Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2021 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et lui a interdit le retour en France pendant deux ans.
Par un jugement n° 2107384 du 7 janvier 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 27 janvier et 6 février 2023, M. D... A..., représenté par Me Thalinger, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2107384 du tribunal administratif de Strasbourg du 7 janvier 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 26 octobre 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer le titre de séjour sollicité ou, à défaut, de réexaminer sa situation, sous astreinte de cent cinquante-cinq euros par jour de retard, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relatif à l'aide juridique.
Il soutient que :
- la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation, dès lors que le préfet du Haut-Rhin n'a pas examiné s'il pouvait bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour en application des stipulations du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, relatif à la gestion concertées des flux migratoires entre la France et le Sénégal, tel que modifié par l'avenant à cet accord du 25 février 2008, et qu'il n'a pas pris en considération le fait que l'emploi d'agent d'entretien, pour l'occupation duquel il a reçu une proposition de recrutement, fait partie de la liste des métiers sous tension au sens de l'annexe IV de cet accord ;
- la décision en litige, en tant qu'elle refuse de l'admettre exceptionnellement au séjour au titre de la vie privée et familiale, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du premier alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision, en tant qu'elle refuse de l'admettre exceptionnellement au séjour au titre du travail, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, tel que modifié par l'avenant du 25 février 2008, et des dispositions du premier alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard du pouvoir discrétionnaire du préfet de régularisation à titre exceptionnel ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été signée par une autorité incompétente ;
- la décision en litige est insuffisamment motivée ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire a été prise par une autorité incompétente ;
- la décision en litige est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- cette décision est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant interdiction de retour en France pendant deux ans a été prise par une autorité incompétente ;
- la décision en litige est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire ;
- cette décision est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet du Haut-Rhin a commis une erreur d'appréciation en fixant à deux ans la durée de l'interdiction de retour, laquelle est disproportionnée au regard de sa situation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mars 2023, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 décembre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre la France et le Sénégal, tel que modifié par l'avenant à cet accord du 25 février 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Meisse a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... A... est un ressortissant sénégalais, né le 19 mars 1999. Il a déclaré être entré irrégulièrement en France, le 26 août 2016. Se prévalant de sa qualité de mineur non accompagné, il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance
du Haut-Rhin jusqu'à sa majorité. A la suite de son interpellation, le 11 avril 2019, par les services de la police aux frontières de Dijon et de son placement en retenue administrative pour vérification de son droit au séjour, le préfet de la Côte-d'Or a prononcé à son encontre, le jour même, une obligation de quitter sans délai le territoire français à laquelle il n'a pas déféré. Une demande de délivrance de titre de séjour en qualité de jeune majeur, présentée par l'intéressé le 20 mai 2019, ayant été rejetée par le préfet du Haut-Rhin, le requérant a été invité, les 5 juillet et 6 décembre 2019, à se conformer à cette mesure d'éloignement. S'étant maintenu irrégulièrement sur le territoire français, il a sollicité, le 16 juin 2021, son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 26 octobre 2021, le préfet du Haut-Rhin a refusé de faire droit à cette demande, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et lui a interdit le retour en France pendant deux ans. M. A... a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 26 octobre 2021. Il relève appel du jugement du 7 janvier 2022, qui rejette sa demande.
Sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 110-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le présent code régit, sous réserve du droit de l'Union européenne et des conventions internationales, l'entrée, le séjour et l'éloignement des étrangers en France ainsi que l'exercice du droit d'asile. ". Aux termes de troisième alinéa du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, relatif à la gestion concertées des flux migratoires entre la France et le Sénégal, dans sa rédaction issue du point 31 de l'article 3 de l'avenant signé le 25 février 2008 : " Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : - soit la mention "salarié" s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail ; - soit la mention "vie privée et familiale" s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels. ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. ".
3. Les stipulations du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue de l'avenant signé le 25 février 2008, renvoyant à la législation française en matière d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants sénégalais en situation irrégulière rendent applicables à ces ressortissants les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par un ressortissant sénégalais en situation irrégulière, est conduit, par l'effet de l'accord du 23 septembre 2006 modifié, à faire application des dispositions de l'article L. 435-1 de ce code.
4. D'une part, il ne résulte, ni des motifs de la décision en litige, ni d'aucune des autres pièces du dossier, que le préfet du Haut-Rhin se serait abstenu de procéder à un examen particulier et circonstancié de la situation de M. A... avant de lui opposer un refus de délivrance de titre de séjour. Eu égard à ce qui a été dit au point précédent, la circonstance que la demande d'admission exceptionnelle au séjour de l'intéressé n'ait pas été examinée au regard des stipulations du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue de l'avenant signé le 25 février 2008, ainsi que de l'annexe IV à laquelle elles renvoient, n'est pas de nature à caractériser un tel défaut d'examen. De même, le requérant ne saurait utilement soutenir que l'emploi d'agent d'entretien, pour l'occupation duquel il a reçu une proposition de recrutement, fait partie de la liste des métiers sous tension au sens de l'annexe IV de cet accord.
5. D'autre part, M. A... ne saurait utilement soutenir que la décision en litige, en tant qu'elle refuse de lui délivrer un titre de séjour au titre du travail, serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue de l'avenant signé le 25 février 2008, ainsi que de l'annexe IV à laquelle elles renvoient. Un tel moyen doit être écarté comme inopérant.
6. En deuxième lieu, en présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 431-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.
7. M. A... se prévaut de son arrivée en France, le 26 août 2016, alors qu'il était encore mineur, de la durée de sa présence sur le territoire français, de son parcours scolaire et de ses perspectives d'intégration professionnelle. Il fait notamment valoir qu'il a conclu avec le département du Haut-Rhin un contrat jeune majeur jusqu'au 31 août 2019, qu'il a obtenu un diplôme d'études en langue française de niveau A2 en mai 2017, un certificat d'aptitude professionnelle d'employé de vente spécialisé le 3 octobre 2018 et un brevet d'études professionnelles " Hygiène et propreté " le 29 septembre 2020, enfin, qu'il a accompli plusieurs stages en entreprise dans le domaine de l'hygiène et de la propreté au cours desquels il a donné satisfaction. Il souligne également être destinataire d'une proposition de recrutement, le 8 septembre 2021, en vue de l'occupation d'un emploi d'agent d'entretien sur la base d'un contrat aidé de dix mois et à raison de vingt heures de travail hebdomadaires. Toutefois, alors que l'intéressé est célibataire et sans charge de famille, qu'il s'est soustrait à une mesure d'éloignement prise à son encontre le 11 avril 2019, qu'il ne possède aucune attache familiale en France, qu'il ne démontre pas, nonobstant les attestions versées au débats, y avoir tissé des liens personnels forts et qu'il n'est pas isolé dans son pays d'origine, où vivent ses parents, son frère et ses sœurs, il ne ressort pas des pièces que l'admission au séjour du requérant répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard de motifs exceptionnels qu'il aurait fait valoir. S'il est vrai que M. A... a été embauché, le 15 novembre 2021, par une entreprise de Mulhouse de débarras et de désinfection et qu'il y travaille, depuis le 17 février 2022, en contrat à durée indéterminée, ces circonstances sont, en tout état de cause, postérieures à la décision en litige et, partant, sans incidence sur sa légalité. Dans ces conditions, le préfet du Haut-Rhin n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard du premier alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de délivrer au requérant un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions. Par suite, le moyen invoqué en ce sens doit être écarté.
8. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
9. Eu égard aux circonstances qui ont été analysées au point 7 du présent arrêt, il y a lieu d'écarter les moyens tirés respectivement de ce que la décision en litige méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation de M. A... au regard du pouvoir discrétionnaire de régularisation du préfet à titre exceptionnel.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
10. En premier lieu, au regard des circonstances de fait précédemment rappelées, il y a lieu d'écarter les moyens tirés respectivement de ce que la décision en litige méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences au regard de la situation personnelle de M. A....
11. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en litige a été signée, " pour le préfet et par délégation ", par Mme C... B..., cheffe du bureau de l'admission au séjour. Or, par un arrêté du 6 septembre 2021, régulièrement publié le même jour au recueil n° 71 des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Haut-Rhin a consenti à Mme B... une délégation de signature à l'effet de signer notamment, dans le cadre de ses attributions et compétences, les décisions portant refus de séjour et fixant le pays de renvoi d'un étranger en situation irrégulière, les obligations de quitter le territoire, les refus d'accorder un délai de départ volontaire et les interdictions de retour sur le territoire français. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait et il ne peut, dès lors, qu'être écarté.
12. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ". Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour (...). ". Aux termes de l'article L. 613-1 du même code : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. (...) ".
13. Il ressort des dispositions de de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'obligation de quitter le territoire français contestée, édictée sur le fondement du 3° de l'article L. 611-1 du même code, n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour. Il n'est pas contesté que cette dernière énonce, dans ses visas et motifs, les considérations de droit et de fait, qui en constituent le fondement, et qu'elle est suffisamment motivée au regard des exigences de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Dans ces conditions, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté comme manquant en fait.
Sur la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :
14. En premier lieu, au regard des circonstances de fait précédemment exposées, il y a lieu d'écarter les moyens tirés respectivement de ce que la décision en litige aurait été prise par une autorité incompétente et de ce qu'elle serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
15. En second lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. ". Aux termes de L. 612-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) ".
16. Contrairement aux allégations de M. A..., l'enregistrement et l'examen par l'administration de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, déposée le 16 juin 2021, sans délivrance du récépissé prévu à l'article R. 431-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peuvent être regardés comme ayant eu pour effet d'abroger implicitement, ni à plus forte raison de retirer, l'obligation de quitter le territoire français pris à son encontre par le préfet de la Côte-d'Or le 11 avril 2019. Il est constant que le requérant s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement, malgré les courriers du préfet du Haut-Rhin des 5 juillet et 6 décembre 2019 l'invitant à s'y conformer. Le requérant n'invoque par ailleurs aucun élément susceptible de caractériser une circonstance particulière, au sens de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, en estimant qu'il existait un risque que l'intéressé ne défère pas à la décision portant obligation de quitter le territoire français, dont il fait actuellement l'objet, et en refusant de lui accorder pour ce motif un délai de départ volontaire, le préfet du Haut-Rhin n'a pas commis d'erreur de droit, ni erreur d'appréciation. Par suite ces deux moyens doivent être écartés.
Sur la décision portant interdiction de retour en France de deux ans :
17. En premier lieu, compte tenu de ce qui précède, il y a lieu d'écarter les moyens tirés respectivement de ce que la décision en litige aurait été prise par une autorité incompétente et de ce qu'elle serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire.
18. En second lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".
19. Il est constant qu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à M. A.... Le préfet avait donc vocation à lui interdire le retour sur le territoire français, sous réserve de circonstances humanitaires, qui ne sont pas, en l'état, caractérisées. La durée de l'interdiction, fixée en l'espèce à deux ans, n'est pas excessive au regard de la durée du séjour en France de M. A..., de la nature des liens privés qu'il y a noués, de l'absence de liens familiaux et de la précédente mesure d'éloignement dont il a fait l'objet, alors même qu'il ne représente pas une menace pour l'ordre public. Dans ces conditions, en interdisant à l'intéressé le retour sur le territoire français et en fixant à deux ans la durée de cette interdiction, le préfet du Haut-Rhin n'a pas commis d'erreur de droit, ni d'erreur d'appréciation. Par suite, ces deux moyens ne peuvent être accueillis.
20. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 26 octobre 2021, ni à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et ses conclusions à fin d'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
Délibéré après l'audience du 23 mai 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Samson-Dye, présidente,
- M. Meisse, premier conseiller,
- Mme Stenger, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2024.
Le rapporteur,
Signé : E. Meisse
La présidente,
Signé : A. Samson-Dye
La greffière,
Signé : S. Blaise
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière :
S. Blaise
N° 23NC00288 2