Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 6 juin 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Par une ordonnance du 15 juin 2022, la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Strasbourg a transmis le dossier de la requête de M. D... au tribunal administratif de Nancy.
Par un jugement n° 2201683 du 4 octobre 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 octobre 2022, M. D..., représenté par Me Grosset, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy ;
2°) d'annuler l'arrêté de la préfète du Bas-Rhin du 6 juin 2022 ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut de lui de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier car il est insuffisamment motivé ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- la décision méconnaît les dispositions du 1°, du 2° et du 5° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aucune substitution de base légale avec les dispositions du 3° de l'article L. 611-1 du même code n'est possible dès lors qu'elle aurait pour effet de le priver d'une garantie ;
- elle est entachée d'incompétence ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- la préfète n'a pas procédé à une appréciation de sa situation personnelle et s'est crue, à tort, en situation de compétence liée pour examiner sa demande ;
- la préfète du Bas-Rhin aurait dû analyser les éléments relatifs à son état de santé présentés au cours de son audition par les services de la gendarmerie nationale comme une demande de protection contre l'éloignement ;
- la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
S'agissant de la décision lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :
- la décision est entachée d'incompétence ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle a été prise en méconnaissance de son droit d'entendu ;
- la préfète n'a pas procédé à une appréciation de sa situation personnelle et s'est crue, à tort, en situation de compétence liée ;
- elle est entachée d'une erreur de droit et d'un défaut de base légale dès lors que la législation nationale est contraire aux exigences de la directive 2008/115/CE ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- la décision est entachée d'incompétence ;
- elle a été prise en méconnaissance de son droit d'entendu ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
- la décision est entachée d'incompétence ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- la préfète s'est crue en compétence liée et n'a pas examiné sa situation ;
- la décision est entachée d'une erreur d'appréciation.
La procédure a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Par une décision du 10 juillet 2023, M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Marchal a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant arménien né le 8 mars 1989, est entré en France, selon ses déclarations, le 24 décembre 2012. Par un arrêté du 6 juin 2022, la préfète du Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. D... fait appel du jugement du 4 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 juin 2022.
Sur la régularité du jugement :
2. Il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Nancy, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments des parties, a expressément répondu, de manière suffisamment précise, aux moyens présentés dans les mémoires produits par le requérant. Ainsi, les premiers juges ont notamment exposé les motifs justifiant que le moyen tiré de la méconnaissance par la décision portant obligation de quitter le territoire français des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile soit écarté en indiquant, après avoir analysé, comme ils pouvaient régulièrement le faire, les pièces médicales versées par M. D..., que ces éléments ne suffisaient pas à justifier qu'un défaut de prise en charge médicale de l'intéressé l'exposerait à des conséquences d'une exceptionnelle gravité ni, en tout état de cause, qu'il ne pourrait bénéficier dans son pays des soins nécessaires. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement ne peut donc qu'être écarté.
Sur la légalité de l'arrêté du 6 juin 2022 de la préfète du Bas-Rhin :
En ce qui concerne le moyen commun aux différentes décisions :
3. Par un arrêté du 4 mars 2022 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du même jour, la préfète du Bas-Rhin a donné délégation à M. C... B... à l'effet de signer, durant ses permanences, notamment toute décision en matière d'entrée, de séjour des étrangers en France et d'éloignement ainsi que les décisions d'interdiction de retour sur le territoire français. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en cause manque en fait et doit être écarté.
En ce qui concerne les moyens propres à la décision portant obligation de quitter le territoire français :
4. En premier lieu, M. D... reprend en appel le moyen qu'il avait invoqué en première instance tiré de l'insuffisante motivation de la décision attaquée. Il y a lieu de rejeter ce moyen par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Nancy.
5. En deuxième lieu, M. D... ne verse au dossier aucun élément permettant de justifier qu'il ait sollicité la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé préalablement à l'adoption de la décision contestée. De plus, si le requérant a, lors de son audition du 6 juin 2022 par les services de la gendarmerie nationale, indiqué qu'il a été hospitalisé à la suite d'une importante chute et a décrit sommairement les conséquences de cette chute avant de mentionner qu'il prenait un traitement à base de Kardegic et de Laroxyl, il a toutefois précisé, lorsqu'il a, à la suite de ces déclarations, été interrogé sur son souhait de se prévaloir de son état de santé auprès de l'administration, ne souffrir d'aucun problème. Par ailleurs, lorsqu'il a été invité à présenter ses observations sur l'adoption d'une éventuelle mesure d'éloignement à son encontre, M. D... a précisé qu'il ne voulait pas retourner dans son pays d'origine pour des raisons politiques. Contrairement à ce que soutient le requérant, il ne résulte donc pas des échanges tenus lors de cette audition qu'il aurait entendu faire valoir que son état de santé s'opposait à son éloignement au regard des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, la préfète du Bas-Rhin, qui a rappelé les principales considérations relatives à la situation de M. D..., n'a pas entaché sa décision d'un défaut d'examen de la situation personnelle du requérant. Il ne ressort pas plus des pièces du dossier qu'elle se serait estimée en situation de compétence liée pour adopter la décision en litige. Par suite, ces moyens doivent être écartés.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / 2° L'étranger, entré sur le territoire français sous couvert d'un visa désormais expiré ou, n'étant pas soumis à l'obligation du visa, entré en France plus de trois mois auparavant, s'est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d'un titre de séjour ou, le cas échéant, sans demander le renouvellement du titre de séjour temporaire ou pluriannuel qui lui a été délivré ; / 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ; / (...) / 5° Le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public ; (...) ".
7. Pour obliger M. D... à quitter le territoire français, la préfète du Bas-Rhin a retenu qu'il est entré irrégulièrement sur le territoire français, mais aussi qu'il s'y maintenait sans disposer d'un titre de séjour et que son comportement constitue une menace pour l'ordre public. La préfète s'est ainsi fondée sur les dispositions tant du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que du 2° et du 5° de ce même article. Toutefois, le tribunal administratif de Nancy a substitué à ces fondements celui tiré du 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que M. D... s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par des arrêtés du préfet de Meurthe-et-Moselle en date du 10 février 2016 et du 28 septembre 2020. Contrairement à ce que se borne à soutenir à M. D..., une telle substitution de base légale n'a pas eu pour effet de le priver des garanties relatives à une éventuelle demande de protection contre l'éloignement. Le moyen doit donc être écarté.
8. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du même code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) "
9. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a, en raison d'un accident de la circulation survenu le 20 janvier 2022, été victime d'un accident vasculaire cérébral. Il justifie qu'à la date de la décision il devait toujours disposer d'une surveillance neurovasculaire régulière et bénéficier d'un traitement en raison des troubles connus à la suite de cet accident. Toutefois, à considérer qu'un défaut de prise en charge médicale serait en l'espèce susceptible d'entraîner pour l'intéressé des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il n'apporte aucun élément justifiant qu'il ne pourrait bénéficier d'une prise en charge adaptée à son état de santé dans son pays d'origine. Dans ces conditions et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise sur ce point, M. D... n'est pas fondé à soutenir qu'il pouvait bénéficier de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que la préfète du Bas-Rhin aurait ainsi méconnu les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du même code en l'obligeant à quitter le territoire français.
10. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
11. M. D... fait valoir qu'il est entré en France le 24 décembre 2012 et qu'il était donc présent sur le territoire français depuis 9 ans à la date de la décision en litige. Toutefois, il n'apporte aucun élément démontrant une quelconque intégration sociale en France. M. D..., qui est célibataire et sans enfant, ne soutient par ailleurs pas être démuni d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-trois ans. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la préfète du Bas-Rhin a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport au but en vue duquel la décision litigieuse a été prise. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit en conséquence être écarté.
En ce qui concerne la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :
12. En premier lieu, M. D... reprend en appel, sans les assortir d'éléments nouveaux, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision et de la méconnaissance de son droit d'être entendu. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
13. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de la décision litigieuse que la préfète a procédé à un examen de la situation personnelle de M. D... et a notamment considéré qu'il présentait un risque de soustraction à l'exécution de la mesure d'éloignement. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle se serait estimée en situation de compétence liée pour adopter la décision en litige. Par suite, ces moyens doivent être écartés.
14. En troisième lieu, d'une part, aux termes de l'article 3 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 : " Aux fins de la présente directive, on entend par : (...) 7) " risque de fuite " : le fait qu'il existe des raisons, dans un cas particulier et sur la base de critères objectifs définis par la loi, de penser qu'un ressortissant d'un pays tiers faisant l'objet de procédures de retour peut prendre la fuite (...) ". Aux termes de l'article 7 de cette directive : " (...) 4. S'il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les Etats membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire (...) ".
15. D'autre part, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / (...) / 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) / 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5. (...) ".
16. En estimant, dans les cas énoncés à l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il existe des risques que l'étranger se soustraie à l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français, le législateur a retenu des critères objectifs qui ne sont pas incompatibles avec la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil que la loi du 16 juin 2011 avait pour objet de transposer. En outre, en réservant l'hypothèse de circonstances particulières, l'article L. 612-3 a entendu garantir un examen de chaque situation individuelle au cas par cas et ne peut dès lors être regardé comme méconnaissant le principe de proportionnalité rappelé par la directive susvisée. Dès lors, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant un délai de départ volontaire aurait été prise en méconnaissance des objectifs fixés par la directive 2008/115/CE et serait dépourvue de base légale.
17. Alors que le préfet a refusé d'accorder un délai de départ volontaire au requérant en raison uniquement du risque de soustraction à l'exécution de la mesure d'éloignement qu'il présentait, M. D... ne saurait utilement faire valoir que son comportement ne présente pas une menace pour l'ordre public. Si le requérant soutient également qu'il ne présente pas un risque de fuite, il ressort des pièces du dossier qu'il ne conteste pas ne pas avoir pu présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité et que, de surcroît, il a déjà fait l'objet de deux mesures d'éloignement qu'il n'a pas exécutées. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
18. En premier lieu, M. D... reprend en appel, sans l'assortir d'éléments nouveaux, le moyen tiré de la méconnaissance de son droit d'être entendu. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
19. En second lieu, ainsi qu'il a été précisé au point 9, M. D... n'apporte aucun élément justifiant qu'il ne pourrait bénéficier, dans son pays d'origine, d'une prise en charge adaptée à son état de santé. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison des risques qu'elle implique sur sa santé.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
20. En premier lieu, M. D... reprend en appel, sans l'assortir d'éléments nouveaux, le moyen tiré du défaut de motivation. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
21. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de la décision litigieuse que la préfète a procédé à un examen de la situation personnelle de M. D... et a notamment souligné son absence de liens en France et l'inexécution de précédentes mesures d'éloignement. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète se serait estimée en situation de compétence liée pour lui interdire le retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.
22. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour ".
23. Si le requérant fait valoir que des circonstances humanitaires s'opposent à l'interdiction en litige, il n'apporte aucune précision quant à la nature de ces circonstances. En tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que des circonstances humanitaires s'opposaient à l'adoption de la mesure litigieuse. Le moyen doit donc être écarté.
24. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des article 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.
Délibéré après l'audience du 27 juin 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Wurtz, président,
- M. Meisse, premier conseiller,
- M. Marchal, conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juillet 2023.
Le rapporteur,
Signé : S. MARCHALLe président,
Signé : C. WURTZ
Le greffier,
Signé : F. LORRAIN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier :
F. LORRAIN
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N° 22NC02710