Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 17 mars 2023 par lequel le préfet de la Meuse lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'un an et l'a assigné à résidence.
Par un jugement n° 2301046 du 13 avril 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2023, M. A..., représenté par Me Lévi-Cyferman, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 13 avril 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 17 mars 2023 par lequel le préfet de la Meuse lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'un an et l'a assigné à résidence ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Meuse de lui délivrer un titre de séjour avec une autorisation de travail et, subsidiairement, de réexaminer sa situation et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
à l'encontre du jugement :
- le tribunal n'a pas tenu compte des arguments invoqués pour démontrer l'insuffisante motivation de l'arrêté et a insuffisamment motivé son jugement ;
- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant en tenant compte des éléments qu'il avait produits ;
- le tribunal n'a pas apprécié correctement les risques encourus en cas de retour en Albanie malgré les pièces qu'il avait produites ;
- le tribunal n'a pas analysé les moyens invoqués à l'encontre de la décision portant interdiction de retour ;
à l'encontre de l'arrêté en litige :
- l'insuffisante motivation de l'arrêté révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- il n'a pas pu présenter ses observations en méconnaissance de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- la compétence du signataire de l'arrêté n'est pas établie ;
- le préfet s'est estimé en situation de compétence liée en s'abstenant d'examiner s'il y avait lieu de prolonger le délai de départ volontaire en violation de l'article 7 de la directive n° 2008/115/CE et de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision méconnaît le droit d'être entendu garanti par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur de droit ; elle méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 novembre 2023, le préfet de la Meuse conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la requête est tardive ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 15 juin 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Barteaux a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant albanais, est entré en France, selon ses déclarations, en 2022, accompagné de son épouse et de leurs trois enfants, mineurs. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 8 juillet 2022, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 29 novembre 2022. Par un arrêté du 17 mars 2023, pris sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Meuse lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination, a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an et l'a assigné à résidence. Par un jugement du 13 avril 2023, dont M. A... fait appel, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet de la Meuse :
2. Aux termes de l'article R. 776-9 du code de justice administrative, applicable au contentieux des obligations de quitter le territoire français en vertu de l'article R. 776-1 du même code : " Le délai d'appel est d'un mois. Il court à compter du jour où le jugement a été notifié à la partie intéressée. Cette notification mentionne la possibilité de faire appel et le délai dans lequel cette voie de recours peut être exercée ".
3. Aux termes de l'article 43 du décret du 28 décembre 2020 : " (...) lorsqu'une action en justice ou un recours doit être intenté avant l'expiration d'un délai devant les juridictions de première instance ou d'appel, l'action ou le recours est réputé avoir été intenté dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée ou déposée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration dudit délai et si la demande en justice ou le recours est introduit dans un nouveau délai de même durée à compter : / (...)/ 3° De la date à laquelle le demandeur de l'aide juridictionnelle ne peut plus contester la décision d'admission ou de rejet de sa demande en application du premier alinéa de l'article 69 et de l'article 70 ou, en cas de recours de ce demandeur, de la date à laquelle la décision relative à ce recours lui a été notifiée ; / 4° Ou, en cas d'admission, de la date, si elle est plus tardive, à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné. (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que le jugement du tribunal administratif de Nancy rejetant la demande de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté en litige a été notifié à son avocat, par l'intermédiaire de l'application télérecours, le 17 avril 2023. L'intéressé a sollicité le 5 mai 2023, soit dans le délai d'appel d'un mois, le bénéfice de l'aide juridictionnelle qui lui a été accordé par une décision du 15 juin 2023, laquelle a été expédiée au requérant le 18 juin suivant. Cette même décision désignait un avocat pour représenter M. A... en appel. La requête présentée par cet avocat pour le compte de M. A... a été enregistrée au greffe de la cour le 13 juillet 2023, soit nécessairement dans le délai d'appel. Il s'ensuit que la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la requête opposée par le préfet doit être écartée.
Sur la régularité du jugement attaqué :
5. Il ressort des pièces du dossier que la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a omis de répondre au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de ce que l'arrêté en litige a été pris en méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Le jugement doit, par suite, être annulé.
6. Il y a lieu, pour la cour, de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Nancy et ses conclusions d'appel.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté contesté :
7. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en litige a été signé par M. Robbe-Grillet, secrétaire général de la préfecture de la Meuse, en vertu d'un arrêté n° 2023-561 du 7 mars 2023, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le 8 août 2022, par lequel le préfet de la Meuse lui a donné délégation à l'effet de signer notamment tous les arrêtés, décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Meuse à l'exception des déclinatoires de compétence, des arrêtés de conflit, des décisions de déférer au juge administratif des actes des autorités décentralisées et des décisions de saisine de la chambre régionale des comptes. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit être écarté comme manquant en fait.
8. En deuxième lieu, l'arrêté en litige rappelle les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne les conditions d'entrée de M. A... sur le territoire français avec l'ensemble de sa famille et le rejet de sa demande d'asile. Il comporte des éléments de faits relatifs à la situation personnelle et familiale de l'intéressé, dont il tire les conséquences pour prononcer les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixation du pays de destination, interdiction de retour sur le territoire français et assignation à résidence. Cette motivation est suffisante et démontre, contrairement à ce que soutient le requérant, que le préfet a procédé à un examen particulier de sa situation préalablement à l'édiction de l'arrêté.
9. En troisième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". L'article L. 122-1 du même code dispose : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. (...) ". Aux termes de l'article L. 121-2 : " Les dispositions de l'article L. 121-1 ne sont pas applicables : (...) 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière ; (...) ".
10. Il résulte des dispositions du livre VI du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions portant obligation de quitter le territoire français et des décisions pouvant les assortir, parmi lesquelles les interdictions de retour sur le territoire français. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut être utilement invoqué à l'encontre de l'arrêté en litige.
11. En quatrième lieu, le droit d'être entendu, qui fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union, se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Ce droit ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.
12. Dans le cas prévu au 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision portant obligation de quitter le territoire français est prise, notamment, après que la qualité de réfugié a été définitivement refusée à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Or, celui-ci est conduit, à l'occasion du dépôt de sa demande d'asile, à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit reconnu la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, laquelle doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles et il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir toute observation complémentaire, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux, notamment au regard de sa situation dans son pays d'origine ou de sa situation personnelle et familiale.
13. Il n'est pas contesté que M. A... a pu faire valoir ses observations dans le cadre de l'examen de sa demande d'asile. Il ne pouvait ignorer qu'en cas de rejet de sa demande, il était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Par ailleurs, il ne soutient pas avoir vainement sollicité un entretien auprès des services préfectoraux, ni même avoir été empêché de présenter des observations avant que le préfet ne prononce l'arrêté contesté. En outre, il ne fait valoir aucun élément qui aurait été de nature à influencer le sens de l'arrêté. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu doit être écarté.
14. En cinquième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'articles L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être utilement invoqué à l'encontre de l'arrêté en litige qui ne refuse aucun titre de séjour.
15. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
16. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France en mars 2022, soit depuis à peine plus d'un an à la date de la décision attaquée. Son épouse, de même nationalité que lui, fait également l'objet d'une mesure d'éloignement. Si le requérant se prévaut de ses efforts d'intégration, notamment par l'apprentissage du français et des liens amicaux qu'il a tissés, il n'apporte, toutefois, aucun élément de nature à justifier de la réalité de ces liens en dehors de ceux établis avec sa famille. Les manifestations ponctuelles, organisées par l'école, auxquelles son épouse, également en situation irrégulière, a participé ne suffisent pas à attester d'une intégration particulière. La circonstance que ses enfants sont scolarisés en France ne traduit pas une méconnaissance des stipulations précitées dès lors qu'il ne fait état d'aucun élément qui s'opposerait à la reconstitution de la cellule familiale dans son pays d'origine, pays où les enfants pourront poursuivre leur scolarité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
17. En septième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
18. Il résulte de ce qui a été exposé au point 16 que l'arrêté en litige n'a pas pour effet de séparer les enfants de leurs parents et que rien ne s'oppose à ce qu'ils reprennent leur scolarité en Albanie. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
19. En huitième lieu, aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui a remplacé l'article L. 511-1 du même code : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. (...) ".
20. Il ne ressort pas de l'arrêté contesté, ni des autres pièces du dossier qu'en retenant le délai légal de trente jours, alors que le requérant n'a invoqué aucune circonstance de nature à justifier une prolongation de ce délai, le préfet de la Meuse aurait méconnu l'étendue de sa compétence. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.
21. En neuvième lieu, aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui a repris les dispositions de l'article L. 513-2 du même code, abrogées depuis mai 2021 : " L'autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi : / 1° Le pays dont l'étranger a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu la qualité de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Un autre pays pour lequel un document de voyage en cours de validité a été délivré en application d'un accord ou arrangement de réadmission européen ou bilatéral ; / 3° Ou, avec l'accord de l'étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
22. M. A... fait valoir qu'il encourt des risques de traitements contraires aux stipulations de l'article 3 en cas de retour en Albanie en raison de menaces dont il a été victime dans ce pays. Pour établir la réalité de ses craintes, l'intéressé a produit un bulletin justifiant de son hospitalisation le 8 décembre 2021 à la suite de blessures corporelles, un récépissé de dépôt d'une plainte qu'il a déposée le 5 décembre 2021 contre trois personnes non identifiées pour menaces ainsi qu'une lettre anonyme de menaces que le frère de son épouse aurait trouvée sur le palier de leur maison en Albanie. Toutefois, ces seuls éléments ne suffisent pas à établir que l'intéressé encourt des risques actuels et personnels, ni, à les supposer même établis, que les services de police ne seraient pas en mesure d'assurer sa protection et celle de sa famille. Au demeurant, ainsi qu'il a été exposé au point 1, la demande d'asile du requérant a été rejetée. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.
23. En dixième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, le préfet de la Meuse n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de M. A... en refusant de faire usage de son pouvoir de régularisation.
24. En dernier lieu, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie d'exception d'illégalité n'est pas assorti des précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé.
25. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de la Meuse du 17 mars 2023. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2301046 du 13 avril 2023 rendu par la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A... en première instance et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie de l'arrêt sera adressée au préfet de la Meuse.
Délibéré après l'audience du 17 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Ghisu-Deparis, présidente,
- M. Barteaux, président assesseur,
- M. Lusset, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 octobre 2024.
Le rapporteur,
Signé : S. Barteaux
La présidente,
Signé : V. Ghisu-DeparisLa greffière,
Signé : F. Dupuy
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
F. Dupuy
N° 23NC02264 2