Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler, d'une part, la décision du 10 avril 2018 par laquelle le directeur général de l'Agence nationale de santé publique l'a réintégré dans son poste précédent d'écoutant à 50% du temps de travail, à compter du 15 avril 2018 et, d'autre part, la décision du 30 janvier 2020 par laquelle le directeur général de l'Agence nationale de Santé publique a refusé de le placer sur un poste d'écoutant à 80% de son temps de travail ainsi que la décision du 22 juin 2020 rejetant son recours gracieux contre cette décision.
Par un jugement n° 1803935 du 23 avril 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 juin 2021, M. B..., représenté par Me Kadri, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 23 avril 2021 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 10 avril 2018 ;
2°) d'annuler la décision du 10 avril 2018 ainsi que la décision rejetant implicitement son recours gracieux ;
3°) d'enjoindre à l'Agence nationale de santé publique de le réintégrer dans son poste d'écoutant - gestionnaire de l'annuaire spécialisé en addictologie à 80 % avec effet rétroactif à compter du 10 avril 2018 ;
4°) de mettre à la charge de l'Agence nationale de santé publique une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'Agence nationale de santé publique ne pouvait pas prolonger la période probatoire sur ses nouvelles missions d'écoutant au-delà du 15 janvier 2018 en méconnaissance des dispositions de l'article 3 du décret n° 2014-1318 ;
- l'Agence nationale de santé publique ne pouvait pas évaluer ses compétences sans mettre en œuvre un aménagement de poste adapté à sa situation de handicap.
Par des mémoires en défense enregistrés les 10 avril et 6 mai 2024, l'Agence nationale de santé publique, représentée par Me Falala, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de M. B... une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
L'Agence nationale de santé publique soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;
- le décret n° 2014-1318 du 3 novembre 2014 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Peton,
- les conclusions de Mme Bourguet-Chassagnon, rapporteure publique,
- et les observations de Me Goulard, substituant Me Falala, pour l'Agence nationale de santé publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., agent contractuel de droit public, exerce une mission d'écoutant, à 50% du temps de travail, depuis le 30 janvier 2011 au sein de " Drogues info service " service dépendant depuis le 1er mai 2016 de l'Agence nationale de santé publique, établissement public administratif sous tutelle du ministère chargé de la santé. La qualité de travailleur handicapé lui a été reconnue par une décision du 1er mars 2017. Le 11 octobre 2017, par un avenant à son contrat de travail, M. B... a été placé sur un poste à temps incomplet à 80 % d'un temps plein avec une mission d'écoutant à 50 % du temps de travail et de gestionnaire de l'annuaire spécialisé en addictologie à 30 % du temps de travail. La période d'essai de trois mois sur ce nouveau poste a été renouvelée le 29 décembre 2017, et par une décision du 10 avril 2018, le directeur général de l'Agence nationale de santé publique a informé M. B... qu'il était replacé sur un poste d'écoutant à 50% du temps de travail. Le 15 mai 2018, M. B... a formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision qui a été implicitement rejeté. Par ailleurs, le 29 novembre 2019, M. B... a demandé à son employeur un passage à un temps de travail de 80% en qualité d'écoutant. Par une décision du 30 janvier 2020, l'Agence nationale de santé publique a refusé de faire droit à cette demande. Le 22 mars 2020, M. B... a formé un recours contre cette décision, qui a été rejeté le 22 juin 2020. M. B... relève appel du jugement du 23 avril 2021 en tant que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes d'annulation de la décision du 10 avril 2018 et de la décision implicite rejetant son recours gracieux contre cette première décision.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 9 du décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat pris pour l'application de l'article 7 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le contrat ou l'engagement peut comporter une période d'essai qui permet à l'administration d'évaluer les compétences de l'agent dans son travail et à ce dernier d'apprécier si les fonctions occupées lui conviennent. Toutefois, aucune période d'essai ne peut être prévue lorsqu'un nouveau contrat est conclu ou renouvelé par une même autorité administrative avec un même agent pour exercer les mêmes fonctions que celles prévues par le précédent contrat, ou pour occuper le même emploi que celui précédemment occupé. (...) La période d'essai peut être renouvelée une fois pour une durée au plus égale à sa durée initiale. La période d'essai et la possibilité de la renouveler sont expressément stipulées dans le contrat ou l'engagement ".
3. M. B... soutient que l'avenant à son contrat, signé le 11 octobre 2017, fixait une période probatoire de trois mois sans indication de la possibilité de la renouveler et qu'en l'absence d'une telle mention, l'administration ne pouvait la renouveler sans méconnaitre les dispositions de l'article 3 du décret du 3 novembre 2014 modifiant les dispositions de l'article 9 du décret du 17 janvier 1986.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est engagé en qualité d'agent contractuel au sein de l'Agence nationale de santé publique sur un emploi d'écoutant et exerce son activité à temps incomplet d'une quotité de 50 %, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée conclu le 20 juillet 2016. Un avenant à ce contrat, conclu le 11 octobre 2017, prévoit que M. B... est engagé en qualité d'écoutant et exerce son activité à temps incomplet d'une quotité de 80 %, la fiche de poste annexée à ce contrat prévoyant une mission d'écoutant-gestionnaire de l'annuaire spécialisé en addictologie. Il résulte des pièces du dossier que ceci conduisait l'agent à exercer une nouvelle mission de gestionnaire de l'annuaire spécialisé en addictologie à 30% de son temps de travail, en plus de son activité d'écoutant à 50% de son temps de travail. Ainsi, l'avenant signé le 11 octobre 2017 n'a pas été à l'origine d'un changement de fonctions de M. B... permettant de considérer qu'un nouveau contrat a été conclu. En conséquence, les dispositions de l'article 9 du décret du 17 janvier 1986 dont se prévaut M. B... sont inapplicables et le moyen doit être écarté.
5. En second lieu, aux termes de l'article 6 sexies du chapitre II de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " I. - Afin de garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard des travailleurs handicapés, les employeurs visés à l'article 2 prennent, en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleurs mentionnés aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 5212-13 du code du travail d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de développer un parcours professionnel et d'accéder à des fonctions de niveau supérieur ainsi que de bénéficier d'une formation adaptée à leurs besoins tout au long de leur vie professionnelle, sous réserve que les charges consécutives à la mise en œuvre de ces mesures ne soient pas disproportionnées, notamment compte tenu des aides qui peuvent compenser en tout ou partie les dépenses supportées à ce titre par l'employeur. Ces mesures incluent notamment l'aménagement de tous les outils numériques concourant à l'accomplissement de la mission des agents, notamment les logiciels métiers et de bureautique ainsi que les appareils mobiles ". En vertu de l'article 32 de cette même loi : " (...) II. Sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires, sont applicables aux agents contractuels le chapitre II de la présente loi, (...) ".
6. M. B... soutient qu'il n'a pas été mis en mesure de faire ses preuves dans le cadre de sa période d'essai sur ses nouvelles missions en raison de l'absence d'aménagement de son poste ce qui n'a pas permis une évaluation objective de ses compétences. En l'espèce, il est constant que M. B... a été reconnu travailleur handicapé du fait de problèmes auditifs à compter du 1er mars 2017. À la suite de cette reconnaissance, l'employeur de M. B... se trouvait tenu d'aménager son poste de travail à son handicap. À cet égard, il ressort des pièces du dossier que les aménagements de poste nécessités par la situation de handicap de M. B... consistaient essentiellement en l'installation d'un caisson d'isolation et en un appareillage auditif bilatéral et que, dès la reconnaissance de ce statut, l'agent de prévention de l'Agence nationale de santé publique a engagé des actions afin d'aménager le poste de travail de l'agent. Mais surtout, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision contestée ait été prise en raison des difficultés auditives de M. B.... En effet, le directeur général de l'Agence nationale de santé publique précise, dans sa décision du 10 avril 2018, qu'il a décidé de ne pas maintenir M. B... sur ses nouvelles missions au motif qu'il n'avait pas donné satisfaction, pendant sa période probatoire, en tant que gestionnaire de l'annuaire spécialisé en addictologie. Il est précisé, sans que le requérant n'apporte aucun élément sérieux de nature à remettre en cause ces constats, que M. B... n'a pas répondu aux attentes concernant cette mission dès lors que les fiches qu'il transmettait comportaient peu de mises à jour, qu'il manquait certains éléments essentiels tels que le type de structure et que ces éléments lui avaient été rappelés à de nombreuses reprises. Par ailleurs, il est fait état d'un manque de fluidité dans la communication avec la responsable du pôle information-formation qui est la coordinatrice de l'annuaire. En conséquence, et contrairement à ce qu'il soutient, il ne ressort pas du dossier qu'une absence d'aménagement du poste de travail de M. B... aurait eu une incidence sur sa capacité à faire ses preuves dans le cadre de cette nouvelle mission.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
8. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Agence nationale de santé publique, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. B... demande à ce titre. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'Agence nationale de santé publique au même titre.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'Agence nationale de santé publique présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à l'Agence nationale de santé publique.
Délibéré après l'audience du 3 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Durup de Baleine, président de chambre,
- M. Barlerin, premier conseiller,
- Mme Peton, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 décembre 2024.
La rapporteure,
Signé : N. PetonLe président,
Signé : A. Durup de Baleine
Le greffier,
Signé : A. Betti
La République mande et ordonne à la ministre de la santé et de l'accès aux soins en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
A. Betti
N° 21NC01768 2