La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/05/2025 | FRANCE | N°22NC01809

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 22 mai 2025, 22NC01809


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... Guillotin a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la délibération du 29 juin 2020 par laquelle le conseil municipal de Villerupt a approuvé les modalités d'inscription et la tarification des services extrascolaires " petites vacances et grandes vacances " de la commune au titre de l'année scolaire 2020/2021.



Par un jugement n° 2002121 du 17 mai 2022, le tribunal administratif de Nancy a annulé cette délibération.



Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés le 8 juillet 2022 et le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... Guillotin a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la délibération du 29 juin 2020 par laquelle le conseil municipal de Villerupt a approuvé les modalités d'inscription et la tarification des services extrascolaires " petites vacances et grandes vacances " de la commune au titre de l'année scolaire 2020/2021.

Par un jugement n° 2002121 du 17 mai 2022, le tribunal administratif de Nancy a annulé cette délibération.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 8 juillet 2022 et le 7 février 2023, le maire de la commune de Villerupt, représenté par Me Tadic, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 mai 2022 ;

2°) de rejeter la demande de M. Guillotin ;

3°) de mettre à la charge de M. Guillotin une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les collectivités territoriales peuvent instituer des tarifs différenciés en raison de l'objet du service et de leur mode de financement ; la tarification modulée en accueil de loisirs sans hébergement constitue une condition d'éligibilité au financement de la prestation de service versée par la caisse d'allocations familiales à la commune ; il existe une différence de situation objective entre les usagers affiliés au régime général de la sécurité sociale et les usagers affiliés à un autre régime ; M. Guillotin ne soutient ni même n'allègue que le plus élevé des tarifs prévus par la délibération excéderait le prix de revient du service fourni par la commune de Villerupt ;

- les autres moyens soulevés par M. Guillotin dans sa requête de première instance ne sont pas fondés ;

- le droit à l'information des conseillers municipaux n'a pas été méconnu ;

- la délibération litigieuse n'était pas soumise à obligation de motivation ;

- l'erreur manifeste d'appréciation et le détournement de pouvoir allégué sont sans fondement.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 11 janvier 2023 et le 17 juin 2024, M. Guillotin, représenté par Me Branchet, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Villerupt une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la tarification litigieuse méconnaît le principe d'égalité entre les usagers du service public ;

- le droit à l'information des conseillers municipaux lors de la séance du 29 juin 2020 a été méconnu, dès lors qu'aucune explication logique et pertinente ne leur a été fournie ;

- la délibération n'est pas motivée ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; la commune n'a pas tenu compte de la résidence effective des usagers dans la commune et a délibérément visé leur situation de travailleurs transfrontaliers ;

- elle est, pour le même motif, entachée de détournement de pouvoir.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bauer,

- les conclusions de M. Meisse, rapporteur public,

- et les observations de Me Tadic, représentant la commune de Villerupt, et de Me Branchet, représentant M. Guillotin.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 29 juin 2020, le conseil municipal de Villerupt a approuvé les modalités d'inscription et la tarification des services extrascolaires " petites vacances et grandes vacances " au titre de l'année scolaire 2020/2021. M. Guillotin, conseiller municipal, a sollicité l'annulation de cette délibération. Par la présente requête, la commune de Villerupt relève appel du jugement n° 2002121 du 17 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Nancy a annulé cette délibération.

Sur les conclusions à fin d'annulation du jugement attaqué :

En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

2. Le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit, dans l'un comme l'autre cas, en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des différences de situation susceptibles de la justifier.

3. La délibération du 29 juin 2020 litigieuse relative à la tarification des services périscolaires adopte une tarification différenciée des services extrascolaires " petites vacances et grandes vacances ", selon le quotient familial et selon l'affiliation ou non au régime général de la sécurité sociale, seul ce deuxième critère étant contesté.

4. La commune de Villerupt justifie cette différence de traitement par les circonstances que les usagers affiliés au régime général de la sécurité sociale contribuent indirectement au financement du service par leurs cotisations, que plusieurs bénéficiaires potentiels de ce service exercent une activité professionnelle au Luxembourg, dont le régime des allocations familiales verse des prestations supérieures à celles versées par le régime général français de sécurité sociale et que les salaires moyens au Luxembourg et en Belgique sont plus élevés qu'en France. Toutefois, en premier lieu, la circonstance que seules les personnes affiliées au régime général de sécurité sociale paient des cotisations aux caisses d'allocations familiales, lesquelles versent aux communes des subventions pour les activités en cause, ne peut justifier la différence de traitement avec les personnes non affiliées au régime général français ayant un lien suffisant avec la commune. En deuxième lieu, ni la circonstance que les allocations familiales versées par le système de sécurité sociale luxembourgeois seraient supérieures à celles octroyées par le régime général français, ni celle que les salaires moyens seraient plus élevés au Luxembourg et en Belgique qu'en France ne sauraient caractériser une différence objective de ressources entre usagers de nature à permettre une différenciation des tarifs applicables, alors au surplus que les différences de ressources entre usagers sont par ailleurs prises en compte par l'application de tarifs distincts en fonction du quotient familial. Enfin, si la commune se prévaut d'une fiche d'information de la caisse d'allocations familiales de Meurthe-et-Moselle proposant aux communes désireuses de mettre en place ce service public des exemples de grilles tarifaires, dont l'une retient, en plus du quotient familial, l'affiliation ou non des bénéficiaires au régime général de la sécurité sociale, ce document n'a, en tout état de cause, aucune valeur normative. Il s'ensuit que la fixation de tarifs différenciés, pour les services extrascolaires " petites vacances et grandes vacances ", selon que l'usager est affilié au régime général de la sécurité sociale ou à un autre régime, méconnaît le principe d'égalité entre les usagers du service public.

5. La commune de Villerupt n'est dès lors pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 17 mai 2022, le tribunal administratif a annulé la délibération litigieuse.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. Guillotin, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme sollicitée en application de ces dispositions par la commune de Villerupt.

7. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la commune de Villerupt une somme de 1 000 euros au même titre.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Villerupt est rejetée.

Article 2 : La commune de Villerupt versera à M. Guillotin une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... Guillotin et à la commune de Villerupt.

Délibéré après l'audience du 30 avril 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- Mme Bauer, présidente-assesseure,

- M. Berthou, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 mai 2025.

La rapporteure,

Signé : S. BAUER Le président,

Signé : Ch. WURTZ Le greffier,

Signé : F. LORRAIN

La République mande et ordonne au préfet de Meurthe-et-Moselle en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

F. LORRAIN

N° 22NC01809 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC01809
Date de la décision : 22/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme Sandra BAUER
Rapporteur public ?: M. MEISSE
Avocat(s) : TADIC

Origine de la décision
Date de l'import : 25/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-22;22nc01809 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award