Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiées (SAS) GOLD a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge de la majoration pour manquement délibéré appliquée aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2014 et du 1er janvier au 31 juillet 2016 ainsi qu'à la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2014.
Par un jugement n° 2003087 du 28 décembre 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement les 23 février et 4 août 2022, la SAS GOLD, représentée par Me Alleki, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 28 décembre 2021 ;
2°) de prononcer la décharge de la majoration pour manquement délibéré appliquée aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2014 et du 1er janvier au 31 juillet 2016 ainsi qu'à la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la majoration pour manquement délibéré ne saurait être appliquée au rappel de taxe sur la valeur ajoutée au titre du rapprochement du chiffre d'affaires dans la mesure où la somme éludée n'est pas significative, elle n'est pas un professionnel averti et l'erreur n'a pas été répétée ;
- la majoration en raison du rappel de taxe sur la valeur ajoutée à la suite de la cession d'un terrain à bâtir n'est pas justifiée en ce qu'elle n'est pas un professionnel averti et que la somme en cause n'est pas importante ;
- la majoration assortissant la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés est infondée dans la mesure où le caractère délibéré du manquement est déduit de la seule erreur comptable.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juin 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la SAS GOLD ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mosser,
- les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique,
- et les observations de Me Steinmetz, représentant la SAS GOLD.
Considérant ce qui suit :
1. La SAS GOLD, qui exerce une double activité de société holding d'un groupe informel spécialisé dans le commerce de métaux précieux et de marchand de biens a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015, étendue au 31 juillet 2016 en matière de taxe sur la valeur ajoutée. A l'issue de ce contrôle, l'administration lui a réclamé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 juillet 2016, d'un montant de 113 267 euros en droits et 46 627 euros de pénalités, et l'a assujettie à une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2014, s'élevant à 2 031 euros en droits et 999 euros de pénalités. La société a accepté ces rehaussements mais a contesté la majoration pour manquement délibéré mise à sa charge. La société requérante relève appel du jugement du 28 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette majoration.
2. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions élevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ". L'article L. 195 A du Livre des procédures fiscales dispose que : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ". Il résulte de ces dispositions que pour établir le caractère délibéré du manquement reproché au contribuable, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt. Pour établir le caractère intentionnel du manquement du contribuable à son obligation déclarative, l'administration doit se placer au moment de la déclaration ou de la présentation de l'acte comportant l'indication des éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt.
Sur l'application de la majoration pour manquement délibéré au titre des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
3. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 19 avril 2017, que pour justifier l'application de la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration a indiqué que la SAS GOLD a volontairement minoré son chiffre d'affaires, ce qui a conduit à une insuffisance de taxe sur la valeur ajoutée collectée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2014 pour un montant de 23 267 euros. Elle a relevé à cet effet que la société requérante ne pouvait ignorer que la taxe collectée était due au même titre que les autres opérations réalisées par la société au cours de la même année et qu'elle a, en ce sens, partiellement régularisé cette insuffisance de déclaration en 2015. Contrairement à ce que soutient la société requérante, l'administration a pu, pour établir le caractère intentionnel du manquement, prendre en compte cette régularisation partielle au cours de la période contrôlée et estimer que la société avait connaissance de cette insuffisance dès la déclaration de taxe sur la valeur ajoutée en 2014. Eu égard aux éléments de fait précités et en dépit de l'absence de répétition de l'infraction sur plusieurs exercices, l'administration apporte la preuve du manquement délibéré de la société requérante à ses obligations fiscales. C'est dès lors à bon droit que la majoration de 40 %, prévue à l'article 1729 du code général des impôts lui a été infligée en raison de ce chef de rehaussement.
4. En second lieu, s'agissant de la pénalité appliquée à l'autre chef de rehaussement litigieux, l'administration a constaté qu'à la suite de la cession d'un terrain à bâtir, acquis en 2005 avec un immeuble vendu par lots entre 2005 et 2010, la SAS Gold a omis de régler la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge en application de l'article 268 du code général des impôts pour un montant de 90 000 euros. La SAS GOLD, qui ne conteste pas dans la présente instance le bien-fondé de ce chef de redressement, lequel a d'ailleurs été confirmé par l'arrêt de ce jour de la cour n° 22NC02121, se borne à faire valoir que son activité de marchand de biens n'est qu'accessoire et que la vente par lots de l'immeuble acheté en même temps que le terrain étant exonérée de taxe sur la valeur ajoutée, elle a cru à tort que la cession du terrain suivait le même régime fiscal. L'administration a, pour sa part, retenu que dans la mesure où la taxe sur la valeur ajoutée avait été facturée à l'acheteur, la société requérante qui exerce une activité de marchand de biens depuis près de trente ans à la date de la cession ne pouvait ignorer que cette taxe devait être reversée. Elle a relevé également que le terrain n'était plus comptabilisé à l'actif de la SAS GOLD ce qui illustre la volonté de la société de dissimuler cette vente. Dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les pénalités concernant le chef de rectification relatif à la taxe sur la valeur ajoutée calculée sur la marge ont été appliquées en méconnaissance de l'article 1729 précité.
Sur l'application de la majoration pour manquement délibéré au titre des rappels de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés :
5. L'administration a constaté que la société a maintenu dans ses écritures comptables de l'exercice clos en 2014 une provision d'un montant de 218 537 euros correspondant à une indemnisation consécutive à un litige relatif à une promesse de vente alors que la société été condamnée par un jugement du tribunal de grande instance du 15 décembre 2008 qui, faute d'appel, est devenu exécutoire, à verser une somme de 204 000 euros de dommages et intérêts. La dette étant ainsi devenue certaine, le service a, en conséquence, réintégré cette provision dans le résultat de l'exercice 2014 à hauteur de la différence entre son montant et la perte subie par la société, soit la somme de 13 537 euros. Pour justifier l'application de la majoration prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts à ce rehaussement, l'administration a relevé qu'en maintenant cette provision dans ses écritures alors qu'elle ne pouvait ignorer qu'elle était devenue sans objet, la SAS GOLD a sciemment minoré son résultat imposable. Ce faisant, contrairement à ce que soutient la société requérante, l'administration démontre l'intention délibérée d'éluder l'impôt justifiant l'application de la majoration sanctionnant un manquement délibéré.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS GOLD n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée dans toutes ses conclusions y compris celles sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SAS GOLD est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS GOLD et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 20 juin 2024, à laquelle siégeaient :
M. Martinez, président de chambre,
M. Agnel, vice-président,
Mme Mosser, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 juillet 2024.
La rapporteure,
Signé : C. Mosser Le président,
Signé : J. Martinez
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
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N° 22NC00481