 431-2 du même code : " Pour l'application de l'article 4 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture, ne sont toutefois pas tenues de recourir à un architecte les personnes physiques, les exploitations agricoles ou les coopératives d'utilisation de matériel agricole agréées au titre de l'article L. 525-1 du code rural et de la pêche maritime qui déclarent vouloir édifier ou modifier pour elles-mêmes : a) Une construction à usage autre qu'agricole dont la surface de plancher n'excède pas cent cinquante mètres carrés (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier et notamment de l'imprimé CERFA rempli par M. C... que la surface de plancher de la maison était de 200 mètres carrés avant le projet de construction de terrasse surélevée en litige . Dès lors, ce projet n'a pu, en tout état de cause, avoir pour effet de porter la surface de plancher au-delà du seuil de 150 mètres carrés fixé au a) de l'article R. 431-2 du code de l'urbanisme et n'avait donc pas à faire l'objet d'une demande de permis de construire. Au surplus, ce seuil n'est pas applicable à la construction d'une terrasse qui ne comporte pas de création de surface de plancher supplémentaire. En conséquence, le moyen ne peut être qu'écarté.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article UA11 du règlement du plan local d'urbanisme de Delme : " Le projet peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ". Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel de nature à fonder une opposition à déclaration préalable voire des prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de l'autorisation, il appartient à l'autorité administrative d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.

9. Les requérants, font valoir que la construction porte atteinte à l'intérêt des lieux avoisinants et crée une vue plongeante sur leur propriété et leurs habitations. Toutefois, outre que l'avis de l'architecte des bâtiments de France dont ils se prévalent n'avait en l'espèce qu'une valeur consultative, il ressort des pièces du dossier qu'il n'existe aucune covisibilité entre la construction en cause et les éléments de patrimoine remarquables de la commune, tels que la synagogue de Delme. En outre, les lieux avoisinant cette construction ne revêtent pas un intérêt architectural particulier, alors que la terrasse projetée n'est pas visible de la voie publique. Enfin, ainsi qu'il a été précédemment indiqué, l'autorisation d'urbanisme est délivrée sous réserve des droits des tiers. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce qu'en ne s'opposant pas à la déclaration préalable contestée, le maire a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête, Mme B... et Mme et M. H... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par les requérants au titre des frais exposés pour l'instance et non compris dans les dépens soient mis à la charge de la commune de Delme, qui n'est pas la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune de Delme et de M. C... présentées sur le fondement de ces dispositions.

D E C I D E:

Article 1er : La requête formée par Mme B... et Mme et M. H... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Delme relatives à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. C... relatives à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... B..., représentante unique pour l'application des dispositions de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la commune de Delme et à M. A... C....

Délibéré après l'audience du 22 mai 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- Mme Bauer, présidente-assesseure,

- M. Berthou, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 juin 2025.

La rapporteure,

Signé : S. BAUER Le président,

Signé : Ch. WURTZ Le greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au préfet de la Moselle en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

F. LORRAIN

2

N° 22NC00453


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC00453
Date de la décision : 12/06/2025

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme Sandra BAUER
Rapporteur public ?: M. MEISSE
Avocat(s) : SELAS DEVARENNE ASSOCIES GRAND EST

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-12;22nc00453 ?
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