La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/06/2023 | FRANCE | N°20NC03432

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 21 juin 2023, 20NC03432


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société S-PASS a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler, d'une part, le titre de recette n° 135 émis le 2 juin 2017 et rendu exécutoire par le président de la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois (CCPSV), ensemble l'opposition à tiers détenteur du 6 mars 2018 et de prononcer la décharge de l'obligation de paiement en résultant, et d'autre part, le titre exécutoire n° 65 du 20 avril 2018, ensemble la lettre de relance du 2 juillet 2018 et de prononcer la décharge de l'

obligation de paiement en résultant.

Par un jugement n° 1801082, 1802230 du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société S-PASS a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler, d'une part, le titre de recette n° 135 émis le 2 juin 2017 et rendu exécutoire par le président de la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois (CCPSV), ensemble l'opposition à tiers détenteur du 6 mars 2018 et de prononcer la décharge de l'obligation de paiement en résultant, et d'autre part, le titre exécutoire n° 65 du 20 avril 2018, ensemble la lettre de relance du 2 juillet 2018 et de prononcer la décharge de l'obligation de paiement en résultant.

Par un jugement n° 1801082, 1802230 du 29 septembre 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 26 novembre 2020 et le 23 mai 2023, la société S-PASS, représentée par Me Cabanes, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1801082-1802230 du 29 septembre 2020 du tribunal administratif de Nancy ;

2°) d'annuler le titre de recettes n° 135 et de prononcer la décharge de l'obligation de paiement en résultant, soit une décharge de 36 826,82 euros ;

3°) d'annuler le titre de recettes n° 65 et de prononcer la décharge de l'obligation de paiement en résultant, soit une décharge de 20 545,41 euros ;

4°) de mettre à la charge de la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois la somme de 4 000 euros en applications des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'une omission à statuer : les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de ce que la collectivité, alors qu'elle avait déjà perçu, au moyen d'avoirs, l'intégralité du différentiel entre le budget prévisionnel et réalisé par la société ENGIE-COFELY, lui a réclamé cette même somme ;

- les titres de recettes ne précisent pas les bases de la liquidation ; ils sont insuffisamment motivés ; contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, les courriers transmis avant l'émission des titres de recettes litigieux, à savoir le courrier du 16 mai 2017 pour le titre de recettes n° 135 et le courrier du 27 mars 2018 pour le titre de recettes n° 65, ne lui indiquent pas les bases de la liquidation des créances et elle n'était donc pas en mesure de comprendre le montant indiqué sur les titres ;

- la créance n'est pas fondée : la communauté de communes n'a pas respecté l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) :

. elle lui a réclamé plus que ce qui lui était dû ; elle devait déduire ce qui lui avait déjà été versé au moyen d'avoirs par la société ENGIE-COFELY ;

. en considérant que le paiement direct n'avait pas d'incidence sur les modalités de calcul de la somme à reverser, les juges du fond ont donc commis une erreur dans l'analyse des stipulations contractuelles, que la collectivité a elle-même mal appliquées ;

- en ce qui concerne le titre de perception n° 135 : elle ne doit que la somme de 78 002,07 euros sur les 85 344,06 euros réclamés au titre de l'exploitation 2015/2016 et est donc fondée à solliciter la décharge de la somme de 36 826,82 euros ;

- en ce qui concerne le titre de perception n° 65 : elle ne doit que la somme de 68 200,978 euros sur les 72 310,06 euros réclamés au titre de l'exploitation du deuxième semestre 2016/2017 et est donc fondée à solliciter la décharge de la somme de 20 545,41 euros ;

- il appartient à la communauté de communes d'apporter la preuve que les avoirs de la société ENGIE-COFELY ne donneront pas lieu à un versement à son profit.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 mai 2023, la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois, représentée par Me Le Chatelier, conclut au rejet de la requête et à ce que la société S-PASS soit condamnée à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif n'a commis aucune omission à statuer ;

- les bases de la liquidation des titres exécutoires étaient parfaitement connues par la requérante ;

- l'article 11 du CCAP n'établit aucune distinction entre les dépenses prévisionnelles et réelles du titulaire du marché et de son sous-traitant ;

- elle n'a jamais perçu la somme de 36 856,81 euros HT correspondant à l'avoir émis par la société ENGIE-COFELY ; les avoirs de la société ENGIE-COFELY ont donné lieu, le cas échéant, à une révision de la facturation pour la période postérieure en application de l'article 7-3 du CCAP.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Roussaux, première conseillère,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me Couette, représentant la société S-PASS et de Me Dubroca, représentant la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois.

Considérant ce qui suit :

1. Par acte d'engagement signé le 8 juin 2012, la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois (CCPSV) a confié à la société S-PASS (anciennement Carilis) la gestion du centre aquatique de loisirs et de remise en forme " l'Atrium " situé à Dombasle-sur-Meurthe. La société S-PASS a conclu un contrat de sous-traitance avec la société ENGIE-COFELY pour les prestations de gaz, d'électricité, d'eau, de produits de traitement et de maintenance des installations. Le 2 juin 2017, le président de la communauté de communes a émis un titre exécutoire n° 135, d'un montant de 143 684,23 euros, correspondant au différentiel entre les dépenses prévisionnelles et réelles du compte d'exploitation de l'exercice 2015-2016 qu'elle estimait lui être dû en application de l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) de ce marché. La communauté de communes a corrigé une erreur matérielle en faveur de la société S-PASS en août 2017 en retranchant du montant de ce titre exécutoire un montant de 28 854,71 euros correspondant aux acomptes versés. L'opposition à tiers détenteur délivrée le 6 mars 2018 par le comptable public de la trésorerie de Saint-Nicolas-de-Port fait ainsi état d'une somme à recouvrer de 114 829,52 euros. Le 20 avril 2018, le président de la communauté de communes a émis un second titre de recette n° 65, d'un montant de 88 746,39 euros, correspondant au différentiel entre les dépenses prévisionnelles et réelles du compte d'exploitation de l'exercice 2016-2017 qu'elle estimait lui être dû en application des mêmes stipulations du CCAP de ce même contrat. Le 2 juillet 2018, la société S-PASS a reçu une lettre de relance de la part du comptable public de la trésorerie de Saint-Nicolas-de-Port concernant cette somme. Par des demandes enregistrées sous les n° 1801082 et 1802230, la société S-PASS a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les titres de recettes n° 135 et n° 65, ensemble la notification de l'opposition à tiers détenteur délivrée le 6 mars 2018 et la lettre de relance du 2 juillet 2018. Par un jugement du 29 septembre 2020 n° 1801082, 1802230 le tribunal administratif de Nancy a rejeté ces demandes. La société S-PASS relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de ces deux titres de perception et à la décharge partielle des sommes réclamées par ces titres pour un montant s'agissant du titre de perception n° 135 d'une somme de 36 826,82 euros et s'agissant du titre n° 65, d'une somme de 20 545,41 euros.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. La requérante fait valoir que les premiers juges n'auraient pas répondu au moyen tiré de ce que la collectivité, alors qu'elle avait déjà perçu l'intégralité du différentiel entre le budget prévisionnel et réalisé par la société ENGIE-COFELY au travers d'avoirs, lui a à nouveau réclamé cette somme. Toutefois, il ressort des motifs du jugement attaqué que les premiers juges y ont répondu au point 14 lorsqu'il est précisé que la requérante se borne à soutenir que la créance litigieuse intègre des sommes ayant fait l'objet d'un paiement direct par la société ENGIE-COFELY à la CCPSV sans néanmoins se prévaloir de la méconnaissance d'une stipulation contractuelle du CCAP. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la régularité des titres exécutoires en litige :

3. Aux termes de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation ".

4. Pour satisfaire à ces dispositions, un état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur.

5. D'une part, il résulte de l'instruction que le titre exécutoire n° 135 du 2 juin 2017 a pour objet " reversement cpte exploitation 2015-2016 ". Si le titre ne comporte pas les bases de calcul de la créance, il résulte toutefois de ses mentions que lui était joint un document intitulé " courrier + cpte exploitation approuvé ". Il est constant que préalablement à l'émission du titre litigieux, la société S-PASS a été destinataire de ce courrier du 16 mai 2017, lequel indique avec précision les bases de la liquidation de la créance et mentionne qu'elle doit rembourser à la collectivité 80 % du différentiel à la collectivité en vertu de l'article 11 du CCAP.

6. D'autre part, il résulte de l'instruction que le titre exécutoire n° 65 du 20 avril 2018 a pour objet " reversement cpte exploitation 2016-2017 ". Il est également constant que la société S-PASS a reçu le 3 avril 2018, soit préalablement à l'émission du titre litigieux, un courrier du 27 mars 2018 de la CCPSV lui indiquant les éléments constitutifs de la créance. Ce courrier indique avec précision les bases de la liquidation et le montant dû en application de l'article 11 du CCAP. Enfin, ce courrier annonçait également qu'un " titre de recette de ce montant vous sera transmis dans les plus brefs délais ".

7. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que les bases de la liquidation de ces titres de perception n'étaient pas suffisamment précises doit être écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé des créances en en litige :

8. Aux termes de l'article 7 du CCAP : " la collectivité en assure la trésorerie nécessaire d'équilibre par des versements mensuels faits avant la fin de chaque mois et à titre d'avances, la régularisation de ces avances s'effectuant après la présentation des résultats définitifs de l'exercice considéré (...) ". Aux termes de l'article 11 du CCAP : " A la clôture de l'exercice, si le montant des dépenses réellement effectuées est inférieur au montant des dépenses prévues au budget prévisionnel, le Titulaire versera à la collectivité, dans un délai de trois mois, 80% du différentiel entre les dépenses prévisionnelles et les dépenses réelles (...) ". Aux termes de l'article 13 du CCAP : " la collectivité verse mensuellement au Titulaire un douzième du prix des prestations indiqué dans le budget prévisionnel pour une année pleine d'exécution (...) Les sommes dues au(x) titulaire(s) et au(x) sous-traitant(s) de premier rang éventuel(s) seront payées dans un délai global de 30 jours à compter de la date de réception des factures ou des demandes de paiement équivalentes ".

9. Il résulte de ces stipulations que le douzième du prix des prestations indiqué dans le budget prévisionnel est versé d'une part au titulaire et d'autre part au sous-traitant, en l'occurrence la société ENGIE-COFELY qui bénéficiait d'un paiement direct. En revanche l'article 11 du CCAP, qui prévoit qu'en cas de dépenses inférieures à celles prévues aux sommes inscrites au budget prévisionnel et avancées par la communauté de communes, le titulaire doit rembourser 80 % du différentiel, ne prévoit aucun remboursement par le sous-traitant. Aucune autre stipulation contractuelle ne prévoit de reversement à la charge du sous-traitant.

10. Il résulte de ce qui précède qu'en réclamant au seul titulaire du contrat le différentiel total entre les sommes perçues et celles exposées par le titulaire et le sous-traitant, la CCPSV n'a méconnu aucune stipulation du contrat. La circonstance que cette dernière a bénéficié, alors qu'aucune clause du contrat ne le prévoit, des avoirs du sous-traitant la conduisant à percevoir deux fois le différentiel entre les sommes versées en paiement direct et les dépenses à ce titre réellement exposées, n'a pas d'incidence sur le droit de la communauté de communes à percevoir, en application de l'article 11 du contrat, les 80 % du différentiel auprès du seul titulaire.

11. Dans ces conditions, le moyen selon lequel les créances ne seraient pas dues au motif qu'elles résulteraient d'une application inexacte de l'article 11 du CCAP doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la société S-PASS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par la société S-PASS soit mise à la charge de la CCPSV qui n'a pas la qualité de partie perdante.

14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances particulières de l'espèce, de mettre à la charge de la société S-PASS la somme demandée par la CCPSV, au même titre.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société S-PASS est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la communauté de communes du pays du Sel et du Vermois présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société S-PASS et à la communauté de communes des pays du Sel et du Vermois.

Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- Mme Samson-Dye, présidente assesseure,

- Mme Roussaux, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 juin 2023.

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : N. Basso

La République mande et ordonne au préfet Meurthe-et-Moselle en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N. Basso

2

N° 20NC03432


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC03432
Date de la décision : 21/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : ADALTYS AVOCATS ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-06-21;20nc03432 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award