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23/07/2024 | FRANCE | N°24NC00395

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 23 juillet 2024, 24NC00395


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2022 par lequel le maire de Seebach lui a retiré l'ensemble de ses délégations de fonctions à l'exception des dossiers tenant à son mandat de maire déléguée de la commune de Niederseebach.



Par un jugement n° 2208536 du 21 décembre 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.



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Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 février 2024 et le 12 juin 2024, Mme B... A..., représentée pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2022 par lequel le maire de Seebach lui a retiré l'ensemble de ses délégations de fonctions à l'exception des dossiers tenant à son mandat de maire déléguée de la commune de Niederseebach.

Par un jugement n° 2208536 du 21 décembre 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 février 2024 et le 12 juin 2024, Mme B... A..., représentée par Me Maetz, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 21 décembre 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2022 par lequel le maire de Seebach lui a retiré l'ensemble de ses délégations de fonctions autres que celles tenant à son mandat de maire déléguée de la commune de Niederseebach ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Seebach la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en l'absence de signature ;

- l'arrêté contesté est entaché d'un vice de forme en l'absence de convocation du conseil municipal dans un délai raisonnable en application de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales ;

- l'arrêté n'est pas exécutoire en l'absence de transmission au préfet ;

- l'arrêté contesté est entaché d'une inexactitude matérielle et d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2024, la commune de Seebach, représentée par Me Loctin, conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Barteaux,

- les conclusions de M. Marchal, rapporteur public,

- et les observations de Me Picoche, représentant Mme A... et de Me Barbier-Renard, représentant la commune de Seebach.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... est maire déléguée de Niederseebach, commune associée à celle de Seebach, dont elle est également maire adjointe. Par un arrêté du 21 octobre 2022, le maire de la commune de Seebach a décidé de retirer à l'intéressée toutes ses délégations de fonctions à l'exception des dossiers relevant de la mairie de Niederseebach. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler cet arrêté. Par un jugement du 21 décembre 2023, dont Mme A... fait appel, le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

3. Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué a été signée par le président, par le magistrat rapporteur et par la greffière d'audience. La circonstance que la copie de ce jugement, qui a été notifiée aux parties, ne comportait pas ces signatures est sans incidence sur sa régularité. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué ne serait pas conforme aux exigences de l'article R. 741-7 du code de justice administrative manque en fait.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " I.- Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'ils ont été portés à la connaissance des intéressés dans les conditions prévues au présent article et, pour les actes mentionnés à l'article L. 2131-2, qu'il a été procédé à la transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement prévue par cet article. / Le maire peut, sous sa responsabilité, certifier le caractère exécutoire d'un acte. (...) / III.- Les actes réglementaires et les décisions ne présentant ni un caractère réglementaire, ni un caractère individuel font l'objet d'une publication sous forme électronique, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, de nature à garantir leur authenticité et à assurer leur mise à disposition du public de manière permanente et gratuite. (...)".

5. Le défaut de transmission d'un acte pris par une autorité communale au représentant de l'Etat, qui fait obstacle à ce qu'il devienne exécutoire, est sans incidence sur sa légalité. La circonstance que le maire n'a pris aucune délégation de fonctions en bonne et due forme n'est pas davantage de nature à entacher d'illégalité l'arrêté litigieux. Par suite et à supposer que Mme A... ait entendu soulever de tels moyens, ils doivent être écartés.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et à des membres du conseil municipal. (...) / Lorsque le maire a retiré les délégations qu'il avait données à un adjoint, le conseil municipal doit se prononcer sur le maintien de celui-ci dans ses fonctions ".

7. Il résulte de ces dispositions qu'il est loisible au maire d'une commune, sous réserve que sa décision ne soit pas inspirée par un motif étranger à la bonne marche de l'administration communale, de mettre un terme, à tout moment, aux délégations de fonctions qu'il avait données à l'un de ses adjoints. Dans ce cas, il est tenu de convoquer sans délai le conseil municipal afin que celui-ci se prononce sur le maintien dans ses fonctions de l'adjoint auquel il a retiré ses délégations.

8. D'une part, il résulte de ce qui a été exposé précédemment que la convocation du conseil municipal afin qu'il se prononce sur le maintien en fonction de l'adjoint auquel le maire a retiré ses délégations intervient postérieurement au retrait de la délégation de fonction. Par suite, si la requérante fait valoir que le maire n'a pas convoqué le conseil municipal dans un délai raisonnable, cette circonstance est, par-elle-même, sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté. Le moyen tiré du vice de procédure doit, dès lors, être écarté comme inopérant.

9. D'autre part, Mme A... soutient que l'arrêté en litige lui retirant toutes ses délégations de fonctions repose sur des faits matériellement inexacts et a été pris pour des motifs étrangers à la bonne marche de l'administration. Si l'intéressée, au cours de son arrêt de travail du 23 juin au 31 août 2022, n'était pas tenue, en l'absence d'accord formel de son médecin, conformément aux dispositions du dernier alinéa de l'article L. 323-6 du code de la sécurité sociale, d'exercer les fonctions de son mandat, il est constant qu'à l'issue de son congé, elle n'a pas repris les fonctions afférentes à celui-ci ni indiqué quand elle souhaitait le faire. Il ressort des pièces du dossier, notamment de courriels des 4 et 7 septembre 2022, que le secrétaire de mairie, puis le secrétaire général de mairie ont d'ailleurs demandé à l'intéressée de fournir des précisions sur sa situation. En réponse, par un courriel du 20 septembre 2022, la requérante s'est bornée à mentionner qu'elle avait progressivement repris son activité professionnelle en sollicitant un entretien avec le maire sans pour autant clarifier sa situation. Si par un courriel du 30 septembre 2022, Mme A... a refusé, à juste titre, dès lors qu'elle n'était plus en congé de maladie, de fournir au maire de Seebach un certificat d'aptitude médical avant tout entretien avec lui, elle ne justifie pour autant pas d'une reprise de ses fonctions. Les pièces du dossier, notamment un courriel du maire du 11 octobre 2022, établissent même que l'intéressée n'exerçait toujours pas, à cette date, régulièrement ses fonctions. Eu égard à sa date, la convocation à une réunion de la commission communale d'action sociale du 25 octobre 2022 produite par Mme A... n'est pas de nature à justifier de l'accomplissement de ses fonctions antérieurement à l'arrêté contesté. Quant aux attestations d'habitants de la commune, elles sont antérieures à la période en litige. En outre, dans ses écritures, la commune de Seebach se prévaut d'une dégradation des relations entre le maire et la requérante, ce que cette dernière ne conteste pas, faisant même référence à une vive altercation avec le maire au cours de l'été 2022. Les divers échanges produits au dossier entre l'intéressée et le maire de Seebach témoignent de ce climat de défiance tenant à une divergence de vue sur l'exercice de la délégation de fonction, lequel est de nature à perturber le bon fonctionnement de l'administration communale et à rompre la relation de confiance entre elle et le maire. Dans ces conditions, la décision contestée ne peut être regardée comme ayant été inspirée par des motifs étrangers à la bonne marche de l'administration communale. Il s'ensuit que les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les frais de l'instance :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Seebach, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme A... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme demandée par la commune de Seebach, au même titre.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Seebach au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Seebach.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Bauer, présidente,

- M. Meisse, premier conseiller,

- M. Barteaux, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juillet 2024.

Le rapporteur,

Signé : S. BARTEAUXLa présidente,

Signé : S. BAUERLe greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 24NC00395 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NC00395
Date de la décision : 23/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BAUER
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : SELARL CL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-23;24nc00395 ?
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