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21/02/2024 | FRANCE | N°20NC00969

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 21 février 2024, 20NC00969


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La SARL Groupe Keskin a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 20 décembre 2017 par laquelle l'Eurométropole de Strasbourg a préempté la parcelle cadastrée MT 70 sise 91 route des Romains à Strasbourg.



Par un jugement n° 1800060 du 12 février 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de la société.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregist

rée le 21 avril 2020, la SARL Groupe Keskin, représentée par Me Zimmermann-Friederich, demande à la cour :



1°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Groupe Keskin a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 20 décembre 2017 par laquelle l'Eurométropole de Strasbourg a préempté la parcelle cadastrée MT 70 sise 91 route des Romains à Strasbourg.

Par un jugement n° 1800060 du 12 février 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de la société.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 avril 2020, la SARL Groupe Keskin, représentée par Me Zimmermann-Friederich, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 12 février 2020 ;

2°) d'annuler la décision du président de l'Eurométropole de Strasbourg du 20 décembre 2017 ;

3°) d'enjoindre à l'Eurométropole de Strasbourg de proposer aux vendeurs, puis à elle, d'acquérir le bien au prix auquel elle l'aurait acquis, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Eurométropole de Strasbourg le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision a été prise par une autorité incompétente ;

- la décision est entachée d'un vice de procédure dès lors que l'Eurométropole n'établit pas avoir reçu l'avis de France Domaine préalablement à cette décision ;

- la décision est dépourvue de base légale dès lors que l'Eurométropole n'établit pas de la régularité des formalités de publicité des délibérations de la commune de Strasbourg instituant le droit de préemption ;

- la décision est insuffisamment motivée faute d'indiquer un projet précis d'une part et de répondre aux objets énoncés par l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme d'autre part ;

- la décision est intervenue hors-délai en méconnaissance des dispositions de l'article L. 2132 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 octobre 2020, l'Eurométropole de Strasbourg, représentée par Me Maetz, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la SARL Groupe Keskin sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'Eurométropole de Strasbourg soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 17 juillet 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 17 août 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le décret n° 2014-1603 du 23 décembre 2014 ;

- l'arrêté du 5 décembre 2016 relatif aux opérations d'acquisitions et de prises en location immobilières poursuivies par les collectivités publiques et divers organismes ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Wallerich, président,

- les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique,

- et les observations de Me Laumin, pour la société Groupe Keskin ainsi que celles de Me Canal, pour l'Eurométropole de Strasbourg.

Considérant ce qui suit :

1. Par une déclaration d'intention d'aliéner du 17 octobre 2017, la SCP Deshayes et associés, notaire, a informé l'Eurométropole de Strasbourg de l'intention de sa mandante de vendre à la SARL Groupe Keskin un immeuble situé 91 route des romains à Strasbourg. Par une décision du 20 décembre 2017, l'Eurométropole de Strasbourg a décidé d'exercer son droit de préemption sur l'immeuble. La SARL Groupe Keskin relève appel du jugement du 12 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de préemption du 20 décembre 2017.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 211-2 du code de l'urbanisme : " La délibération par laquelle le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent décide, en application de l'article L. 211-1, d'instituer ou de supprimer le droit de préemption urbain ou d'en modifier le champ d'application est affichée en mairie pendant un mois. Mention en est insérée dans deux journaux diffusés dans le département. / Les effets juridiques attachés à la délibération mentionnée au premier alinéa ont pour point de départ l'exécution de l'ensemble des formalités de publicité mentionnées audit alinéa. Pour l'application du présent alinéa, la date à prendre en considération pour l'affichage en mairie est celle du premier jour où il est effectué ". Aux termes de l'article R. 211-3 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable : " Le maire ou, le cas échéant, le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent adresse sans délai au directeur départemental ou, le cas échéant, régional des finances publiques, à la chambre départementale des notaires, aux barreaux constitués près les tribunaux de grande instance dans le ressort desquels est institué le droit de préemption urbain et au greffe des mêmes tribunaux copie des actes ayant pour effet d'instituer ou de supprimer le droit de préemption urbain ou d'en modifier le champ d'application. Cette copie est accompagnée, s'il y a lieu, d'un plan précisant le champ d'application du droit de préemption urbain ". Et aux termes de l'article R. 211-4 du même code : " La délibération prise en application du dernier alinéa de l'article L. 211-1 est affichée en mairie pendant un mois et prend effet le premier jour dudit affichage. (...) Copie en est en outre adressée aux organismes et services mentionnés à l'article R. 211-3 (...) ".

3. La société requérante soutient que le droit de préemption urbain ne serait pas entré en vigueur sur le territoire de la commune de Strasbourg à raison du défaut d'exécution des formalités de publicité prévues par les articles R. 211-2 et R. 211-3 du code de l'urbanisme et en infère que la décision de préemption est privée de base légale. Toutefois, d'une part, la société requérante ne saurait utilement se prévaloir du défaut de caractère exécutoire de la délibération du 26 juin 1987 instituant le droit de préemption urbain antérieurement à la délibération du 16 décembre 2016. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que le droit de préemption urbain a été institué par une délibération de l'Eurométropole de Strasbourg du 16 décembre 2016. Cette délibération a été transmise au représentant de l'Etat dans le département le 20 décembre 2016, publiée dans deux journaux d'annonces légales les 20 et 23 décembre 2016, et il ressort d'une attestation du maire de la commune de Strasbourg que le document a été affiché aux endroits officiels du 21 décembre 2016 au 21 janvier 2017. Par suite, et contrairement aux affirmations de la requérante, l'Eurométropole de Strasbourg a procédé, lors de l'instauration du droit de préemption urbain, aux formalités de publicité prévues par les articles R. 211-2 et R. 211-4 du code de l'urbanisme.

4. Les formalités de publicité et de transmission au représentant de l'Etat dans le département ayant ainsi été exécutées, la délibération du 16 décembre 2016 instaurant le droit de préemption sur le territoire de l'Eurométropole de Strasbourg a acquis un caractère exécutoire. Par suite, la SARL Groupe Keskin n'est pas fondée à soutenir que la décision du 20 décembre 2017 serait dépourvue de base légale. En tout état de cause, la société appelante n'est pas recevable à soulever, à l'appui de sa demande d'annulation de la décision de préemption, l'illégalité de la délibération du 16 décembre 2016, dès lors que cette délibération a acquis un caractère définitif.

5. En deuxième lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 211-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse : " (...) la compétence d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre (...) en matière de plan local d'urbanisme, emporte leur compétence de plein droit en matière de droit de préemption urbain ". Aux termes du troisième alinéa de l'article L. 5211-9 du code général des collectivités territoriales, le président de l'établissement public de coopération intercommunale : " est seul chargé de l'administration, mais il peut déléguer par arrêté, sous sa surveillance et sa responsabilité, l'exercice d'une partie de ses fonctions aux vice-présidents et, en l'absence ou en cas d'empêchement de ces derniers ou dès lors que ceux-ci sont tous titulaires d'une délégation, à d'autres membres du bureau. (...) ". Aux termes du neuvième alinéa de ce même article : " Le président de l'établissement public de coopération intercommunale peut, par délégation de son organe délibérant, être chargé d'exercer, au nom de l'établissement, les droits de préemption, ainsi que le droit de priorité, dont celui-ci est titulaire ou délégataire en application du code de l'urbanisme. Il peut également déléguer l'exercice de ces droits à l'occasion de l'aliénation d'un bien, dans les conditions que fixe l'organe délibérant de l'établissement. (...) ". Selon l'article L. 5211-10 du même code, le président, les vice-présidents ayant reçu délégation ou le bureau dans son ensemble peuvent recevoir délégation d'une partie des attributions de l'organe délibérant à l'exception de certaines matières, au nombre desquelles ne figure pas le droit de préemption urbain. Enfin, il résulte des dispositions de l'article L. 2122-23 du même code, rendues applicables aux établissements publics de coopération intercommunale par l'article L. 5211-2 de ce code, que, sauf disposition contraire dans la délibération de l'organe délibérant portant délégation, les décisions prises en application de celle-ci peuvent être signées par un vice-président ou un membre du bureau agissant par délégation du président dans les conditions fixées à l'article L. 5211-9.

6. Il ressort des pièces du dossier que par une délibération du 5 janvier 2017, le conseil communautaire de l'Eurométropole de Strasbourg a délégué à son président le pouvoir d'exercer, au nom de l'Eurométropole, les droits de préemption définis par le code de l'urbanisme. Par arrêté du 9 janvier 2017, M. Zaegel, vice-président, a reçu du président de l'Eurométropole de Strasbourg une délégation, la stratégie foncière et les compétences rattachées et pour signer notamment " les actes portant exercice des droits de préemption urbain tels que prévus par le code de l'urbanisme ". Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de M. Zaegel pour signer la décision de préemption du 20 décembre 2017 doit être écarté comme manquant en fait.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 213-21 du code de l'urbanisme prévoit que : " Le titulaire du droit de préemption doit recueillir l'avis du service des domaines sur le prix de l'immeuble dont il envisage de faire l'acquisition dès lors que le prix ou l'estimation figurant dans la déclaration d'intention d'aliéner ou que le prix que le titulaire envisage de proposer excède le montant fixé par l'arrêté du ministre chargé du domaine prévu à l'article R. 1211-2 du code général de la propriété des personnes publiques. (...) / L'avis du directeur départemental ou, le cas échéant, régional des finances publiques doit être formulé dans le délai d'un mois à compter de la date de réception de la demande d'avis. Passé ce délai, il peut être procédé librement à l'acquisition (...) ".

8. En l'espèce, il est constant que le prix figurant dans la déclaration d'intention d'aliéner était supérieur au montant fixé par l'arrêté du 5 décembre 2016 relatif aux opérations d'acquisitions et de prises en location immobilières poursuivies par les collectivités publiques et divers organismes. En conséquence, la décision de préemption ne pouvait intervenir qu'après consultation préalable et obligatoire du directeur départemental ou, le cas échéant, régional des finances publiques. A cet égard, il ressort des pièces du dossier que le directeur régional des finances publiques de la région Grand Est et du département du Bas-Rhin a rendu un avis sur l'opération de préemption litigieuse le 5 décembre 2017. Cet avis, visé dans la décision de préemption du 20 décembre 2017, a été transmis par voie informatique par le biais de la plateforme Escale des finances publiques le 7 décembre 2017. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté comme manquant en fait.

9. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme (version applicable) " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. / (...) Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. (...) ". Et aux termes de l'article L. 300-1 du même code : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en œuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité et l'habitat indigne ou dangereux, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. (...) ".

10. Il résulte des articles L. 210-1 et L. 300-1 du code de l'urbanisme que les collectivités titulaires du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et, d'autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption.

11. En l'espèce, la décision de préemption indique que le droit est exercé " en vue de réaliser un équipement collectif, un pôle des services publics, dans l'objectif de regrouper les services de proximité de la ville de Strasbourg sur un site unique à Koenigshoffen : centre médico-social, mairie de quartier, direction de territoire, bureau de l'adjoint de quartier, entre autres. Il permettra à la ville de Strasbourg d'améliorer l'accueil du public et le service rendu, mais également d'optimiser les charges de fonctionnement ". En conséquence, et contrairement aux allégations de la requérante, le droit de préemption a été exercé, en vue de la réalisation d'une opération précise de regroupement de plusieurs services publics locaux répondant à un des objets définis par l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme.

12. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier et notamment d'une étude intitulée " Les côteaux de Mulbach " présentée en juillet 2017 que l'Eurométropole avait l'intention de réaliser un pôle de services publics, l'immeuble détenu par le vendeur ayant été identifié. Par ailleurs, une note circulaire de la direction de l'urbanisme et des territoires en date de juillet 2017 a pour objet " pôle de services publics à Koenigshoeffen / Faisabilité des sites d'implantation pressentis et inscription de l'opération au PPI de la ville ". Dès lors, l'Eurométropole de Strasbourg justifiait, à la date de la décision de préemption, de la réalité du projet d'aménagement en vue duquel le droit de préemption était exercé.

13. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 213-2 du code de l'urbanisme : " Toute aliénation visée à l'article L. 213-1 est subordonnée, à peine de nullité, à une déclaration préalable faite par le propriétaire à la mairie de la commune où se trouve situé le bien. (...) Le silence du titulaire du droit de préemption pendant deux mois à compter de la réception de la déclaration mentionnée au premier alinéa vaut renonciation à l'exercice du droit de préemption. / Le délai est suspendu à compter de la réception de la demande mentionnée au 1er alinéa ou de la demande de visite du bien. Il reprend à compter de la réception des documents par le titulaire du droit de préemption, du refus par le propriétaire de la visite du bien ou de la visite du bien par le titulaire du droit de préemption. Si le délai restant est inférieur à un mois, le titulaire dispose d'un mois pour prendre sa décision. Passés ces délais, son silence vaut renonciation à l'exercice du droit de préemption. / (...) Le titulaire du droit de préemption peut demander à visiter le bien dans des conditions fixées par décret. (...) La décision du titulaire du droit de préemption urbain fait l'objet d'une publication. Elle est notifiée au vendeur, au notaire et, le cas échéant, à la personne mentionnée dans la déclaration d'intention d'aliéner qui avait l'intention d'acquérir le bien. (...) ". Aux termes de l'article D. 213-13-1 du même code : " La demande de visite du bien prévue à l'article L. 213-2 est faite par écrit. / Elle est notifiée par le titulaire du droit de préemption au propriétaire ou à son mandataire ainsi qu'au notaire mentionnés dans la déclaration [d'intention d'aliéner], dans les conditions fixées à l'article R. 213-25. (...) ". Aux termes de l'article D. 213-13-2 de ce code : " (...) Un constat contradictoire précisant la date de visite et les noms et qualité des personnes présentes est établi le jour de la visite et signé par le propriétaire ou son représentant et par le titulaire du droit de préemption ou une personne mandatée par ce dernier. / L'absence de visite dans le délai prévu au 3ème alinéa vaut soit refus de visite, soit renonciation à la demande de visite. Dans ce cas, le délai suspendu en application du 4ème alinéa de l'article L. 213-2 reprend son cours ". Et aux termes de l'article R. 213-25 du code de l'urbanisme : " Les demandes, offres et décisions du titulaire du droit de préemption et des propriétaires prévues par le présent titre sont notifiées par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, par acte d'huissier, par dépôt contre décharge ou par voie électronique (...) ".

14. La société appelante soutient que la décision est intervenue hors-délai en méconnaissance des dispositions de l'article L. 213-2 du code de l'urbanisme et fait valoir que le droit de visite a été exercé de façon irrégulière et n'a donc pas pu suspendre le délai de préemption.

15. Il ressort des pièces du dossier que la déclaration d'intention d'aliéner du 17 octobre 2017 indique à sa rubrique H en qualité de mandataire les coordonnées de la SCP Deshayes et associés, notaire. Elle indique également que les décisions du titulaire du droit de préemption " devront être notifiées à l'adresse du mandataire mentionné à la rubrique H ". Dans ces conditions, la seule circonstance que le courrier signifié par voie d'huissier le 21 novembre 2017 par lequel l'Eurométropole de Strasbourg a souhaité l'organisation d'une visite du bien ait été adressé seulement à la SCP Deshayes et associés n'est pas contraire à l'article D. 213-13-1, dès lors que ce notaire était le mandataire du vendeur. Par ailleurs, il n'est pas contesté que la visite du bien s'est déroulée en présence d'un représentant de l'Eurométropole de Strasbourg et d'un représentant des propriétaires, conformément aux dispositions précitées de l'article D. 213-13-2 du code de l'urbanisme. Le droit de visite ayant ainsi été régulièrement exercé par l'Eurométropole de Strasbourg, il a suspendu le délai de préemption.

16. Ensuite, un constat contradictoire de visite des lieux a été établi le 28 novembre 2017, et en conséquence l'Eurométropole de Strasbourg disposait d'un nouveau délai d'un mois pour prendre la décision de préemption litigieuse, en application des dispositions précitées. Enfin, il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée, exécutoire depuis sa transmission au représentant de l'Etat dans le département le 21 décembre 2017, a été signifiée le 27 décembre 2017 au notaire au propriétaire et à l'acquéreur. Par suite, la décision de préemption du 20 décembre 2017 ayant ainsi été prise et rendue exécutoire avant l'expiration du délai de préemption dont disposait l'Eurométropole de Strasbourg, le moyen tiré de ce que la décision de préemption serait illégale car tardive doit être écarté.

17. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Groupe Keskin n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

18. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de la SARL Groupe Keskin, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de la requête tendant à ce qu'il soit enjoint à l'Eurométropole de Strasbourg de proposer au vendeur, et à ladite société, d'acquérir le bien doivent être rejetées.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Eurométropole de Strasbourg, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la SARL Groupe Keskin demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la SARL Groupe Keskin une somme de 1 500 euros à verser à l'Eurométropole de Strasbourg sur le fondement des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL Groupe Keskin est rejetée.

Article 2 : La SARL Groupe Keskin versera à l'Eurométropole de Strasbourg une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Groupe Keskin et à l'Eurométropole de Strasbourg et au Régime social des Indépendants.

Délibéré après l'audience du 1er février 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- Mme Guidi, présidente-assesseure,

- M. Sibileau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 février 2024.

L'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

Signé : L. Guidi

Le président-rapporteur,

Signé : M. Wallerich

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne à la préfète du Bas-Rhin en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 20NC00969


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00969
Date de la décision : 21/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: M. Marc WALLERICH
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : LEONEM AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-21;20nc00969 ?
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