Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'une part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015 et d'autre part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2016.
Par deux jugements respectivement rendus sous le n° 2004886 et le n° 2004888 du 29 juin 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 15 août 2021, sous le n° 21NC02322, M. A..., représenté par Me Wolff demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2004886 du 29 juin 2021 ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le jugement a méconnu le principe du contradictoire dans la mesure où son mémoire en réplique n'a pas été communiqué à l'administration fiscale ;
- nonobstant ses carences dans la tenue des documents requis pour son activité d'achat et de vente d'objet d'art, celle-ci a bien été accomplie à titre professionnel ; sa participation à cette activité est personnelle, continue et directe.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 février 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
II. Par une requête enregistrée le 15 août 2021, sous le n° 21NC02323, M. A..., représenté par Me Wolff demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2004888 du 29 juin 2021 ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le jugement a méconnu le principe du contradictoire dans la mesure où son mémoire en réplique n'a pas été communiqué à l'administration fiscale ;
- l'usage du parking situé à Strasbourg qu'il loue est professionnel à hauteur de 90 % ;
- les honoraires de son avocat constituent des charges qu'il a exposées dans le cadre de son activité professionnelle ;
- nonobstant ses carences dans la tenue des documents requis pour son activité d'achat et de vente d'objet d'art, celle-ci a bien été accomplie à titre professionnel ; sa participation à cette activité est personnelle, continue et directe ;
- les pénalités pour manquements délibérés ne sont pas justifiées dans la mesure où il a déclaré ses revenus avec les informations en sa possession car il ne disposait alors pas de sa comptabilité.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 février 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mosser,
- et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... qui exerce à titre principal la profession de masseur-kinésithérapeute soutient effectuer une seconde activité d'achat-revente de biens d'occasion. Il a fait l'objet d'une vérification de comptabilité de cette activité d'antiquaire engagée par un avis du 15 mai 2017. Par proposition de rectification du 25 septembre 2017, l'administration lui a notifié des rappels d'impôt sur le revenu pour les années 2014 et 2015 qui ont été mis en recouvrement le 31 décembre 2017 pour un montant total en droit et pénalités de 79 711 euros. Au titre de l'année 2016, il a fait l'objet d'une vérification de comptabilité de son activité de masseur-kinésithérapeute et a été destinataire d'une proposition de rectification le 23 mars 2019. Une seconde proposition de rectification lui a été transmise le 27 mars 2019, tirant les conséquences des constats effectués lors de la vérification de comptabilité de son activité d'antiquaire au titre des années précédentes et concernant à la fois son activité de masseur-kinésithérapeute et son activité d'antiquaire. L'imposition supplémentaire afférente a été mise en recouvrement le 31 octobre 2019 pour un montant total, en droits et pénalités de 42 710 euros. M. A... relève appel des jugements du 29 juin 2021 par lesquels le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes tendant à la décharge de ces impositions et pénalités au titre d'une part des années 2014 et 2015 et d'autre part, de l'année 2016.
Sur la jonction :
2. Les requêtes n° 21NC02322 et n° 21NC02323, présentées par M. A... concernent la situation d'un même contribuable et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement.
Sur la régularité des jugements :
3. Aux termes du troisième alinéa de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. "
4. Dans ses requêtes introductives d'instance devant le tribunal administratif de Strasbourg, M. A... a notamment soutenu que son activité d'antiquaire constitue une activité qu'il exerce de manière personnelle, continue et directe. A la suite des mémoires en défense de l'administration enregistrés le 12 mars 2021, il a produit des mémoires en réplique enregistrés dans chaque instance le 20 mai 2021 dans lesquels il se borne à préciser les conditions d'exercice de son activité d'antiquaire. Ainsi, les développements contenus dans ces mémoires en réplique ne contenaient aucun moyen nouveau, au sens de l'article R. 611-1 du code de justice administrative. Par suite, et alors même que ces derniers mémoires qui ont été visés par les premiers juges n'ont pas été communiqués à l'administration fiscale, M. A... n'est pas fondé à soutenir que les jugements attaqués seraient intervenus au terme d'une procédure irrégulière.
Sur les déficits imputables sur le revenu global des années 2014, 2015 et 2016 :
5. Aux termes de l'article 156 du code général des impôts : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (...) sous déduction : / I. du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; (...) / Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation : / 1° bis des déficits provenant, directement ou indirectement, des activités relevant des bénéfices industriels ou commerciaux lorsque ces activités ne comportent pas la participation personnelle, continue et directe de l'un des membres du foyer fiscal à l'accomplissement des actes nécessaires à l'activité. (...). Les déficits non déductibles pour ces motifs peuvent cependant être imputés sur les bénéfices tirés d'activités de même nature exercées dans les mêmes conditions, durant la même année ou les six années suivantes. (...) ". Il appartient au contribuable de justifier de la nature, du montant et du caractère déductible des dépenses qu'il entend porter en déduction de son revenu global.
6. M. A... qui exerçait à titre principal une activité de masseur-kinésithérapeute, soutient qu'il effectuait à titre personnel, continu et direct une activité secondaire d'antiquaire et réalisait, à ce titre, des opérations s'inscrivant dans un processus d'achat d'œuvres d'art en vue de leur revente. Toutefois, l'administration a relevé sans être utilement contestée qu'il n'a réalisé qu'une seule vente effective en 2014 et deux en 2015 et que les cessions ont été exécutées dans le cadre d'une seule salle des ventes ou par l'intermédiaire du crédit municipal de Strasbourg. Si M. A... soutient que la conjoncture économique n'était pas favorable, cette circonstance, à la supposer établie, ne saurait expliquer à elle seule un niveau si faible de ventes. L'administration a également constaté que le contribuable ne disposait à son domicile où il a déclaré exercer son activité, d'aucun local dédié à celle-ci. De plus, elle souligne qu'il n'a présenté au cours du contrôle fiscal de ses revenus, ni comptabilité, ni aucune des formalités obligatoires nécessaires à l'exercice de l'activité d'antiquaire alors même que cette activité avait déjà été contrôlée au titre des années 2011 et 2012. Par conséquent, nonobstant la circonstance que son activité préalable de décorateur ne nécessitait pas la réalisation de telles formalités, le requérant ne peut raisonnablement soutenir avoir ignoré les démarches administratives qu'il aurait dû accomplir. Si M. A... soutient que sa participation à des salons de vente réputés et son expertise dans les œuvres d'art des XVIIème et XVIIIème siècles ne sauraient se résumer à celle d'un collectionneur privé, il ne justifie ni qu'il aurait communiqué sur son activité d'antiquaire, ni qu'il aurait démarché de nouveaux clients ou cherché à développer son activité. Dans ces conditions, M. A... ne démontre pas qu'il aurait participé de manière personnelle, continue et directe à une activité d'antiquaire et ne justifie pas dès lors qu'il exerçait une telle activité de manière professionnelle. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le déficit issu d'une telle activité est imputable sur son revenu global au titre des années 2014, 2015 et 2016.
Sur le bénéfice non commercial et les pénalités de l'année 2016 :
En ce qui concerne le bénéfice non commercial :
7. Aux termes de l'article 12 du code général des impôts : " L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année ". Aux termes de l'article 93 du même code : " 1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession ". Quelle que soit la procédure d'imposition suivie à l'encontre du contribuable, il lui appartient de justifier que les sommes qu'il a déduites de son bénéfice non commercial ont constitué des dépenses nécessitées par l'exercice de sa profession.
8. M. A... se borne à contester la quote-part d'usage professionnel de deux tiers appliquée par l'administration pour le parking à usage mixte qu'il loue à Strasbourg en alléguant que son usage est professionnel à hauteur de 90 %. Or l'administration relève que ce parking se trouve plus proche du domicile du requérant que de son cabinet médical situé à Woerth, que le contribuable a lui-même déclaré lors des opérations de contrôle, que sa clientèle strasbourgeoise est limitée et que le contribuable n'avait pas remis en cause cette quote-part au titre des années précédentes. Par suite, M. A... ne démontre pas que 90 % de ses frais de location de parking sont justifiés par l'exercice de sa profession et doivent être déduits au titre de l'année 2016.
9. En ce qui concerne les notes d'honoraires relatives à l'intervention de son avocat dont M. A... demande la déduction, il se borne à soutenir qu'il s'agit d'une charge qu'il a exposée dans le cadre de son activité professionnelle sans le justifier davantage. L'administration relève notamment que ces factures ne figuraient pas dans la comptabilité lors des opérations de contrôle, et qu'il n'est pas établi qu'elles ont été réglées en 2016. Dans ces conditions, M. A... ne justifie pas de leur caractère professionnel et nécessaire à l'exercice de son activité. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a refusé d'opérer la déduction de ces deux factures de son bénéfice non commercial au titre de l'année 2016.
En ce qui concerne les manquements délibérés :
10. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ".
11. L'administration a assorti les cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu de la rectification du bénéfice non commercial de la majoration due en cas de manquement délibéré dans la mesure où le montant déclaré au titre de l'année 2016 était très inférieur au montant ressortant de la comptabilité et reporté sur une déclaration de bénéfices déposée le 14 décembre 2017. Si M. A... soutient qu'il ne disposait pas de sa comptabilité lorsqu'il a fait sa déclaration et a tenté de déclarer un résultat proche de la réalité et que son comptable a ultérieurement déposé une déclaration à son insu, l'administration relève sans être utilement contestée qu'il n'a pas signalé son incertitude quant au montant déclaré, ni signalé postérieurement une quelconque erreur. De plus, il avait déjà minoré ses résultats en 2014 et 2015, minoration qui avait d'ailleurs déjà été sanctionnée par une majoration pour manquement délibéré qu'il n'avait alors pas contestée. Enfin, l'administration avait déjà constaté d'importantes majorations de charges professionnelles lors de la vérification de comptabilité au titre de la période de 2010 à 2012. Ainsi, l'administration doit, eu égard à la persistance d'un comportement ayant pour but de tenter d'éluder l'impôt être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe du manquement délibéré du contribuable à ses obligations fiscales. Par suite, le requérant n'est pas fondé à demander la décharge de la pénalité dont la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu a été assortie.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes. Par suite, ses requêtes doivent être rejetées en toutes leurs conclusions, y compris celles relatives aux frais liés au litige.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes n° 21NC02322 et n° 21NC02323 de M. A... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 11 mai 2023, à laquelle siégeaient :
M. Agnel, président,
Mme Brodier, première conseillère,
Mme Mosser, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2023.
La rapporteure,
Signé : C. Mosser Le président,
Signé : M. Agnel
La greffière,
Signé : L. Kara
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
L. Kara
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N°s 21NC02322, 21NC02323