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18/07/2023 | FRANCE | N°20NC02616

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 18 juillet 2023, 20NC02616


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... E... et Mme B... E... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner solidairement la commune d'Illkirch-Graffenstaden et le club de rugby d'Illkirch-Graffenstaden à leur verser la somme de 160 000 euros en raison des préjudices subis du fait de la présence du complexe sportif à proximité immédiate de leur bien immobilier, d'enjoindre à la commune d'Illkirch-Graffenstaden de réaliser des travaux d'isolation phonique, d'enjoindre au club de rugby d'Illkirch-Graffenstaden (CRIG) d'i

nterdire l'exploitation des installations sportives entraînant des nuis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... E... et Mme B... E... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner solidairement la commune d'Illkirch-Graffenstaden et le club de rugby d'Illkirch-Graffenstaden à leur verser la somme de 160 000 euros en raison des préjudices subis du fait de la présence du complexe sportif à proximité immédiate de leur bien immobilier, d'enjoindre à la commune d'Illkirch-Graffenstaden de réaliser des travaux d'isolation phonique, d'enjoindre au club de rugby d'Illkirch-Graffenstaden (CRIG) d'interdire l'exploitation des installations sportives entraînant des nuisances sonores et visuelles et de condamner la commune d'Illkirch-Graffenstaden à leur verser la somme de 1 500 euros au titre des frais d'expertise.

Par un jugement n° 1900324 du 7 juillet 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande, ainsi que les conclusions de la commune d'Illkirch-Graffenstaden relatives aux frais d'instance.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 7 septembre 2020, 1er octobre 2020 et 4 février 2022, M. et Mme E..., représentés par Me Fady, de la SCP Racine Strasbourg - cabinet d'avocats, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 7 juillet 2020 ;

2°) de condamner solidairement la commune d'Illkirch-Graffenstaden et le club de rugby d'Illkirch-Graffenstaden à leur verser la somme de 160 000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de leur réclamation préalable, avec capitalisation de ces intérêts ;

3°) d'enjoindre à la commune d'Illkirch-Graffenstaden de réaliser des travaux d'isolation phonique dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre au club de rugby d'Illkirch-Graffenstaden d'interdire l'exploitation des installations sportives entraînant des nuisances sonores et visuelles ;

5°) de condamner la commune d'Illkirch-Graffenstaden et le club de rugby d'Illkirch-Graffenstaden à payer les frais de l'expertise menée par M. F... à hauteur de 1 500 euros ;

6°) de mettre à la charge de la commune d'Illkirch-Graffenstaden et du club de rugby d'Illkirch-Graffenstaden le versement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la responsabilité sans faute de la commune d'Illkirch-Graffenstaden est engagée en raison des dommages qu'ils subissent, en leur qualité de riverains et de tiers à l'ouvrage public, du fait de l'existence et du fonctionnement des équipements sportifs occupés par le club de rugby d'Illkirch-Graffenstaden (CRIG) :

. les nuisances sonores et visuelles excédent les sujétions que doivent supporter un riverain d'un ouvrage public ;

. ils subissent un dommage anormal ; l'expert désigné par le juge civil dans son rapport du 6 novembre 2017 a conclu que l'activité du complexe sportif avait un impact sonore indéniable dans l'environnement proche de leur habitation ;

- la responsabilité pour faute de la commune d'Illkirch-Graffenstaden est également engagée pour défaut de mise en œuvre des pouvoirs de police du maire, dès lors que la commune n'a pris aucune mesure pour éviter les nuisances sonores et visuelles et celles résultant des allées et venues liées au stationnement anarchique des véhicules ;

- la responsabilité pour faute de la commune d'Illkirch-Graffenstaden est également engagée en sa qualité de maitre d'ouvrage du complexe sportif du fait de la conception et de la réalisation de celui-ci, car aucune étude acoustique, isolation phonique et étude d'impact n'ont été réalisées dans le cadre du marché public qui a conduit à l'édification de cet ouvrage public ;

- la responsabilité pour faute du club de rugby d'Illkirch-Graffenstaden est engagée en sa qualité de délégataire de service public de cet ouvrage public, dans la mesure où le club exploite de manière intensive le terrain synthétique situé face à leur habitation et il n'a mis en place aucun dispositif concret afin de s'assurer d'une diminution du bruit engendré par les licenciés ;

- ils subissent des préjudices et sont donc fondés à en demander la réparation à hauteur de 160 000 euros ; leurs préjudices consistent en des troubles dans leurs conditions d'existence, pour 80 000 euros, et en une perte de valeur de leur bien immobilier, pour le même montant.

Par des mémoires en défense enregistrés les 2 septembre 2021 et 31 mars 2022, la commune d'Illkirch-Graffenstaden, représentée par Me Marcantoni, du cabinet ADVEN avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M.et Mme E... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Elle soutient que :

- il ressort des écritures des requérants qu'ils ont abandonné leurs demandes fondées sur la responsabilité sans faute car le dispositif de leur requête ne vise qu'à constater l'existence d'une faute de la commune qui engagerait sa responsabilité ;

- les requérants ne sont pas fondés à rechercher sur le terrain de la responsabilité pour dommages de travaux publics :

. ce n'est pas l'ouvrage public en lui-même qui est à l'origine du bruit mais son exploitation ;

. en tout état de cause, les nuisances sonores n'excèdent pas les sujétions normales inhérentes au voisinage d'un ouvrage public ;

. les rapports de l'expert qu'elle a mandaté ont mis en évidence des émergences provenant de la rue de la ceinture, de nature à couvrir les bruits émanant des terrains sportifs ;

. l'expertise diligentée par les requérants ne répond pas aux normes AFNOR en vigueur en matière de mesures acoustiques ;

- le maire de la commune n'a pas défailli dans l'utilisation de ses pouvoirs de police qu'il détient conformément à l'article L. 2542-3 du code général des collectivités territoriales, alors que des mesures ont été prises dès 2014 sous la forme de consignes pour l'utilisation des équipements afin de réduire au maximum la nuisance occasionnée aux habitants ;

- les préjudices invoqués par les requérants ne sont pas indemnisables :

. ils ne démontrent pas le caractère certain du trouble dans leurs conditions d'existence ;

. ils ne démontrent également pas que la perte de la valeur vénale de leur habitation, au demeurant non établie, résulterait de l'ouvrage public ;

- les conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées, dans la mesure où, si le préjudice acoustique devait être réparé au moyen d'une indemnisation, cette condamnation n'impliquerait pas que les requérants puissent demander que soient ordonnés des travaux d'isolation phonique à la charge de la commune ; elles excédent le pouvoir d'injonction du juge administratif.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Roussaux, première conseillère,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me Paye-Blondet, représentant M. et Mme E..., et A... C..., représentant la commune d'Illkirch-Graffenstaden.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme E... habitent depuis 1988 une habitation située à Illkirch-Graffenstaden et sont riverains du complexe sportif Albert Schweitzer, qui a été construit par la commune en 2014. Ce complexe a été mis à disposition, notamment, du club de rugby d'Illkirch-Graffenstaden (CRIG) qui l'utilise pour ses matchs et entraînements. Se plaignant principalement de nuisances sonores et visuelles générées par l'utilisation du complexe, les requérants ont, afin de faire interdire au CRIG d'utiliser le terrain synthétique, saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Strasbourg, lequel s'est déclaré incompétent pour connaitre d'un tel litige par une ordonnance du 31 mai 2018. Le 15 octobre 2018, les requérants ont adressé une réclamation préalable à la commune d'Illkirch-Graffenstaden et au CRIG afin d'être indemnisé de leur préjudice à hauteur de 160 000 euros. Par un courrier du 29 novembre 2018, la commune d'Illkirch-Graffenstaden a refusé de les indemniser. Ils ont alors demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner solidairement la commune d'Illkirch-Graffenstaden et le CRIG à leur verser la somme de 160 000 euros en raison des préjudices subis, d'enjoindre à la commune de réaliser des travaux d'isolation phonique, d'enjoindre au CRIG d'interdire l'exploitation des installations sportives et enfin de condamner la commune à leur verser la somme de 1 500 euros au titre des frais d'expertise. Par un jugement du 7 juillet 2020 le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande des requérants. M. et Mme E... relèvent appel de ce jugement.

Sur la responsabilité de la commune d'Illkirch-Graffenstaden :

En ce qui concerne la responsabilité sans faute de la commune d'Illkirch-Graffenstaden :

2. Le maître d'ouvrage est responsable même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement. Il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure. Ces tiers ne sont pas tenus de démontrer le caractère grave et spécial du préjudice qu'ils subissent lorsque le dommage n'est pas inhérent à l'existence même de l'ouvrage public ou à son fonctionnement et présente, par suite, un caractère accidentel.

3. Pour que la responsabilité sans faute de la commune d'Illkirch-Graffenstaden puisse être engagée, il appartient à Monsieur et Madame E..., tiers par rapport au complexe sportif, de démontrer le caractère grave et spécial du préjudice qu'ils estiment subir en raison des nuisances sonores et visuelles, qui présentent un caractère permanent et non accidentel.

4. Aux termes de l'article R. 1334-32 du code de la santé publique : " Lorsque le bruit mentionné à l'article R. 1334-31 a pour origine (...) une activité sportive, culturelle ou de loisir, organisée de façon habituelle ou soumise à autorisation, et dont les conditions d'exercice relatives au bruit n'ont pas été fixées par les autorités compétentes, l'atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l'homme est caractérisée si l'émergence globale de ce bruit perçu par autrui, telle que définie à l'article R. 1334-33, est supérieure aux valeurs limites fixées au même article ". Aux termes de l'article R. 1334-32 du même code : " L'émergence globale dans un lieu donné est définie par la différence entre le niveau de bruit ambiant, comportant le bruit particulier en cause, et le niveau du bruit résiduel constitué par l'ensemble des bruits habituels, extérieurs et intérieurs, correspondant à l'occupation normale des locaux et au fonctionnement habituel des équipements, en l'absence du bruit particulier en cause. / Les valeurs limites de l'émergence sont de 5 décibels A en période diurne (de 7 heures à 22 heures) et de 3 dB (A) en période nocturne (de 22 heures à 7 heures), valeurs auxquelles s'ajoute un terme correctif en dB (A), fonction de la durée cumulée d'apparition du bruit particulier (...). "

5. Les requérants soutiennent qu'ils sont exposés depuis 2014 à des bruits incessants, presque chaque jour jusqu'à 22 heures, en raison de l'utilisation des équipements sportifs dont ils sont riverains et qui sont utilisés par le CRIG pour ses matchs et entraînements. Ces nuisances sont constituées de cris, d'applaudissements, de coups de sifflet, de bruits de mégaphones et de fanfares, d'échos en raison d'un mauvais aménagement du site, plus accessoirement d'un éclairage trop puissant et des allées et venues de véhicules stationnés en face de chez eux.

6. Il résulte de l'instruction et notamment de l'expertise de la société Scène acoustique du 8 avril 2015, missionnée par la commune et menée contradictoirement, notamment en ce que ses relevés ont été effectués depuis le jardin des requérants, que l'émergence sonore résultant de l'utilisation en journée ou le soir en période diurne du terrain synthétique du complexe sportif, est faible, atteignant un maximal de 1,7 dB(A). Cette émergence tolérée est donc inférieure aux émergences réglementaires maximales tolérées tel que précisées à l'article R. 1334-32 précité qui sont de 5 dB(A). Ce rapport indique également que le niveau sonore, notamment lié à l'activité du terrain, est globalement couvert par le bruit résiduel constitué du trafic routier de la rue de la Ceinture, qui borde la propriété des requérants, et qui correspond selon la commune, et sans que cela soit contesté, à 2 700 véhicules par jour.

7. Les requérants se prévalent du rapport d'expertise judiciaire réalisé par M. F... du 6 novembre 2017, désigné par ordonnance du tribunal de grande instance de Strasbourg pour procéder à une mesure de constat relative à l'enregistrement sonore sur leur propriété et qui fait état d'une émergence sonore mesurée de 8,3 ou 8,4 selon les périodes, soit supérieure à celle indiquée par l'article précité du code de la santé publique. Il résulte toutefois de la contre-expertise réalisée par la société Scène acoustique et datée du 2 mars 2018 que la méthodologie de l'expertise du 6 novembre 2017 n'est pas conforme aux recommandations " AFNOR ", notamment en ce que la traçabilité des données n'est pas garantie, que l'analyse a été effectuée de manière continue alors que l'émergence sonore maximale tolérée doit être corrigée dès lors que l'activité des terrains n'est pas perceptible toute la journée et qu'en procédant à une mesure sur un temps long, il est impossible d'appliquer les correctifs imposés par l'article R. 1334-33 du code de la santé publique qui permettent de prendre en compte la durée d'apparition du bruit et de diminuer la valeur relevée et enfin que les conclusions du rapport sont en contradiction avec les courbes de mesures du rapport lui-même.

8. En l'absence de contestation sérieuse de la part des requérants sur cette contre-expertise du 2 mars 2018, laquelle critique de manière argumentée l'expertise du 6 novembre 2017, et au regard de l'ensemble des éléments contenus dans ces différents rapports qui ont été soumis au contradictoire et ont ainsi pu être discutés au contentieux, ainsi que des autres documents produits par les parties, M. et Mme E... n'établissent pas subir un préjudice grave et spécial en raison de nuisances sonores résultant de l'utilisation de l'ouvrage public. Il ne résulte pas davantage de l'instruction que des nuisances visuelles, ou d'autres types de nuisances liées à l'ouvrage en question, occasionneraient pour les requérants un préjudice grave et spécial.

En ce qui concerne la responsabilité pour faute de la commune d'Illkirch-Graffenstaden :

9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2542-1 du code général des collectivités territoriales : " Les dispositions du titre Ier du livre II de la présente partie sont applicables aux communes des départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, à l'exception de celles des articles L. 2212-1, L. 2212-2, L. 2212-3, L. 2212-4, L. 2213-6, L. 2213-7, L. 2213-8, L. 2213-9, L. 2213-21, L. 2213-26, L. 2213-27, L. 2214-3, L. 2214-4,L. 2215-1 et L. 2215-4. ". Aux termes de l'article L. 2542-3 du même code applicable aux communes des départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin : " Les fonctions propres au maire sont de faire jouir les habitants des avantages d'une bonne police, notamment de la propreté, de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité dans les rues, lieux et édifices publics. / Il appartient également au maire de veiller à la tranquillité, à la salubrité et à la sécurité des campagnes. ". L'article L. 2542-4 du même code dispose que : " (...) Le maire a également le soin : / 1° De réprimer les délits contre la tranquillité publique, tels que les rixes et disputes accompagnées d'ameutement dans les rues, le tumulte excité dans les lieux d'assemblée publique, les bruits, y compris les bruits de voisinage, et attroupements nocturnes qui troublent le repos des citoyens ; (...). ".

10. Si les requérants font valoir que le maire de la commune d'Illkirch-Graffenstaden a commis une faute dans l'exercice de ses pouvoirs de police en ce qu'ils ont subi des nuisances visuelles et sonores en raison de l'utilisation du complexe sportif, il ne résulte pas de l'instruction qu'ils subissent des nuisances sonores telles qu'elles porteraient atteinte à la tranquillité publique. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que la commune a mis en place des mesures pour éviter des stationnements intempestifs à l'abord du stade et à proximité de leur habitation et pour limiter l'éclairage à 50 % pour l'entrainement.

11. En second lieu, les requérants soutiennent que la commune d'Illkirch-Graffenstaden aurait commis une faute dans la conception et la réalisation de l'ouvrage en ne prenant pas en compte les nuisances que pouvaient générer l'utilisation de l'ouvrage, en l'absence d'étude acoustique préalable à sa construction et à son insuffisante isolation phonique. Toutefois, cette allégation n'est pas assortie des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

12. Il résulte de ce qui précède que les conclusions indemnitaires de M. et Mme E... dirigées contre la commune d'Illkirch-Graffenstaden, ainsi que par voie de conséquence leurs conclusions à fin d'injonction, doivent être rejetées.

Sur la responsabilité du CRIG :

13. Les requérants recherchent la responsabilité du CRIG en qualité de délégataire de service public.

14. La " convention de mise à disposition d'équipements sportifs " du 1er septembre 2013 signée entre la commune d'Illkirch-Graffenstaden et le CRIG autorise ce dernier à occuper le domaine public communal. Les obligations mises à la charge du CRIG correspondent à celles que le gestionnaire du domaine peut imposer à l'occupant dans l'intérêt du domaine et l'intérêt général. Il ne résulte pas des stipulations de la convention que la commune aurait décidé d'ériger les activités sportives en cause en mission de service public et d'en confier, sous son contrôle, la gestion au CRIG. Ce contrat constitue ainsi une concession d'occupation domaniale, et non une délégation de service public.

15. Il suit de là que les requérants ne sont pas fondés à rechercher la responsabilité du CRIG au titre d'une qualité de délégataire de service public, étant précisé que la simple qualité d'occupant ou d'utilisateur d'un ouvrage public ne permet pas d'engager sa responsabilité devant la juridiction administrative.

16. Par suite, les conclusions indemnitaires dirigées contre le CRIG ne peuvent qu'être rejetées.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Sur les dépens :

18. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. L'Etat peut être condamné aux dépens ".

19. Les frais de l'expertise judiciaire qui a été diligentée à la suite de la saisine par les requérants du tribunal de grande instance de Strasbourg ne relèvent pas des dépens de l'instance devant le juge administratif, au sens des dispositions précitées. Dès lors, les conclusions des requérants visant à condamner la commune et le CRIG à leur payer de tels frais doivent être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune d'Illkirch-Graffenstaden et du CRIG, qui ne sont pas dans la présente instance, les parties perdantes, le versement de la somme sollicitée par M. et Mme E... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

21. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme E... le versement de la somme demandée par la commune d'Illkirch-Graffenstaden sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune d'Illkirch-Graffenstaden présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... E... et Mme B... E..., à la commune d'Illkirch-Graffenstaden et au club de rugby d'Illkirch-Graffenstaden.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Samson-Dye, présidente,

- Mme Roussaux, première conseillère,

- Mme Picque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juillet 2023.

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLa présidente,

Signé : A.Samson-Dye

La greffière,

Signé : M. D...

La République mande et ordonne à la préfète du Bas-Rhin en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

M. D...

2

N° 20NC02616


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC02616
Date de la décision : 18/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme SAMSON-DYE
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : CABINET RACINE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-07-18;20nc02616 ?
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