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28/05/2024 | FRANCE | N°23NC01684

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 4ème chambre, 28 mai 2024, 23NC01684


Vu les autres pièces du dossier.



Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.





La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer...

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant algérien né le 23 décembre 1984, entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, en 2009, a fait l'objet, le 10 juin 2018, d'un arrêté portant obligation de quitter sans délai le territoire français et interdiction de retour pour une durée de deux ans pris par le préfet des Bouches-du-Rhône. Le 21 septembre 2020, M. D... a déposé une demande de titre de séjour en faisant valoir sa vie commune avec Mme B... A... ainsi que la naissance de son enfant de nationalité française, le 24 juillet 2020. Par un arrêté du 26 novembre 2020, le préfet du Doubs l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur ce territoire pour une durée d'un an. Le recours de l'intéressé contre cet arrêté a été rejeté par un jugement du 4 décembre 2020 du tribunal administratif de Besançon. M. D..., qui n'a pas exécuté ces décisions, a, de nouveau, sollicité la régularisation de sa situation le 24 mai 2022, en qualité de parent d'un enfant français. Le requérant a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande de titre de séjour, née du silence de l'administration. Par un arrêté du 20 janvier 2023, le préfet du Doubs a pris à son encontre un arrêté portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination. Le tribunal administratif de Besançon, après avoir regardé les conclusions à fin d'annulation de M. D... comme devant être dirigées contre cet arrêté préfectoral du 20 janvier 2023, a rejeté sa demande. M. D... relève appel de ce jugement du 4 mai 2023 du tribunal administratif de Besançon en tant que celui-ci a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté préfectoral du 20 janvier 2023.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 4) Au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".

3. Les stipulations précitées ne privent pas l'autorité compétente du pouvoir qui lui appartient de refuser à un ressortissant algérien la délivrance du certificat de résidence d'un an lorsque sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public.

4. Il ressort des termes de l'arrêté préfectoral litigieux du 20 janvier 2023, lequel vise l'article 6-4 de l'accord franco-algérien et l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le préfet du Doubs, après avoir saisi pour avis la commission du titre de séjour, laquelle s'est réunie le 7 décembre 2022 et a émis un avis défavorable à la délivrance d'un certificat de résidence à l'intéressé, a refusé le séjour au requérant au motif que le comportement de celui-ci est constitutif d'une menace pour l'ordre public.

5. En premier lieu, les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entré et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont le préfet du Doubs a fait application à la situation de M. D..., ne s'appliquent pas aux ressortissants algériens, dont la situation est régie de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

6. Toutefois, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. Une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point.

7. En l'espèce, le refus de titre de séjour contesté trouve son fondement légal dans les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien précité qui peuvent être substituées aux dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cette substitution de base légale n'a pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie. Par ailleurs, l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer ces dispositions et ces stipulations.

8. Il ressort des pièces du dossier que le requérant est père d'un enfant âgé de deux ans et vit en concubinage depuis 2019 avec la mère de celui-ci, qui a eu trois enfants d'une précédente union. Il a fait l'objet d'une part, d'une condamnation d'un an et dix mois d'emprisonnement avec sursis, prononcée le 27 mars 2019 par le tribunal correctionnel de Marseille pour " port sans motif légitime d'arme blanche ou incapacitante de catégorie D ", " violation de domicile " et " violence aggravée par trois circonstances suivie d'incapacité n'excédant pas huit jours, par conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, avec usage ou menace d'une arme, sur une personne dont la particulière vulnérabilité est apparente ou connue de l'auteur " et, d'autre part, d'une condamnation de quatre mois d'emprisonnement en révocation du sursis prononcé, par un jugement du tribunal correctionnel de Besançon du 4 mars 2021 pour " violence sans incapacité, en présence d'un mineur ", sur sa concubine. La circonstance qu'il consulte désormais un psychologue dans le cadre de son sursis probatoire et qu'il ait suivi un stage de responsabilité parentale est sans incidence sur le comportement violent du requérant qui constitue une menace réelle actuelle et suffisamment grave pour l'ordre public, à la date de l'arrêté litigieux. Dans ces conditions, le préfet pouvait dès lors, légalement refuser de lui délivrer, sur ce motif, le titre de séjour sollicité sans méconnaître les stipulations de l'article 6-4 et de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien.

9. Compte tenu des éléments exposés précédemment, l'arrêté préfectoral du 20 janvier 2023 ne porte pas au droit au respect de la vie privée et familiale du requérant une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

10. Enfin, le moyen tiré de ce qu'il ne présenterait pas une menace à l'ordre public est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, laquelle a été prise sur le fondement du 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est que la conséquence de la décision portant refus de titre de séjour.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Hakkar.

Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Doubs.

Délibéré après l'audience du 7 mai 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Samson-Dye, présidente,

- Mme Roussaux, première conseillère,

- M. Denizot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mai 2024.

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLa présidente,

Signé : A. Samson-Dye

La greffière,

Signé : F. Dupuy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

F. Dupuy

2

N° 23NC01684


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC01684
Date de la décision : 28/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme SAMSON-DYE
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : HAKKAR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-28;23nc01684 ?
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