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02/07/2024 | FRANCE | N°23NC01088

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 02 juillet 2024, 23NC01088


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 20 janvier 2022 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné à l'issue de ce délai.



Par un jugement n° 2201059 du 23 juin 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa de

mande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 4 avril 2023, M. ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 20 janvier 2022 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 2201059 du 23 juin 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 avril 2023, M. A..., représenté par Me Martin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 juin 2022 du tribunal administratif de Nancy ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 janvier 2022 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné à l'issue de ce délai ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", avec autorisation de travailler ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté est entaché d'incompétence de l'auteur de l'acte.

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

- le jugement et la décision attaquée sont entachés d'une erreur d'appréciation quant à l'authenticité des documents justifiant de son état civil et de sa nationalité ;

- la police des frontières a outrepassé ses compétences en émettant un avis juridique sur les documents d'état civil qu'il a présentés ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation personnelle et s'est cru en situation de compétence liée par l'avis de la police aux frontières ; en cas de doute, il aurait pu consulter les autorités guinéennes en France sur la validité de ces documents ;

- la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article L. 423-22 du même code ;

- la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'illégalité par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 mai 2023, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 février 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code civil ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 ;

- le décret n° 2020-1370 du 10 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Bauer a été entendu au cours de l'audience publique.

Une note en délibéré, présentée pour M. A..., a été enregistrée le 17 juin 2024.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen né le 3 juin 2003, est entré en France en novembre 2018, selon ses déclarations. Par un jugement du 16 janvier 2019 du juge des enfants près le tribunal de grande instance de Nancy, il a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance jusqu'à sa majorité. Le 2 juin 2021, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Par un arrêté du 20 janvier 2022, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de destination. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 23 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de cet arrêté.

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré du défaut d'examen sérieux de la situation de M. A... par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou s'il entre dans les prévisions de l'article L. 421-35, l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance ou à un tiers digne de confiance au plus tard le jour de ses seize ans se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite, de la nature des liens de l'étranger avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur son insertion dans la société française ".

4. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour de plein droit portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entre dans les prévisions de l'article L. 421-35 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance. Si ces conditions sont remplies, il ne peut alors refuser la délivrance du titre qu'en raison de la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française.

5. Aux termes des dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente 1° les documents justifiant de son état civil 2° les documents justifiant de sa nationalité (...) ". Selon l'article L. 811-2 de ce code : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies à l'article 47 du code civil ". L'article 47 du code civil dispose que : " Tout acte de l'état civil (...) des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".

6. Le II de l'article 16 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme de la justice, dans sa version applicable à la date de la décision attaquée, dispose que : " Sauf engagement international contraire, tout acte public établi par une autorité étrangère et destiné à être produit en France doit être légalisé pour y produire effet. La légalisation est la formalité par laquelle est attestée la véracité de la signature, la qualité en laquelle le signataire de l'acte a agi et, le cas échéant, l'identité du sceau ou timbre dont cet acte est revêtu. Un décret en Conseil d'Etat précise les actes publics concernés par le présent II et fixe les modalités de la légalisation ". Aux termes de l'article 3 du décret n° 2020-1370 du 10 novembre 2020 relatif à la légalisation des actes publics établis par une autorité étrangère, applicable à la date de la décision attaquée : " I. - L'ambassadeur ou le chef de poste consulaire français peut légaliser : 1° Les actes publics émis par les autorités de son Etat de résidence, légalisés le cas échéant par l'autorité compétente de cet Etat ". Aux termes de l'article 4 du même décret : " Par dérogation au 1° du I de l'article 3, peuvent être produits en France ou devant un ambassadeur ou chef de poste consulaire français :1° Les actes publics émis par les autorités de l'Etat de résidence dans des conditions qui ne permettent manifestement pas à l'ambassadeur ou au chef de poste consulaire français d'en assurer la légalisation, sous réserve que ces actes aient été légalisés par l'ambassadeur ou le chef de poste consulaire de cet Etat en résidence en France. Le ministre des affaires étrangères rend publique la liste des Etats concernés ".

7. Les dispositions citées plus haut de l'article 47 du code civil posent une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère. Cependant, la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, y compris celle d'un acte ayant fait l'objet d'une légalisation, qui se borne à attester de sa régularité formelle, peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. Par suite, en cas de contestation de la valeur probante d'un acte d'état civil légalisé établi à l'étranger, il revient au juge administratif de former sa conviction en se fondant sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. A la condition que l'acte d'état civil étranger soumis à l'obligation de légalisation et produit à titre de preuve devant l'autorité administrative ou devant le juge présente des garanties suffisantes d'authenticité, l'absence ou l'irrégularité de sa légalisation ne fait pas obstacle à ce que puissent être prises en considération les énonciations qu'il contient. En particulier, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'admission au séjour sur le fondement de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il appartient à l'autorité administrative d'y répondre, sous le contrôle du juge, au vu de tous les éléments disponibles, dont les évaluations des services départementaux et les mesures d'assistance éducative prononcées, le cas échéant, par le juge judiciaire, sans exclure, au motif qu'ils ne seraient pas légalisés dans les formes requises, les actes d'état civil étrangers justifiant de l'identité et de l'âge du demandeur. Ce faisant, il appartient également d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.

8. Pour refuser la délivrance d'un titre de séjour à M. A..., le préfet de

Meurthe-et-Moselle a considéré que l'intéressé ne justifiait pas de son âge et ne démontrait pas avoir été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et celui de dix-huit ans. Le requérant a produit, à l'appui de sa demande de titre de séjour, un extrait conforme d'un jugement n° 5044 du 16 novembre 2018 rendu par le tribunal de première instance de Kindia (Guinée) tenant lieu d'acte de naissance, l'extrait du registre d'état-civil n° 4748 du 28 novembre 2018 portant transcription de ce jugement, un certificat de nationalité n° 756, du 30 novembre 2020 émis par le président du tribunal de première instance de Kindia et, enfin, une carte d'identité consulaire délivrée par l'ambassade de Guinée en France. Un rapport d'examen technique documentaire de la cellule de la fraude documentaire de la direction zonale de la police aux frontières de la zone Est du 10 décembre 2021 a relevé que ces documents comportaient plusieurs anomalies de nature à établir leur caractère frauduleux. Le préfet a valablement pu s'approprier l'appréciation de ce service dont la mission consiste précisément à donner un avis sur le caractère authentique ou frauduleux des documents d'état-civil qui lui sont présentés.

9. S'agissant du jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance, s'il est relevé que ce dernier a été imprimé au toner, technique d'impression bon marché et accessible au public, sur du papier ordinaire dépourvu de sécurité, et que les tampons humides présentent des irrégularités et un aspect artisanal anormaux, ces seules circonstances, faute de précisions et de comparaison avec des documents officiels émanant des autorités guinéennes et réputés conformes, ne suffisent pas à démontrer que le jugement produit serait falsifié. Il est également fait état de l'absence des mentions et du respect des procédures prévues aux articles 115, 116, 119 du code de procédure civile, économique et administrative guinéen. A supposer que ces dispositions soient applicables aux jugements supplétifs tenant lieu d'acte de naissance, les erreurs et omissions matérielles affectant un jugement n'emportent pas nécessairement son irrégularité. La mention dans le jugement des voies et délais de recours n'est pas requise par les articles 557, 601, 602 et 606 du même code. S'agissant par ailleurs du non-respect allégué de la procédure de convocation des témoins dans le cadre d'une enquête ordinaire prévue par les articles 331, 332, 333 du même code, il ressort des mentions du jugement supplétif que l'enquête a été réalisée à la barre par l'audition de deux témoins, procédure prévue par l'article 334 qui n'exige le respect d'aucune règle particulière de procédure.

10. En revanche, le rapport d'analyse documentaire relève également que ce jugement supplétif aurait été rendu sur la demande présentée le 15 novembre 2018 par M. B... A..., père du requérant, alors qu'il ressort par ailleurs des déclarations de l'intéressé et des pièces du dossier que son père est décédé le 15 janvier 2017. Ainsi que l'a relevé à bon droit le tribunal, cette circonstance est de nature à renverser la présomption de validité qui s'attache aux mentions de cet acte en application de l'article 47 du code civil. Le requérant ne saurait utilement contester l'absence de force probante de ce document en soutenant qu'il serait " usuel en Guinée d'établir un jugement supplétif d'acte de naissance à la requête d'un des parents alors même que ce dernier serait décédé ".

11. Par ailleurs, les autres documents produits par M. A... ont tous été délivrés sur le fondement du jugement supplétif dont la force probante n'est pas établie, de sorte qu'ils ne permettent pas davantage d'établir son état civil, alors en tout état de cause que le certificat de nationalité et la carte d'identité consulaire ne constituent pas des actes d'état civil de nature à justifier de la réalité de la date de naissance de l'intéressé. En outre, si le préfet de

Meurthe-et-Moselle n'a pas sollicité les autorités consulaires guinéennes pour une vérification de l'état civil de M. A..., il ne ressort d'aucune disposition législative ou règlementaire que le préfet serait tenu de saisir les autorités étrangères d'une demande de vérification de l'authenticité des documents d'état civil qui sont présentés devant lui. Dans ces conditions, le préfet n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article 47 du code civil en estimant que les actes d'état civil fournis par le requérant étaient dépourvus de valeur probante.

12. Le requérant ne justifiant pas avoir été confié au service de l'aide sociale à l'enfance avant l'âge de seize ans, le préfet a pu, sur ce seul motif, refuser le titre de séjour sollicité. Si M. A... se prévaut de son investissement dans ses études et de ses perspectives d'intégration professionnelle, ces éléments ne sont pas de nature à remettre en cause la légalité de la décision contestée. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit au regard de l'article L. 423-22 précité doit être écarté.

13. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. (...) ". Il appartient à l'autorité administrative, en application de ces dispositions, de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention "vie privée et familiale" répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire".

14. Il ressort des pièces du dossier qu'à son arrivée en France, M. A... a intégré un lycée des métiers du bâtiment et des travaux publics et a été scolarisé en terminale dans la spécialité de " technicien de maintenance en systèmes énergétiques et climatiques ". S'il soutient qu'il est investi dans sa formation, a réalisé plusieurs stages en entreprises et a noué des attaches amicales en France, ces circonstances ne constituent toutefois ni une considération humanitaire ni un motif exceptionnel d'admission au séjour au sens des dispositions précitées. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

15. En quatrième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

16. Il ressort des pièces du dossier que le séjour en France de M. A... est récent, qu'il est célibataire et sans charge de famille et qu'il entretient toujours des relations avec sa mère restée en Guinée. La circonstance qu'il soit investi dans ses études et qu'il ait noué des relations amicales sur le territoire français ne suffisent pas à établir que la décision portant refus de titre de séjour a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les dispositions et les stipulations précitées, ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard du pouvoir de régularisation à titre exceptionnel qui appartient au préfet.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

17. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté.

18. Pour les mêmes motifs que ceux qui sont exposés au point 16, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations susmentionnées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation dont la décision attaquée serait entachée au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé doit être écarté.

19. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 23 juin 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté attaqué. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles à fin d'injonction et tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de Meurthe-et-Moselle.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2024, à laquelle siégeaient :

M. Wurtz, président,

Mme Bauer, présidente-assesseure,

M. Barteaux, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juillet 2024.

La rapporteure,

Signé : S. BAUER Le président,

Signé : Ch. WURTZ

Le greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

F. LORRAIN

N° 23NC01088 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC01088
Date de la décision : 02/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme Sandra BAUER
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : MARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-02;23nc01088 ?
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