Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 7 novembre 2022 par lequel le préfet de la Marne l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2202639 et 2202641 du 29 décembre 2022, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée sous le n° 23NC02328 le 18 juillet 2023, Mme B..., représentée par Me Lehmann, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
2°) d'annuler l'arrêté du 7 novembre 2022 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- le préfet n'a pas examiné sa situation personnelle et aurait dû saisir l'autorité médicale pour avis avant toute mesure d'éloignement en application des dispositions des articles L. 425-9 et L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté est contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision méconnait les dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'état de santé de son enfant mineur.
La procédure a été communiquée au préfet de la Marne qui n'a pas produit de défense.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 juin 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Peton, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., de nationalité géorgienne, déclare être entrée sur le territoire français le 22 janvier 2022. Elle a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile en raison de craintes en cas de retour dans son pays d'origine. Sa demande d'asile a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 27 juillet 2022. Par arrêté du 7 novembre 2022, le préfet de la Marne l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme B... relève appel du jugement du 29 décembre 2022, par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, la décision en litige mentionne les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les éléments de fait relatifs à la situation personnelle de Mme B... dont les éléments retenus par la décision de l'OFPRA. Par suite, cette décision est suffisamment motivée en droit comme en fait et le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque en fait et doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable (...) ". Mme B... soutient que les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues en se prévalant de l'état de santé de son enfant. Toutefois, un tel moyen est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Toutefois, il est constant que l'arrêté en litige a été pris à la suite du rejet de la demande d'asile de Mme B... laquelle n'a pas sollicité son admission au séjour pour des raisons médicales. En conséquence le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté et le préfet de la Marne a suffisamment examiné la situation personnelle de l'intéressée.
5. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Mme B..., est entrée en France le 22 janvier 2022 et ne justifie pas de l'existence de liens personnels ou familiaux intenses et stables sur le territoire français. Il ressort des pièces du dossier que son conjoint fait également l'objet d'une mesure d'éloignement et qu'ils peuvent dès lors reconstituer leur cellule familiale en dehors du territoire français. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que cet arrêté a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris et méconnaîtrait ainsi l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. En dernier lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Par ailleurs, si Mme B... peut se prévaloir de ces stipulations à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile au motif que les faits allégués n'étaient pas établis et la requérante n'apporte aucun élément permettant d'établir la réalité des craintes dont elle se prévaut. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée dans toutes ses conclusions y compris celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Marne.
Délibéré après l'audience du 6 juin 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Guidi, présidente,
- M. Sibileau, premier conseiller,
- Mme Peton, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 juin 2024.
La rapporteure,
Signé : N. PetonLa présidente,
Signé : L. Guidi
La greffière,
Signé : S. Robinet
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
S. Robinet
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N° 23NC02328