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07/11/2023 | FRANCE | N°20NC02177

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 07 novembre 2023, 20NC02177


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 24 septembre 2018 par laquelle la commune de Schwobsheim a refusé de lui louer la parcelle n° 39 section 11 " Umbruch ".

Par un jugement n° 1807149 du 18 juin 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cette délibération du 24 septembre 2018 en tant qu'elle attribue à M. C... F... la location de la parcelle n° 39 section 11 " Umbruch " et a mis à la charge de la commune de Schwobsheim une somme de

1 000 euros à verser à M. B... sur le fondement des dispositions de l'article L...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 24 septembre 2018 par laquelle la commune de Schwobsheim a refusé de lui louer la parcelle n° 39 section 11 " Umbruch ".

Par un jugement n° 1807149 du 18 juin 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cette délibération du 24 septembre 2018 en tant qu'elle attribue à M. C... F... la location de la parcelle n° 39 section 11 " Umbruch " et a mis à la charge de la commune de Schwobsheim une somme de 1 000 euros à verser à M. B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 30 juillet 2020 et 6 janvier 2021, la commune de Schwobsheim, représentée par Me Karm, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 18 juin 2020 ;

2°) de rejeter la demande de M. B... ;

3°) de mettre à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a annulé sa délibération du 24 septembre 2018 en tant qu'elle a attribué la parcelle section 11 n° 39 " Umbruch " à M. F... car celui-ci répondait aux exigences fixées par l'article R. 331-2 du code rural et de la pêche maritime puisqu'il avait exploité une surface égale au tiers de la surface agricole utile régionale moyenne pendant 5 ans au cours des 15 années précédant la date de la décision litigieuse et justifiait donc de la capacité professionnelle agricole par l'expérience ;

- la délibération litigieuse n'a pas méconnu l'ordre de priorité tel que prévu à l'article L. 411-15 du code rural et de la pêche maritime car, face à deux candidats de priorité équivalente, elle a privilégié le candidat qui avait d'ores et déjà une autorisation au titre du contrôle des structures et qui exploitait déjà des parcelles contiguës ;

- quand bien même M. F... n'aurait pas rempli les conditions de capacité professionnelle, il était détenteur d'une autorisation d'exploiter au titre du contrôle des structures, telle que prévue à l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime, de sorte qu'il pouvait signer valablement un bail rural.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2020, M. B..., représenté par la Selarl Dieudonné, conclut au rejet de la requête d'appel de la commune de Schwobsheim et à ce que le versement d'une somme de 2 000 euros soit mis à la charge de cette dernière en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à bon droit que le tribunal administratif a retenu que la commune de Schwobsheim avait commis une erreur de droit, au regard de l'article L. 411-15 du code rural et de la pêche maritime, en attribuant la parcelle litigieuse à M. F..., alors que ce dernier ne justifiait pas de la capacité ou de l'expérience professionnelle agricole ;

- les développements de la commune sur le fait que le titulaire d'une autorisation d'exploitation délivrée au titre du contrôle des structures peut valablement signer un bail rural sont sans emport, dès lors que n'était pas en cause la capacité juridique de M. F... à signer le contrat de bail litigieux, mais le respect de la priorité instituée par l'article L. 411-15 du code précité, entre les candidats à la conclusion d'un tel bail.

M. F..., à qui la procédure a été communiquée, n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Roussaux, première conseillère,

- et les conclusions de M. Michel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 24 septembre 2018, la commune de Schwobsheim a autorisé le maire de la commune à louer la parcelle n° 39 section 11 " Umbruch " à M. F.... M. B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg l'annulation de cette délibération en tant qu'elle a loué cette parcelle à M. F.... Par un jugement du 18 juin 2020, le tribunal administratif de Strasbourg doit être regardé comme ayant annulé la délibération n° 3 figurant dans les procès-verbaux de relevé de délibération du 24 septembre 2018, relative à la location de ce terrain. La commune de Schwobsheim relève appel de ce jugement du 18 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cette délibération dans cette mesure, a mis à sa charge des frais d'instance à verser à M. B... et a rejeté ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 411-15 du code rural et de la pêche maritime : " Lorsque le bailleur est une personne morale de droit public, le bail peut être conclu soit à l'amiable, soit par voie d'adjudication. (...) Quel que soit le mode de conclusion du bail, une priorité est réservée aux exploitants qui réalisent une installation en bénéficiant de la dotation d'installation aux jeunes agriculteurs ou, à défaut, aux exploitants de la commune répondant aux conditions de capacité professionnelle et de superficie visées à l'article L. 331-2 du présent code, ainsi qu'à leurs groupements. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que, lorsque le propriétaire de terres agricoles destinées à être données à bail est une commune ou un établissement public communal, le conseil municipal ou la commission administrative, en présence de plusieurs demandes concurrentes d'attribution du bail, doit procéder à un choix en respectant les procédures et l'ordre de priorité qu'elles prévoient. L'exercice de ce pouvoir d'appréciation implique nécessairement que lesdits organes délibérants aient connaissance de l'ensemble des candidatures en présence et procèdent à leur examen.

4. Pour donner en location par bail rural à M. F... la parcelle n° 39 section 11 " Umbruch " appartenant à la commune et pour laquelle deux autres candidatures avaient été déposées, le conseil municipal de la commune de Schwobsheim s'est fondé, dans la délibération litigieuse, d'une part, sur la circonstance que celui-ci disposait d'une autorisation implicite d'exploiter, au titre du contrôle des structures, datée du 27 février 2018 et d'autre part sur le fait que M. F... était exploitant de parcelles déjà limitrophes et contigües à la parcelle n° 39. Il a ainsi considéré que M. F... était prioritaire au regard des dispositions de l'article L. 411-15 du code rural et de la pêche maritime.

5. Aux termes de l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime, auquel renvoie l'article L. 411-15 du même code : " I. -Sont soumises à autorisation préalable les opérations suivantes : (...) 3° Quelle que soit la superficie en cause, les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles au bénéfice d'une exploitation agricole : a) Dont l'un des membres ayant la qualité d'exploitant ne remplit pas les conditions de capacité ou d'expérience professionnelle fixées par voie réglementaire ; (...) ". Aux termes de l'article R. 331-2 du même code " I. -Satisfait aux conditions de capacité ou d'expérience professionnelle mentionnées au 3° du I de l'article L. 331-2 le candidat à l'installation, à l'agrandissement ou à la réunion d'exploitations agricoles qui justifie, à la date de l'opération : 1° Soit de la possession d'un des diplômes ou certificats requis pour l'octroi des aides à l'installation visées aux articles D. 343-4 et D. 343-4-1 ; 2° Soit de cinq ans minimum d'expérience professionnelle acquise sur une surface égale au tiers de la surface agricole utile régionale moyenne, en qualité d'exploitant, d'aide familiale, d'associé exploitant, de salarié d'exploitation agricole ou de collaborateur d'exploitation au sens de l'article L. 321-5. La durée d'expérience professionnelle doit avoir été acquise au cours des quinze années précédant la date effective de l'opération en cause. (...) ".

6. La commune fait valoir que M. F... est détenteur d'une autorisation tacite d'exploiter, délivrée dans le cadre de la réglementation du contrôle des structures et portant sur des terrains contigus de la parcelle en cause. Toutefois, le fait qu'un candidat serait titulaire d'une autorisation d'exploiter est, par lui-même, sans incidence sur l'opposabilité de l'article L. 411-15 du code rural et de la pêche maritime et des critères qu'il énumère.

7. Il ressort des pièces du dossier, et ce point n'est pas contesté par les parties, qu'aucun des trois candidats à l'attribution de la parcelle " Umbruch " ne disposait de la qualité de jeune agriculteur. Dans ces conditions, et conformément à l'article L. 411-15 précédemment cité, la priorité devait être réservée aux exploitants de la commune où se situent les terres à louer et répondant à des conditions de capacité professionnelle et de superficie.

8. La circonstance que M. F... bénéficierait d'une autorisation implicite d'exploiter n'implique pas nécessairement, contrairement à ce que fait valoir la commune de Schwobsheim, qu'il soit regardé comme remplissant les conditions de capacités professionnelles, le I de l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime faisant relever du régime de l'autorisation le demandeur qui précisément ne satisfait pas aux conditions de capacité ou d'expériences professionnelles telles que fixées à l'article R. 331-2.

9. Si la commune soutient que M. F... bénéficiait de la capacité professionnelle agricole en raison de son expérience professionnelle sur le fondement des dispositions du 2° du I de l'article R. 331-2 précité, les pièces versées par la commune au dossier, qui consistent en des copies des dossiers PAC déposés auprès des services de l'Etat de 2013 à 2018, concernent M. A... F..., père de M. C... F..., et non ce dernier. Pour le surplus, la commune n'apporte aucun élément quant à la justification de la capacité ou de l'expérience professionnelle de M. C... F.... En revanche, il n'est pas contesté que M. B..., qui s'était porté candidat pour louer la parcelle en cause, est titulaire d'un brevet de technicien supérieur agricole, justifiant ainsi de la capacité professionnelle agricole au sens des dispositions de l'article R. 331-2 précité. Dans ces conditions, la délibération en litige ne pouvait, sans méconnaître les critères posés par l'article L. 411-15, retenir la candidature de M. F....

10. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Schwobsheim n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la délibération n° 3 du conseil municipal du 24 septembre 2018 attribuant à M. F... la location de la parcelle n° 39 section 11 " Umbruch ".

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Schwobsheim demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Schwobsheim une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Schwobsheim est rejetée.

Article 2 : La commune de Schwobsheim versera à M. B... une somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Schwobsheim, à M. D... B... et à M. C... F....

Délibéré après l'audience du 10 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Samson-Dye, présidente,

- Mme Roussaux, première conseillère,

- M. Denizot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2023.

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLa présidente,

Signé : A. Samson-Dye

La greffière,

Signé : N. Basso

La République mande et ordonne à la préfète du Bas-Rhin en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N. Basso

2

N° 20NC02177


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC02177
Date de la décision : 07/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme SAMSON-DYE
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS ASSOCIÉS KARM - ZAIGER

Origine de la décision
Date de l'import : 25/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-11-07;20nc02177 ?
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