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15/11/2024 | FRANCE | N°22NC02868

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 2ème chambre, 15 novembre 2024, 22NC02868


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy, d'une part, d'annuler la décision du 31 août 2021 par laquelle le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de région Grand Est (ci-après CMAR Grand Est) a prononcé son licenciement sans indemnité et a mis fin au versement de l'indemnité différentielle et, d'autre part, de condamner la CMAR Grand Est à lui verser la somme globale de 456 773,17 euros, à titre principal, au titre de diverses indemnités no

n perçues et en réparation des troubles dans les conditions d'existence subis en raison ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy, d'une part, d'annuler la décision du 31 août 2021 par laquelle le président de la chambre de métiers et de l'artisanat de région Grand Est (ci-après CMAR Grand Est) a prononcé son licenciement sans indemnité et a mis fin au versement de l'indemnité différentielle et, d'autre part, de condamner la CMAR Grand Est à lui verser la somme globale de 456 773,17 euros, à titre principal, au titre de diverses indemnités non perçues et en réparation des troubles dans les conditions d'existence subis en raison de son licenciement.

Par un jugement n° 2102861 du 20 octobre 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 novembre 2022, M. A..., représenté par Me Demarest de la SCP Joubert Demarest Merlinge, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 20 octobre 2022 ;

2°) de condamner la chambre des métiers et de l'artisanat Grand Est à lui verser une somme de 163 116,36 euros et, subsidiairement, 76 760,64 euros au titre de l'indemnité de licenciement, une somme de 50 952,52 euros au titre de l'indemnité de préavis, une somme de 2 429,13 euros au titre des congés payés, une somme de 6 408,17 euros au titre des jours de réduction du temps de travail (RTT) et une somme de 233 527,44 euros en réparation de ses troubles dans les conditions d'existence résultant de son licenciement ;

3°) de mettre à la charge de la CMAR Grand Est une somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant de la régularité du jugement attaqué :

- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de ce qu'il n'a pas été procédé à une recherche loyale et sérieuse de reclassement auprès des autres chambres ;

- ils ont insuffisamment motivé leur réponse au moyen tiré de l'absence d'équivalence du poste de reclassement proposé ;

S'agissant de l'illégalité de la décision de supprimer le cumul d'emploi et le bénéfice de l'indemnité différentielle :

- l'abrogation de l'indemnité différentielle est entachée d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation, dès lors que la décision du 31 août 2021 procède au retrait illégal, plus de quatre mois après, du cumul d'emploi dont il bénéficiait tant par l'effet de la décision du 22 décembre 2020 le nommant, à compter du 1er janvier 2021, " secrétaire général - directeur des services " en cumul avec l'emploi de " directeur régional de la formation " que de la décision du 5 janvier 2021 modifiant les conditions de sa nomination par intérim ;

S'agissant de l'illégalité de la décision de licenciement :

- elle est entachée d'erreur de droit, en l'absence d'accord intervenu entre les deux établissements sur sa mutation de reclassement ;

- elle ne pouvait pas être fondée sur la suppression de son poste, celui-ci ayant perduré après le 1er janvier 2021 ;

- elle est entachée d'un vice de procédure, faute pour l'accord des deux établissements d'avoir été sollicité avant la disparition de la CMA de Meurthe-et-Moselle ;

- il avait droit à une indemnité de licenciement, puisque, faute de pouvoir être fondé sur l'article 42 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat, son licenciement ne pouvait intervenir que sur le fondement de l'article 45 du même statut, la perte de confiance résultant en l'espèce de l'indication que le futur secrétaire général ne voulait pas travailler avec lui et de l'absence de transmission au bureau de sa candidature pour le poste de secrétaire général ;

- à titre subsidiaire, en l'absence de fondement légal à son licenciement, l'absence d'indemnité de licenciement s'en trouve d'autant plus illégale ;

- la décision de licenciement est entachée d'erreur de fait et d'erreur manifeste d'appréciation de la légitimité de son refus du poste de reclassement proposé, compte tenu de l'absence d'équivalence entre son ancien poste de secrétaire général et le poste de directeur régional proposé ;

- elle méconnaît le principe général du droit selon lequel un licenciement ne peut intervenir sans recherche préalable d'un reclassement dès lors qu'il ne s'est vu proposer qu'un seul poste et qu'il n'est pas justifié de recherche de reclassement auprès d'autres chambres ;

- elle est entachée d'un vice de procédure au regard de l'article 45 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat, en l'absence d'un délai raisonnable laissé entre sa convocation à l'entretien préalable et la tenue de cet entretien ;

S'agissant de l'illégalité du préavis d'un mois :

- ce délai est illégal, n'étant prévu par aucune disposition applicable ;

- il avait droit à un préavis de six mois en application de l'article 45 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat ;

- il ne pouvait être licencié sans préavis, conformément à un principe général du droit, et seul le délai de six mois était adapté à sa qualification ;

S'agissant des indemnités sollicitées :

- il a droit, au titre de son indemnité de licenciement, à une somme de 163 116,36 euros en vertu de l'article 45 du statut, a minima à une somme de 76 760,64 euros en vertu de l'article 42 du statut, tenant compte de l'indemnité différentielle dont il bénéficiait ;

- il a droit, au titre de l'indemnité de préavis, à 50 952,52 euros, compte tenu de l'indemnité différentielle dont il bénéficiait ;

- il a droit, au titre de l'indemnité de congés payés, à 2 429,13 euros, compte tenu de l'indemnité différentielle dont il bénéficiait ;

- il a droit, au titre de l'indemnité de RTT, à 1 736,97 euros, compte tenu de l'indemnité différentielle dont il bénéficiait et à une indemnité supplémentaire de 4 671,20 euros ;

- il a subi des troubles dans les conditions d'existence à la suite de son licenciement injustifié, qui doivent être indemnisés à hauteur d'un montant de 233 527,44 euros correspondant à vingt-quatre mois de salaires.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 septembre 2023, la chambre de métiers et de l'artisanat de région Grand Est, représentée par la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les décisions du 31 août 2021 ne sont entachées d'aucune illégalité ;

- les prétentions indemnitaires du requérant ne sont pas fondées ;

- le requérant n'établit pas avoir droit à une indemnité de " RTT " complémentaire à celle qui lui a été versée ;

- le préjudice tiré des troubles dans les conditions d'existence n'est pas établi ni dans son principe ni dans son montant ; à titre subsidiaire, l'indemnisation de ce préjudice ne vise pas à réparer une perte de rémunération ou une perte de droits à la retraite ; à titre infiniment subsidiaire, la somme réclamée est excessive.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'artisanat ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;

- la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 ;

- le décret n° 2020-1416 du 18 novembre 2020 ;

- le statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Brodier,

- les conclusions de Mme Mosser, rapporteure publique,

- les observations de Me Demarest, avocat de M. A...,

- les observations de Me Poupot, avocat de la CMAR Grand Est.

Considérant ce qui suit :

1. Recruté comme contractuel le 1er mars 2014 par la chambre de métiers et de l'artisanat de Meurthe-et-Moselle, M. A... a été nommé, à compter du 1er avril 2014, sur l'emploi de secrétaire général de cet établissement. Cet emploi a toutefois été supprimé à la suite de la création, le 1er janvier 2021, de la chambre de métiers et de l'artisanat de région Grand Est dans le cadre de la réorganisation des chambres de métiers et de l'artisanat conformément à l'article 42 de la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises et au décret du 18 novembre 2020 pris pour son application. M. A... s'est alors vu proposer un poste de reclassement, qu'il a refusé. La CMAR Grand Est a saisi la commission paritaire de cessation des fonctions qui, à l'issue de sa séance du 13 juillet 2021, a émis l'avis que le refus de l'agent n'était pas légitime. Par courrier du 10 août 2021, le président de la CMAR a convoqué M. A... à un entretien le 17 août 2021, préalable à son licenciement sans indemnité. Après accord du bureau le 20 août 2021, le président de la CMAR a, par une décision du 31 août 2021, prononcé le licenciement de l'intéressé, sans indemnité, et au terme d'un préavis d'un mois. Par ailleurs, par une décision du même jour, il était mis fin à sa mission d'intérim de la fonction de directeur territorial de l'établissement de Meurthe-et-Moselle ainsi qu'au versement de l'indemnité différentielle qu'il percevait du fait du cumul d'une fonction régionale et départementale. Par sa requête, M. A... relève appel du jugement du 20 octobre 2022 en tant que le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la CMAR, par suite de l'illégalité de ces deux décisions du 31 août 2021, au versement de diverses indemnités ainsi qu'à la réparation de ses troubles dans les conditions d'existence.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il ressort du jugement attaqué que les premiers juges ont, pour répondre au moyen tiré de l'absence de recherche de reclassement sérieuse et loyale, indiqué que la chambre de métiers et de l'artisanat de région Grand Est, qui avait proposé une offre à M. A... pour un emploi équivalent au sien, n'était pas tenue de procéder à d'autres recherches de postes pour le reclasser. Par suite, le moyen tiré du défaut de réponse à un moyen doit être écarté.

3. En deuxième lieu, il ressort du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments des parties, ont répondu de manière suffisamment détaillée au moyen invoqué par M. A... tiré de l'absence d'équivalence du poste de reclassement qui lui avait été proposé. Ils ont notamment répondu à l'argument tiré de l'absence d'équivalence de rémunération, en indiquant que l'indemnité différentielle qui était liée au cumul de deux fonctions ne pouvait pas être prise en compte dans le calcul de la rémunération et que la rémunération brute qui lui était proposée n'était pas inférieure à ce qu'il percevait sur ses précédentes fonctions de secrétaire général. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation ne peut qu'être écarté.

Sur la responsabilité pour faute de la CMAR Grand Est :

En ce qui concerne l'illégalité alléguée de la décision de licenciement sans indemnité :

4. Aux termes de l'article 42 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat : " I. - La suppression d'un emploi permanent doit faire l'objet, après avis de la commission paritaire locale, d'une décision motivée de l'assemblée générale et recevoir l'approbation de l'autorité de tutelle. / L'agent titulaire de l'emploi supprimé doit, dans toute la mesure du possible, être reclassé dans un emploi équivalent existant dans l'établissement ou proposé dans l'un des établissements mentionnés à l'article 1er. / En cas de suppression d'un établissement visé à l'article 1er dans les conditions fixées à l'article 17 du code de l'artisanat, le personnel est affecté, dans toute la mesure du possible, à des emplois équivalents dans l'un des établissements mentionnés à l'article 1er ou dans l'organisme auquel seraient dévolues ses attributions. / La mutation de reclassement, consécutive à une suppression d'emploi ou à celle de la chambre, implique pour sa mise en œuvre, un accord des deux établissements concernés qui fixe notamment la date d'effet du reclassement qu'implique le transfert de l'agent d'un établissement à l'autre. Cet accord, qui est communiqué dans les conditions prévues à l'article 6 à l'agent, doit faire l'objet d'une approbation expresse de sa part dans un délai de quinze jours à compter de sa réception. (...) / Si des emplois équivalents n'existent pas ou si l'agent refuse la proposition qui lui est faite, celui-ci est licencié et la cessation de fonctions ne peut intervenir que trois mois après la date de transmission de la décision de suppression d'emploi à l'autorité de tutelle susvisée, sauf opposition notifiée par celle-ci dans un délai de deux mois. Le délai après lequel la cessation de fonctions peut intervenir est porté à six mois pour les secrétaires généraux, les secrétaires généraux adjoints, les cadres supérieurs et les cadres. Dans l'hypothèse où l'agent n'approuve pas, dans les conditions prévues à l'alinéa précédent, la mutation de reclassement qui lui est proposée, le licenciement, s'il est poursuivi, ne peut intervenir qu'après que la commission paritaire de cessation des fonctions a rendu son avis sur la légitimité du refus. / II. - La commission paritaire de cessation des fonctions définie à l'article 43 est saisie de la légitimité du refus d'un agent d'accepter une mutation de reclassement telle que prévue au I, par le président de l'établissement dans lequel intervient une suppression d'emploi. / (...) / La commission apprécie la légitimité du refus de l'agent d'accepter une mutation de reclassement au regard notamment : / - du caractère raisonnable de l'offre de reclassement au regard notamment des temps et conditions de trajets supplémentaires par rapport à la précédente résidence administrative et des moyens de transport disponibles, au regard également de la situation personnelle de l'agent (situation familiale, handicap, santé...) ; / - de l'équivalence de l'emploi proposé ; / - de la(es) formation(s) adaptée(s) à l'emploi proposé ; / - du maintien d'une rémunération au moins égale à celle précédemment perçue ; / - de la reprise de l'ancienneté de l'agent. / (...) ". Aux termes de l'article 44 du même statut : " II - L'indemnité de licenciement précitée n'est pas due lorsque l'agent : (...) ; refuse sans motif légitime, constaté comme tel en application de l'article 42-II, un emploi équivalent qu'il se voit proposer dans l'un des établissements mentionnés à l'article 1er ; (...) ".

5. Il résulte de l'instruction que la décision du 31 août 2021 par laquelle le président de la CMAR Grand Est a prononcé le licenciement de M. A... sans indemnité a été adoptée sur le fondement des dispositions du I de l'article 42 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat au motif que le poste de secrétaire général, directeur des services, de la CMA de la Meurthe-et-Moselle avait été supprimé au 1er janvier 2021, et que M. A... avait refusé, sans motif légitime, l'emploi de reclassement de directeur régional de la formation qui lui avait été proposé.

6. En premier lieu, la suppression du poste de secrétaire général qu'occupait M. A... depuis 2014 intervient dans le contexte particulier de la fusion, organisée par la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises, entre les établissements consulaires départementaux et l'établissement régional existant au profit d'une chambre des métiers et de l'artisanat de région. La CMA de région Grand Est étant devenue son employeur au 1er janvier 2021, conformément à l'article 42 de cette loi, il lui revenait de mettre en œuvre les dispositions applicables de l'article 42 du statut du personnel, qu'il s'agisse du reclassement de l'agent dans un emploi équivalent et, le cas échéant, des conséquences à tirer du refus de reclassement opposé par l'agent. D'une part, M. A... ne se prévaut d'aucune disposition législative ou réglementaire prévoyant que le reclassement des agents dont l'emploi se trouvait supprimé aurait dû être opéré avant le 31 décembre 2020. Il ne saurait ainsi utilement soutenir qu'un accord devait intervenir sur les modalités de mise en œuvre de son reclassement entre l'établissement dans lequel il était affecté et l'établissement dans lequel s'opérait son reclassement. D'autre part, il n'est pas contesté que M. A... a refusé la proposition de reclassement qui lui avait été faite par courrier du 26 mars 2021. Il ne saurait ainsi utilement soutenir qu'à défaut d'accord avec la CMA de Meurthe-et-Moselle, laquelle n'a au demeurant plus la personnalité juridique, la CMAR Grand Est ne pouvait prononcer son licenciement sur le fondement du I de l'article 42 du statut du personnel. Par suite, les moyens tirés d'un vice de procédure et de l'erreur de droit au regard des dispositions de l'article 42 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat doivent être écartés.

7. En deuxième lieu, il ressort de la grille des emplois de la chambre de métiers et de l'artisanat de région Grand Est, adoptée par la délibération de l'assemblée générale de cette chambre le 8 février 2021, que l'emploi de secrétaire général de la CMA de Meurthe-et-Moselle n'existe plus. La circonstance que, devenu son employeur, la CMAR Grand Est a affecté temporairement M. A..., dans l'attente de son reclassement, sur l'emploi de " directeur territorial par intérim de l'établissement de Meurthe-et-Moselle ", lequel correspondait à ses fonctions antérieures, n'est pas de nature à établir que son emploi de secrétaire général de la CMA de Meurthe-et-Moselle n'avait pas été supprimé. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en l'absence de suppression de son emploi, la CMAR Grand ne pouvait pas prononcer son licenciement sur le fondement de l'article 42 du statut du personnel.

8. En troisième lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'ayant pas établi que l'article 42 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat ne constituait pas la base légale adaptée à la décision de licenciement prise à son encontre, il ne saurait utilement soutenir que son licenciement ne pouvait être prononcé que sur le fondement de l'article 45 du même statut, relatif au licenciement du secrétaire général " à la discrétion du président " de la chambre de métiers et de l'artisanat. En tout état de cause, et alors au demeurant qu'il n'exerçait plus les fonctions de secrétaire général de la CMA de Meurthe-et-Moselle depuis le 31 décembre 2020, la circonstance que le président de la CMAR Grand Est lui aurait indiqué qu'il ne retiendrait pas sa candidature au poste de secrétaire général du nouvel établissement et qu'il n'aurait pas même transmis cette candidature au bureau ne permet pas de considérer que son licenciement entrait dans le champ d'application de l'article 45 du statut du personnel des chambres des métiers et de l'artisanat. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige est illégale en tant qu'elle le prive de l'indemnité de licenciement prévue à l'article 45 de ce statut. Il n'est pas plus fondé à soutenir que la décision de licenciement serait dépourvue de toute base légale pour solliciter le bénéfice d'une indemnité de licenciement.

9. En quatrième lieu, d'une part, si le requérant soutient qu'il n'a pas disposé d'un délai raisonnable entre la réception de sa convocation à l'entretien le 11 août 2021 et la date à laquelle celui-ci s'est tenu le 17 août 2021, il ne ressort pas des dispositions de l'article 45 du statut qu'elles imposeraient de délai minimum. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le délai, d'au moins quatre jours ouvrables, dont M. A... a disposé, n'était pas suffisant pour le préparer utilement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance d'un principe général du droit garantissant un délai suffisant pour préparer l'entretien préalable à son licenciement ne peut qu'être écarté.

10. En cinquième lieu, aux termes de l'article 9 de l'annexe XIX du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat, issu de l'avis de la commission paritaire nationale 52 du 16 juillet 2020 : " Lors du regroupement en chambre de métiers et de l'artisanat de région, le secrétaire général de la chambre de métiers et de l'artisanat départementale, (...), répondant aux dispositions de l'article 10-I et de l'annexe III, dont l'emploi est supprimé et qui est recruté pour occuper un emploi de directeur régional ou de directeur territorial au sein de la chambre de métiers et de l'artisanat de région nouvellement créée bénéficie du rang de secrétaire général adjoint. Ce bénéfice n'ouvre pas l'accès de droit à la fonction de secrétaire général adjoint. / (...) / Si le traitement majoré que le secrétaire général détenait dans sa précédente situation est plus élevé que le traitement correspondant au niveau d'emploi dans lequel il est nommé, il conserve à titre personnel le bénéfice de cette rémunération au moyen du versement d'un complément d'indice différentiel ".

11. Il résulte de l'instruction que M. A... s'est vu proposer, par un courrier du 26 mars 2021, d'être reclassé sur le poste de directeur régional de la formation, classé " SGA Rang 7 / Classe 1 / échelon 1 ", dont l'indice est 1276, pour une rémunération mensuelle brute de 6 647,99 euros et dont la résidence administrative est située à Metz. Dans son avis du 16 juillet 2021, la commission paritaire de cessation des fonctions a retenu que le refus de ce poste de reclassement par l'intéressé n'était pas légitime, au motif que l'ensemble des critères d'appréciation étaient réunis. D'une part, cette proposition faite le 26 mars 2021 à M. A... est conforme aux dispositions du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat. Il est par ailleurs constant que cet emploi comporte un indice 1276, supérieur à l'indice 1260 qu'il détenait à raison de l'emploi de secrétaire général de la CMA de la Meurthe-et-Moselle dont il était titulaire jusqu'au 30 décembre 2020. A cet égard, M. A... ne saurait utilement se prévaloir de l'indice supplémentaire de 440 points qui lui avait été accordé lorsqu'il cumulait son emploi de secrétaire général avec la fonction de directeur régional chargé de la formation au sein de l'ancienne CRMA pour prétendre à un emploi plus élevé dans la grille des emplois de la CMAR Grand Est. Le requérant ne bénéficiait pas plus d'un droit au maintien de la rémunération accordée au titre du cumul d'emploi, qui n'était que temporaire. Il ne saurait à cet égard invoquer les dispositions de l'article 23 du statut du personnel, qui régissent uniquement la situation des agents occupant à titre de remplacement un poste dont la rémunération est supérieure à leur emploi. Enfin, il ne saurait pas plus utilement, pour démontrer l'absence d'équivalence entre son ancien poste et celui qui lui a été proposé, comparer l'emploi de directeur régional avec l'emploi nouvellement créé de " secrétaire général régional " qui, par nature, compte tenu de la fusion des chambres départementales et régionale en une seule chambre des métiers et de l'artisanat par région, relève d'un niveau de responsabilités et d'autonomie supérieurs. Le requérant ne soutient d'ailleurs pas que les dispositions du statut du personnel applicables, qui postulent l'équivalence du poste de directeur régional avec celui de secrétaire général qu'il occupait auparavant, seraient illégales. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la proposition de reclassement qui lui a été faite ne portait pas sur un poste équivalent au sens de l'article 42 du même statut. Par suite, le président de la CMAR Grand Est a pu, sans faire une inexacte application de ces dispositions, estimer que son refus d'accepter ce poste n'était pas légitime.

12. En sixième lieu, il ressort des dispositions du I de l'article 42 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat, citées ci-dessus, que l'agent titulaire d'un emploi supprimé " doit, dans toute la mesure du possible, être reclassé dans un emploi équivalent existant dans l'établissement ou proposé dans l'un des établissements mentionnés à l'article 1er " et qu'il peut être licencié s'il " refuse la proposition qui lui est faite ". Contrairement à ce que M. A... soutient, il ne ressort pas de ces dispositions une obligation de lui proposer plusieurs postes de reclassement. Ainsi, et alors que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la proposition de reclassement qui lui a été faite en mars 2021 portait sur un poste équivalent à celui qu'il occupait auparavant, le requérant ne saurait utilement remettre en cause l'absence de recherches de reclassement avant le 1er janvier 2021 ni le fait que son employeur n'a sollicité le réseau des chambres pour connaître l'existence d'autres postes éventuels de reclassement que le 20 août 2021. Par ailleurs, contrairement à ce que M. A... soutient, le principe général du droit dont s'inspirent notamment les règles du statut général de la fonction publique qui imposent de donner, dans un délai raisonnable, aux fonctionnaires en activité dont l'emploi est supprimé une nouvelle affectation correspondant à leur grade, impose de rechercher à reclasser l'intéressé mais ne porte pas sur les modalités précises du reclassement. Le requérant ne saurait ainsi contester le délai dans lequel une proposition de reclassement lui a été faite. Par suite, et en tout état de cause, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la CMAR Grand Est n'aurait pas procédé à une recherche loyale et sérieuse de reclassement.

13. En dernier lieu, d'une part, faute pour la décision de licenciement de M. A... d'avoir été prise sur le fondement de l'article 45 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat, M. A... ne saurait utilement soutenir qu'il a été privé du délai de préavis de six mois prévu par les dispositions de cet article, qui ne sont pas applicables à sa situation. D'autre part, le délai d'un mois qui a été accordé à M. A... n'est pas contraire aux dispositions de l'article 42 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat, qui ne prévoient aucun délai. Enfin, contrairement à ce que le requérant soutient, aucun principe général du droit ne prévoit de délai de préavis minimum qui s'imposerait dans sa situation. Par suite, le moyen tiré d'une erreur de droit doit être écarté.

14. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'établit pas que la décision du 31 août 2021 prononçant son licenciement sans indemnité sur le fondement du I de l'article 42 du statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat pour refus illégitime de la proposition de reclassement qui lui a été faite et lui accordant un délai de préavis d'un mois serait illégale et donc fautive. Par suite, ses conclusions tendant à la condamnation de la CMAR Grand Est à lui verser la somme de 163 116,36 euros, ou subsidiairement 76 760,64 euros, à titre d'indemnité de licenciement ainsi que la somme de 50 952,52 euros à titre d'indemnité de préavis doivent être rejetées.

En ce qui concerne l'illégalité alléguée de la décision supprimant son cumul d'emploi :

15. Il résulte de l'instruction que, par une deuxième décision du 31 août 2021, le président de la CMAR Grand Est a mis fin, à compter du 1er septembre 2021, à la mission d'intérim de la fonction de directeur territorial de l'établissement de Meurthe-et-Moselle qu'exerçait M. A.... Cette fonction lui avait été confiée par une décision du président de la CMAR, formalisée dans un courrier du 5 janvier 2021, " en cumul avec la mission de directeur régional de la formation ", et dans l'attente d'une nomination définitive au sein de ce nouvel établissement. La décision du 31 août 2021 l'informait par ailleurs de la fin du versement de l'indemnité différentielle mensuelle qui lui avait été versée du fait de ce cumul de fonctions régionale et départementale. M. A... conteste l'absence de perception de l'indemnité différentielle au mois de septembre 2021, au cours duquel il faisait encore partie des effectifs de la CMAR avant prise d'effet de son licenciement au 30 septembre 2021.

16. Aux termes de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration : " L'administration ne peut abroger ou retirer une décision créatrice de droits de sa propre initiative ou sur la demande d'un tiers que si elle est illégale et si l'abrogation ou le retrait intervient dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ".

17. Il résulte de l'instruction que, concomitamment à la décision du 31 août 2021 par laquelle il prononçait son licenciement et le dispensait de l'exécution du préavis d'un mois, le président de la CMAR a décidé de mettre un terme aux fonctions de directeur territorial de l'établissement de Meurthe-et-Moselle que M. A... exerçait jusque-là par intérim. Cette décision, dont le requérant ne conteste pas le motif, a emporté par conséquence l'abrogation, également au 1er septembre 2021, du cumul d'emploi avec la mission de directeur régional de la formation, qui justifiait l'octroi d'une indemnité différentielle. En l'absence de droit au maintien sur ces fonctions, qui n'avaient été accordées qu'à titre provisoire, M. A... n'avait pas non plus de droit au maintien de l'indemnité différentielle au-delà du 31 août 2021. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'absence de versement de cette indemnité au mois de septembre 2021 procèderait d'une erreur de droit ou méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration.

18. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'établit pas que la décision du 31 août 2021 mettant fin à sa désignation comme directeur territorial par intérim serait illégale et donc fautive. Par suite, ses conclusions tendant à ce que la CMAR Grand Est lui verse l'indemnité différentielle au titre du mois de septembre 2021 ne peuvent qu'être rejetées. Doivent également être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions du requérant tendant à la condamnation de la CMAR Grand Est à lui verser, en complément de l'indemnité de congés payés déjà perçue, une somme de 2 429,13 euros et, en complément de l'indemnité de RTT déjà perçue, une somme de 1 736,97 euros, intégrant l'indemnité différentielle non perçue en septembre 2021.

En ce qui concerne l'indemnisation de ses troubles dans les conditions d'existence :

19. Ainsi qu'il a été dit précédemment, M. A... n'établit pas que les décisions du 31 août 2021 le licenciant sans indemnité et mettant fin à son cumul d'emploi et à la perception de l'indemnité différentielle au mois de septembre 2021 seraient entachées d'illégalité et dès lors constitutives d'une faute. Il n'est par suite pas fondé à solliciter la condamnation pour faute de la CMAR Grand Est à lui verser une somme de 233 527,44 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence que ces décisions auraient occasionnés pour lui.

Sur le bénéfice d'une indemnité de réduction du temps de travail (RTT) supplémentaire :

20. M. A... sollicite une indemnité supplémentaire de RTT d'un montant de 4 671,20 euros. Il ne justifie toutefois pas remplir les conditions pour percevoir cette indemnité prévue par les dispositions de l'annexe X au statut du personnel des chambres de métiers et de l'artisanat au profit des cadres dirigeants. Il a, en tout état de cause, perçu au moment de son licenciement un montant d'indemnité de RTT de 5 211,44 euros bruts, dont il n'établit pas qu'il aurait été illégalement déterminé. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de cette demande nouvelle à hauteur d'appel, ces conclusions doivent être rejetées.

21. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 20 octobre 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses demandes.

Sur les frais de l'instance :

22. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la CMAR Grand Est, qui n'est pas la partie perdante, au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.

23. D'autre part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... une somme au titre des frais exposés par la CMAR Grand Est et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la CMAR Grand Est tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la chambre de métiers et de l'artisanat de région Grand Est.

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président,

M. Agnel, président-assesseur,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 novembre 2024.

La rapporteure,

Signé : H. Brodier Le président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne à la préfète de la région Grand Est en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

N° 22NC02868


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC02868
Date de la décision : 15/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Hélène BRODIER
Rapporteur public ?: Mme MOSSER
Avocat(s) : SCP JOUBERT & DEMAREST

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-15;22nc02868 ?
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