Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Nancy, d'une part, d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2019 par lequel le maire de la commune de Rambervillers a mis fin à son détachement sur l'emploi fonctionnel de directeur général des services à compter du 1er janvier 2020 ainsi que la décision du 6 avril 2020 par laquelle le maire a rejeté son recours gracieux et, d'autre part, de condamner cette commune à lui verser une somme de 80 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'amputation irrégulière d'une partie de son revenu et des agissements de harcèlement moral qu'elle a subis.
Par un jugement n° 2001298 du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Nancy a condamné la commune de Rambervillers à verser à Mme C... la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi, a mis à la charge de la commune la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2022, et un mémoire enregistré le 20 juin 2024, Mme C..., représentée par Me Welzer, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'infirmer le jugement du tribunal administratif de Nancy ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2019 et la décision du 6 avril 2020 ;
3°) de condamner la commune à lui verser une somme de 80 000 euros en réparation du préjudice subi ;
4°) de procéder à la régularisation de sa carrière concernant sa rémunération et au versement des rappels correspondants ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Rambervillers le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le premier juge a estimé que la décision refusant de renouveler le détachement d'un agent occupant un emploi fonctionnel n'a pas pour effet de retirer ou d'abroger une décision créatrice de droit ;
- la décision n'est pas motivée par une perte de confiance mais par son état de santé et est donc discriminatoire ;
- cette décision s'inscrit nécessairement dans la continuité des actes de harcèlement moral qu'elle refuse de subir ;
- l'arrêté du 16 décembre 2019 est insuffisamment motivé ;
- elle a été privée d'un entretien préalable ;
- le maire ne pouvait se fonder sur son indisponibilité dès lors que cette absence résultait d'un accident de service ;
- elle subit des agissements répétés de harcèlement moral qui ont entrainé une dégradation de ses conditions de travail et porté atteinte à ses droits et à sa dignité entrainant une altération de sa santé et compromettant son avenir professionnel ;
- elle est fondée à solliciter le versement d'une somme de 80 000 euros de dommages et intérêts en raison du préjudice subi du fait du harcèlement moral dont elle a été victime.
Par des mémoires en défense enregistrés le 26 septembre 2022 et le 19 juin 2024, la commune de Rambervillers, représentée par Me Bonnet, conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demande à la cour d'infirmer le jugement en tant qu'il la condamne à verser à Mme C... la somme de 10 000 en réparation du préjudice subi et la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, et de mettre à la charge de Mme C... la somme de 3 000 euros au même titre.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés et que cette dernière n'a subi aucun préjudice.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme Bourguet, rapporteure publique,
- les observations de Me Leuvrey pour Mme C...,
- et les observations de Me Pizzato pour la commune de Rambervillers.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., attachée territoriale, a été recrutée par la commune de Rambervillers à compter du 1er septembre 2014 et, à compter du 1er janvier 2015, elle a été détachée dans l'emploi fonctionnel de directeur général des services pour une durée de cinq ans. Le 9 mars 2015, elle a sollicité le bénéfice de la protection fonctionnelle à raison de propos injurieux et d'une plainte déposée à son encontre par plusieurs agents communaux pour des faits de harcèlement moral. Le 8 avril 2015, Mme C... a déposé plainte pour dénonciation outrageante à l'encontre du chef de la police municipale de Rambervillers. Le 29 avril 2015, elle a été placée en garde à vue pour des faits de harcèlement moral et acte d'intimidation envers un dépositaire de l'autorité publique pour qu'il accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte de sa fonction. Par une délibération du 30 avril 2015, le conseil municipal a accordé à l'agent le bénéfice de la protection fonctionnelle. Les deux plaintes ont été classées sans suite par le procureur de la République d'Epinal le 8 juin 2015. Alors qu'elle était placée en congé de maladie ordinaire depuis le 16 février 2015 à la suite d'un accident de ski, le 26 juin 2015, Mme C... a sollicité le bénéfice d'un congé pour accident du travail à compter du 29 avril 2015, date de son placement en garde à vue pour harcèlement moral. Dans l'attente d'une décision sur l'imputabilité au service de son accident, le maire de la commune a maintenu Mme C... en congé pour maladie ordinaire. Puis par un arrêté du 16 février 2016, le maire a placé l'intéressée en disponibilité d'office avec maintien du demi-traitement dans l'attente de l'avis de la commission de réforme. Par un arrêté du 28 avril 2016, le maire de la commune de Rambervillers a refusé de reconnaitre l'imputabilité au service de l'accident du 29 avril 2015. Et, par un arrêté du 4 mai 2016, Mme C... s'est vue maintenir le paiement du demi-traitement jusqu'à la date de la décision du comité médical. Par un jugement du 20 mars 2018, le tribunal administratif de Nancy a annulé les arrêtés des 16 février 2016, 28 avril 2016 et 4 mai 2016. Le tribunal a également condamné la commune à verser une somme de 2 000 euros à Mme C... en réparation du préjudice moral résultant de l'illégalité fautive de la décision du maire de ne pas avoir reconnu l'imputabilité au service de l'accident survenu le 29 avril 2015.
2. Par un arrêté du 16 décembre 2019, le maire de la commune de Rambervillers a mis fin au détachement de Mme C... sur l'emploi fonctionnel de directeur général des services à compter du 1er janvier 2020 et l'a réintégrée dans le cadre d'emploi des attachés territoriaux. Mme C... a demandé au maire d'annuler cet arrêté par un courrier du 17 février 2020 et de lui verser une somme de 50 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'amputation irrégulière de son revenu et du harcèlement moral, lequel maire a rejeté cette demande le 6 avril 2020. Mme C... a alors saisi le tribunal administratif de Nancy en lui demandant d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2019, la décision du 6 avril 2020 et de condamner la commune à lui verser une somme de 80 000 euros. Par un jugement du 7 juin 2022, le tribunal, après avoir condamné la commune de Rambervillers à verser à Mme C... une somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi, a rejeté le surplus des conclusions de la demande. Mme C... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions et, par la voie de l'appel incident, la commune de Rambervillers en relève appel en tant qu'il l'a condamnée à indemniser Mme C....
Sur les conclusions d'appel principal :
En ce qui concerne l'arrêté du 16 décembre 2019 :
3. Aux termes de l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, alors applicable : " Lorsqu'il est mis fin au détachement d'un fonctionnaire occupant un emploi fonctionnel mentionné aux alinéas ci-dessous et que la collectivité ou l'établissement ne peut lui offrir un emploi correspondant à son grade, celui-ci peut demander à la collectivité ou l'établissement dans lequel il occupait l'emploi fonctionnel soit à être reclassé dans les conditions prévues aux articles 97 et 97 bis, soit à bénéficier, de droit, du congé spécial mentionné à l'article 99, soit à percevoir une indemnité de licenciement dans les conditions prévues à l'article 98. / Ces dispositions s'appliquent aux emplois : / - de directeur général des services (...) ; / (...) / Il ne peut être mis fin aux fonctions des agents occupant les emplois mentionnés ci-dessus, sauf s'ils ont été recrutés directement en application de l'article 47, qu'après un délai de six mois suivant soit leur nomination dans l'emploi, soit la désignation de l'autorité territoriale. La fin des fonctions des agents mentionnés aux troisième à huitième alinéas du présent article est précédée d'un entretien de l'autorité territoriale avec les intéressés et fait l'objet d'une information de l'assemblée délibérante et du Centre national de la fonction publique territoriale ou du centre de gestion ; la fin des fonctions de ces agents prend effet le premier jour du troisième mois suivant l'information de l'assemblée délibérante (...) ".
4. En premier lieu, un agent dont le détachement arrive à échéance n'a aucun droit au renouvellement de celui-ci. Par conséquent, une décision mettant fin au détachement d'un agent prononcée à l'issue de la période de détachement n'est pas au nombre des décisions qui doivent être motivées au sens des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Au demeurant, l'arrêté du 16 décembre 2019 par lequel le maire de la commune de Rambervillers a prononcé la fin du détachement de Mme C... vise notamment l'article 53 de la loi de 1984, le décret du 30 décembre 1987 et tient compte de " l'indisponibilité continue de Mme C... depuis le 16 février 2015, notamment chargée de coordonner les services et d'en assurer la direction, et l'ayant empêché d'exercer ses fonctions de directeur général des services ". Par suite, cet arrêté est suffisamment motivé et le moyen tiré de l'insuffisance de sa motivation, manquant en fait, doit être écarté.
5. En deuxième lieu, Mme C... soutient ne pas avoir bénéficié de l'entretien préalable prévu par les dispositions de l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984. Il ressort, toutefois, des pièces du dossier que Mme C... a été convoquée à deux reprises par des courriers envoyés en recommandé à des entretiens préalables à la fin de son détachement dans un premier temps les 6 ou 7 août 2019 puis le 21 août 2019. Précisant que son état de santé était incompatible avec de tels entretiens, Mme C... ne s'est pas présentée aux dates qui lui étaient proposées. A cet égard, elle a produit un certificat médical établi par un psychiatre le 22 juillet 2019 précisant que l'état de santé de l'agent était incompatible " avec un quelconque entretien professionnel avec son administration notamment l'entretien proposé les mardi 6 août ou mercredi 7 août ou à toute autre date ultérieure sauf amélioration de son état clinique que je constaterai lors de mes consultations ". Toutefois, Mme C... n'a pas demandé de nouveau report de cette entrevue et n'a pas envisagé la possibilité de se faire représenter comme l'y invitait les courriers de convocation. En conséquence, le maire a accompli les diligences suffisantes pour organiser l'entretien prévu. Il en résulte que l'absence de cet entretien n'a pas entaché d'irrégularité la procédure de fin de détachement.
6. En troisième lieu, il peut être mis fin au détachement des agents occupant les emplois fonctionnels mentionnés à l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984 pour des motifs tirés de l'intérêt du service.
7. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que Mme C... a d'abord été placée en arrêt maladie ordinaire le 16 février 2015 à la suite d'un accident de ski avant d'être placée en congé de maladie pour accident de service. A cet égard, un rapport du médecin du travail du 29 septembre 2017 mentionne que l'état de santé de l'agent est " incompatible avec l'exercice de toutes activités de travail au sein de sa collectivité actuelle " mais qu'elle est en revanche " apte à l'exercice de l'emploi de directeur général des services ". Ensuite, un rapport d'expertise psychiatrique du 26 avril 2019 établi pour la commission de réforme précise que " l'inaptitude aux fonctions dans la collectivité actuelle doit être considérée comme définitive. En revanche, la fin du détachement et la mise à disposition de l'agent au centre de gestion de la fonction publique territoriale devrait permettre à terme une réintégration dans un exercice professionnel ". Ce rapport mentionne également que " cet état anxieux reste invalidant et ne permet pas d'envisager un retour dans l'activité professionnelle antérieure. Toutefois, il ne s'agit que d'une inaptitude au poste occupé auparavant mais pas d'une inaptitude à toute autre fonction. ". Il en résulte qu'en tenant compte de " l'indisponibilité continue de Mme C... depuis le 16 février 2015, notamment chargée de coordonner les services et d'en assurer la direction, et l'ayant empêché d'exercer ses fonctions de directeur général des services ", le maire pouvait, dans l'intérêt du service, décider de mettre fin au détachement. Le fait que Mme C... ait été empêchée d'exercer ses fonctions en raison d'un accident de service est, à cet égard, sans incidence. Par suite, le maire de Rambervillers n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation.
8. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision de mettre fin au détachement de Mme C... sur les fonctions de directeur général des services aurait été prise en raison du refus de cette dernière de subir des agissements constitutifs de harcèlement moral ou constituerait une discrimination du fait de son état de santé.
En ce qui concerne la demande indemnitaire :
9. Aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (...) ".
10. Il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral, lorsqu'il entend contester le refus opposé par l'administration dont il relève à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
11. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'administration auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, ces agissements doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. En revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui. Le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé.
12. En premier lieu, Mme C... soutient que la commune ne l'a pas soutenue lorsqu'elle a été visée par une plainte pour harcèlement moral déposée par plusieurs agents communaux et lors de son placement en garde à vue le 29 avril 2015. Si la protection fonctionnelle lui a été accordée, à sa demande, par le conseil municipal le 30 avril 2015, elle indique qu'elle a fait l'objet d'une campagne de dénigrement pendant plusieurs mois dans la presse locale sans recevoir aucun soutien de la part du maire alors qu'elle avait été chargée de mettre en œuvre une approche décidée par ce dernier. Elle se plaint d'une pression continue afin de la contraindre à partir et fait valoir que le 2 juin 2015, le maire lui aurait demandé de quitter les services de la commune en lui expliquant que les chefs de services ne souhaitaient plus travailler avec elle. Toutefois, si un des articles de presse produit par Mme C... reprend des propos malheureux du maire de la commune indiquant qu'il ne souhaitait pas le retour de Mme C..., les autres publications ne mettent pas en cause cette dernière et se contentent de relater les difficultés rencontrées par la commune en l'absence de directeur général des services. Par ailleurs, la requérante n'établit pas de la réalité de propos qui auraient été tenus lors de la conversation téléphonique du 2 juin 2015 et qui sont contestés en défense. En conséquence, Mme C... n'établit pas de l'existence d'agissements répétés de l'administration de nature à laisser présumer un harcèlement moral.
13. En deuxième lieu, Mme C... soutient qu'elle a dû multiplier les relances pour obtenir l'exécution du jugement du tribunal administratif de Nancy du 20 mars 2018 et qu'elle a dû demander plusieurs fois des explications sur le versement d'une somme de 59 000 euros, la somme de 3 500 euros mise à la charge de la commune par le jugement du 20 mars 2018 et le paiement de la somme de 5 449, 50 euros au titre de ses frais médicaux. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'à la suite de ce jugement reconnaissant l'imputabilité au service de l'accident de Mme C..., le maire a procédé à la régularisation administrative de la situation de cette dernière et a procédé au versement des rappels de salaire liés à cette imputabilité en avril 2018. Le maire a également répondu aux interrogations de la requérante et, par un courrier du 11 octobre 2018, lui a communiqué le détail des rappels de salaires opérés en avril 2018, l'a informée qu'il avait procédé au mandatement de la somme de 6 333, 86 euros correspondant aux frais médicaux avancés par Mme C... et au mandatement de la somme de 3 500 euros mise à la charge de la commune par le tribunal. Le maire a également précisé que le versement des primes d'encouragement était en cours et la commune fait valoir sans être contestée que ces primes ont été versées en décembre 2018. Il n'apparait pas que la mise en œuvre de ces mesures ait été accomplie dans un délai excessif traduisant l'existence de faits constitutifs de harcèlement moral à l'encontre de Mme C....
14. En troisième lieu, Mme C... soutient que sa rémunération a été divisée par deux à compter du 1er janvier 2020. Il résulte toutefois de l'instruction que cette baisse de rémunération est due à la fin de son détachement sur l'emploi fonctionnel de directeur général des services ayant notamment induit la suppression du bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire. Une telle circonstance n'est pas au nombre de celles permettant de faire présumer l'existence de faits de harcèlement.
15. En dernier lieu, Mme C... soutient que les agissements de la commune concernant son évolution de carrière constituent des faits de harcèlement moral. A cet égard, il résulte de l'instruction que Mme C... a dû, par deux fois, signaler au maire qu'il n'avait pas procédé à son avancement au cinquième puis au sixième échelon du grade des attachés territoriaux. Par ailleurs, il résulte des divers avis médicaux produits par la requérante que cette dernière n'était pas en mesure de reprendre ses fonctions au sein de la commune mais était apte à exercer ces fonctions dans d'autres services. Ainsi, par un courrier particulièrement circonstancié du 21 décembre 2017, D... des Vosges a indiqué que la situation administrative de Mme C... bloquait toute possibilité de mutation ou de détachement et a préconisé au maire de Rambervillers de mettre fin au détachement de Mme C... afin de lui permettre d'être reclassée dans les conditions prévues aux articles 97 et 97 bis de la loi du 26 janvier 1984, de la réintégrer en surnombre dans les effectifs de la collectivité et de lui permettre, au terme de la période de placement en surnombre d'une durée d'un an pouvant être réduite à trois mois sur demande de l'intéressée, d'être prise en charge par le centre de gestion de la fonction publique territoriale des Vosges. D... précise également que Mme C... est favorable à la décharge de ses fonctions de directrice générale des services. A la suite de ce courrier, le maire de la commune s'est contenté d'indiquer à Mme C..., le 3 janvier 2018, que " M. D... m'ayant indiqué que vous aviez quelques pistes d'embauche, je vous indique que je ne m'oppose pas à votre mutation dans les meilleurs délais ", sans toutefois appliquer la procédure de fin de détachement prévue par l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984, qui lui avait été pourtant été rappelée par D.... Enfin, Mme C... soutient qu'à la suite de l'arrêté du 16 décembre 2019, elle a demandé au maire, par des courriers des 20 décembre 2020, 31 janvier 2021 et 5 octobre 2021, de lui indiquer l'intitulé du poste sur lequel elle serait réintégrée, de lui transmettre la fiche de poste correspondante et les éléments de salaires liés à ce poste et qu'aucune réponse n'a été apportée à ces demandes. De tels faits répétés sont susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral.
16. La commune de Rambervillers soutient que l'absence d'avancement d'échelon est due au fait que la situation de Mme C..., alors placée en arrêt de maladie, était gérée par le centre de gestion de la fonction publique territoriale qui n'a pas mis à jour les logiciels de gestion de carrière. Il lui incombe, toutefois, de suivre la carrière de ses agents alors même qu'ils sont placés en arrêt de maladie. La commune soutient également que la fin de détachement ne pouvait être prononcée avant le 16 décembre 2019 en raison d'une difficulté tenant à la légalité dont elle ne précise néanmoins pas la teneur pour permettre à la cour d'en apprécier la portée. Enfin, la commune précise avoir toujours maintenu un dialogue avec l'agent mais que l'ensemble de ses agissements s'explique par la complexité du statut de la fonction publique. D... des Vosges avait néanmoins invité la commune, dans son courrier du 21 décembre 2017, à se rapprocher du centre de gestion de la fonction publique territoriale pour être accompagnée dans la mise en œuvre de la procédure de fin de détachement anticipée. Enfin, la commune ne peut être regardée comme ayant suffisamment répondu aux demandes relatives à la réintégration de Mme C... présentées entre décembre 2020 et octobre 2021 en produisant une fiche de poste de chargé de communication adressée à l'agent le 3 février 2022. En conséquence, la commune ne démontre pas que les agissements qui lui sont reprochés auraient été justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement.
17. Il résulte de l'instruction que Mme C... a présenté, à compter du mois de juin 2015, un syndrome anxio-dépressif associé à un trouble anxieux généralisé. Si ces troubles sont la conséquence de l'accident de service dont elle a été victime le 29 avril 2015, il résulte toutefois de l'instruction qu'ils ont été entretenus par la situation dans laquelle la requérante a été maintenue au sein des services de la commune de Rambervillers. En conséquence, eu égard aux agissements de harcèlement moral dont a été victime Mme C... et à leurs conséquences sur son état de santé et son évolution de carrière, les premiers juges se sont livrés à une juste appréciation de son préjudice moral en accordant à la requérante à ce titre en réparation la somme de 10 000 euros.
Sur les conclusions d'appel incident :
18. En premier lieu, eu égard à ce qui a été énoncé aux points 15 à 17, la commune de Rambervillers n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'a commis aucune faute et que Mme C... n'a subi aucun préjudice.
19. En second lieu, aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. "
20. En jugeant qu'il y avait lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune la somme de 1 500 euros au profit de Mme C... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, et alors même qu'ils n'ont fait que partiellement droit aux conclusions de l'intéressée, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce.
21. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions de Mme C..., que, d'une part, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté le surplus de sa demande et, d'autre part, la commune de Rambervillers n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal l'a condamnée à verser en réparation à Mme C... la somme 10 000 euros.
Sur les frais d'instance :
22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Rambervillers, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par cette commune au même titre.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions d'appel incident de la commune de Rambervillers et ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et à la commune de Rambervillers.
Délibéré après l'audience du 28 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Antoine Durup de Baleine, président,
- M. Axel Barlerin, premier conseiller,
- Mme Nolwenn Peton, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 février 2025.
La rapporteure,
Signé : N. A...Le président,
Signé : A. Durup de Baleine
Le greffier,
Signé : A. Betti
La République mande et ordonne à la préfète des Vosges en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
A. Betti
N° 22NC01982 2