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21/03/2024 | FRANCE | N°22NC00292

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 1ère chambre, 21 mars 2024, 22NC00292


Vu la procédure suivante :



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 4 février 2022 et un mémoire complémentaire enregistré le 6 octobre 2023, la société par actions simplifiée Schumacher exploitation et la société par actions simplifiée TS Distribution, représentées par Me Leraisnable, demandent à la cour :



1°) d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2021 par lequel le maire de Rixheim a délivré à la société par actions simplifiée Rixdis 2 un permis de construire valant autorisation d'exploi

tation commerciale en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale ;



2°) de mettre solida...

Vu la procédure suivante :

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 février 2022 et un mémoire complémentaire enregistré le 6 octobre 2023, la société par actions simplifiée Schumacher exploitation et la société par actions simplifiée TS Distribution, représentées par Me Leraisnable, demandent à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2021 par lequel le maire de Rixheim a délivré à la société par actions simplifiée Rixdis 2 un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale ;

2°) de mettre solidairement à la charge de l'Etat et de la commune de Rixheim une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- l'arrêté du 6 décembre 2021 est entaché d'incompétence dès lors que son signataire ne bénéficie pas d'une délégation de signature régulièrement publiée et transmise au représentant de l'Etat dans le département ;

- l'arrêté du 6 décembre 2021 est entaché d'un vice de procédure dès lors qu'en méconnaissance de l'article R. 752-35 du code de commerce, les membres de la Commission nationale d'aménagement commercial n'ont pas été convoqué régulièrement ;

- l'arrêté du 6 décembre 2021 est entaché d'un vice de procédure dès lors qu'en méconnaissance de l'article R. 752-36 du code de commerce, les avis des ministres chargés du commerce et de l'urbanisme n'ont pas été signés par des personnes dûment habilitées ;

- l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial du 14 octobre 2021 est insuffisamment motivé dès lors qu'elle ne s'est pas prononcée expressément sur un moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande d'autorisation d'exploitation commerciale de la SAS Rixdis 2 ;

- l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial du 14 octobre 2021 est entaché d'illégalité dès lors qu'il n'est pas établi que la SAS Rixdis 2 aurait pris en compte les motifs sur lesquels la Commission nationale d'aménagement commercial s'est fondée pour émettre les avis défavorables des 16 mars 2017 et 18 janvier 2018 ;

- l'arrêté du 6 décembre 2021 est incompatible avec les objectifs du schéma de cohérence territoriale de la région mulhousienne ;

- l'arrêté du 6 décembre 2021 a été obtenu frauduleusement par la SAS Rixdis 2 qui a présenté de manière séparée deux projets qui auraient en réalité dû être présentés de manière unique ;

- l'arrêté du 6 décembre 2021 méconnaît l'article L. 752-6 du code de commerce en raison de son effet sur les les flux de transport et en raison de ses conditions d'accès, d'un recours insuffisant aux énergies renouvelables, aux procédés et matériaux éco-responsables et de son insertion paysagère et architecturale.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 25 janvier 2023 et le 23 octobre 2023, la société par actions simplifiée Rixdis 2, représentée par Me Bouyssou, conclut au rejet de la requête et à ce que somme de 10 000 euros soit solidairement mise à la charge des SAS Schumacher exploitation et SAS TS Distribution sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par les requérantes ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mars 2023, la commune de Rixheim, représentée par Me Cereja, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge des SAS Schumacher exploitation et SAS TS Distribution sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par les requérantes ne sont pas fondés.

Un mémoire complémentaire présenté le 31 octobre 2023 pour les SAS Schumacher exploitation et SAS TS Distribution a été reçu et non communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de commerce ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sibileau, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique,

- et les observations de Me Payneau subsitutant Me Leraisnable, pour la SAS Schumacher exploitation et la SAS TS Distribution, ainsi que celles de Me Bouyssou pour la SAS Rixdis 2.

Une note en délibéré enregistrée le 26 février 2024, a été présentée pour la société par actions simplifiée Schumacher Exploitation et la société par actions simplifiée TS Distribution.

Considérant ce qui suit :

1. Le 30 juillet 2018, la société par actions simplifiée Rixdis 2 (ci-après " la SAS Rixdis 2 ") a sollicité du maire de Rixheim la délivrance d'un permis de construire devant tenir lieu d'autorisation d'exploitation commerciale en vue de la création, sur un terrain de 3,8 hectares, situé rue de Mulhouse à Rixheim, d'un hypermarché à l'enseigne E. Leclerc, d'une surface de vente de 3 000 mètres carrés, comprenant une galerie marchande, une boutique de 100 mètres carrés et un restaurant. Le 24 septembre 2018, la commission départementale d'aménagement commercial du Haut-Rhin a émis sur ce projet un avis favorable, auquel s'est substitué, le 20 décembre 2018, un avis défavorable de la Commission nationale d'aménagement commercial. Par un arrêté du 19 février 2019, le maire de Rixheim a refusé à la SAS Rixdis 2 le permis de construire sollicité. Par un arrêt n° 19NC01188 du 8 juillet 2021, la cour administrative d'appel, saisie par la SAS Rixdis 2, a annulé l'arrêté du 19 février 2019 portant refus de délivrance à la SAS Rixdis 2 d'un permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale et a enjoint à la Commission nationale d'aménagement commercial de réexaminer le projet de la SAS Rixdis 2 dans un délai de trois mois à compter de la notification de cet arrêt et au maire de Rixheim de statuer à nouveau sur la demande de permis de construire de la société requérante dans le délai d'un mois à compter de la notification à la commune de Rixheim de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial. Par une décision n° 456491 du 14 mars 2022, le Conseil d'Etat n'a pas admis le recours dirigé contre l'arrêt du 8 juillet 2021. Le 14 octobre 2021, la Commission nationale d'aménagement commercial a émis un avis favorable au projet et le maire de Rixheim a délivré le 6 décembre 2021 à la SAS Rixdis 2 le permis de construire sollicité. La société par actions simplifiée Schumacher exploitation et la société par actions simplifiée TS Distribution (ci-après " les SAS Schumacher exploitation et SAS TS Distribution ") demandent l'annulation de l'arrêté du 6 décembre 2021 en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.

Sur la légalité de l'arrêté du 6 décembre 2021 :

En ce qui concerne l'incompétence de l'auteur de l'acte :

2. Par un arrêté du 27 octobre 2020, régulièrement affiché et transmis au contrôle de légalité du préfet le même jour, le maire de Rixheim, a consenti à M. E... B..., quatrième adjoint au maire, une délégation afin " d'accomplir tous actes et de signer tous les documents dans les domaines d'attribution suivants : (...) urbanisme commercial ". Par conséquent, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 6 décembre 2021 serait entaché d'un vice d'incompétence manque en fait et doit être écarté.

En ce qui concerne la régularité de la procédure suivie devant la Commission nationale d'aménagement commercial :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 752-35 du code de commerce : " La commission nationale se réunit sur convocation de son président. / Cinq jours au moins avant la réunion, chacun des membres reçoit, par tout moyen, l'ordre du jour ainsi que, pour chaque dossier : / 1° L'avis ou la décision de la commission départementale ; / 2° Le procès-verbal de la réunion de la commission départementale ; / 3° Le rapport des services instructeurs départementaux ; / 4° Le ou les recours à l'encontre de l'avis ou de la décision ; / 5° Le rapport du service instructeur de la commission nationale ".

4. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'attestation de convocation issue du dossier de la Commission nationale d'aménagement commercial, que les membres de cette commission ont été destinataires simultanément le 29 septembre 2021, par l'application www.e-convocations.com, d'une convocation en vue de la séance de la commission du 14 octobre 2021, au cours de laquelle celle-ci a examiné le projet de la SAS Rixdis 2, soit dans le délai prévu par l'article R. 752-34 du code de commerce. Cette convocation était assortie de l'ordre du jour de cette séance et précisait que les documents visés à l'article R. 752-35 du code de commerce seraient disponibles, au moins cinq jours avant la tenue de la séance, sur la plateforme de téléchargement. Il n'est ni établi, ni même allégué que les membres de la Commission nationale d'aménagement commercial n'auraient pas été mis en mesure d'accéder par ces moyens aux documents en cause, dans le délai de cinq jours prévu par ce même article. Par suite le moyen tiré de l'irrégularité de la consultation de la Commission nationale d'aménagement commercial doit être écarté.

5. En second lieu, aux termes de l'article R. 752-36 du code de commerce : " (...) Le secrétariat de la commission nationale instruit et rapporte les dossiers. Le commissaire du Gouvernement présente et communique à la commission nationale les avis des ministres chargés de l'urbanisme et du commerce. Après audition des parties, il donne son avis sur les demandes ".

6. Il ressort des pièces du dossier que l'avis émis au nom du ministre en charge du commerce a été signé par Mme A... C..., en sa qualité de cheffe du service du tourisme, du commerce, de l'artisanat et des services, poste auquel elle a été nommée par arrêté du 30 septembre 2019 et que conformément à l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 susvisé, cette qualité l'habilitait à signer " l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité ". Il ressort également des pièces du dossier que l'avis émis au nom du ministre en charge de l'urbanisme a été signé par M. D... F..., en sa qualité de sous-directeur de la qualité du cadre de vie, au sein de la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages de la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature, poste auquel il a été nommé par arrêté du 27 février 2020 et que conformément à l'article 1er du décret du 27 juillet 2005, cette qualité l'habilitait à signer " l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité ". Dans ces conditions le moyen tiré de ce qu'il ne serait pas établi que les avis des ministres chargés du commerce et de l'urbanisme auraient été signés par des personnes dûment habilitées doit être écarté comme manquant en fait.

En ce qui concerne la motivation de l'avis de la commission nationale d'aménagement commercial :

7. Aux termes de l'article L. 752-20 du code de commerce : " (...) Les décisions de la commission nationale indiquent le nombre de votes favorables et défavorables ainsi que les éventuelles abstentions. Elles doivent être motivées conformément aux articles L. 211-2 à L. 211-7 du code des relations entre le public et l'administration ".

8. Aux termes de l'article L. 752-21 du même code : " Un pétitionnaire dont le projet a été rejeté pour un motif de fond par la Commission nationale d'aménagement commercial ne peut déposer une nouvelle demande d'autorisation sur un même terrain, à moins d'avoir pris en compte les motivations de la décision ou de l'avis de la commission nationale (...) ". Il en découle qu'il appartient à la commission d'aménagement commercial saisie de ce nouveau projet de vérifier que cette condition préalable est satisfaite et, seulement dans l'hypothèse où elle l'est, de procéder au contrôle qui lui incombe du respect des autres exigences découlant du code de commerce, y compris, s'agissant des exigences de fond, de celles dont il avait été antérieurement estimé qu'elles avaient été méconnues ou dont il n'avait pas été fait mention dans l'avis de la commission nationale d'aménagement commercial. Le nouvel avis doit mentionner les considérations de droit et de fait sur lesquelles la commission saisie de ce nouveau projet s'est fondée pour conclure au respect des exigences découlant du code de commerce et rendre un avis favorable à la nouvelle demande d'autorisation, sans nécessairement comporter de référence explicite ni à l'avis défavorable précédemment émis, ni aux éléments apportés par le pétitionnaire pour justifier que sa demande comporte des modifications en lien avec la motivation de l'avis antérieur de la commission nationale d'aménagement commercial, ni à l'ensemble des motifs de fond l'ayant justifié.

9. L'avis du 14 octobre 2021 précise notamment que le projet est compatible avec les orientations du schéma de cohérence territoriale de la région mulhousienne, que le projet répond aux exigences de l'article L. 752-6 du code de commerce mais également qu'il prendra place au sein d'une zone d'activités sur des parcelles actuellement occupées par des bâtiments vétustes qui seront détruits. Elle comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. De surcroît, les SAS Schumacher exploitation et SAS TS Distribution ne peuvent utilement se prévaloir de la circonstance, à la supposer établie, que l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial ne comporte pas de référence aux éléments apportés par le pétitionnaire pour justifier que sa demande comporte des modifications en lien avec la motivation de l'avis du 18 janvier 2018 de la commission nationale d'aménagement commercial. Enfin, cette obligation de motivation n'implique pas que la Commission nationale soit tenue de prendre explicitement parti sur le respect, par le projet qui lui est soumis, de chacun des objectifs et critères d'appréciation fixés par les dispositions législatives applicables. Il résulte de tout ce qui précède que l'avis du 14 octobre 2021 est suffisamment motivé au regard des exigences des articles L. 750-20 et L. 750-21 du code de commerce précités.

En ce qui concerne le moyen tiré de la fraude :

10. Si les sociétés requérantes soutiennent que la SAS Rixdis 2, a artificiellement scindé son projet initial de création à Rixheim d'un ensemble commercial et d'un drive, qui avait fait l'objet d'un avis défavorable de la Commission nationale d'aménagement commercial du 16 mars 2017, en présentant par la suite deux demandes distinctes, l'une concernant l'ensemble commercial, l'autre, le drive, il ressort des pièces du dossier que la Commission nationale d'aménagement commercial, qui s'était prononcée sur le projet cumulé de création d'un ensemble commercial et d'un drive, a, une fois les deux projets dissociés, émis des avis défavorables aux projets de création de l'ensemble commercial au cours de ses séances des 18 janvier et 20 décembre 2018, et, au contraire, un avis favorable au projet de création du drive, au cours de cette même séance du 20 décembre 2018. Ainsi, saisie concomitamment des deux projets et y ayant statué au cours de la même séance, la Commission nationale d'aménagement commercial a été en mesure d'apprécier non seulement l'impact de chaque projet pris séparément, mais également l'impact cumulé de ces deux projets, dont elle avait déjà eu à connaître dans le cadre d'un projet global le 16 mars 2017. Ainsi, la dissociation de ces deux projets par la SAS Rixdis 2 n'a pas été de nature à fausser l'appréciation de la Commission nationale d'aménagement commercial comme l'a déjà jugé cette cour à l'occasion de son arrêt n° 19NC00976 du 5 mai 2022. Par conséquent, cette dissociation n'a pas pu entacher d'illégalité l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial au vu duquel le maire de Rixheim a pris l'arrêté attaqué 6 décembre 2021.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L. 752-6 du code de commerce :

S'agissant du cadre juridique applicable :

11. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige : " I. - L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : (...) / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; (...) ".

S'agissant de l'incompatibilité du projet autorisé avec le schéma de cohérence territoriale de la région mulhousienne :

12. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial non de vérifier la conformité des projets d'exploitation commerciale qui leur sont soumis aux énonciations des schémas de cohérence territoriale, mais d'apprécier la compatibilité de ces projets avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent.

13. Les sociétés Schumacher exploitation et TS distribution soutiennent que l'arrêté du 6 décembre 2021 est incompatible avec les objectifs 1.5.1 et 1.5.2 du schéma de cohérence territoriale de la région mulhousienne dès lors que le projet autorisé par le maire de Rixheim à l'occasion de la délivrance de l'arrêté du 6 décembre 2021 n'est pas conforme à la vocation de la zone dans laquelle il s'implante qui doit préférentiellement accueillir des commerces d'achats lourds d'une part et qu'il entre en contradiction avec l'objectif de favoriser et maintenir le commerce de proximité dans les zones de centralité et de proximité d'autre part. Toutefois les requérantes n'établissent ni même n'allèguent sérieusement que la réalisation de ces objectifs revêt, dans l'économie générale du schéma de cohérence territoriale de la région mulhousienne une importance particulière ou que la réalisation du projet de la SAS Rixdis 2 présente, à l'aune de ces objectifs, une gravité quelconque à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert par ce document d'urbanisme. Par conséquent, les SAS Schumacher exploitation et SAS TS Distribution ne sont pas fondées à soutenir que le projet est incompatible avec les orientations générales et les objectifs 1.5.1 et 1.5.2 du schéma de cohérence territoriale.

S'agissant de l'effet sur les flux de transport et des conditions d'accès :

14. Il ressort des pièces du dossier, notamment des plans d'accès au site du projet, que celui-ci et le projet de point permanent de retrait, ayant fait l'objet d'une demande distincte et d'un avis favorable de la Commission nationale d'aménagement commercial, sont desservis, l'un, par la rue de Mulhouse et le Chemin de Battenheim, l'autre, par les rues de l'Ile Napoléon et de l'industrie, sans qu'il soit établi que les flux de circulation générés par l'un et l'autre de ces deux projets soient le cas échéant de nature, en raison même de leur effet cumulatif, à affecter négativement les axes de circulation alentours. Dès lors, il n'apparaît pas que l'étude de circulation, au demeurant très étayée, réalisée par le bureau d'étude AED, annexée au dossier de demande de la SAS Rixdis 2, aurait été insuffisante pour permettre d'appréhender les effets du projet sur la circulation. Il n'est pas davantage démontré que le projet aurait un impact négatif sur les flux de transports et les modes de déplacement doux.

S'agissant du recours insuffisant aux énergies renouvelables, aux procédés et matériaux éco-responsables :

15. Aux termes de l'article L. 111-18-1 du code de la construction et de l'habitation issue de la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat : " I. Dans le respect des objectifs généraux de performance énergétique et environnementale des bâtiments énoncés à l'article L. 111-9 du code de la construction et de l'habitation, les constructions et installations mentionnées au II du présent article ne peuvent être autorisées que si elles intègrent soit un procédé de production d'énergies renouvelables, soit un système de végétalisation basé sur un mode cultural garantissant un haut degré d'efficacité thermique et d'isolation et favorisant la préservation et la reconquête de la biodiversité, soit tout autre dispositif aboutissant au même résultat et, sur les aires de stationnement associées lorsqu'elles sont prévues par le projet, des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l'infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation et préservant les fonctions écologiques des sols. (...) ".

16. Si les SAS Schumacher exploitation et SAS TS Distribution soutiennent que la SAS Rixdis 2 ne prévoit pas, à l'occasion de la construction du projet autorisé par l'arrêté du 6 décembre 2021, de recourir à des énergies renouvelables ou d'utiliser des matériaux ou des procédés éco-responsables, elles n'apportent à l'appui de leurs allégations aucun élément matériel permettant à la cour d'apprécier le bien-fondé de leurs affirmations. Outre des aménagements paysagers en pleine terre représentant 43 % de l'emprise foncière, le projet prévoit une végétalisation de la toiture sur 7 050 mètres carrés, l'installation d'un mur végétal de 107 mètres carrés, la plantation de cent-soixante-huit arbres de haute et moyenne tige ainsi que la mise en place d'une zone en galets perméables. Enfin, le bâtiment construit sera conforme aux exigences de la RT 2012 et comportera un chauffage et une climatisation par des pompes à chaleur air/air, des " roof top " spécifiques permettant de réduire la consommation de moitié par rapport à un roof top classique et un dispositif de ventilation mécanique double flux d'échange de chaleur. Dans ces conditions, en se bornant à soutenir que le projet ne comporte pas de production d'énergies renouvelables, les sociétés requérantes ne démontrent pas que le projet ne respecterait pas les exigences en matière de qualité environnementale. Par suite le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-18-1 du code de la construction et de l'habitation et celles a du 2° du I de l'article L. 752-6 du code de commerce ne peut qu'être écarté.

S'agissant de l'insertion paysagère et architecturale :

17. Il ressort des pièces du dossier et notamment de l'avis de la direction départementale des territoires du Haut-Rhin émis à l'attention de la commission départementale d'aménagement commercial du Haut-Rhin dans le cadre de l'instruction qui a abouti à l'avis du 24 septembre 2018 que le projet d'hypermarché de la SAS Rixdis 2 est réalisé dans un environnement hétérogène à l'interface entre une zone d'activité et une zone d'habitat dans une zone dépourvue d'intérêt architectural particulier et engagée dans un processus de mutation. L'aspect global du bâtiment à construire apparaît d'une architecture assez épurée, proche des halls métalliques de la zone d'activité environnante et contribuera à l'apaisement de l'entrée de ville, déjà surchargée en signes. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du b du 2° de l'article L. 752-6 du code de commerce doit être écarté.

18. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation de l'arrêté du 6 décembre 2021 par lequel le maire de Rixheim a délivré à la société par actions simplifiée Rixdis 2 un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.

Sur les frais d'instance :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Rixheim et de l'Etat, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que les SAS Schumacher exploitation et SAS TS Distribution demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

20. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la SAS Schumacher exploitation une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la SAS Rixdis 2 et non compris dans les dépens.

21. Il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la SAS TS Distribution une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la SAS Rixdis 2 et non compris dans les dépens.

22. Il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la SAS Schumacher exploitation une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Rixheim et non compris dans les dépens.

23. Il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la SAS TS Distribution une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Rixheim et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête des SAS Schumacher exploitation et SAS TS Distribution est rejetée.

Article 2 : La SAS Schumacher exploitation versera à la commune de Rixheim la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La SAS Schumacher exploitation versera à la SAS Rixdis 2 la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La SAS TS Distribution versera à la commune de Rixheim la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La SAS TS Distribution versera à la SAS Rixdis 2 la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Schumacher exploitation, à la SAS TS Distribution, à la SAS Rixdis 2, à la commune de Rixheim et à la Commission nationale d'aménagement commercial.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

Délibéré après l'audience du 21 février 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- Mme Guidi, présidente-assesseure,

- M. Sibileau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 mars 2024.

Le rapporteur,

Signé : J.-B. SibileauLe président,

Signé : M. Wallerich

La greffière,

Signé : S. RobinetLa République mande et ordonne au préfet du Haut-Rhin en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 22NC00292


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NC00292
Date de la décision : 21/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste SIBILEAU
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : CEREJA

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-21;22nc00292 ?
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