La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/07/2024 | FRANCE | N°23NC02583

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 1ère chambre, 05 juillet 2024, 23NC02583


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 22 mars 2023 par lequel la préfète de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait susceptible d'être éloigné en cas d'exécution contrainte, d'enjoindre à la préfète de l'Aube de lui délivrer une carte de séjour temporaire.



Par un jugement n° 2300873 du 13 juillet 2023, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejet...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 22 mars 2023 par lequel la préfète de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait susceptible d'être éloigné en cas d'exécution contrainte, d'enjoindre à la préfète de l'Aube de lui délivrer une carte de séjour temporaire.

Par un jugement n° 2300873 du 13 juillet 2023, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 3 août 2023 et 15 novembre 2023,

M. A..., représenté par Me Lombardi, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 mars 2023 ;

3°) de lui octroyer un titre de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- il a été pris en méconnaissance de son droit d'être entendu protégé par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il fait preuve d'une insertion scolaire et bénéficie d'une aide financière pour poursuivre sa scolarité ;

- sa famille ne peut pas retourner dans son pays d'origine ;

- il peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 422-1 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 novembre 2023, la préfète de l'Aube, représentée par Me Ancelet, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. A... une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Peton, première conseillère,

- et les observations de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant kosovar né en 2001, déclare être entré en France le 7 septembre 2017 accompagné de ses parents. Le 15 septembre 2022, il a sollicité de la préfète de l'Aube son admission au séjour en se prévalant de sa qualité d'étudiant et sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 22 mars 2023, la préfète de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait susceptible d'être éloigné. M. A... relève appel du jugement du 13 juillet 2023, par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 22 mars 2023 :

2. Aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" d'une durée inférieure ou égale à un an (...) ".

3. Il ressort des termes de l'arrêté contesté que la préfète de l'Aube a refusé de délivrer une carte de séjour portant la mention " étudiant " à M. A... au motif qu'il ne dispose d'aucune source de revenu. Il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A... a suivi un parcours scolaire régulier depuis son entrée sur le territoire français. A cet effet, il a obtenu son baccalauréat en juillet 2021 puis a poursuivi ses études en bachelor universitaire de technologie mention " techniques de commercialisation ". Il a ainsi obtenu le diplôme universitaire de technologie au titre de l'année 2022-2023 et est inscrit en troisième année de licence au titre de l'année universitaire 2023-2024. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que M. A... reçoit régulièrement une aide financière afin de payer les transports lui permettant de se rendre à la faculté et bénéficie, depuis le 7 novembre 2023 d'un contrat d'apprentissage au titre duquel il perçoit une rémunération mensuelle de 1 389 euros. En conséquence et alors même que ce contrat est postérieur à la décision en litige, M. A... est fondé à soutenir que la préfète de l'Aube, en considérant que son parcours scolaire était moyen et qu'il ne disposait d'aucune source de revenus, a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

4. Par suite, M. A... est fondé à demander l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour et il y a lieu, par voie de conséquence d'annuler les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.

5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 mars 2023.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Eu égard au motif d'annulation du refus de titre de séjour ci-dessus retenu et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que cette autorité délivre à M. A... un titre de séjour " étudiant ", dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais d'instance :

7. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sous réserve que Me Lombardi, avocate de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Lombardi d'une somme de 800 euros. Les conclusions présentées par la préfète de l'Aube sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent en revanche être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2300873 du 13 juillet 2023 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et l'arrêté du 22 mars 2023 par lequel la préfète de l'Aube a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A... sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la préfète de l'Aube de délivrer à M. A... un titre de séjour portant la mention " étudiant " dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Lombardi une somme de 800 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Lombardi renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Les conclusions présentées par la préfète de l'Aube sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Lombardi et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Aube.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- M. Sibileau, premier conseiller,

- Mme Peton, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 juillet 2024.

La rapporteure,

Signé : N. PetonLe président,

Signé : M. Wallerich

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

V. Firmery

2

N° 23NC02583


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NC02583
Date de la décision : 05/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: Mme Nolwenn PETON
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : LOMBARDI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-05;23nc02583 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award