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21/11/2024 | FRANCE | N°23NC01954

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 21 novembre 2024, 23NC01954


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 14 avril 2023 par lequel le préfet de la Moselle lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement, a prononcé à son encontre une interdiction de retour en France d'un an et a procédé à son inscription dans le système d'information de Schengen.



Par un jugement n° 2302648 du 31 mai 2023,

la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 14 avril 2023 par lequel le préfet de la Moselle lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement, a prononcé à son encontre une interdiction de retour en France d'un an et a procédé à son inscription dans le système d'information de Schengen.

Par un jugement n° 2302648 du 31 mai 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédures devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 20 juin 2023, sous le n° 23NC01954, M. A... B... doit être regardé comme demandant à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2302648 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg du 31 mai 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Moselle du 14 avril 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, durant ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de condamner l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter sans délai le territoire français est entachée d'un vice de procédure en l'absence de production du procès-verbal de son interpellation ;

- cette décision méconnaît également son droit d'être entendu, dès lors qu'il n'a pas été mis à même de présenter des observations concernant sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle est également entachée d'erreurs de fait et d'un abus de pouvoir quant à la prise en considération de sa situation réelle et personnelle ;

- il craint de retourner en Algérie en raison des persécutions et des discriminations qu'il a subies du fait de son orientation sexuelle ;

- la décision portant interdiction de retour en France méconnaît les dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision est insuffisamment motivée au regard des critères énoncés à l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

II. Par une requête, enregistrée le 10 décembre 2023, sous le n° 23NC03566, M. A... B..., représenté par Me Cappelletti, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2302648 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg du 31 mai 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Moselle du 14 avril 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et de prendre toute mesure propre à mettre fin à son signalement dans le système d'information de Schengen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 de 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- cette décision est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard du pouvoir discrétionnaire de régularisation du préfet à titre exceptionnel ;

- la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- cette décision est insuffisamment motivée :

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors qu'il justifie de garanties de représentation suffisante et ne présente pas de risque de fuite ;

- la décision portant interdiction de retour en France pendant un an est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- cette décision est insuffisamment motivée au regard des critères énoncés à l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 janvier 2024, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 novembre 2023.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 de 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Meisse été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 23NC01954 et 23NC03566, présentées par et pour M. B..., sont dirigées contre le même arrêté. Elles soulèvent des questions analogues et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. M. B... est un ressortissant algérien, né le 1er octobre 1983. Il a déclaré être entré en France, le 22 septembre 2021, sous couvert de son passeport revêtu d'un visa de court séjour de quatre-vingt-dix jours, valable du 23 octobre 2016 au 22 octobre 2021. A la suite d'un contrôle d'identité par les services de la police aux frontières de Thionville le 13 avril 2023, il a été placé en retenue administrative aux fins de vérification de son droit au séjour en France. Par un arrêté du 14 avril 2023, le préfet de la Moselle lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour en France d'un an. M. B... a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 avril 2023. Il relève appel du jugement n° 2302648 du 31 mai 2023, qui rejette sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

3. En premier lieu, la circonstance que le procès-verbal de son interpellation n'a pas été communiqué à M. B..., ni n'a été versé au débat contentieux, est sans incidence sur la légalité de la décision en litige. Par suite, le moyen tiré de ce que cette décision serait entachée d'un vice de procédure pour ce motif doit être écarté comme inopérant.

4. En deuxième lieu, si M. B... fait valoir que son droit d'être entendu aurait été méconnu, il est constant que l'intéressé a été informé de ce qu'il était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement et mis à même de présenter ses observations lors de son audition par les services de la police aux frontières de Thionville le 13 avril 2023 dans le cadre de sa retenue administrative pour vérification du droit au séjour. Par suite et alors que le requérant n'établit pas avoir sollicité en vain un entretien auprès de l'administration, ni avoir été empêché de lui communiquer tout élément jugé utile à la compréhension de sa situation, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu ne peut qu'être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. ". Il ressort des pièces du dossier que la décision en litige énonce, dans ses visas et motifs, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle est suffisamment motivée au regard des dispositions du premier alinéa de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait et il ne peut, dès lors, qu'être écarté.

6. En quatrième lieu, il ne résulte, ni des motifs de la décision en litige, ni d'aucune des autres pièces du dossier que le préfet de la Moselle se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation de M. B... au regard de l'ensemble des éléments portés à sa connaissance préalablement à l'édiction de la mesure d'éloignement contestée et, plus particulièrement, des informations fournies par le requérant lors de son audition par les services de police le 13 avril 2023. Par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré du défaut d'un tel examen.

7. En cinquième lieu, M. B... ne saurait utilement, pour contester la légalité de la mesure d'éloignement prononcée à son encontre, se prévaloir de ce que le préfet de la Moselle n'a pas fait usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation à titre exceptionnel ou de ce qu'il aurait méconnu les dispositions du premier alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatives à l'admission exceptionnelle au séjour sur le territoire français. Par suite ces moyens doivent, en tout état de cause, être écartés comme inopérants.

8. En sixième lieu, si le requérant fait valoir que la décision en litige serait entachée d'erreurs de fait et d'abus de pouvoir, ces moyens ne sont pas assortis de précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé. Par suite, il y a lieu de les écarter.

9. En septième et dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré sur le territoire français, pour la seconde fois, le 22 septembre 2021, en provenance de l'Espagne et qu'il y a travaillé en intérim comme ouvrier polyvalent de janvier 2022 à mai 2023. Toutefois, outre que la durée de son séjour en France à la date de la décision attaquée est brève, il n'établit pas avoir sollicité un titre de séjour et donc avoir cherché à régulariser sa situation depuis l'expiration de son visa de court séjour. S'il fait valoir qu'il a demandé qu'un certificat de nationalité française lui soit délivré, il est constant que cette demande a été rejetée par le ministère de la justice le 24 avril 2019. L'intéressé est célibataire et sans enfant à charge. En dehors d'un cousin qui l'hébergerait, il ne justifie pas d'attaches familiales, ni d'une intégration particulière en France. Il n'est pas isolé dans son pays d'origine, où résident ses parents et ses six frères et sœurs. Par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision en litige serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

10. En premier lieu, compte tenu de ce qui précède, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision en litige serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 613-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les décisions relatives au refus et à la fin du délai de départ volontaire prévues aux articles L. 612-2 et L. 612-5 et les décisions d'interdiction de retour et de prolongation d'interdiction de retour prévues aux articles L. 612-6, L. 612-7, L. 612-8 et L. 612-11 sont distinctes de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Elles sont motivées. ".

12. La décision en litige énonce, dans ses visas et motifs, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle est ainsi suffisamment motivée au regard des exigences de l'article L. 613-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait et il ne peut, dès lors, qu'être écarté.

13. En troisième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. ". Aux termes de l'article L. 612-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". Aux termes de L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; 2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, (...) qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale (...). ".

14. Si M. B... fait valoir qu'il est hébergé à Thionville par son cousin depuis le 22 septembre 2021 et produit en ce sens une attestation de l'intéressé, il résulte du procès-verbal d'audition du 13 avril 2023 qu'il a également indiqué aux services de la police aux frontières de Thionville qu'il était domicilié à Metz et logé par des amis. Dans ces conditions, le requérant ne pouvant être regardé comme justifiant d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale, le préfet de la Moselle n'a pas commis d'erreur d'appréciation en considérant que M. B... présentait, faute de garanties de représentation suffisantes, un risque de se soustraire à l'obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision portant fixation du pays de destination :

15. Si M. B... fait valoir qu'il craint de retourner en Algérie en raison des persécutions et des discriminations qu'il a subies du fait de son orientation sexuelle, ses allégations de mauvais traitement ne sont étayées par aucun élément probant. Par suite, le préfet de la Moselle n'a pas commis d'erreur d'appréciation en fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement contestée.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

16. En premier lieu, compte tenu de ce qui précède, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision en litige serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

17. En deuxième lieu, au regard des circonstances de fait qui ont été analysées au point 9 du présent arrêt, le moyen tiré de ce que la mesure d'interdiction de retour en France contestée méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit également être écarté.

18. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ".

19. Il est constant qu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à M. B.... Dans ces conditions, le préfet de la Moselle n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en assortissant la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour en France d'une durée d'un an.

20. En quatrième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. ".

21. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, le préfet assortit, en principe et sauf circonstances humanitaires, l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour. La durée de cette interdiction doit être déterminée en tenant compte des critères tenant à la durée de présence en France, à la nature et l'ancienneté des liens de l'intéressé avec la France, à l'existence de précédentes mesures d'éloignement et à la menace pour l'ordre public représentée par la présence en France de l'intéressé.

22. Il incombe à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

23. Pour justifier le prononcé d'une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, le préfet de la Moselle a retenu que M. B..., qui a déclaré être entré en France pour la seconde fois en 2023, ne justifie d'aucune circonstance humanitaire particulière, ni de liens intenses et stables sur le territoire français. Il en conclut que, alors même qu'il n'a pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement et que son comportement ne présente pas, à ce jour, une menace pour l'ordre public, il est justifié que soit prononcée une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Le préfet de la Moselle, qui s'est prononcé sur l'ensemble des critères énoncés au premier alinéa de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a ainsi suffisamment motivé sa décision. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.

24. En cinquième et dernier lieu, s'il est vrai que M. B... est entré régulièrement en France le 22 septembre 2021, il résulte de l'instruction que le préfet de la Moselle aurait pris la même décision s'il avait retenu cette date pour apprécier la durée du séjour de l'intéressé sur le territoire français. Dans ces conditions, eu égard aux éléments retenus par le préfet, ainsi qu'aux circonstances analysées au point 9 du présent arrêt, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige ne serait pas adaptée à sa situation et qu'elle serait, de ce fait, entachée d'une erreur d'appréciation.

25. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête n° 23NC01954, que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 14 avril 2023, ni à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que ses conclusions à fin d'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi de 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. B... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

Délibéré après l'audience du 24 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- Mme Bauer, présidente-assesseure,

- M. Meisse, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 novembre 2024.

Le rapporteur,

Signé : E. MEISSE

Le président,

Signé : Ch. WURTZ

Le greffier,

Signé : F. LORRAIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 23NC01954 et 23NC03566 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC01954
Date de la décision : 21/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Eric MEISSE
Rapporteur public ?: M. MARCHAL

Origine de la décision
Date de l'import : 01/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-21;23nc01954 ?
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