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11/05/2023 | FRANCE | N°21NC00954

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 11 mai 2023, 21NC00954


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par sept requêtes, la SASU Phoenix Pharma a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la réduction des cotisations foncières des entreprises établies au titre des années 2012 à 2018 et des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties établies au titre des années 2015 à 2018 à raison de son établissement situé dans la commune de Vandoeuvre-les-Nancy.

Par un jugement n° 1803228, 1803250, 1803255, 1803258, 1900953, 1900954 et 1901912 du 28 janvier 2021, le tribunal admi

nistratif de Nancy a partiellement fait droit à ces demandes en ce qui concerne les an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par sept requêtes, la SASU Phoenix Pharma a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la réduction des cotisations foncières des entreprises établies au titre des années 2012 à 2018 et des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties établies au titre des années 2015 à 2018 à raison de son établissement situé dans la commune de Vandoeuvre-les-Nancy.

Par un jugement n° 1803228, 1803250, 1803255, 1803258, 1900953, 1900954 et 1901912 du 28 janvier 2021, le tribunal administratif de Nancy a partiellement fait droit à ces demandes en ce qui concerne les années 2013 à 2018.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête enregistrée le 26 mars 2021 et des mémoires enregistrés le 24 novembre 2022 et le 29 mars 2023, la SASU Phoenix Pharma, représentée par Mes Maheust et Du Pasquier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a omis de statuer sur sa demande relative à l'année 2012 ;

2°) de prononcer la réduction de la cotisation foncière des entreprises et des taxes annexes établies au titre de l'année 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il a omis de statuer sur ses conclusions tendant à la réduction de la cotisation foncière des entreprises établie au titre de l'année 2012 ;

- l'outillage et le matériel n'ayant pas un rôle prépondérant dans l'activité de l'entrepôt qu'elle exploite, c'est à tort que l'administration a voulu l'évaluer selon les règles des articles 1499 et 1500 du code général des impôts propres aux établissements industriels.

Par un mémoire enregistré le 29 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

II) Par une requête enregistrée le 12 mai 2021, sous le n° 21NC01381, et des mémoires enregistrés le 22 octobre 2021 et le 10 août 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 janvier 2021 ;

2°) de rétablir à la charge de la SASU Phoenix Pharma les cotisations foncières des entreprises dues au titre des années 2013 à 2018 ainsi que les cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties dues au titre des années 2015 et 2016 dont le tribunal administratif de Nancy a prononcé la réduction.

Il soutient que :

- c'est à tort que par ordonnance du 28 juin 2021 la présidente de la cour a renvoyé les conclusions de sa requête d'appel relatives aux taxes foncières des années 2015 et 2016 au Conseil d'Etat alors que ces conclusions étaient bien connexes aux conclusions en matière de cotisation foncière des entreprises pour lesquelles la cour est bien compétente ;

- c'est à tort que le jugement a prononcé la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties des années 2015 et 2016 demandées par la société Phoenix Pharma alors que le redevable légal de ces impositions est la société BPI France Financement ;

- le rôle de l'outillage et du matériel étant prépondérant dans l'activité exercée par la société dans son établissement, c'est à tort que le jugement a estimé que ce local ne pouvait pas être évalué selon la méthode comptable.

Par des mémoires enregistrés les 12 octobre 2021, 4 août 2022, 23 novembre 2022 et 29 mars 2023, la SASU Phoenix Pharma, représentée par Me Maheust et Me Du Pasquier, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme de 7 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par le ministre ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 28 juin 2021, la présidente de cette cour a renvoyé au Conseil d'Etat les conclusions de la requête ci-dessus visée sous le n° 21NC01381 relatives à la taxe foncière sur les propriétés bâties des années 2015 et 2016 au Conseil d'Etat.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... ;

- et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée à associé unique (SASU) Phoenix Pharma dont le siège est à Créteil, exerce une activité de grossiste-répartiteur en pharmacie, dans un établissement situé au 36 rue Jean Mermoz à Vandœuvre-lès-Nancy / Heillecourt, propriété indivise de la SA BPI France Financement et de la société Natixis Lease Immo jusqu'en 2016. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant concerné la période du 1er février 2011 au 31 janvier 2014. A l'issue des opérations de contrôle, le service a requalifié l'établissement de Vandœuvre-lès-Nancy / Heillecourt en établissement industriel ce qui a entraîné des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises et de taxes annexes au titre des années 2012 à 2016 ainsi que de taxe foncière sur les propriétés bâties au titre des années 2015 et 2016. En outre, les rôles de taxe foncière sur les propriétés bâties et de cotisation foncière des entreprises ont été mis en recouvrement au titre des années 2017 et 2018 sur la base de la valeur locative telle que réévaluée après cette requalification en établissement industriel. La société Phoenix Pharma, après le rejet de ses réclamations préalables, a saisi le tribunal administratif de Nancy par sept requêtes tendant à la réduction de ces impositions. La SASU Phoenix Pharma relève appel du jugement du 28 janvier 2021 en tant que le tribunal administratif de Nancy a omis de faire droit à sa demande tendant à la décharge du supplément de cotisation foncière des entreprises et de taxes annexes qui lui a été assigné au titre de l'année 2012. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel de ce même jugement en tant qu'il a prononcé la réduction des cotisations foncières des entreprises et des taxes annexes au titre des années 2013 à 2018 ainsi que des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties au titre des années 2015 et 2016. Il y a lieu de joindre ces deux requêtes afin de statuer par un seul arrêt.

Sur l'étendue du litige :

2. Dès lors que, par une ordonnance du 28 juin 2021, la présidente de cette cour a renvoyé au Conseil d'Etat les conclusions de la requête ci-dessus visée sous le n° 21NC01381 du ministre chargé du budget, relatives à la taxe foncière sur les propriétés bâties due au titre des années 2015 et 2016, il n'y a pas lieu, contrairement à ce que soutient le ministre, de statuer sur ces conclusions dans le cadre du présent litige. Par ailleurs, le ministre chargé du budget s'est également pourvu en cassation en tant que ce même jugement a prononcé la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties des années 2017 et 2018 et, par une décision n° 450973 du 1er juillet 2021, le Conseil d'Etat n'a pas admis ce pourvoi. En conséquence, dans le cadre de la présente instance, outre les conclusions de la SASU Phoenix Pharma relatives à la cotisation foncière des entreprises de l'année 2012, il appartient à la cour de statuer sur les conclusions du ministre uniquement en tant qu'elles sont relatives à la réduction des cotisations foncières des entreprises et des taxes annexes établies au nom de cette société au titre des années 2013 à 2018.

Sur la régularité du jugement :

3. Le jugement attaqué a omis de statuer sur les conclusions de la requête n°1803258 par laquelle la société Phoenix Pharma a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge du supplément de cotisation foncière des entreprises et de taxes annexes qui lui a été assigné au titre de l'année 2012. Par suite, le jugement ci-dessus visé du 28 janvier 2021 doit être annulé dans cette mesure.

4. Il y a lieu pour cette cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de la société Phoenix Pharma présentée devant le tribunal administratif de Nancy en ce qui concerne la cotisation foncière des entreprise et les taxes annexes dues pour l'année 2012 et de statuer par la voie de l'effet dévolutif sur les autres années en litige.

Sur le bien-fondé des impositions :

5. Aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France (...) dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle (...). La valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe ". Les règles suivant lesquelles est déterminée la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties sont définies à l'article 1496 du code général des impôts pour les locaux affectés à l'habitation ou assimilés, à l'article 1498 pour tous les biens autres que les locaux d'habitation ou assimilés et à l'article 1499 pour les immobilisations industrielles. Revêtent un caractère industriel, au sens de l'article 1499 du code général des impôts, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant.

6. Il résulte de l'instruction que pour réaliser son activité, qui ne consiste pas en la fabrication ou transformations de biens mais se limite à une activité d'expédition des commandes à destination des officines, la société Phoenix Pharma utilise deux automates de 50 mètres pour la préparation de commandes automatiques, des systèmes de convoyage Knapp motorisés et commandés par ordinateur, un logiciel de gestion d'entrepôt, des systèmes d'emballage automatique (cercleuses, paqueteuses, couvercleuses ...), du matériel de manutention et de transport de marchandises ( monte-charges, chariot élévateur, transpalette, camionnette ...), du matériel de stockage et de conditionnement (rayonnage statiques, dynamiques, racks, bacs, couvercles ...), du matériel pour le stockage des médicaments à basse température (chambres froides, congélateurs, surgélateurs...) et du matériel permettant le contrôle des températures dans les entrepôts. Ces moyens techniques, compte tenu de leur nature, de leur nombre et de leur valeur, peuvent être regardés comme importants. Cependant, il résulte de l'instruction, sans que cet élément ne soit à lui seul décisif, que la société exerce son activité dans un entrepôt d'une superficie de 5 852 m² au sein duquel la zone de l'automate représente une surface de 185m² soit 3,1% de la surface du bâtiment et les congélateurs et réfrigérateurs occupent 32 m² soit 0,5% de la surface du bâtiment. La société requérante soutient également que son activité de préparation des commandes, bien qu'en partie automatisée, nécessite des interventions manuelles, notamment pour le réapprovisionnement de l'automate, et qu'à ce titre 37 salariés sur un effectif de 80 salariés sont affectés à la préparation des commandes. S'agissant de ces derniers, 65 % de leur activité est effectuée de manière manuelle et non automatisée. Il résulte également de l'instruction que cette étape de préparation des commandes représente moins de la moitié de l'activité de l'établissement, le reste du temps de travail étant consacré aux commandes auprès des laboratoires, à la réception des commandes, au tri et au rangement de ces dernières, à la gestion des stocks, à la livraison des officines et à la gestion des retours, activités qui sont essentiellement manuelles. A cet égard, le ministre ne saurait utilement soutenir qu'il ne faudrait pas tenir compte des activités de l'établissement ne donnant pas lieu à une facturation alors que toutes ces activités concourent nécessairement à la réalisation du chiffre d'affaires. Enfin, alors même que 95 % des produits sont gérés par le logiciel Pharmos, seuls 14 % d'entre eux font l'objet d'une manipulation automatisée en vue de leur préparation et de leur expédition. Ainsi, il résulte de l'instruction que les installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre par la société requérante ne peuvent être considérés comme jouant un rôle prépondérant au regard de l'ensemble de l'activité exercée au sein de l'établissement lui conférant ainsi le caractère d'un établissement industriel. Par suite, l'administration fiscale ne pouvait estimer que l'établissement exploité à Vandœuvre-lès-Nancy / Heillecourt par la société Phoenix Pharma présentait un caractère industriel et devait être soumis, pour la détermination de la valeur locative, aux dispositions précitées de l'article 1499 du code général des impôts.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a fait droit aux demandes de réduction des cotisations foncières des entreprises et des taxes annexes établies au titre des années 2013 à 2018 au nom de la société Phoenix Pharma tandis que celle-ci est fondée, pour sa part, à demander la réduction de la cotisation foncière des entreprises et de taxes annexes établies au titre de l'année 2012.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, le versement à la société Phoenix Pharma d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle dans les instances ci-dessus visées.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy du 28 janvier 2021 est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions de la société Phoenix Pharma tendant à la réduction de la cotisation foncière des entreprises et de taxes annexes dues au titre de l'année 2012.

Article 2 : La société Phoenix Pharma est renvoyée devant l'administration fiscale pour que celle-ci procède au calcul de la valeur locative de l'établissement qu'elle exploite à Vandœuvre-lès-Nancy selon les dispositions de l'article 1498 du code général des impôts et détermine les montants de cotisation foncière des entreprises, de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie et de taxe spéciale d'équipement qui en résultent pour l'année 2012.

Article 3 : La société Phoenix Pharma est déchargée des suppléments de cotisation foncière des entreprises, de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie et de taxe spéciale d'équipement auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2012 à hauteur de leurs montants qui, ajoutés à l'imposition initiale, dépassent les montants de cotisation foncière des entreprises et de taxes annexes déterminés conformément à l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête ci-dessus visée sous le n° 21NC01381 du ministre de l'économie, des finances et de la relance, tel que précisé dans les motifs au point 2 ci-dessus, est rejeté.

Article 5 : L'Etat versera à la SASU Phoenix Pharma la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SASU Phoenix Pharma et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie du présent arrêt sera transmise au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat.

Délibéré après l'audience du 6 avril 2023, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 mai 2023.

Le rapporteur,

Signé : M. AgnelLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

N°s 21NC00954, 21NC01381

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC00954
Date de la décision : 11/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL DE PARIS LA DEFENSE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-05-11;21nc00954 ?
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