La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/05/2024 | FRANCE | N°23NC01467

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 1ère chambre, 16 mai 2024, 23NC01467


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2022 par lequel le préfet de la Marne lui a refusé le séjour, l'a obligé à quitter le territoire et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2202985 du 28 mars 2023, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ce recours.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 1

1 mai 2023, M. B..., représenté par Me Boia, demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2022 par lequel le préfet de la Marne lui a refusé le séjour, l'a obligé à quitter le territoire et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2202985 du 28 mars 2023, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ce recours.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 mai 2023, M. B..., représenté par Me Boia, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 28 mars 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2022 par lequel le préfet de la Marne lui a refusé le séjour, l'a obligé à quitter le territoire et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer un titre de séjour " recherche d'emploi - création d'entreprise " dans un délai d'un mois suivant l'arrêt à intervenir et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, moyennant la renonciation de son avocat à percevoir la contribution versée par l'État au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

s'agissant de la régularité du jugement :

- les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de ce qu'il ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dans la mesure où il pouvait bénéficier d'un titre de séjour de plein droit ;

- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré par exception de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

s'agissant du refus de titre de séjour :

- le préfet de la Marne aurait dû lui délivrer un titre de séjour de plein droit sur le fondement de l'article L. 422-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité affectant le refus de titre de séjour ;

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 2 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sibileau, premier conseiller,

- et les observations de Me Boia, pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., ressortissant tchadien né le 7 août 1998, est entré en France le 3 octobre 2016 muni d'un visa de long séjour portant la mention étudiant. Il a bénéficié d'un titre de séjour en cette qualité jusqu'au 26 septembre 2022. Par un arrêté du 24 novembre 2022 le préfet de la Marne lui a refusé le séjour et l'a obligé à quitter le territoire français. M. A... relève appel du jugement du 28 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 24 novembre 2022.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. M. A... soutient que le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de ce que le préfet s'était illégalement abstenu d'apprécier son droit au séjour à l'aune de l'article L. 422-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, les premiers juges ont répondu à ce moyen, au point 4 du jugement, en relevant que l'intéressé n'avait pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement.

3. M. A... soutient également que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré par exception de l'illégalité du refus de titre de séjour et dirigé contre le refus de titre de séjour. Toutefois, le tribunal a écarté expressément ce moyen au point 6 du jugement.

Sur la légalité de l'arrêté du 24 novembre 2022 :

4. Aux termes de l'article L. 422-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger titulaire d'une assurance maladie qui justifie soit avoir été titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " délivrée sur le fondement des articles L. 422-1, L. 422-2 ou L. 422-6 et avoir obtenu dans un établissement d'enseignement supérieur habilité au plan national un diplôme au moins équivalent au grade de master ou figurant sur une liste fixée par décret, soit avoir été titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " passeport talent-chercheur " délivrée sur le fondement de l'article L. 421-14 et avoir achevé ses travaux de recherche, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " recherche d'emploi ou création d'entreprise " d'une durée d'un an dans les cas suivants : / 1° Il entend compléter sa formation par une première expérience professionnelle, sans limitation à un seul emploi ou à un seul employeur ; / 2° Il justifie d'un projet de création d'entreprise dans un domaine correspondant à sa formation ou à ses recherches. ".

5. Lorsque la loi prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à l'intéressé, cette circonstance fait alors obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une obligation de quitter le territoire. Enfin, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile régissant la délivrance des titres de séjour n'imposent pas au préfet, sauf disposition spéciale contraire, de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui ne remplit pas les conditions auxquelles est subordonné le droit d'obtenir ce titre. La faculté pour le préfet de prendre, à titre gracieux et exceptionnel, une mesure favorable à l'intéressé pour régulariser sa situation relève de son pouvoir d'appréciation de l'ensemble des circonstances de l'espèce.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a expressément indiqué aux services de la préfecture de la Marne qui l'avaient interrogé sur ce point qu'il ne sollicitait pas la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 422-10 précité. Par conséquent, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet de la Marne ne lui a pas délivré un tel titre de séjour. En revanche, dès lors qu'il n'est pas contesté que M. A... remplit les conditions posées par l'article L. 422-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ces dispositions font obstacle à ce que le préfet de la Marne oblige l'intéressé à quitter le territoire français et par conséquent détermine le pays de renvoi.

7. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 novembre 2022 en tant qu'il l'oblige à quitter le territoire et fixant le pays de destination.

Sur l'injonction :

8. L'exécution du présent arrêt implique que la demande de M. A... soit réexaminée. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de la Marne de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais d'instance :

9. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Boia, avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Boia de la somme de 1 500 euros.

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêté du 24 novembre 2022 du préfet de la Marne est annulé en tant qu'il oblige M. A... à quitter le territoire français et en tant qu'il fixe le pays de destination.

Article 2 : Le jugement du 28 mars 2023 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Marne de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'État versera la somme de 1 500 euros à Me Boia, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que Me Boia renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B..., à Me Boia et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Marne.

Délibéré après l'audience du 11 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- M. Sibileau, premier conseiller,

- Mme Peton, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 mai 2024.

Le rapporteur,

Signé : J.-B. SibileauLe président,

Signé : M. Wallerich

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 23NC01467


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NC01467
Date de la décision : 16/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste SIBILEAU
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : LE CAB AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 26/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-16;23nc01467 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award