Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 22 juin 2021 par laquelle la section disciplinaire du conseil académique de l'université de Reims Champagne-Ardenne a prononcé à son encontre une sanction d'exclusion de deux ans dont un an avec sursis.
Par un jugement n° 2102064 du 24 juin 2022, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 novembre 2022, M. B..., représenté par Me Taillon, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 24 juin 2022 ;
2°) d'annuler la décision du 22 juin 2021 de la section disciplinaire du conseil académique de l'université de Reims Champagne-Ardenne lui ayant infligé une sanction d'exclusion de deux ans dont un an avec sursis ;
3°) par voie de conséquence, de condamner l'université de Reims Champagne-Ardenne à lui rembourser la somme perçue au titre de la bourse universitaire et de le réintégrer dans cette université ;
4°) de mettre à la charge l'université de Reims Champagne-Ardenne une somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision en litige méconnaît les dispositions des articles R. 811-24 et R. 811-33 du code de l'éducation dès lors qu'il n'est pas établi que la secrétaire de séance a assisté à la séance de la section disciplinaire ;
- cette décision méconnaît les dispositions des articles R. 811-26 et R. 811-27 du même code ainsi que les droits de la défense, en l'absence de communication des documents prévus par ces dispositions qui lui ont été envoyées à une adresse erronée ;
- cette décision méconnaît ces mêmes dispositions dès lors qu'il n'est pas justifié que le président de l'université, le recteur de région académique et le médiateur académique ont reçu copie de la lettre de saisine de la section disciplinaire ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article R. 811-28 du code de l'éducation en l'absence de désignation d'un rapporteur adjoint ;
- le rapporteur adjoint n'était pas présent lors de la séance de la section disciplinaire ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article R. 811-29 du code de l'éducation dès lors que le délai d'instruction par le rapporteur a dépassé le délai de deux mois et qu'un seul rapporteur a instruit le dossier ;
- cette décision, qui n'a pas été rendue sur la base de propos objectifs, est entachée d'erreurs de fait.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 décembre 2022, l'université de Reims Champagne-Ardenne, représentée par Me Dreyfus, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. B... une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les conclusions de M. B... tendant à la condamnation de l'université à lui rembourser la somme perçue au titre de la bourse universitaire est irrecevable en l'absence de demande préalable ;
- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 septembre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éduction ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Michel, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 22 juin 2021, la section disciplinaire du conseil académique de l'université de Reims Champagne-Ardenne a infligé à M. B..., étudiant en deuxième année de master marketing, vente par communication, la sanction d'exclusion de deux ans dont un an avec sursis. M. B... relève appel du jugement du 24 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 22 juin 2021.
Sur la légalité externe de la décision du 22 juin 2021 :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 811-26 du code de l'éducation : " La section disciplinaire est saisie par une lettre adressée à son président. Ce document mentionne le nom, l'adresse et la qualité de la personne faisant l'objet des poursuites ainsi que les faits qui lui sont reprochés. Il est accompagné de toutes pièces justificatives ". Aux termes de l'article R. 811-27 du même code : " Dès réception du document mentionné à l'article R. 811-26 et des pièces jointes, le président de la section disciplinaire en transmet copie, par tout moyen permettant de conférer date certaine, à la personne poursuivie ainsi que, s'il s'agit d'un mineur, aux personnes qui exercent à son égard l'autorité parentale ou la tutelle. Il en transmet une copie au président de l'université, au recteur de région académique et au médiateur académique. La lettre mentionnée au premier alinéa indique à l'usager poursuivi le délai dont il dispose pour présenter des observations écrites. Elle lui précise qu'il peut se faire assister ou représenter par un conseil de son choix, qu'il peut demander à être entendu par les rapporteurs chargés de l'instruction de l'affaire et qu'il peut prendre connaissance du dossier pendant le déroulement de cette instruction ".
3. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
4. Il ressort des pièces du dossier que le président de la section disciplinaire n'a pas adressé une copie de la lettre de saisine de la section au président de l'université, au recteur de région académique et au médiateur académique en méconnaissance de l'article R. 811-27 du code de l'éducation. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, cette irrégularité ait été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision en litige ou qu'elle ait privé l'intéressé d'une garantie. Dès lors, cette irrégularité n'est pas de nature à entraîner l'annulation de la décision contestée.
5. En deuxième lieu, M. B... soutient qu'il n'a pas reçu en temps utile le courrier de saisine du président de la section disciplinaire du 15 décembre 2020 ainsi que les pièces justificatives, dès lors qu'elles ont été transmises à l'adresse de ses parents. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que ces documents ont été envoyés à l'adresse fixe renseignée par M. B... et dont il a été accusé réception le 19 décembre 2020 et comportant l'ensemble des éléments énoncés par les dispositions précitées de l'article R. 811-27 du code de l'éducation. Par suite, et alors qu'en tout état de cause, les documents lui ont été remis en main propre par les rapporteurs le 22 avril 2021, dans un délai suffisant avant la tenue le 22 juin 2021 de la séance du conseil de discipline, les moyens tirés de la méconnaissance des droits de la défense ainsi que des dispositions précitées des articles R. 811-26 et R. 811-27 du code de l'éducation doivent être écartés.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 811-28 du code de l'éducation : " Le président de la section disciplinaire désigne pour chaque affaire, au sein de la commission de discipline, un rapporteur, membre d'un des collèges définis aux 1° et 2° de l'article R. 811-14, et un rapporteur adjoint, membre du collège défini au 3° du même article (...) ". Aux termes de l'article R. 811-29 du même code : " Les rapporteurs instruisent l'affaire, pendant un délai qui ne peut excéder deux mois, par tous les moyens qu'ils jugent propres à les éclairer. Ils recueillent les observations écrites de l'intéressé, qu'ils peuvent convoquer. Ils l'entendent sur sa demande. Ils peuvent procéder à toutes les autres auditions et consultations qu'ils estiment utiles. Toute personne ayant la qualité de témoin et qui s'estime lésée par les agissements de l'usager poursuivi peut se faire assister de la personne de son choix. En l'absence du rapporteur adjoint, le rapporteur peut procéder seul à l'ensemble de ces actes d'instruction. Le rapport d'instruction comporte l'exposé des faits ainsi que les observations présentées, le cas échéant, par le président de l'université et par la personne poursuivie. Il est transmis au président de la commission de discipline, qui peut demander aux rapporteurs de poursuivre l'instruction s'il estime que l'affaire n'est pas en état d'être examinée par la commission de discipline, notamment en raison d'éléments nouveaux portés à la connaissance de la section disciplinaire. Le rapport d'instruction et les pièces du dossier sont tenus à la disposition de la personne poursuivie et du président de l'université, de leur conseil et des membres de la commission de discipline pendant la période d'au moins dix jours prévue au premier alinéa de l'article R. 811-31 (...) ".
7. Il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport d'instruction du 27 mai 2021, dont le requérant ne conteste pas les termes, que le président de la section disciplinaire a désigné, par arrêté du 23 mars 2021, les rapporteur et rapporteur adjoint parmi les membres des collèges définis aux 2° et 3° de l'article R. 811-14 du code de l'éducation, qui ont convoqué M. B... le 22 avril 2021 pour l'auditionner dans le cadre de l'instruction de l'affaire. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.
8. En quatrième lieu, il ressort des écritures non contestées de l'université, corroborées par les pièces du dossier, que le suppléant du rapporteur adjoint a siégé lors la séance de la section disciplinaire du 22 juin 2021. Alors que cette circonstance n'entache pas la procédure d'irrégularité, le moyen tiré de l'absence d'un rapporteur adjoint lors cette séance doit être écarté.
9. En cinquième lieu, si les dispositions précitées de l'article R. 811-29 du code de l'éducation prévoient que les rapporteurs instruisent l'affaire pendant un délai qui ne peut excéder deux mois, ce délai n'est pas prescrit à peine d'irrégularité de la procédure. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du délai d'instruction prévu par les dispositions précitées doit, en tout état de cause, être écarté.
10. En sixième lieu, aux termes de l'article R. 811-24 du code de l'éducation : " La section disciplinaire est assistée d'un secrétaire mis à sa disposition par le président de l'université ". Et, aux termes de l'article R. 811-33 de ce code : " Au jour fixé pour la séance d'examen de l'affaire, le rapporteur (...) donne lecture du rapport. L'intéressé ou, le cas échéant, son conseil peuvent ensuite présenter des observations. (...) Après la levée de la séance, la décision de sanction est prise par les membres de la commission de discipline ayant assisté à la totalité de la séance, en présence du secrétaire ".
11. La décision de la section disciplinaire du conseil académique du 22 juin 2021 en litige comporte la mention des prénom et nom de la secrétaire ainsi que sa signature. Ces mentions, qui font foi jusqu'à preuve contraire, sont de nature à établir la présence de la secrétaire lors de la séance d'examen de l'affaire. Alors que le requérant n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause la présence de la secrétaire à cette séance, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées des articles R. 811-24 et R. 811-33 du code de l'éducation doit être écarté.
Sur la légalité interne de la décision du 22 juin 2021 :
12. Aux termes de l'article R. 811-10 du code de l'éducation : " Le conseil académique, constitué en section disciplinaire conformément à l'article L. 811-5, est compétent pour prononcer des sanctions à l'égard des usagers de l'université, dans les conditions et selon la procédure prévues aux articles R. 811-11 à R. 811-42 ". Aux termes de l'article R. 811-11 du même code : " Relève du régime disciplinaire prévu aux articles R. 811-10 à R. 811-42 tout usager de l'université lorsqu'il est auteur ou complice, notamment : / (...) 2° De tout fait de nature à porter atteinte à l'ordre, au bon fonctionnement ou à la réputation de l'université (...) ". Aux termes du I de l'article R. 811-36 du code de l'éducation : " I.- Les sanctions disciplinaires applicables aux usagers des établissements publics d'enseignement supérieur sont, sous réserve des dispositions de l'article R. 811-37 : / 1° L'avertissement ; / 2° Le blâme ; / 3° La mesure de responsabilisation définie au II ; / 4° L'exclusion de l'établissement pour une durée maximum de cinq ans. Cette sanction peut être prononcée avec sursis si l'exclusion n'excède pas deux ans ; / 5° L'exclusion définitive de l'établissement ; / 6° L'exclusion de tout établissement public d'enseignement supérieur pour une durée maximum de cinq ans ; / 7° L'exclusion définitive de tout établissement public d'enseignement supérieur (...) / Les sanctions prévues au 4° du présent article sans être assorties du sursis ainsi qu'aux 5°, 6° et 7° entraînent en outre l'interdiction de prendre toute inscription dans le ou les établissements publics dispensant des formations post-baccalauréat, de subir des examens sanctionnant ces formations ainsi que de subir tout examen conduisant à un diplôme national (...) ".
13. Il ressort des pièces du dossier que pour prononcer à l'encontre de M. B... une sanction d'exclusion de deux ans dont un an avec sursis, la section disciplinaire du conseil académique de l'université de Reims Champagne-Ardenne a estimé que M. B... avait accusé des retards récurrents en cours, manifesté un comportement inconvenant à l'égard de ses camarades et professeurs, et une attitude méprisante vis-à-vis de l'autorité du personnel administratif et enseignant de l'université en refusant de sortir des bureaux et salles de cours et qu'il avait adopté une conduite déplacée à l'endroit d'une étudiante.
14. A l'appui de la contestation de la sanction prononcée à son encontre, M. B... allègue que les propos rapportés à son encontre ne sont pas objectifs et fait valoir que des retards étaient dus à des changements inopinés d'emploi du temps, qu'il portait des écouteurs en cours à la demande de ses professeurs et qu'il ne saurait lui être reproché des absences alors qu'il se trouvait en entretien de stage dans le cadre de son master 2. Toutefois, ces éléments ne sont pas de nature à remettre sérieusement en cause la matérialité des faits reprochés à l'intéressé, fondés sur le rapport d'instruction du 27 mai 2021 et les témoignages précis et circonstanciés versés au dossier. Par suite, le moyen tiré de l'inexactitude matérielle des faits doit être écarté.
15. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 juin 2021 par laquelle la section disciplinaire du conseil académique de l'université de Reims Champagne-Ardenne a prononcé à son encontre une sanction d'exclusion de deux ans dont un an avec sursis.
Sur les conclusions à fin de condamnation et d'injonction :
16. Compte tenu de ce qui précède, les conclusions de M. B... tendant à la condamnation de l'université de Reims Champagne-Ardenne à lui rembourser la somme perçue au titre de la bourse universitaire et à ce qu'il soit réintégré dans cette université, présentées par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de sanction du 22 juin 2021, ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'université de Reims Champagne-Ardenne, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme sollicitée par l'université de Reims Champagne-Ardenne au même titre.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'université de Reims Champagne-Ardenne au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Taillon et à l'université de Reims Champagne-Ardenne.
Délibéré après l'audience du 19 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Wallerich, président de chambre,
- Mme Guidi, présidente-assesseure,
- M. Michel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 janvier 2025.
Le rapporteur,
Signé : A. MichelLe président,
Signé : M. Wallerich
La greffière,
Signé : F. Dupuy
La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
E. Delors
2
N° 22NC02910