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22/05/2025 | FRANCE | N°22NC02259

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 22 mai 2025, 22NC02259


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La SARL Cantebonne a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la délibération du 25 février 2020 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes du Pays Haut Val d'Alzette a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal tenant lieu de programme local de l'habitat (PLUiH).



Par un jugement n° 2005064, 2006015, 2006016 du 30 juin 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.



P

rocédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 août 2022 et le 17 se...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Cantebonne a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la délibération du 25 février 2020 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes du Pays Haut Val d'Alzette a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal tenant lieu de programme local de l'habitat (PLUiH).

Par un jugement n° 2005064, 2006015, 2006016 du 30 juin 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 août 2022 et le 17 septembre 2024, la SARL Cantebonne, représentée par Me De Zolt, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 30 juin 2022 ;

2°) d'annuler la délibération du 25 février 2020 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes du Pays Haut Val d'Alzette a approuvé le PLUiH ;

3°) de mettre à la charge de la communauté de communes Pays Haut Val d'Alzette la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé dans sa réponse au moyen tiré de l'insuffisance du bilan de la concertation ;

- les premiers juges n'ont pas répondu à deux branches du moyen tiré de la modification du PLUiH postérieurement à l'enquête publique, en méconnaissance de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme ;

- le jugement est insuffisamment motivé dans sa réponse au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 151-2 du code de l'urbanisme ;

- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de ce que le projet d'aménagement et de développement durable (PADD) ne traite pas des axes principaux susceptibles de guider les politiques d'attribution des logements locatifs sociaux, en méconnaissance de l'article R. 302-1-2 c) du code de la construction et de l'habitation ;

- aucune conférence intercommunale rassemblant l'ensemble des maires des communes membres n'a été organisée préalablement à la délibération arrêtant les modalités de la collaboration avec les communes, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 153-8 du code de l'urbanisme ;

- les modalités de la collaboration avec les communes prévues par la délibération du 3 février 2015 n'ont pas été respectées ;

- les modalités de la concertation avec le public prévues par la délibération du 3 février 2015 n'ont pas été respectées ;

- la délibération prescrivant l'élaboration du PLUiH n'a pas été notifiée à toutes les personnes publiques associées ;

- cette délibération n'a fait l'objet d'aucune publicité ;

- le Centre national de la propriété forestière n'a pas été consulté en méconnaissance des dispositions de l'article L. 112-3 du code de l'urbanisme ;

- aucun bilan de la concertation n'a été tiré, en méconnaissance de l'article L. 103-6 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté portant ouverture de l'enquête publique méconnaît les dispositions des articles R. 123-9 et L. 123-10 du code de l'environnement ;

- les autorités luxembourgeoises n'ont pas été consultées, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 104-7 du code de l'urbanisme ;

- le dossier d'enquête publique ne comporte pas l'ensemble des pièces exigées par les dispositions de l'article R. 123-8 du code de l'environnement ;

- le projet de PLUiH a été modifié postérieurement à l'enquête publique en méconnaissance de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme ;

- le schéma de cohérence territorial étant caduc, les zones 1AU et 2AU ne peuvent être ouvertes à l'urbanisation sans accord préalable du préfet, après avis de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers ;

- les mesures envisagées pour éviter, réduire et, si possible, compenser, s'il y a lieu, les conséquences dommageables de la mise en œuvre du plan sur l'environnement sont insuffisantes ;

- en l'absence de prise en compte de l'occupation des sols au Luxembourg, le PLUiH litigieux méconnaît les dispositions de l'article L. 131-10 du code de l'urbanisme ;

- le rapport de présentation ne dresse pas d'inventaire des capacités de stationnement par communes, des capacités de stationnement s'agissant des véhicules hybrides et des parcs de vélos ouverts au public en méconnaissance des dispositions de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme ;

- le rapport de présentation ne procède à aucune justification des choix du règlement selon les destinations et sous-destinations de constructions dans une même zone et n'étudie pas la complémentarité des orientations d'aménagement et de programmation (OAP) avec les dispositions du règlement, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 151-2 du code de l'urbanisme ;

- le PADD ne traite pas des axes principaux susceptibles de guider les politiques d'attribution des logements locatifs sociaux, en méconnaissance de l'article R. 302-1-2 c) du code de la construction et de l'habitation ;

- aucune des OAP " sectorielles " n'est reportée sur le règlement graphique, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 151-6 du code de l'urbanisme ;

- en créant de nouvelles destinations ou sous-destinations afin de moduler les obligations de stationnement en fonction de différents usages envisagés, l'article 6 du règlement méconnaît les dispositions combinées des articles R. 151-45, R. 151-27 et 28 du code de l'urbanisme ;

- le classement en zone 1AU du secteur dit " A... " à Rédange est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le PLUiH adopté est incompatible avec le schéma de cohérence territoriale de l'agglomération thionvilloise.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 septembre 2024, la communauté de communes du Pays Haut Val d'Alzette (CCPHVA) conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la SARL Cantebonne en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de l'absence de publicité de la délibération prescrivant l'élaboration du PLUiH est inopérant ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 21 octobre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 novembre 2024 à 12 heures.

Par un courrier du 23 décembre 2024, la CCPHVA a été invitée, en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative, à produire des éléments et des pièces en vue de compléter l'instruction.

La CCPHVA a répondu de manière incomplète à cette demande le 24 janvier 2025.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Berthou,

- les conclusions de M. Meisse, rapporteur public,

- et les observations de Me Damilot, substituant Me De Zolt,, représentant la SARL Cantebonne et de Me Kazouz, représentant la communauté de communes du Pays Haut Val d'Alzette.

Une note en délibéré, présentée pour la communauté de communes du Pays Haut Val d'Alzette, a été enregistrée le 12 mai 2025.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Cantebonne, propriétaire de parcelles situées sur le territoire de la commune de Villerupt, demande à la cour d'annuler le jugement du 30 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 25 février 2020 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes du Pays Haut Val d'Alzette (CCPHVA) a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal tenant lieu de programme local de l'habitat (PLUiH).

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la collaboration avec les communes membres :

2. Aux termes de l'article L. 123-6 du code de l'urbanisme en vigueur à la date de la délibération prescrivant l'élaboration du PLUiH litigieux : " Le plan local d'urbanisme est élaboré à l'initiative et sous la responsabilité de l'établissement public de coopération intercommunale lorsqu'il est doté de la compétence en matière de plan local d'urbanisme, en collaboration avec les communes membres. L'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale arrête les modalités de cette collaboration après avoir réuni une conférence intercommunale rassemblant, à l'initiative de son président, l'ensemble des maires des communes membres (...) ".

3. En application de ces dispositions le conseil communautaire de la CCPHVA a approuvé, par délibération du 3 février 2015, les modalités de la collaboration avec les communes membres en prévoyant " [d'associer à l'élaboration] les conseils municipaux du territoire, en réunissant une conférence de l'ensemble des élus du territoire aux moments clés de la procédure, en faisant travailler sur le projet chaque commission intercommunale et en intégrant les techniciens des communes au comité technique ".

4. Si deux conférences intercommunales ont été réunies les 20 janvier 2015 et le 11 février 2020, elles ne réunissaient que les maires des huit communes membres, et non pas l'ensemble des élus du territoire, et répondaient seulement aux obligations légales de la collectivité aux étapes d'arrêt des modalités de la collaboration et d'arrêt du projet de PLUiH. Par ailleurs, malgré une mesure d'instruction en ce sens, la CCPHVA ne produit aucun élément de nature à établir la fréquence de tenue, ni la réalité même de l'organisation des comités techniques qui devaient associer les techniciens des communes. Elle se borne, à ce titre, à produire deux simples projets de relevés de décision, non approuvés, de " comités de pilotage " du 23 novembre 2015 et du 25 novembre 2015, associant certains maires des communes membres, des conseillers municipaux et avec, comme seul technicien, un représentant des services techniques de la commune d'Audun-le-Tiche présent uniquement à la seconde réunion. S'agissant enfin de la tenue des commissions intercommunales compétentes, elle ne produit qu'un compte-rendu de la commission habitat du 3 septembre 2015 et une feuille de présence à une seconde commission habitat du 29 juin 2017. Si la CCPHVA cite le rapport du commissaire enquêteur qui relève que " l'ensemble des élus du territoire ont été associés à l'élaboration de ce document par le biais des différentes instances de gouvernance mise en place au lancement de la mission (conseils municipaux, conseil communautaire, comité technique, comité de pilotage, conférence intercommunale) ", ce rapport n'est étayé par aucun élément et le commissaire enquêteur ne précise pas l'origine des éléments dont il fait ainsi état. Elle produit enfin en défense les avis émis par les conseils municipaux en début d'année 2019, au demeurant très réservés, sur le projet de PLUiH arrêté le 11 septembre 2018, sans apporter, malgré une autre mesure d'instruction en ce sens, aucun élément permettant d'établir la réalité de l'association des conseils municipaux à l'élaboration de ce document, pourtant expressément prévue par la délibération du 3 février 2015.

5. Par suite, la SARL Cantebonne est fondée à soutenir que les modalités de la collaboration avec les communes membres, définies par la délibération du 3 février 2015, ont été méconnues.

En ce qui concerne la communication du projet au Grand-Duché du Luxembourg :

6. Aux termes de l'article L. 104-7 du code de l'urbanisme : " Les documents d'urbanisme mentionnés aux articles L. 104-1 et L. 104-2 dont la mise en œuvre est susceptible de produire des effets notables sur l'environnement d'un autre Etat membre de l'Union européenne sont transmis aux autorités de cet Etat, à la demande de celles-ci ou à l'initiative des autorités françaises. L'autorité compétente pour approuver un des documents d'urbanisme mentionnés aux articles L. 104-1 et L. 104-2 en informe le public, l'autorité environnementale et, le cas échéant, les autorités des autres Etats membres de l'Union européenne consultés, et met à leur disposition le rapport de présentation établi en application des articles L. 104-4 et L. 104-5, qui comporte notamment des indications relatives à la manière dont il a été tenu compte des consultations auxquelles il a été procédé ainsi que les motifs qui ont fondé les choix opérés par le plan ou le document, compte tenu des diverses solutions envisagées. / L'Etat intéressé est invité à donner son avis dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article R. 104-26 de ce code : " Lorsqu'un document d'urbanisme mentionné à la section 1 en cours d'élaboration est susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement d'un autre Etat membre de l'Union européenne, ou lorsque cet autre Etat en fait la demande, l'autorité compétente transmet un exemplaire du dossier sur lequel est consulté le public aux autorités de cet Etat, en leur indiquant le délai qui ne peut dépasser trois mois dont elles disposent pour formuler leur avis. En l'absence de réponse dans ce délai, l'avis est réputé émis. / L'autorité compétente en informe le ministre des affaires étrangères. / Lorsque l'autorité n'est pas un service de l'Etat, elle saisit le préfet qui procède à la transmission. / Ces dispositions ne font pas obstacle aux consultations prévues à l'article R. 132-5 ".

7. D'une part, il ressort des pièces du dossier qu'une grande partie du territoire de la CCPHVA fait l'objet de l'Opération d'intérêt national " Alzette-Belval ", reconnue par décret du 18 avril 2011, ayant pour objectif d'accompagner la mutation de ce secteur, étroitement liée à celle du territoire voisin des communes luxembourgeoises de Sanem et d'Esch-sur-Alzette, sur lequel le projet " Belval " de reconversion d'une friche industrielle d'un ancien site sidérurgique de 120 hectares est en cours de réalisation. Ce développement, intégré dans le PLUiH, qui y justifie un besoin de plus de 1 000 logements sur les cinq prochaines années et de plus de 3 000 logements sur la durée du plan, accentuera encore le trafic frontalier pendulaire des résidents français travaillant au Luxembourg particulièrement marqué sur la route départementale RD 16 desservant le Luxembourg, saturée en traversée d'Audun-le-Tiche, connaissant déjà un niveau moyen de 20 000 véhicules par jour.

8. D'autre part, l'avis de la mission régionale d'évaluation environnementale relève que les effluents du réseau d'assainissement des zones à urbaniser sur la commune d'Ottange doivent être traités par une station d'épuration des eaux usées luxembourgeoises, située à Bettembourg, dont il n'est pas établi que les capacités ont été vérifiées.

9. Il résulte de ce qui précède que la mise en oeuvre du PLUiH de la CCPHVA est susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement du Luxembourg. La CCPHVA était, par suite, tenue, en application des dispositions précitées des articles L. 104-7 et R. 104-26 du code de l'urbanisme, de transmettre un exemplaire du dossier d'enquête publique aux autorités de cet Etat membre de l'Union européenne. La circonstance qu'elle a consulté cinq communes limitrophes luxembourgeoises, sans d'ailleurs qu'aucune d'elles n'ait formulé d'observation, ne suffit pas à pallier l'absence de consultation du Grand-Duché qui s'imposait en application des dispositions précitées du code de l'urbanisme prises pour l'application de la Directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 et qui constitue une garantie pour les Etats membres. Par suite, le moyen tiré de l'absence de transmission du projet de PLUiH au Grand-Duché du Luxembourg doit être accueilli.

En ce qui concerne la création de sous-destinations pour l'application des règles de stationnement :

10. Aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées. " et aux termes de l'article R. 151-2 de ce code : " Le rapport de présentation comporte les justifications de : / 1° La cohérence des orientations d'aménagement et de programmation avec les orientations et objectifs du projet d'aménagement et de développement durables ; / 2° La nécessité des dispositions édictées par le règlement pour la mise en œuvre du projet d'aménagement et de développement durables et des différences qu'elles comportent, notamment selon qu'elles s'appliquent à des constructions existantes ou nouvelles ou selon la dimension des constructions ou selon les destinations et les sous-destinations de constructions dans une même zone ; (...) ".

11. Aux termes de l'article R. 151-27 du code de l'urbanisme applicable à la date de la délibération litigieuse : " Les destinations de constructions sont : / 1° Exploitation agricole et forestière ; / 2° Habitation ; / 3° Commerce et activités de service ; / 4° Equipements d'intérêt collectif et services publics ; / 5° Autres activités des secteurs secondaire ou tertiaire. " et aux termes de son article R. 151-28 : " Les destinations de constructions prévues à l'article R. 151-27 comprennent les sous-destinations suivantes : / 1° Pour la destination " exploitation agricole et forestière " : exploitation agricole, exploitation forestière ; / 2° Pour la destination " habitation " : logement, hébergement ; / 3° Pour la destination " commerce et activités de service " : artisanat et commerce de détail, restauration, commerce de gros, activités de services où s'effectue l'accueil d'une clientèle, hébergement hôtelier et touristique, cinéma ; / 4° Pour la destination " équipements d'intérêt collectif et services publics " : locaux et bureaux accueillant du public des administrations publiques et assimilés, locaux techniques et industriels des administrations publiques et assimilés, établissements d'enseignement, de santé et d'action sociale, salles d'art et de spectacles, équipements sportifs, autres équipements recevant du public ; / 5° Pour la destination " autres activités des secteurs secondaire ou tertiaire " : industrie, entrepôt, bureau, centre de congrès et d'exposition. ". Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 10 novembre 2016 définissant les destinations et sous-destinations de constructions pouvant être réglementées par le règlement national d'urbanisme et les règlements des plans locaux d'urbanisme ou les documents en tenant lieu : " La destination de construction " commerce et activité de service " prévue au 3° de l'article R. 151-27 du code de l'urbanisme comprend les six sous-destinations suivantes : / - artisanat et commerce de détail, (...) ".

12. S'il est loisible aux auteurs des plans locaux d'urbanisme de préciser, pour des motifs d'urbanisme et sous le contrôle du juge, le contenu des catégories énumérées à l'article R. 151-27 du code de l'urbanisme, les dispositions de cet article ne leur permettent, toutefois, ni de créer de nouvelles catégories de destination pour lesquelles seraient prévues des règles spécifiques, ni de soumettre certains des locaux relevant de l'une des catégories qu'il énumère aux règles applicables à une autre catégorie.

13. En l'espèce, l'article 6 du règlement du PLUiH litigieux, applicable à toutes les zones, distingue, pour la définition des règles de stationnement, une catégorie " artisanat, commerce de détail, commerce de gros ", qui se voit appliquer une obligation de création d'un emplacement pour 60 mètres carrés de surface de plancher et une catégorie " commerce supérieur à 100 mètres carrés de surface de vente " qui se voit appliquer une obligation de création d'un emplacement pour 100 mètres carrés de surface de plancher. En créant ainsi une catégorie spécifique intégrant notamment l'ensemble des activités artisanales, distincte de la catégorie des commerces supérieurs à 100 mètres carrés de surface, les auteurs du PLUiH ont créé des nouvelles catégories de destination pour lesquelles ils ont prévu des règles spécifiques en matière d'obligation de stationnement. Il en résulte que, dans cette mesure, l'article 6 du règlement du PLUiH contesté est entaché d'illégalité. Cette illégalité entraîne l'annulation partielle du PLUiH litigieux en tant qu'il instaure les sous-catégories " artisanat, commerce de détail, commerce de gros " et " commerce supérieur à 100 mètres carrés de surface de vente " pour leur appliquer des règles différentes en matière de stationnement.

En ce qui concerne le classement en zone 1AU du secteur dit " A... " à Rédange :

14. Aux termes de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation. / Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone et que des orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement en ont défini les conditions d'aménagement et d'équipement, les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement. (...) ".

15. Il résulte de ces dispositions que les secteurs à caractère naturel de la commune peuvent être ouverts à l'urbanisation selon des modalités différentes en fonction du caractère suffisant ou insuffisant des voies publiques et des réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate de la zone à urbaniser - dite zone AU - pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone. Lorsque les voies et réseaux existant à la périphérie immédiate des terrains ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de la zone, celle-ci (dite " 1AU ") est ouverte à l'urbanisation et les constructions y sont autorisées dans les conditions fixées par le deuxième alinéa de l'article R. 123-6. Seuls les voies et réseaux existants à la périphérie, et non les travaux projetés, peuvent être pris en compte pour classer une zone comme ouverte à l'urbanisation. Au cas contraire, en application du troisième alinéa du même article, le plan local d'urbanisme peut soit subordonner l'ouverture à l'urbanisation de la zone (dite " 2AU ") à une modification ou à une révision de ce plan, soit fixer immédiatement les règles de constructibilité applicables dans la zone en subordonnant la possibilité d'autoriser des constructions à la réalisation des voies et réseaux nécessaires à la périphérie immédiate de la zone.

16. Le PLUiH classe le secteur dit " A... " à Rédange en zone 1AU. Alors que la CCPHVA n'a pas répondu à la mesure d'instruction diligentée par la cour, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de la délibération litigieuse, les capacités des voies et réseaux publics existants à la périphérie immédiate de ce secteur étaient suffisantes pour desservir les constructions à implanter. Le seul engagement d'études techniques par l'EPA d'Alzette-Belval en charge de l'opération d'intérêt national est, par ailleurs, insuffisant pour permettre l'ouverture à l'urbanisation de ce secteur. Il en résulte que le classement de ce secteur en zone 1AU est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Cette illégalité entraîne l'annulation partielle du PLUiH litigieux en tant qu'il procède à ce classement.

17. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'apparaît en l'état de l'instruction susceptible de fonder l'annulation de l'arrêté attaqué.

18. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'en examiner la régularité, la SARL Cantebonne est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil communautaire de la CCPHVA du 25 février 2020.

Sur les frais de l'instance :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SARL Cantebonne, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la CCPHVA demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la CCPHVA une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SARL Cantebonne et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.

Article 2 : La délibération du 25 février 2020 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes du Pays Haut Val d'Alzette a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal tenant lieu de programme local de l'habitat est annulée

Article 3 : La communauté de communes du Pays Haut Val d'Alzette versera à la SARL Cantebonne la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la communauté de communes du Pays Haut Val d'Alzette sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Cantebonne et à la communauté de communes du Pays Haut Val d'Alzette.

Délibéré après l'audience du 30 avril 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Rousselle, présidente,

- Mme Bauer, présidente-assesseure,

- M. Berthou, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 mai 2025.

Le rapporteur,

Signé : D. BERTHOULa présidente,

Signé : P. ROUSSELLELe greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au préfet de la Moselle en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N°22NC02259 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC02259
Date de la décision : 22/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: M. David BERTHOU
Rapporteur public ?: M. MEISSE
Avocat(s) : COSSALTER, DE ZOLT & COURONNE

Origine de la décision
Date de l'import : 25/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-22;22nc02259 ?
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