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16/05/2023 | FRANCE | N°20NC02743

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 16 mai 2023, 20NC02743


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C... et son épouse, Mme E... C..., ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner solidairement le centre hospitalier universitaire de Reims et la Société hospitalière d'assurances mutuelles à verser à M. F... C... la somme de 586 906,42 euros au titre de ses préjudices, à Mme E... C... la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice d'affection et, enfin, à M. et Mme C..., en leur qualité de représentants légaux de leurs deux enfants mineurs, la somme de 15 000

euros au titre du préjudice d'affection de leurs enfants.

G... un jugement ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C... et son épouse, Mme E... C..., ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner solidairement le centre hospitalier universitaire de Reims et la Société hospitalière d'assurances mutuelles à verser à M. F... C... la somme de 586 906,42 euros au titre de ses préjudices, à Mme E... C... la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice d'affection et, enfin, à M. et Mme C..., en leur qualité de représentants légaux de leurs deux enfants mineurs, la somme de 15 000 euros au titre du préjudice d'affection de leurs enfants.

G... un jugement n° 1801096 du 17 juillet 2020, le tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne a condamné le centre hospitalier universitaire de Reims et la Société hospitalière d'assurances mutuelles à verser à M. C... la somme de 39 803,36 euros.

Procédure devant la cour :

G... une requête, enregistrée le 21 septembre 2020, et un mémoire complémentaire, enregistré le 17 juin 2021, M. F... C... et son épouse Mme E... C..., représentés G... Me Aidi, demandent à la cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 17 juillet 2020 ;

2°) de condamner solidairement le centre hospitalier universitaire de Reims et la Société hospitalière d'assurances mutuelles à verser à M. F... C... la somme de 670 385,39 euros au titre de ses préjudices ;

3°) de condamner solidairement le centre hospitalier universitaire de Reims et la Société hospitalière d'assurances mutuelles à verser à Mme E... C... la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice d'affection ;

4°) de condamner solidairement le centre hospitalier universitaire de Reims et la Société hospitalière d'assurances mutuelles à verser à M. F... C... et à Mme E... C..., en leur qualité de représentants légaux de leur fils mineur, A..., la somme de 7 500 euros, au titre du préjudice d'affection de ce dernier ;

5°) de condamner solidairement le centre hospitalier universitaire de Reims et la Société hospitalière d'assurances mutuelles à verser à M. F... C... et à Mme E... C..., en leur qualité de représentants légaux de leur fille mineure, B..., la somme de 7 500 euros, au titre du préjudice d'affection de cette dernière ;

6°) d'assortir les sommes en cause des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir ;

7°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Reims et de la Société hospitalière d'assurances mutuelles les dépens, y compris les frais d'expertise ;

8°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Reims et de la Société hospitalière d'assurances mutuelles, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 5 000 euros à verser à M. C... et une somme de 1 500 euros à verser à Mme C....

Ils soutiennent que :

- l'expert a relevé que M. C... a subi une perte de chance due au manque d'informations qui lui avaient été données G... le chirurgien, qui aurait dû tout d'abord réaliser un forage cervico-céphalique au niveau de la hanche droite ;

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'une prothèse totale de la hanche droite était un choix thérapeutique approprié à l'état de M. C... et que le chirurgien n'a pas commis de faute en ne lui proposant pas de réaliser un forage cervico-céphalique au niveau de la hanche droite ;

- il est proposé à la cour, concernant la perte de chance de la hanche droite, de retenir un taux de 90 % ;

- M. C... justifie avoir exposé des frais de déplacement à hauteur de 129,12 euros ; il est fondé à solliciter une indemnité de 11 774,70 euros au titre de l'assistance tierce personne avant consolidation ; il sollicite une somme de 20 360,99 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels (avant consolidation) ; il est fondé à solliciter la prise en charge du surcoût inhérent à l'achat d'une voiture avec boîte automatique, qui peut être évalué à 11 123,35 euros, compte tenu d'un changement de véhicule tous les six ans ; il est fondé à solliciter une somme de 8 521,12 euros au titre de l'acquisition d'un vélo d'appartement, d'un tapis de marche, l'installation de la barre d'appui dans les douches, ainsi qu'au titre de l'installation d'une chaise murale dans la douche et du renouvellement de ce matériel tous les six ans ; il est fondé à solliciter une somme de 182 581,19 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs échus et à échoir ; c'est à tort que les premiers juges ont refusé d'indemniser ce poste de préjudice ; il est également fondé à solliciter une somme de 121 014,60 euros au titre de son préjudice de carrière ainsi qu'une somme complémentaire de 70 000 euros au titre du préjudice lié à l'état d'inactivité totale ; il est également fondé à solliciter une somme de 145 338,96 euros au titre de la perte de droits à retraite ; il est fondé à solliciter une somme de 3 288,82 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire lié à la prothèse de la hanche gauche ; il est fondé à solliciter une somme de 7 381,36 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire lié à la prothèse de la hanche gauche ; les souffrances endurées pourront être indemnisées G... l'allocation d'une indemnité de 20 000 euros ; il est fondé à solliciter une somme de 2 000 euros au titre de son préjudice esthétique temporaire ; s'agissant des préjudices extrapatrimoniaux permanents, l'expert a retenu un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) imputable de 5 % pour la hanche gauche et un taux d'IPP imputable de 8 % pour la hanche droite ; il est fondé à solliciter à ce titre une somme totale de 34 160 euros ; il subit également un préjudice d'agrément spécifique qui peut être indemnisé G... l'allocation d'une somme de 15 000 euros ; il est fondé à solliciter une somme de 4 000 euros au titre de son préjudice esthétique permanent et une somme de 7 000 euros au titre de son préjudice sexuel ; contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, il est fondé à solliciter l'indemnisation de son préjudice d'établissement et à solliciter une somme de 10 000 euros à ce titre ;

- le centre hospitalier universitaire de Reims et la SHAM devront également indemniser le préjudice d'affection de Mme E... C..., à hauteur de 10 000 euros et celui de leurs deux enfants, à hauteur de 7 500 euros, chacun.

G... des mémoires, enregistrés le 5 mai et le 20 juillet 2021, le centre hospitalier universitaire de Reims et la Société hospitalière d'assurances mutuelles, représentés G... Me Le Prado, concluent au rejet de la requête et demandent à la cour, G... la voie de l'appel incident :

1°) de réformer le jugement du 10 mars 2020 ;

2°) de ramener la somme de 39 803,36 euros, qu'ils ont été solidairement condamnés à verser à M. C..., à 34 803,36 euros.

Ils font valoir que :

- c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré qu'il ne pouvait pas être reproché au centre hospitalier l'absence de réalisation d'un forage du col et de la tête fémorale droite, préalablement à l'arthroplastie totale de la hanche droite, et qu'ils ont G... suite écarté tout manquement au devoir d'information et toute faute médicale s'agissant l'intervention d'arthroplastie totale de la hanche droite du 18 mars 2015 ;

- les requérants ne sont pas fondés à solliciter une indemnité supérieure à celle allouée G... les premiers juges ;

- c'est à tort que les premiers juges ont alloué une indemnité de 5 000 euros à M. C... au titre de l'incidence professionnelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public,

- et les observations de Me Sedlak pour les requérants.

Considérant ce qui suit :

1. M. F... C..., alors âgé de 41 ans, a présenté en 2013 une ostéonécrose bilatérale des têtes fémorales pour laquelle il a subi, dans un premier temps, au mois de mai 2013, un forage de hanche gauche. Dans les suites de ce forage, il a présenté une aggravation des phénomènes douloureux à la reprise d'appui en août 2013, justifiant la pose d'une prothèse totale de hanche gauche. Une prothèse de hanche de type RM/Twinsys a ainsi été mise en place le 22 janvier 2014, au centre hospitalier universitaire (CHU) de Reims. Il a subi, le 8 octobre 2014, une reprise chirurgicale lors de laquelle un changement de l'insert cotyloïdien a été réalisé. G... ailleurs, M. C... a, à nouveau, été hospitalisé du 17 mars 2015 au 22 mars 2015 au CHU de Reims en vue de la pose d'une prothèse totale de la hanche droite. Cette opération a été réalisée le 18 mars 2015. Estimant que la prise en charge réalisée au CHU de Reims n'avait pas été conforme aux règles de l'art, M. C..., son épouse et leurs enfants, ont saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, afin que ce dernier condamne le centre hospitalier à réparer les préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de fautes commises. G... un jugement du 17 juillet 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné le centre hospitalier universitaire de Reims et son assureur, la Société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), à verser à M. C... la somme de 39 803,36 euros. Il a considéré que la mise en place le 22 janvier 2014 de la prothèse de la hanche gauche n'avait pas été conforme aux règles de l'art de la chirurgie orthopédique, en raison d'une disposition verticale et non impactée du cotyle prothétique.

Sur la responsabilité du CHU de Reims :

2. Ainsi que l'ont jugé les premiers juges, il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expertise ordonnée G... le juge des référés du tribunal de grande instance de Reims le 29 janvier 2016 et réalisée G... un rhumatologue que, lors de l'intervention du 22 janvier 2014, le cotyle prothétique a été mal positionné et qu'ainsi, la réalisation du geste chirurgical au niveau de la hanche gauche n'a pas été conforme aux règles de l'art, du fait de la disposition verticale et non impactée du cotyle prothétique.

3. En revanche, si l'expert a également retenu " une perte de chance due au manque d'informations données à M. C... G... le chirurgien, qui aurait dû tout d'abord réaliser un forage cervico-céphalique au niveau de la hanche droite " et a indiqué que " ce forage aurait éventuellement permis de repousser de 3 à 5 ans la mise en place de la prothèse totale de hanche sachant que l'âge de l'intéressé le permettait ", il ne résulte pas de l'instruction que l'indication de la pose d'une prothèse totale de la hanche était erroné et qu'ainsi, ce choix thérapeutique était fautif. Il est ainsi notamment indiqué dans le compte-rendu d'une consultation de contrôle du 7 janvier 2015 que " la hanche droite est de plus en plus invalidante ", que " le tableau clinique s'aggrave avec des douleurs majorées à la position assise et que " l'ostéonécrose au niveau de la hanche droite (...) déjà connue (...) semble s'être accélérée ". Le praticien a conclu son compte-rendu en indiquant que " devant ce tableau clinique hyperalgique, [il] propose de réaliser une arthroplastie totale de hanche droite de façon à supprimer définitivement les douleurs ". M. C..., dont le forage de hanche gauche n'avait pas permis d'atténuer les phénomènes douloureux, n'apporte en outre pas d'élément de nature à établir qu'en ne lui proposant pas un forage de hanche droit, le chirurgien aurait commis une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier. G... ailleurs et alors même que l'expert relève un raccourcissement du membre inférieur droit de 2 centimètres induit G... la verticalisation du cotyle prothétique et G... la position de la tige prothétique fémorale, il ne résulte pas davantage de l'instruction, en l'absence de tout élément en ce sens dans le rapport d'expertise, que l'intervention pratiquée le 18 mars 2015 n'aurait pas été réalisée conformément aux règles de l'art.

4. Enfin, aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus (...) ".

5. Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il résulte de l'instruction qu'avant les interventions des 22 janvier 2014, 8 octobre 2014 et 18 mars 2015, M. C... qui a d'ailleurs signé les formulaires de consentement éclairé, a reçu des informations suffisantes sur ces interventions et, notamment, sur leurs modalités, leurs risques et leurs suites. G... ailleurs, ainsi qu'il a été dit ci-dessus et compte tenu de l'échec du forage dans la hanche gauche, les praticiens du centre hospitalier ont pu considérer qu'un forage dans la hanche droite ne constituait pas une possibilité thérapeutique raisonnable. Ils n'étaient ainsi pas tenus d'informer l'intéressé de cette possibilité. En tout état de cause, M. C..., qui avait subi une intervention similaire sur la hanche gauche, ne pouvait ignorer une telle possibilité. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le CHU de Reims aurait méconnu le devoir d'information du patient imposé G... les dispositions de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique.

Sur les préjudices :

6. Compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, les requérants sont fondés à solliciter une indemnisation au titre des seuls dommages subis du fait de la faute commise lors de la pose de la prothèse totale de la hanche gauche.

En ce qui concerne les préjudices subis G... M. C... :

S'agissant des préjudices patrimoniaux :

7. En premier lieu, M. C... ne conteste pas le montant de l'indemnité allouée G... les premiers juges au titre de ses frais de déplacement pour se rendre aux opérations d'expertise et à des séances de kinésithérapie et fixée à 129,12 euros.

8. En deuxième lieu, lorsque le juge administratif indemnise dans le chef de la victime d'un dommage corporel la nécessité de recourir à l'aide d'une tierce personne, il détermine le montant de l'indemnité réparant ce préjudice en fonction des besoins de la victime et des dépenses nécessaires pour y pourvoir. Il doit, à cette fin, se fonder sur un taux horaire permettant, dans les circonstances de l'espèce, le recours à l'aide professionnelle d'une tierce personne d'un niveau de qualification adéquat, sans être lié G... les débours effectifs dont la victime peut justifier. Il n'appartient notamment pas au juge, pour déterminer cette indemnisation, de tenir compte de la circonstance que l'aide a été ou pourrait être apportée G... un membre de la famille ou un proche de la victime.

9. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que l'état de santé de M. C... a justifié l'assistance d'une tierce personne, à raison de deux heures quotidiennes du 11 mars 2014 au 28 avril 2014 et du 14 octobre au 25 novembre 2014, et d'une heure quotidienne du 29 avril au 23 mai 2014 et du 26 novembre 2014 au 7 janvier 2015. Ainsi que l'indique M. C... lui-même, ce besoin en tierce personne en raison de la faute commise lors de la pose de la prothèse de la hanche gauche peut être évalué à 252 heures. Si les requérants produisent un devis établi en 2017 G... une société indiquant un coût horaire de 21 euros, ils n'établissement pas avoir sollicité d'autres devis ni, en tout état de cause, avoir fait appel à une cette société. Dans ces conditions, ce préjudice doit être, en l'espèce, déterminé sur la base d'un montant horaire de 13 euros et d'une année de 412 jours pour tenir compte des congés payés et des jours fériés. Dès lors, les premiers juges n'ont pas fait une évaluation insuffisante de ce chef de préjudice en allouant à ce titre à M. C... une indemnité de 5 000 euros.

10. En troisième lieu, les premiers juges ont alloué à M. C... une indemnité de 7 424,24 euros au titre de divers aménagements et équipements dans son logement et, plus particulièrement, au titre de l'acquisition d'un siège de douche, d'une barre d'appui mural, d'un tapis de course et d'un vélo d'appartement. Les requérants, qui se bornent à produire des devis pour un montant de 1 608,69 euros, n'établissent pas que ces équipements devraient être renouvelés tous les six ans. Dans ces conditions, les premiers juges n'ont pas fait une appréciation insuffisante de ce chef de préjudice.

11. En quatrième lieu, les premiers juges ont considéré que l'état physiologique de M. C... justifiait l'utilisation d'un véhicule doté d'une transmission automatique, alors qu'il possède un véhicule équipé d'une transmission manuelle, et que cette utilisation était imputable à la faute commise lors de la pose de prothèse de la hanche gauche. M. C... produit une attestation établie G... un garagiste indiquant que le surcoût pour l'achat d'une voiture avec boîte automatique peut être évalué à 2 100 euros. Compte tenu des prix de l'euro de rente viagère fixés dans le barème publié à la Gazette du Palais en 2022, il sera fait une juste appréciation du préjudice lié à l'achat et au renouvellement tous les sept ans d'un tel véhicule en l'évaluant à la somme globale de 9 365 euros.

12. En cinquième lieu, M. C... conteste le rejet G... les premiers juges de ses demandes tendant à l'indemnisation de ses pertes de revenus.

13. Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il résulte de l'instruction que M. C..., salarié en qualité de manutentionnaire-soudeur au sein d'une société depuis le 27 mars 2012, est également titulaire d'un certificat d'aptitude professionnelle de boulanger, obtenu en 1990 et d'un brevet de maîtrise de la pratique de ce métier délivré en 1992. Il a été placé en arrêt de maladie, en raison d'une lombosciatique, à compter du 23 novembre 2012, puis a été licencié pour inaptitude physique le 14 mars 2016, après que le médecin du travail l'a déclaré médicalement inapte à la profession de manutentionnaire-soudeur. Il a perçu des indemnités journalières du 29 avril 2014 au 30 septembre 2015. G... ailleurs, à la suite de son classement dans la catégorie 2 G... la caisse primaire d'assurance maladie, il bénéficie d'une pension d'invalidité, depuis le 1er octobre 2015, d'un montant annuel de 8 621 euros.

14. En l'état de l'instruction et compte tenu des éléments du rapport d'expertise, il ne peut pas être regardé comme établi que les pertes de revenus dont se prévaut le requérant seraient imputables à la faute commise. Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, M. C..., qui a été placé en arrêt de maladie le 23 novembre 2012, en raison d'une lombosciatique, n'établit pas avoir repris une activité professionnelle entre le 23 novembre 2012 et le 22 janvier 2014. G... ailleurs, il résulte de l'instruction qu'une évolution défavorable de l'ostéonécrose de la hanche droite, justifiant une prise en charge médicale, a été constatée dès le 7 janvier 2015. En outre, si l'expert fixe le taux d'incapacité permanente partielle imputable spécifiquement à la faute commise à 5 %, il relève également que le taux d'incapacité permanente partielle qui résulte, dans tous les cas, de la pose d'une prothèse totale de la hanche est de 5 % et que, du fait de la pose de la prothèse de la hanche droite, l'intéressé demeure atteint d'une incapacité permanente partielle supplémentaire de 13 %. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction qu'en l'absence de faute lors de la pose de la prothèse de la hanche gauche, M. C..., qui ne percevait plus de revenus professionnels depuis la fin du mois de novembre 2012, aurait effectivement été à même d'occuper à nouveau son emploi de manutentionnaire-soudeur à compter du 29 avril 2014. Il ne résulte pas davantage de l'instruction que les pertes de gains professionnels alléguées seraient en lien avec la faute commise. G... ailleurs, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, si M. C... soutient qu'en 2014 il devait racheter, avec son frère, les parts d'une société appartenant à son père et que la faute commise l'a privé de la possibilité de reprendre la gérance de cette société, il ne résulte pas de l'instruction que le déficit fonctionnel permanent de 5 % seul imputable à cette faute aurait fait obstacle à une telle co-gérance.

15. En sixième lieu, les premiers juges ont considéré que la faute commise avait aggravé l'incidence professionnelle de l'ostéonécrose invalidante dont a été affecté M. C... et de l'arthroplastie bilatérale des hanches dont il a bénéficié. Compte tenu des considérations énoncées au point précédent, les premiers juges n'ont pas fait une évaluation insuffisante de ce chef de préjudice en l'évaluant à 5 000 euros. G... ailleurs, si M. C... perçoit une rente d'invalidité versée G... l'organisme de sécurité sociale et si cette rente a pour objet de réparer les préjudices subis G... l'assuré dans sa vie professionnelle en conséquence de l'accident,

c'est-à-dire ses pertes de revenus professionnels et l'incidence professionnelle de son incapacité, cette prestation doit être regardée comme réparant prioritairement les pertes de revenus professionnels et, G... suite, comme ne réparant tout ou partie de l'incidence professionnelle que si la victime ne subit pas de pertes de revenus ou si le montant de ces pertes était inférieur au capital représentatif de la rente. En l'espèce, compte tenu des pertes de revenus subies G... M. C... du fait de son invalidité, la rente perçue doit être regardée comme réparant exclusivement les pertes de revenus professionnels. Dans ces conditions, le centre hospitalier et son assureur ne sont pas fondés à soutenir qu'il y a lieu de déduire cette rente de l'indemnité allouée à M. C....

S'agissant des préjudices extrapatrimoniaux :

16. Ainsi que l'ont retenu les premiers juges et compte tenu des conclusions de l'expert, il résulte de l'instruction que la date de consolidation de la hanche gauche peut être fixée au 16 mars 2015 et qu'en l'absence de faute lors de la réalisation de l'intervention du 22 janvier 2014, la consolidation aurait pu être acquise le 29 avril 2014.

En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux temporaires :

17. En premier lieu, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise, d'une part, qu'en l'absence de faute, l'arthroplastie de la hanche gauche dont a bénéficié M. C... lui aurait occasionné un déficit fonctionnel temporaire total du 21 au 27 janvier 2014, au taux de 50 % du 28 janvier au 10 mars 2014 et au taux de 10 % du 11 mars au 28 avril 2014 et, d'autre part, que du fait de la faute commise, il a subi un déficit fonctionnel temporaire total du 7 au 13 octobre 2014 et des déficits fonctionnels temporaires partiel aux taux de 75 % du 28 janvier 2014 au 10 mars 2014, de 50 % du 11 mars au 28 avril 2014, de 25 % du 29 avril au 23 mai 2014, de 10 % du 24 mai au 6 octobre 2014, de 50 % du 14 octobre 2014 au 25 novembre 2014, de 25 % du 26 novembre 2014 au 7 janvier 2015 et, enfin, de 15 % du 8 janvier au 16 mars 2015. Les premiers juges n'ont pas fait une évaluation insuffisante du déficit fonctionnel temporaire subi du fait de la faute commise en allouant à l'intéressé une somme de 1 500 euros.

18. En second lieu, les premiers juges n'ont pas davantage fait une évaluation insuffisante des souffrances endurées, estimées à 3 sur une échelle de 7 G... l'expert, et du préjudice esthétique temporaire de M. C..., qui a dû marcher en s'aidant d'une canne du 28 avril 2014 au 16 mars 2015, en lui allouant les sommes de, respectivement, 4 000 et 1 000 euros.

En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux permanents :

19. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, il résulte de l'instruction et notamment des conclusions de l'expert que la faute commise a engendré pour M. C... un surcroît d'incapacité permanente partielle, G... rapport à celle que lui aurait en tout état de cause occasionnée l'évolution normale d'une prothèse totale de la hanche gauche, qui peut être estimé à 5 %. Compte tenu de l'âge de M. C... à la date de la consolidation, les premiers juges n'ont pas fait une évaluation insuffisante du déficit fonctionnel permanent en lui allouant à ce titre une somme de 6 000 euros.

20. En deuxième lieu, le centre hospitalier et son assureur ne contestent pas que la faute commise a été à l'origine d'un préjudice esthétique permanent. L'expert a évalué ce préjudice à 2 sur une échelle de 7, sans distinguer la part imputable à la faute commise. Les premiers juges n'ont pas fait une évaluation insuffisante de ce poste de préjudice en allouant à M. C... une somme de 2 000 euros.

21. En troisième lieu, le centre hospitalier et son assureur ne contestent pas non plus que la faute commise a été à l'origine d'un préjudice sexuel. Compte tenu des conclusions de l'expert et des pathologies dont demeure affecté l'intéressé, les retentissements sur la libido et sur la réalisation de l'acte sexuel évoqués G... l'expert ne peuvent qu'être regardés comme très partiellement imputables à la faute commise. Les premiers juges n'ont pas fait une évaluation insuffisante de ce poste de préjudice en allouant à M. C... une somme de 1 000 euros.

22. En quatrième lieu, en se bornant à produire une attestation de son épouse indiquant qu'il s'occupait auparavant de l'entretien des extérieurs de la maison et du jardinage, M. C... n'établit pas qu'il aurait subi un préjudice d'agrément en raison de la faute commise.

23. En dernier lieu, il ne résulte pas de l'instruction et alors, ainsi qu'il a été dit

ci-dessus, que la faute commise a uniquement engendré un surcroît d'incapacité permanente partielle qui peut être estimé à 5 %, que le préjudice d'établissement dont M. C... demande réparation soit en lien avec cette faute.

Sur le préjudice d'affection de Mme C... et de leurs deux enfants :

24. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la faute commise a pour conséquence pour M. C... un déficit fonctionnel permanent supplémentaire qui n'est que de 5 %, l'incapacité permanente partielle supplémentaire étant liée à la pathologie initiale et évolutive du patient et à la pose de la prothèse de la hanche droite. Dans ces conditions, il n'est pas établi que le préjudice d'affection dont il est demandé réparation est en lien avec la faute commise.

25. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts C... sont seulement fondés à demander que l'indemnité que le tribunal administratif a condamné le CHU de Reims et la SHAM à verser à M. C... soit portée à la somme de 42 418,36 euros. L'appel incident présenté G... le centre hospitalier universitaire de Reims et la SHAM doit quant à lui être rejeté.

Sur les intérêts :

26. Si les consorts C... demandent que les sommes allouées soient assorties des intérêts à compter de la notification du présent arrêt, les premiers juges ont déjà assorti ces sommes des intérêts au taux légal à compter de la date de lecture du jugement. Leurs conclusions sont ainsi sans objet et ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les dépens :

27. Si les requérants demandent la condamnation du CHU de Reims et de la SHAM aux dépens comprenant les frais d'expertise, il n'est pas établi que les frais et honoraires de l'expertise ordonnée G... le juge des référés du tribunal de grande instance de Reims auraient été mis à leur charge. Ces conclusions doivent ainsi être rejetées.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

28. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHU de Reims et de la SHAM une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés G... M. C... et non compris dans les dépens, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La somme de 39 803,36 euros que le centre hospitalier universitaire de Reims et la Société hospitalière d'assurances mutuelles ont été condamnés à verser à M. C... G... le jugement du 17 juillet 2020 est portée à 42 418,36 euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 17 juillet 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le centre hospitalier universitaire de Reims et la Société hospitalière d'assurances mutuelles verseront à M. C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête des consorts C... est rejeté.

Article 5 : L'appel incident du centre hospitalier universitaire de Reims et de la Société hospitalière d'assurances mutuelles est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... C..., représentant unique en application des dispositions de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, au centre hospitalier universitaire de Reims, à la Société hospitalière d'assurances mutuelles et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise.

Délibéré après l'audience du 11 avril 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- Mme Haudier, présidente assesseure,

- M. Meisse, premier conseiller.

Rendu public G... mise à disposition au greffe le 16 mai 2023.

La rapporteure,

Signé : G. D...

Le président,

Signé : Ch. WURTZ

Le greffier,

Signé : F. LORRAIN

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

2

N° 20NC02743


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC02743
Date de la décision : 16/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme Guénaëlle HAUDIER
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : SARL LE PRADO - GILBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-05-16;20nc02743 ?
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