La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/02/2024 | FRANCE | N°21NC03214

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 15 février 2024, 21NC03214


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société par actions simplifiées (SAS) France volet intex a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la restitution d'un crédit d'impôt recherche d'un montant de 29 988 euros au titre de l'année 2017.



Par un jugement n° 1903063 du 14 octobre 2021, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et des mémoires

enregistrés respectivement, le 10 décembre 2021, le 22 juin et le 11 octobre 2022, la SAS France volet intex, représentée p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiées (SAS) France volet intex a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la restitution d'un crédit d'impôt recherche d'un montant de 29 988 euros au titre de l'année 2017.

Par un jugement n° 1903063 du 14 octobre 2021, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés respectivement, le 10 décembre 2021, le 22 juin et le 11 octobre 2022, la SAS France volet intex, représentée par Me Honnet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 14 octobre 2021 ;

2°) de prononcer la restitution d'une somme de 29 988 euros correspondant à une créance de crédit d'impôt recherche acquise au titre de l'année 2017 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que les dépenses afférentes aux projets n° 1 et n° 2 sont éligibles au crédit d'impôt recherche dès lors que ceux-ci correspondent à des opérations de développement expérimental.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 25 mars, 14 septembre 2022 et 26 octobre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que le moyen soulevé par la SAS France volet intex n'est pas fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mosser,

- et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Adrame est la société mère d'un groupe fiscalement intégré qui compte au nombre de ses filiales la SAS France volet intex, ayant pour activité la fabrication de charpentes et de menuiseries. Le 25 mai 2018, l'EURL Adrame a sollicité, au titre de l'année 2017, le remboursement de la somme de 94 967 euros, correspondant à une créance de crédit d'impôt recherche au titre de dépenses exposées par sa filiale. L'avis du ministre chargé de la recherche, sollicité en application des articles L. 45 B et R. 45 B-1 du livre des procédures fiscales et établi le 4 novembre 2019, a conclu à l'éligibilité partielle des dépenses engagées par la société. Par une décision du 6 novembre 2021, la direction départementale des finances publiques de l'Aube a admis les dépenses au titre du crédit impôt recherche à hauteur de 33 117 euros. La société France volet intex demande la restitution de la somme de 29 988 euros correspondant à la créance de crédit d'impôt recherche dont elle s'estime encore titulaire au titre de l'année 2017. La SAS France volet intex relève appel du jugement du 14 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.

2. Aux termes des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. - Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. (...) ". L'article 49 septies F de l'annexe III du code général des impôts dispose : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : (...) / c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté. ". Ne peuvent être prises en compte pour le bénéfice du crédit d'impôt recherche que les dépenses exposées pour le développement ou l'amélioration substantielle de matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services, dont la conception ne pouvait être envisagée, eu égard à l'état des connaissances techniques à l'époque du projet de recherche, par un professionnel averti, par simple développement ou adaptation de ces techniques. Au contraire, il résulte des dispositions précédemment citées que des opérations consistant à perfectionner des matériels ou procédés existants ou à en développer des fonctionnalités particulières et qui se traduisent par des améliorations non substantielles de techniques déjà existantes ne caractérisent pas des opérations de développement expérimental présentant un caractère de nouveauté.

3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si les opérations réalisées par le contribuable entrent dans le champ d'application du crédit d'impôt recherche eu égard aux conditions dans lesquelles sont effectuées ces opérations, et, notamment, d'examiner si les opérations de développement expérimental en cause présentent un caractère de nouveauté au sens de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts.

4. La SAS France volet intex soutient que le projet n°1 relatif à la mise au point d'un procédé d'égrenage de la pré-couche de peinture des volets visait à améliorer significativement le procédé d'égrenage automatique pour des volets en bois peints permettant à la fois la conservation d'une partie significative de cette pré-couche et l'obtention d'une surface lisse et propre permettant l'application de la peinture de finition. La société a réalisé plusieurs tests en variant la vitesse de rotation des brosses abrasives, la granulométrie du papier abrasif et la vitesse d'avancée des volets dans les machines d'égrenage dont elle dispose. Toutefois, il résulte de l'instruction et notamment de l'avis de l'expert désigné par le ministre chargé de la recherche dont l'impartialité n'est pas remise en cause et avec lequel la société a pu bénéficier d'un échange oral et contradictoire, d'une part, que les difficultés techniques invoquées constituent des contraintes inhérentes au travail du bois et, d'autre part, que ces travaux relèvent d'une ingénierie traditionnelle reposant à la fois sur des données accessibles et le savoir-faire dans la fabrication de volets en bois. Il note à cet égard que la granulométrie retenue au terme de l'expérimentation est le grain habituellement retenu par la profession pour réaliser ce type d'activité. Ces travaux ne peuvent donc, à l'exception des tests relatifs à l'introduction d'une nouvelle peinture primaire qui a été reconnue comme entrant dans le champ des dispositions précitées, être regardés comme apportant des améliorations substantielles présentant un caractère de nouveauté au sens des dispositions législatives précitées.

5. Le projet n°2 soumis par la société avait pour objet la détermination d'une peinture adaptée à la production d'un volet entièrement uni, peinture pouvant ainsi être appliquée à la fois aux volets et aux accessoires prépeints provenant de fournisseurs différents et composés de matériaux variés. Si la société fait valoir qu'il n'existait pas de solutions techniques le permettant, elle ne l'établit pas en se bornant à indiquer que ses fournisseurs ne lui en avaient proposé aucune. La circonstance alléguée selon laquelle les connaissances de la société ne lui permettaient pas de résoudre ces difficultés aisément malgré l'expérience de son dirigeant n'est pas de nature à démontrer l'existence de verrous technologiques alors qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'avis de l'expert que les difficultés signalées, à savoir, assurer un état de surface permettant une bonne accroche, intégrer les bases de peinture existantes dans la société et enfin, limiter la surépaisseur engendrée par la couche de finition, sont des tâches réalisables en s'appuyant sur le savoir-faire et les connaissances accessibles dans les domaines de la menuiserie et de la peinture. Ainsi, hormis les tests menés pour les dégraissages par solvants de pièces avant application de la peinture qui ont été reconnus comme entrant dans le champ du crédit impôt recherche, il n'est pas démontré que les autres activités menées, en l'occurrence, l'application de différentes peintures hors de tout cadre d'analyse structuré et le vieillissement des échantillons, processus qui ne comporte aucune incertitude, avaient un caractère d'améliorations techniques substantielles les faisant entrer dans le champ du crédit d'impôt recherche.

6. Enfin, la SAS France volet intex ne peut utilement se prévaloir du guide du crédit d'impôt recherche publié par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales dans la mesure où il n'émane pas de l'administration fiscale et ne constitue pas une interprétation formelle d'un texte fiscal. En tout état de cause, ce guide ne donne pas une interprétation différente de la notion de recherche et développement et d'activités éligibles au titre du crédit impôt recherche que celle résultant des dispositions précitées.

7. Il résulte de tout ce qui précède , et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête, que la SAS France volet intex n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée dans toutes ses conclusions y compris celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS France volet intex est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS France volet intex et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, vice-président,

Mme Mosser, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2024.

La rapporteure,

Signé : C. Mosser Le président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

N° 21NC03214


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC03214
Date de la décision : 15/02/2024
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Cyrielle MOSSER
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : HONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-15;21nc03214 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award