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13/04/2023 | FRANCE | N°20NC02315

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 13 avril 2023, 20NC02315


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 28 novembre 2017, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux et à titre subsidiaire, de réduire le montant de la contribution spéciale mentionnée à l'article L. 8253-1 du code du travail à la somme de 7 080 euros.

Par un jugement n° 1801135 du 31 mars 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
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Par une requête enregistrée le 10 août 2020, M. A... repré...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 28 novembre 2017, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux et à titre subsidiaire, de réduire le montant de la contribution spéciale mentionnée à l'article L. 8253-1 du code du travail à la somme de 7 080 euros.

Par un jugement n° 1801135 du 31 mars 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 août 2020, M. A... représenté par Me Lordier demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 31 mars 2020 ;

2°) d'annuler la décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 28 novembre 2017, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux ;

3°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de la contribution spéciale mentionnée à l'article L. 8253-1 du code du travail à la somme de 7 080 euros et d'annuler la contribution forfaitaire d'un montant de 2 398 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'OFII le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;

- il n'a jamais été mis en possession du procès-verbal du 24 mai 2017 constatant l'infraction ;

- l'administration était tenue de lui adresser une information écrite en application de l'article L. 8113-7 du code du travail, aline´a 3 ;

- le jugement de relaxe pour les faits ayant fondé la décision litigieuse a autorité de chose jugée devant la juridiction administrative ;

- les conditions de mise en œuvre de l'article L. 8251-1 du code du travail ne sont pas réunies dès lors que l'intervention de M. D... relève de " l'entraide amicale ", que la preuve du lien de subordination n'est pas rapportée et qu'il n'a pas été rémunéré ;

- il y a lieu de réduire le montant de la contribution spéciale mentionnée à l'article L. 8253-1 du code du travail à 2 000 fois le taux horaire minimum garanti en application du 1° du II de l'article R. 8253-2 du code du travail dès lors qu'aucune autre infraction n'a été relevée par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ;

- les conditions posées par l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas réunies dès lors qu'il n'avait pas la qualité d'employeur et que M. D... disposait d'une attestation de demande d'asile valable.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 octobre 2020, le directeur de l'office français de l'immigration et de l'intégration conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Barrois, première conseillère,

- et les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique,

Considérant ce qui suit :

1. Le 24 mai 2018, les services de la direction régionale des entreprises, de la concurrence et de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) Grand-Est, ont procédé à un contrôle sur le chantier de la création d'une future auto-école sise dans des locaux appartenant à M. A..., entrepreneur individuel. Ils ont constaté la présence en action de travail de M. D..., ressortissant arménien non autorisé à séjourner et à travailler en France. En application de l'article L. 8271-17 du code du travail, le procès-verbal de constat a été transmis à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Une procédure pénale a été concomitamment initiée. Par lettre du 4 octobre 2017, M. A... a été invité à présenter ses observations sur l'éventualité d'une sanction administrative, ce qu'il a fait le 19 octobre 2017. Par une décision du 28 novembre 2017, l'OFII a mis à sa charge la contribution spéciale mentionnée à l'article L. 8253-1 du code du travail pour un montant de 17 700 euros et la contribution forfaitaire mentionnée à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour un montant de 2 398 euros, qui ont été plafonnées à la somme globale de 15 000 euros. Le 26 janvier 2018, M. A... a formé un recours gracieux contre cette décision, qui sera rejeté le 14 février 2018. Par un jugement du 18 juin 2018, le tribunal correctionnel de Nancy a relaxé M. A... des fins des poursuites dirigées contre lui pour des faits d'exécution d'un travail dissimulé et d'emploi d'un étranger non muni d'une autorisation de travail salarié. Par sa requête, M. A... fait appel du jugement du 31 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 28 novembre 2017, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux et à la réduction du montant de la contribution spéciale mentionnée à l'article L. 8253-1 du code du travail à la somme de 7 080 euros.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 28 novembre 2017 :

2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 8251-1 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France ". Aux termes de l'article L. 8253-1 du même code, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat et est au moins égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12 et, en cas de réitération, à 25 000 fois ce même taux. / L'Office français de l'immigration et de l'intégration est chargé de constater et de liquider cette contribution (...) ". Aux termes de l'article L. 8271-17 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Outre les inspecteurs et contrôleurs du travail, les agents et officiers de police judiciaire, les agents de la direction générale des douanes sont compétents pour rechercher et constater, au moyen de procès-verbaux transmis directement au procureur de la République, les infractions aux dispositions de l'article L. 8251-1 relatif à l'emploi d'un étranger sans titre de travail et de l'article L. 8251-2 interdisant le recours aux services d'un employeur d'un étranger sans titre. " Aux termes de l'article R. 8253-6 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Au vu des procès-verbaux qui lui sont transmis, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration décide de l'application de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 et notifie sa décision à l'employeur ainsi que le titre de recouvrement ".

3. Si ni les articles L. 8253-1 et suivants du code du travail, ni l'article L. 8271-17 du même code ne prévoient expressément que le procès-verbal constatant l'infraction aux dispositions de l'article L. 8251-1 relatif à l'emploi d'un étranger non autorisé à travailler en France, et fondant le versement de la contribution spéciale, soit communiqué au contrevenant, le respect du principe général des droits de la défense suppose, s'agissant des mesures à caractère de sanction, ainsi d'ailleurs que le précise désormais l'article L. 122-2 du code des relations entre le public et l'administration, entré en vigueur le 1er janvier 2016, que la personne en cause soit informée, avec une précision suffisante et dans un délai raisonnable avant le prononcé de la sanction, des griefs formulés à son encontre et mise à même de demander la communication des pièces au vu desquelles les manquements ont été retenus. Par suite, l'Office français de l'immigration et de l'intégration est tenu d'informer l'intéressé de son droit de demander la communication du procès-verbal d'infraction sur la base duquel ont été établis les manquements qui lui sont reprochés.

4. Il est constant que le courrier de l'OFII du 4 octobre 2017 n'informait pas M. A... de son droit de demander la communication du procès-verbal d'infraction sur la base duquel les manquements avaient été établis et que ce document ne lui a pas été transmis avant l'édiction de la sanction. Dans cette mesure, la décision du 28 novembre 2017 a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière et doit par voie de conséquence être annulée.

5. Il en résulte que M. A... est fondé à soutenir, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que c'est à tort que , par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 28 novembre 2017 de l'OFII.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.

7. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l'Office français de l'immigration et de l'intégration présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 31 mars 2020 du tribunal administratif de Nancy et la décision de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 28 novembre 2017 sont annulés.

Article 2 : L'Office français de l'immigration et de l'intégration versera à M. A... somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de l'Office français de l'immigration et de l'intégration présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au directeur de l'office français de l'immigration et de l'intégration.

Délibéré après l'audience du 23 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- M. Sibileau, premier conseiller,

- Mme Barrois, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 avril 2023.

La rapporteure,

Signé : M. BarroisLe président,

Signé : M. C...

La greffière,

Signé : S. RobinetLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

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N° 20NC02315


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NC02315
Date de la décision : 13/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-06 Étrangers. - Emploi des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: Mme Marion BARROIS
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : KOSNISKY-LORDIER LAURA

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-04-13;20nc02315 ?
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