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11/03/2025 | FRANCE | N°24NC01825

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 4ème chambre, 11 mars 2025, 24NC01825


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 10 juin 2024 par lequel le ministre de l'intérieur et des outre-mer a pris à son encontre une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance.



Par un jugement n° 2404240 du 28 juin 2024, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé les articles 1er, 2 et 3 de cet arrêté du 10 juin 2024 et l'article 8 de ce même arrêté en tant qu'il prévoit une d

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 10 juin 2024 par lequel le ministre de l'intérieur et des outre-mer a pris à son encontre une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance.

Par un jugement n° 2404240 du 28 juin 2024, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé les articles 1er, 2 et 3 de cet arrêté du 10 juin 2024 et l'article 8 de ce même arrêté en tant qu'il prévoit une durée d'application allant au-delà de la fin des Jeux paralympiques, mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 juillet 2024, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 28 juin 2024 ;

2°) de rejeter la demande de première instance de M. A....

Il soutient que :

- il y a une contradiction entre le dispositif du jugement attaqué en tant qu'il annule les restrictions tenant à l'interdiction de se déplacer en dehors du territoire de la commune de Strasbourg et l'obligation de pointage et les motifs du jugement qui reconnaissent la nécessité d'une mesure individuelle de contrôle et de surveillance ; cette annulation prive d'efficacité opérationnelle l'arrêté ;

- les pièces du dossier n'établissent pas que la mesure en litige serait de nature à mettre en difficulté à brève échéance la société de M. A... ; ce dernier ne démontre pas l'impossibilité de déléguer les visites de chantier à ses salariés ; il pouvait solliciter des aménagements ponctuels ou permanents des mesures de contrôle ;

- la durée de trois mois n'était pas disproportionnée, l'arrêté devant prendre fin le 13 septembre 2024 soit quelques jours après la fin des Jeux paralympiques. En outre, compte tenu du contexte de menace terroriste pesant sur le territoire à un niveau très élevé, accru par le risque d'importation du conflit israélo-palestinien, la menace terroriste ne se limite pas à la période des Jeux olympiques et paralympiques ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2024, M. A..., représenté par Me Morant, conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demande la réformation du jugement en ce qu'il n'a pas prononcé l'annulation totale de l'arrêté du 10 juin 2024 et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les conditions fixées par l'article L. 428-1 du code de la sécurité intérieure ne sont pas remplies ;

- les mesures de contrôle sont disproportionnées au regard de sa situation personnelle et des objectifs poursuivis alors que l'actualité de la menace terroriste n'est pas établie ; les restrictions sont également disproportionnées dans leur durée et au regard du périmètre concerné en l'absence de risque actuel et alors qu'elles reposent sur l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques dont aucune épreuve n'a été organisée à Strasbourg en dehors des passages de la flamme les 26 juin et 25 août 2024 ; l'obligation de pointage quotidien est incompatible avec ses activités professionnelles et sa vie familiale ; cette disproportion aurait dû entraîner l'annulation totale de l'arrêté.

Par décision du 10 février 2025, la présidente de la cour a autorisé l'occultation du nom des magistrats et du greffier en application des articles L. 10 alinéa 3 et R. 741-14 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

-le code de la sécurité intérieure ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M.,

- les conclusions de M., rapporteur public,

- les observations de Mme, pour le ministre de l'intérieur et de Me Morant, pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 10 juin 2024, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a pris à l'encontre de M. A... une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance en application des articles L. 228-1 et L. 228-2 du code de la sécurité intérieure pour une durée de trois mois lui interdisant de se déplacer en dehors du territoire de la commune de Strasbourg, l'obligeant à se présenter une fois par jour au commissariat de police de Strasbourg, tous les jours, y compris les dimanches et jours fériés ou chômés, à confirmer et justifier son lieu d'habitation dans un délai de 24 heures suivant l'entrée en vigueur de l'arrêté et tout changement ultérieur, lui interdisant d'entrer en relation avec son frère et de paraître dans certains lieux de passage de la flamme olympique et paralympique respectivement les journées des 26 juin et 25 août 2024. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer doit être regardé comme faisant appel du jugement du 28 juin 2024 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a annulé les articles 1er, 2 et 3 de cet arrêté du 10 juin 2024 ainsi que son article 8 en tant qu'il prévoit une durée d'application allant au-delà de la fin des Jeux paralympiques.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 228-1 du code de la sécurité intérieure : " Aux seules fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme, toute personne à l'égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics et qui soit entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme, soit soutient, diffuse, lorsque cette diffusion s'accompagne d'une manifestation d'adhésion à l'idéologie exprimée, ou adhère à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes peut se voir prescrire par le ministre de l'intérieur les obligations prévues au présent chapitre ". Aux termes de l'article L. 228-2 du même code : " Le ministre de l'intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la République antiterroriste et le procureur de la République territorialement compétent, faire obligation à la personne mentionnée à l'article L. 228-1 de : / 1° Ne pas se déplacer à l'extérieur d'un périmètre géographique déterminé, qui ne peut être inférieur au territoire de la commune. La délimitation de ce périmètre permet à l'intéressé de poursuivre une vie familiale et professionnelle et s'étend, le cas échéant, aux territoires d'autres communes ou d'autres départements que ceux de son lieu habituel de résidence ; / 2° Se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie, dans la limite d'une fois par jour, en précisant si cette obligation s'applique les dimanches et jours fériés ou chômés ; / 3° Déclarer son lieu d'habitation et tout changement de lieu d'habitation. / Les obligations prévues aux 1° à 3° du présent article sont prononcées pour une durée maximale de trois mois à compter de la notification de la décision du ministre. Elles peuvent être renouvelées par décision motivée, pour une durée maximale de trois mois, lorsque les conditions prévues à l'article L. 228-1 continuent d'être réunies. Au-delà d'une durée cumulée de six mois, chaque renouvellement est subordonné à l'existence d'éléments nouveaux ou complémentaires. La durée totale cumulée des obligations prévues aux 1° à 3° du présent article ne peut excéder douze mois. Les mesures sont levées dès que les conditions prévues à l'article L. 228-1 ne sont plus satisfaites (...) ". L'article L. 228-5 du même code énonce que : " Le ministre de l'intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la République antiterroriste et le procureur de la République territorialement compétent, faire obligation à toute personne mentionnée à l'article L. 228-1, y compris lorsqu'il est fait application des articles L. 228-2 à L. 228-4, de ne pas se trouver en relation directe ou indirecte avec certaines personnes, nommément désignées, dont il existe des raisons sérieuses de penser que leur comportement constitue une menace pour la sécurité publique (...) ". Aux termes de l'article L. 228-6 du code de la sécurité intérieure : " (...) La définition des obligations prononcées sur le fondement de ces articles tient compte, dans le respect des principes de nécessité et de proportionnalité, des obligations déjà prescrites par l'autorité judiciaire. (...) ".

3. Il résulte des dispositions de l'article L. 228-1 du code de la sécurité intérieure que les mesures qu'il prévoit doivent être prises aux seules fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme et sont subordonnées à deux conditions cumulatives, la première tenant à la menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics résultant du comportement de l'intéressé, la seconde aux relations qu'il entretient avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme ou, de façon alternative, au soutien, à la diffusion ou à l'adhésion à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes.

4. Pour annuler l'article 1er de l'arrêté en litige qui interdit à M. A... de se déplacer en dehors du territoire de la commune de Strasbourg, l'article 2 qui l'oblige à se présenter une fois par jour au commissariat de police de Strasbourg, tous les jours, y compris les dimanches et jours fériés ou chômés, l'article 3 qui lui impose de solliciter un sauf-conduit pour sortir du périmètre de déplacement et l'article 8 en tant qu'il prévoit que les obligations fixées aux articles 1 à 5 sont applicables pour une durée de trois mois à compter de la notification de l'arrêté, le tribunal a estimé que ces obligations étaient disproportionnées.

5. Toutefois, s'il est établi par les pièces du dossier que M. A... a créé une société ayant pour objet la réalisation de " travaux d'installation électrique dans tous les locaux ", dont l'activité a commencé en novembre 2021, et qu'il emploie onze salariés dont cinq sous contrats à durée indéterminée, il n'est pas démontré que les obligations et interdictions imposées pour une durée de trois mois par le ministre seraient disproportionnées au regard de l'objectif qu'elles poursuivent. En effet, si l'intéressé a produit de nombreux devis, certains d'entre eux ne sont pas signés. En outre, s'agissant des devis signés ou dont il est établi qu'ils étaient en cours, si l'intimé fait valoir qu'il doit se rendre sur des chantiers en dehors de Strasbourg, notamment dans d'autres communes du Bas-Rhin et dans le département du Haut-Rhin, il résulte de l'annexe de notification jointe à l'arrêté en litige, qu'il a la faculté de solliciter un aménagement ponctuel de ses obligations afin d'accomplir entre autres des démarches professionnelles. Il n'établit pas que des sauf-conduits pour exercer son activité professionnelle en dehors du territoire de la commune de Strasbourg lui auraient été refusés, ni que ses contraintes professionnelles seraient radicalement incompatibles avec les obligations et interdictions fixées par l'arrêté en litige alors qu'il ressort de son agenda que les rendez-vous à l'extérieur du périmètre de l'assignation à résidence sont ponctuels et programmés à l'avance. Si sa demande d'aménagement pour assister à un mariage à l'étranger a été refusée, un tel refus se justifiait par l'éloignement de cette cérémonie. Par ailleurs, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que les obligations prévues par l'arrêté en litige seraient de nature à compromettre la pérennité de la société de M. A... alors qu'au cours de l'été, il a bénéficié de l'attribution d'un lot pour un marché de travaux d'électricité dans une commune située dans le Haut-Rhin. L'intimé n'apporte aucun élément pour établir que l'arrêté porterait une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale. Si aucune épreuve des Jeux olympiques et paralympiques n'a été organisée à Strasbourg, en dehors du passage de la flamme les 26 juin et 25 août 2024, cette circonstance est sans incidence sur la nécessité et la proportionnalité de l'arrêté litigieux au regard de l'objectif qu'il poursuit de prévention des actes de terrorisme au-delà du contexte particulier des Jeux olympiques et paralympiques. L'assouplissement des modalités du contrôle judiciaire par le juge judiciaire est par lui-même sans incidence sur la nécessité de la mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance qui poursuit un objectif distinct. Enfin, si l'arrêté en litige prend fin le 13 septembre 2024, cette circonstance n'est pas de nature à établir le caractère excessif des modalités de contrôle alors que ce terme intervient quelques jours seulement après la fin des Jeux paralympiques et qu'elle s'inscrit, en outre, dans un contexte national et international dans lequel la menace terroriste demeure à un niveau particulièrement élevé. Dans ces conditions, la mesure en litige n'est pas disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi. Par suite, le ministre de l'intérieur et des outre-mer est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a, pour ce motif, partiellement annulé l'arrêté du 10 juin 2024 prononçant une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance à l'encontre de M. A....

En ce qui concerne les conclusions d'appel incident de M. A... :

6. En premier lieu, il résulte de ce qui a été exposé précédemment que M. A... n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges auraient dû annuler intégralement l'arrêté contesté en raison de son caractère disproportionné.

7. En second lieu, pour estimer qu'il existe des raisons sérieuses de penser que le comportement de M. A... constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a pris en considération qu'en 2014, l'intéressé a manifesté des velléités de rejoindre son frère en zone syro-irakienne, lequel, selon une enquête préliminaire ouverte en 2018, pour association de malfaiteurs terroristes, a rejoint d'abord la Géorgie, où il a participé à une prise d'otage en 2012, puis la Turquie. Il a rappelé que des investigations judiciaires ont mis en évidence qu'il avait transféré des fonds, entre juillet 2011 et juillet 2012, vers la Géorgie, à son frère, faits que l'intéressé a minimisé en faignant de ne pas s'en souvenir ou d'avoir adressé des dons à des associations. Il s'est également fondé sur les déclarations de l'intéressé, à la suite de son interpellation le 26 novembre 2019, dans lesquelles il a reconnu avoir accompagné son frère à l'aéroport de Bâle Mulhouse en août 2012, et non 2015 comme indiqué de manière erronée dans la note des services de renseignements, avoir été en contact régulier avec lui depuis cette date et l'avoir rencontré en Turquie en 2014. L'arrêté mentionne qu'au cours de conversations avec sa belle-sœur, l'intéressé a évoqué les raisons de l'arrestation de son frère, employant les termes de " hochet " et de " petits avions " qui désignent en tchétchène les drones et armes telles que les grenades, qu'il a également admis avoir communiqué avec son frère jusqu'au début de l'année 2019, lui avoir ouvert des lignes téléphoniques sous diverses identités et l'avoir aidé financièrement entre 2012 et 2018. Le ministre s'est aussi fondé sur les fichiers vidéos de l'organisation Daesch qui ont été retrouvés sur l'ordinateur de l'intéressé et sur sa mise en examen le 29 novembre 2019 pour des faits de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un crime d'atteinte aux personnes, financement d'une entreprise terroriste et escroquerie avec une entreprise terroriste, faits pour lesquels il a été placé en détention provisoire avant d'être libéré et placé sous contrôle judiciaire le 7 avril 2020.

8. Le requérant se prévaut notamment de l'ancienneté des faits qui lui sont reprochés, de l'absence de mesures de contrôle avant l'été 2024 et soutient que le contexte international, notamment le conflit israélo-palestinien, rappelé par le ministre dans l'arrêté en litige, n'est pas de nature à justifier la mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance.

9. Toutefois, d'une part, en se bornant à soutenir qu'il n'a pas été informé de l'existence d'un signalement à la suite de sa tentative de rejoindre son frère en zone irako-syrienne, M. A... n'établit pas l'inexactitude de cette mention figurant dans la note blanche. Il ressort, en outre, des pièces du dossier, et en particulier de cette même note soumise au débat contradictoire, précise et circonstanciée, que l'intéressé a transmis régulièrement des fonds directement ou indirectement à son frère, qu'il a également évoqué avec l'épouse de ce dernier les raisons de son incarcération en Turquie en recourant à des termes qui, pour les initiés, font référence, selon la note de renseignements, à des drones et des grenades, rendant peu probable son ignorance totale des agissements de son frère. D'ailleurs, dans son arrêt du 7 avril 2020, la huitième chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris de l'instruction a relevé qu'il existait des indices graves et concordants à l'encontre de l'intéressé concernant les faits qui lui sont reprochés. Il ressort également des pièces du dossier, notamment de cet arrêt de la chambre de l'instruction, que M. A... a fourni des explications évasives concernant notamment les vidéos retrouvées sur l'ordinateur familial ou sur les photographies sur lesquelles il apparaît avec des armes, factices selon ses allégations, ou avec le doigt levé, auquel il dénie toute signification alors qu'il est généralement perçu comme un signe d'allégeance à l'Etat islamique. L'intéressé enfin a été condamné le 7 janvier 2019 par les autorités allemandes à des jours amendes pour transport délibéré d'une arme prohibée. Dans ces conditions, eu égard au contexte national et international dans lequel la menace terroriste demeure à un niveau particulièrement élevé, notamment en considération du conflit israélo-palestinien, et de la tenue des Jeux olympiques et paralympiques à l'été 2024, le ministre a pu estimer, à la date de sa décision, qu'il existait des raisons sérieuses de penser que le comportement de M. A... constituait toujours une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre public, quand bien même son contrôle judiciaire a été sensiblement assoupli et qu'il n'est pas connu pour être lui-même radicalisé.

10. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. A... a maintenu jusqu'en 2019 des contacts réguliers avec son frère, qui est identifié comme membre de la mouvance islamiste radicale et qui a fait l'objet, le 3 octobre 2019, d'une information judiciaire des chefs d'association de malfaiteurs terroriste en vue de la préparation d'un ou plusieurs crimes d'atteinte aux personnes, financement d'une entreprise terroriste et escroquerie en relation avec une entreprise terroriste à titre connexe. En outre, l'intéressé est lui-même mis en examen pour ces mêmes faits. Dans ces conditions, le ministre a pu considérer qu'il entretient des relations habituelles avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme ou qu'il adhère et soutient des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes.

11. Il s'ensuit qu'en prononçant l'arrêté en litige, le ministre n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 228-1 du code de la sécurité intérieure.

12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur le moyen de régularité du jugement invoqué par l'appelant principal, que le ministre de l'intérieur et des outre-mer est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a partiellement annulé l'arrêté du 10 juin 2024 prononçant une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance à l'encontre de M. A.... En revanche, M. A... n'est pas fondé à soutenir, par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que par ce même jugement, le tribunal administratif n'a pas intégralement annulé cet arrêté. Il y a lieu, par suite, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a annulé les articles 1er, 2 et 3 de l'arrêté du 10 juin 2024 et l'article 8 de ce même arrêté en tant qu'il prévoit une durée d'application allant au-delà de la fin des Jeux paralympiques et de rejeter l'appel incident de M. A....

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2404240 du 28 juin 2024 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé en tant qu'il a annulé les articles 1er, 2 et 3 de l'arrêté du 10 juin 2024 et l'article 8 de ce même arrêté en tant qu'il prévoit une durée d'application allant au-delà de la fin des Jeux paralympiques.

Article 2 : La demande de première instance de M. A... et ses conclusions d'appel incident sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de M. A... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à M. B....

Délibéré après l'audience du 11 février 2025, à laquelle siégeaient :

- M., président,

- M., premier conseiller,

- Mme, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 mars 2025.

Le président rapporteur,

SignéL'assesseur le plus ancien,

Signé

La greffière,

Signé

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N° 24NC01825 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NC01825
Date de la décision : 11/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BARTEAUX
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: M. DENIZOT
Avocat(s) : MORANT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-11;24nc01825 ?
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