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17/09/2024 | FRANCE | N°23NC03073

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 4ème chambre, 17 septembre 2024, 23NC03073


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... C..., veuve B..., a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 14 avril 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2303393 du 16 août 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.





Procédure deva

nt la cour :



Par une requête enregistrée le 10 octobre 2023, Mme C..., représentée par Me Burkatzki, demande à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C..., veuve B..., a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 14 avril 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2303393 du 16 août 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 octobre 2023, Mme C..., représentée par Me Burkatzki, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 16 août 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 avril 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sous une astreinte de 150 euros par jour de retard, et de lui délivrer, dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier car il ne comporte pas la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé qu'à sa demande était tardive et l'a rejetée pour ce motif :

. elle a eu connaissance de l'arrêté litigieux du 14 avril 2022 de manière fortuite, dans le cadre d'une procédure concernant un tiers, en novembre 2022 et elle a aussitôt sollicité l'aide juridictionnelle pour le contester ;

. l'association " Entraide le Relais ", chez laquelle elle est domiciliée, n'a pas enregistré le courrier recommandé litigieux ; si un avis de passage avait été déposé à son attention, le numéro du courrier recommandé aurait été renseigné dans les registres de l'association ;

. il n'existe aucune preuve de la remise effective d'un avis de passage du facteur à son attention ;

. la circonstance que le facteur ait renseigné la mention " pli avisé et non réclamé " ne saurait emporter une présomption irréfragable de la remise d'un avis de passage à l'association puis à son intention ;

. l'attestation de l'association " Entraide Le Relais " selon laquelle elle n'a pas trace d'un tel recommandé n'a pas été " écrite pour les besoins de la cause " contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges ;

sur l'arrêté préfectoral du 14 avril 2022 :

- l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les articles L. 581-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la décision d'exécution (UE) 2022/382 du Conseil du 4 mars 2022 ; compte tenu de leur nationalité ukrainienne, elle et ses enfants doivent bénéficier de la protection temporaire prévue par ces dispositions ;

- il méconnaît le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; son fils mineur sera obligé d'interrompre sa scolarité ;

- il méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle et ses enfants sont originaires d'une province séparatiste russophone, actuellement occupée par les forces militaires russes depuis l'invasion de l'Ukraine le 24 février 2022, ou le conflit armé est particulièrement violent ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle ne pourra pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et sur celle de ses enfants.

La préfète du Bas-Rhin, à qui la procédure a été communiquée, n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., veuve B..., ressortissante ukrainienne née le 24 février 1982, déclare être entrée en France le 17 mai 2017. Sa demande d'asile a été rejetée par le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 30 novembre 2018 puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 11 juin 2019. Le 13 novembre 2019, elle a sollicité son admission au séjour en raison de son état de santé. Par arrêté du 12 mars 2021, la préfète du Bas-Rhin a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Le tribunal a annulé cet arrêté et enjoint à la préfète du Bas-Rhin de réexaminer la demande de l'intéressée par jugement du 13 juillet 2021. Le 23 juillet 2021, Mme C... veuve B... a également sollicité son admission au séjour sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 14 avril 2022, la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme C... relève appel du jugement du 16 août 2023 du tribunal administratif de Strasbourg qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté préfectoral comme irrecevable pour tardiveté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation du jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué comporte la signature du président de la formation de jugement, celle du rapporteur et celle du greffier d'audience. Dès lors, le moyen tiré de ce qu'en l'absence de ces signatures, ce jugement serait irrégulier, ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " I. Conformément aux dispositions de l'article L. 614-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification d'une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire, prise en application de l'article L. 251-1 ou des 3°, 5° ou 6° de l'article L. 611-1 du même code, fait courir un délai de trente jours pour contester cette obligation ainsi que les décisions relatives au séjour, au délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour ou à l'interdiction de circulation notifiées simultanément. (...). ".

5. Aux termes de l'article L. 614-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français prise en application des 3°, 5° ou 6° de l'article L. 611-1 est assortie d'un délai de départ volontaire, le tribunal administratif est saisi dans le délai de trente jours suivant la notification de la décision./ L'étranger peut demander le bénéfice de l'aide juridictionnelle au plus tard lors de l'introduction de sa requête en annulation. (....). ".

6. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en litige du 14 avril 2022 a été notifié à Mme C... par lettre recommandée avec accusé de réception avisée le 16 avril 2022 à l'adresse qu'elle avait déclarée à l'administration, à savoir l'adresse de l'association " Entraide Le Relais " à Strasbourg. Mme C... n'a pas récupéré le pli recommandé. L'avis de réception rattaché au pli porte la mention " avisé le 16 avril 2022 " et la case " pli avisé et non réclamé ", correspondant au motif de non-distribution, y est cochée. Pour contester ce motif de non distribution, la requérante fait valoir qu'aucun avis de passage n'a été déposé et produit pour le démontrer une attestation du 16 novembre 2022 d'un éducateur spécialisé de l'association chez laquelle elle est domiciliée. Cependant une telle attestation, réalisée plusieurs mois après le passage de la poste, se borne à préciser qu'il n'y a pas, d'après ces registres, dont les extraits utiles ne sont pas joints, trace d'un " courrier recommandé à la date du 14 avril 2022 ni à une date proche de celle-ci ". Dans ces conditions, cette seule attestation peu circonstanciée, alors que l'association n'allègue pas avoir déjà rencontré des problèmes de distribution du courrier ni avoir alerté les services postaux de telles difficultés, ne permet pas de remettre en cause les mentions apposées sur le courrier. La notification de l'arrêté doit donc être regardée comme ayant été régulièrement effectuée le 16 avril 2022. Par suite, la demande de Mme C... formée le 15 mai 2023 devant le tribunal administratif de Strasbourg et précédée d'une demande d'aide juridictionnelle du 21 novembre 2022, contre l'arrêté qui lui a été notifié le 16 avril 2022, était tardive.

7. La requérante n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande comme tardive.

8. La requête ne peut donc qu'être rejetée dans toutes ses conclusions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., veuve B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Burkatzki.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 27 août 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- Mme Guidi, présidente assesseure,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 septembre 2024.

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : N. Basso

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N. Basso

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N° 23NC03073


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC03073
Date de la décision : 17/09/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. DENIZOT
Avocat(s) : BERARD JEMOLI SANTELLI BURKATZKI BIZZARRI

Origine de la décision
Date de l'import : 22/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-09-17;23nc03073 ?
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