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13/04/2023 | FRANCE | N°22NC01085

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 13 avril 2023, 22NC01085


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 14 octobre 2021 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être reconduite.

Par un jugement n° 2200134 du 28 avril 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :<

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Par une requête enregistrée le 2 mai 2022, Mme B..., représentée par Me Issa, demande à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 14 octobre 2021 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être reconduite.

Par un jugement n° 2200134 du 28 avril 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 mai 2022, Mme B..., représentée par Me Issa, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 28 avril 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 octobre 2021 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être reconduite ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer le titre de séjour qu'elle a sollicité ou à tout le moins de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente de ce réexamen, de la mettre immédiatement en possession d'une autorisation provisoire de séjour.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- Le tribunal administratif n'a pas jugé sa requête dans le délai de trois mois prévu à l'article L. 614-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

- elle est entachée d'irrégularité, dès lors que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) n'a pas été consulté sur sa capacité à voyager sans risque vers son pays d'origine ;

- la commission du titre de séjour n'a pas été consultée conformément aux articles L. 432-13 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision attaquée méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle ne peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle justifie de l'existence de liens familiaux et personnels intenses, stables et anciens sur le territoire français ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;

- l'illégalité de la décision de refus de séjour prive de base légale la décision d'obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;

- elle doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour ;

- l'état de santé de la requérante ne lui permet pas de voyager dans son pays d'origine.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 octobre 2022, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme C... D... épouse B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Barrois, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante serbe née le 8 janvier 1986 déclare être entrée sur le territoire français le 22 décembre 2013 afin d'y solliciter la reconnaissance du statut de réfugié. Sa demande d'asile enregistrée le 13 mars 2014 a été rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 16 mars 2015, qui a été de nouveau rejetée dans le cadre d'une procédure de réexamen. Le 18 juillet 2019, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour pour raisons de santé. A la suite d'un avis défavorable du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 12 octobre 2020, le préfet de Meurthe-et-Moselle par un arrêté du 14 octobre 2021, a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai. Mme B... fait appel du jugement du 28 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement

2. Aux termes de l'article L. 614-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français prise en application des 3°, 5° ou 6° de l'article L. 611-1 est assortie d'un délai de départ volontaire, le tribunal administratif est saisi dans le délai de trente jours suivant la notification de la décision. L'étranger peut demander le bénéfice de l'aide juridictionnelle au plus tard lors de l'introduction de sa requête en annulation. Le tribunal administratif statue dans un délai de trois mois à compter de sa saisine ". Le délai de trois mois prévu par ces dispositions n'étant pas prescrit à peine de nullité ou de dessaisissement, la circonstance que la demande de Mme B..., enregistrée le 17 janvier 2021 au greffe du tribunal administratif de Nancy, n'ait fait l'objet d'un jugement par ce tribunal que le 28 avril 2022 est sans incidence sur sa régularité.

En ce qui concerne la légalité du refus de séjour :

3. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an " et de l'article R. 425-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ".

4. En premier lieu, contrairement à ce que soutient la requérante, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a bien apprécié dans son avis du 12 octobre 2020 si son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine. La circonstance, temporaire, qu'elle ait été opérée d'une appendicite le 9 juin 2022 étant sans incidence sur cette appréciation. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration doit être écarté.

5. En deuxième lieu, la requérante ne produit aucun élément nouveau en appel. Les seuls rapports émanant d'organisations internationales sur la situation et l'accès aux soins des membres de la communauté Rom en Serbie, qui sont anciens et dont certains ne sont pas traduits, ne permettent pas à eux seuls de remettre en cause l'avis du collège de médecins de l'OFII selon lequel l'intéressée pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

6. En troisième lieu, dès lors que l'intéressée ne remplissait pas effectivement les conditions posées pour l'obtention de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour.

7. En quatrième lieu, si la requérante se prévaut de la durée de sa présence sur le territoire français, celle-ci ne découle que de son maintien irrégulier en dépit des obligations de quitter le territoire dont elle a fait l'objet. De plus, si elle soutient que ses deux enfants seraient scolarisés en France et qu'elle aurait des liens personnels et affectifs intenses et stables en France, elle ne produit aucun élément au soutien de ses allégations. Dans ces conditions, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée aurait porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée et aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation de la requérante est écarté.

En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français

8. En premier lieu, Mme B... reprend en appel, sans apporter d'élément nouveau ni critiquer utilement les motifs de rejet qui lui ont été opposés par le premier juge, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et de la méconnaissance de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus, à juste titre, par le magistrat désigné par le tribunal administratif de Nancy dans son jugement du 28 avril 2022 et énoncés aux points 16 et 18 dudit jugement.

9. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que le refus de titre de séjour est fondé. Par suite, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision portant obligation de quitter le territoire est écarté.

10. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales est écarté.

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination

11. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que la décision portant obligation de quitter le territoire est fondée. Par suite, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision fixant le pays de destination est écarté.

12. En deuxième lieu, il résulte des termes mêmes de la décision attaquée que le préfet a apprécié si Mme B... serait exposée à des peines ou des traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Serbie. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation est écarté.

13. En dernier lieu, à l'exception de son hospitalisation récente en juin 2022 pour une appendicite dont il ne ressort pas qu'il y aurait des conséquences sur son état de santé, la requérante ne produit aucun élément de nature à établir qu'elle ne pourrait pas voyager vers son pays d'origine.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal Administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle

Délibéré après l'audience du 7 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Agnel, président de chambre,

- Mme Picque, première conseillère,

- Mme Barrois, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2023.

La rapporteure,

Signé : M. BarroisLe président,

Signé : M. A...

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

N° 22NC01085


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC01085
Date de la décision : 13/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. AGNEL
Rapporteur ?: Mme Marion BARROIS
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : ISSA

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-04-13;22nc01085 ?
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