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25/10/2024 | FRANCE | N°24NC02093

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 25 octobre 2024, 24NC02093


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La maire de la commune de Jussecourt-Minecourt, agissant en qualité d'agent de l'Etat, a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de déclarer M. Clément Rollot démissionnaire d'office de ses fonctions de conseiller municipal de cette commune.



Par un jugement n° 2401392 du 10 juillet 2024, le tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne a déclaré M. Rollot démissionnaire d'office de ses fonctions de conseiller municipal de Juss

ecourt-Minecourt.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 7 août...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La maire de la commune de Jussecourt-Minecourt, agissant en qualité d'agent de l'Etat, a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de déclarer M. Clément Rollot démissionnaire d'office de ses fonctions de conseiller municipal de cette commune.

Par un jugement n° 2401392 du 10 juillet 2024, le tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne a déclaré M. Rollot démissionnaire d'office de ses fonctions de conseiller municipal de Jussecourt-Minecourt.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 août 2024 sous le n° 24NC02093, et un mémoire complémentaire, enregistré le 12 septembre 2024, M. Clément Rollot, représenté par la SELAS Devarenne associés Grand Est, avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de première instance de la maire de Jussecourt-Minecourt ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'il n'a pas méconnu ses obligations résultant de l'article L. 2121-5 du code général des collectivités territoriales dès lors qu'il a désigné une suppléante en vue de l'élection du 9 juin 2024 après avoir reçu le tableau comportant les noms des membres du conseil municipal désignés pour assurer des fonctions d'assesseur et les plages horaires qui leur étaient assignées et que, en tout état de cause, il avait une excuse valable pour ne pas remplir ces fonctions pendant la plage qui lui était attribuée.

Par un mémoire, enregistré le 16 août 2024, le ministre de l'intérieur et des outre-mer s'en remet à la sagesse de la cour et aux éventuelles observations de la maire de Jussecourt-Minecourt.

Par des mémoires, enregistrés le 2 septembre et le 30 septembre 2024, la maire de Jussecourt-Minecourt, représentée par Me Calot, avocat, demande le rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de M. Rollot ne sont pas fondés.

Un mémoire, présenté par la maire de la commune de Jussecourt-Minecourt, a été enregistré le 16 octobre 2024 et n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code électoral ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le décret n° 79-160 du 28 février 1979 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Wurtz,

- les conclusions de M. Marchal, rapporteur public,

- et les observations de Me Jacquemin, substituant la SELAS Devarenne associés Grand Est, pour M. Rollot, et de la maire de Jussecourt-Minecourt.

Considérant ce qui suit :

1. Le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, saisi par la maire de

Jussecourt-Minecourt, a prononcé la démission d'office de M. Clément Rollot, conseiller municipal, au motif qu'il a refusé, sans excuse valable, de remplir les fonctions d'assesseur dans le bureau de vote de la commune pour les élections européennes du 9 juin 2024.

2. Aux termes de l'article L. 2121-5 du code général des collectivités territoriales : " Tout membre d'un conseil municipal qui, sans excuse valable, a refusé de remplir une des fonctions qui lui sont dévolues par les lois, est déclaré démissionnaire par le tribunal administratif. / Le refus résulte, soit d'une déclaration expresse adressée à qui de droit ou rendue publique par son auteur, soit de l'abstention persistante après avertissement de l'autorité chargée de la convocation (...) " Aux termes de l'article R. 2121-5 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 2121-5, la démission d'office des membres des conseils municipaux est prononcée par le tribunal administratif. / Le maire, après refus constaté dans les conditions prévues par l'article L. 2121-5 saisit dans le délai d'un mois, à peine de déchéance, le tribunal administratif (...) ".

3. Aux termes de l'article 1er du décret du 28 février 1979 : " L'élection des représentants au Parlement européen est régie par le titre Ier du livre Ier (partie réglementaire) du code électoral, à l'exception des articles R. 38 et R. 38-1, et par les dispositions des articles suivants. " Aux termes de l'article R. 42 du code électoral : " Chaque bureau de vote est composé d'un président, d'au moins deux assesseurs et d'un secrétaire choisi par eux parmi les électeurs de la commune (...) " Aux termes de l'article R. 44 de ce code : " Les assesseurs de chaque bureau sont désignés conformément aux dispositions ci-après : / - chaque candidat, binôme de candidats ou chaque liste en présence a le droit de désigner un assesseur et un seul pris parmi les électeurs du département ; / - des assesseurs supplémentaires peuvent être désignés par le maire parmi les conseillers municipaux dans l'ordre du tableau, puis, le cas échéant, parmi les électeurs de la commune (...) " Enfin, aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 45 du même code : " Chaque conseiller municipal assesseur peut également désigner son suppléant, soit parmi les autres conseillers municipaux, soit parmi les électeurs de la commune. ".

4. Il résulte de ces dispositions que la fonction d'assesseur de bureau de vote qui, en vertu de l'article R. 44 du code électoral, peut être confiée par le maire à des membres du conseil municipal, est au nombre des fonctions qui leur sont dévolues par les lois au sens de l'article L. 2121-5 du code général des collectivités territoriales. Un membre du conseil municipal ainsi désigné ne peut en conséquence se soustraire à cette obligation que s'il est en mesure, sous le contrôle du juge administratif, de présenter une excuse valable.

5. Il ressort des pièces du dossier d'appel et, notamment, d'une attestation, produite devant la cour, signée par le préfet A... que celui-ci a demandé à s'entretenir avec le président du syndicat " Jeunes agriculteurs " A... et avec M. Rollot, secrétaire général adjoint de ce syndicat, avant l'ouverture au public de la Foire de l'agriculture organisée par le syndicat le dimanche 9 juin 2024 et que cette rencontre, qui présentait un caractère d'urgence, n'a été confirmée aux intéressés que le 8 juin. Dans ces conditions, alors même que M. Rollot avait informé la maire de son absence dès le 7 juin 2024 et à supposer que M. Rollot n'ait pas été élu membre du bureau du syndicat, il disposait, à la date du scrutin, d'une excuse valable, au sens des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 2121-5 du code général des collectivités territoriales, pour ne pas assurer les fonctions d'assesseur du bureau de vote dans la plage horaire pour laquelle il avait été désigné et pendant laquelle cette entrevue devait avoir lieu.

6. Il résulte de ce qui précède que le jugement du tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne déclarant M. Rollot démissionnaire d'office de ses fonctions de conseiller municipal de la commune de Jussecourt-Minecourt doit être annulé, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête, et que la demande de première instance de la maire de cette commune doit être rejetée.

7. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par M. Rollot sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais exposés pour instance et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 10 juillet 2024 du tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne est annulé.

Article 2 : La demande de première instance de la maire de Jussecourt-Minecourt est rejetée.

Article 3 : Le surplus de la requête de M. Rollot est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Clément Rollot et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la maire de la commune de Jussecourt-Minecourt.

Délibéré après l'audience du 24 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- Mme Bauer, présidente-assesseure,

- M. Meisse, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 octobre 2024.

Le président-rapporteur,

Signé : Ch. WURTZ

La présidente-assesseure,

Signé : S. BAUERLe greffier,

Signé : F. LORRAIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

2

N° 24NC02093


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NC02093
Date de la décision : 25/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Christophe WURTZ
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS ACG REIMS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-25;24nc02093 ?
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