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13/04/2023 | FRANCE | N°20NC00622

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 13 avril 2023, 20NC00622


Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

Par une requête n° 1703720, la société Burda Druck France a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision implicite née le 15 avril 2017 par laquelle la ministre du travail a rejeté son recours hiérarchique formé contre la décision du préfet du Haut-Rhin du 14 décembre 2016 refusant de lui accorder une autorisation de déroger de façon permanente aux règles du repos dominical.

Par une requête n° 1706122, la société Burda Druck France a demandé au tribunal admin

istratif de Strasbourg d'annuler la décision du 5 octobre 2017 par laquelle la ministre d...

Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

Par une requête n° 1703720, la société Burda Druck France a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision implicite née le 15 avril 2017 par laquelle la ministre du travail a rejeté son recours hiérarchique formé contre la décision du préfet du Haut-Rhin du 14 décembre 2016 refusant de lui accorder une autorisation de déroger de façon permanente aux règles du repos dominical.

Par une requête n° 1706122, la société Burda Druck France a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 5 octobre 2017 par laquelle la ministre du travail l'a informée de ce que son recours hiérarchique, formé contre la décision du préfet du Haut-Rhin du 14 décembre 2016 refusant de lui accorder une autorisation de déroger de façon permanente aux règles du repos dominical, avait été rejeté par une décision implicite.

Par un jugement commun n° 1703720 et 1706122 du 22 janvier 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés le 9 mars 2020, le 18 et 19 novembre 2020 et le 26 octobre 2021, la société Burda Druck France représentée par Me Bender demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 22 janvier 2020 ;

2°) d'annuler la décision implicite née le 15 avril 2017 par laquelle la ministre du travail a rejeté son recours hiérarchique formé contre la décision du préfet du Haut-Rhin du 14 décembre 2016 refusant de lui accorder une autorisation de déroger de façon permanente aux règles du repos dominical ;

3°) d'annuler la décision du préfet du Haut-Rhin du 14 décembre 2016 refusant de lui accorder une autorisation de déroger de façon permanente aux règles du repos dominical.

La société requérante soutient que :

- le préfet n'était pas lié par le fondement légal de la demande et aurait dû également se prononcer au regard de l'article L. 3134-5 du code du travail ;

- il a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que la dérogation fondée sur l'article L. 3134-7 du code du travail ne pouvait être accordée à titre individuel ;

- l'exercice complet ou partiel de son activité est nécessaire les dimanches ou le jours fériés pour la satisfaction des besoins de la population présentant un caractère journalier ou se manifestant particulièrement ces jours-là ;

- la liste des activités visées par l'ordonnance du 22 mars 1895 n'est pas limitative, et en tout état de cause, celle-ci mentionne l'activité d'édition de journaux quotidiens ;

- cette autorisation ne créée pas de distorsion de concurrence dès lors que la société est la seule à intervenir sur ce marché en Alsace ;

- en outre la société détient quatre usines de production et seule celle installée en France ne bénéficie pas de la possibilité de faire ses salariés travailler le dimanche ce qui pose un problème de compétitivité entre les quatre établissements relevant du groupe qui pourrait conduire à une fermeture du site français.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 octobre 2020, le ministre du travail du plein emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la société ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- l'ordonnance du 22 mars 1895 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Barrois, première conseillère,

- et les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le 2 novembre 2016, la société Burda Druck France dont l'établissement est situé à Vieux Thann et qui exerce une activité d'impression de périodiques hebdomadaires, mensuels ou bimestriels et d'ouvrages typographiques de longue durée, a sollicité du préfet du Haut-Rhin l'autorisation permanente de faire travailler en trois équipes de huit heures chacune, des salariés le dimanche en cas de retard pris dans la production d'avril à décembre et en cas de travaux de maintenance annuelle de janvier à avril. Par une décision du 14 décembre 2016, le préfet a refusé de lui accorder cette autorisation. La société a alors formé un recours hiérarchique auprès du ministre du travail reçu le 15 février 2017, auquel ce dernier n'a pas répondu dans le délai de deux mois. La société Burda Druck France fait appel du jugement du 22 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 décembre 2016 du préfet du Haut-Rhin et de la décision implicite de rejet du ministre du travail née le 15 avril 2017.

2. En vertu de l'article L. 3134-2 du code du travail, l'emploi de salariés dans les entreprises industrielles, commerciales ou artisanales est, dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, interdit les dimanches et jours fériés, sauf dans les cas prévus par le chapitre IV du titre III du livre Ier de la troisième partie de ce code, au sein duquel cet article figure. A ce titre, l'article L. 3134-4 de ce code dispose que : " Dans les exploitations commerciales, les salariés ne peuvent être employés le premier jour des fêtes de Noël, de Pâques ou de la Pentecôte. / Les autres dimanches et jours fériés, leur travail ne peut dépasser cinq heures. / Par voie de statuts ayant force obligatoire, adoptés après consultation des employeurs et des salariés et publiés selon les formes prescrites, les départements ou communes peuvent réduire la durée du travail ou interdire complètement le travail pour toutes les exploitations commerciales ou pour certaines branches d'activité. (...) ". L'article L. 3134-7 de ce code, combiné avec son article R. 3134-3, prévoit que des dérogations aux dispositions de l'article L. 3134-4 peuvent être accordées par le préfet " pour les catégories d'activité dont l'exercice complet ou partiel est nécessaire les dimanches ou les jours fériés pour la satisfaction de besoins de la population présentant un caractère journalier ou se manifestant particulièrement ces jours-là. (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'octroi de dérogations au régime du repos dominical par le préfet sur le fondement de l'article L. 3134-7 du code du travail ne peut être accordé qu'à des catégories d'activités dont l'exercice complet ou partiel est nécessaire les dimanches ou jours fériés pour la satisfaction de besoins de la population présentant un caractère journalier ou se manifestant particulièrement ce jour-là.

3. En premier lieu, si la société requérante a précisé, à l'appui de sa demande, qu'elle sollicitait cette dérogation pour, d'avril à décembre, combler le retard pris sur les plannings de production, et de janvier à avril, effectuer des tâches de maintenance, la société a fondé expressément sa demande de dérogation au repos dominical sur les dispositions de l'article L. 3134-7 du code du travail. Dans cette mesure, l'administration n'a commis aucune erreur de droit en s'abstenant de se prononcer sur la demande au regard des dispositions de l'article L. 3134-5 du même code alors qu'au demeurant, l'administration a invité la société à présenter cette demande sous couvert des services de l'inspection du travail chargé de son instruction.

4. En deuxième lieu, même si le préfet du Haut-Rhin pouvait accorder une dérogation sur le fondement de l'article L. 3134-7 du code du travail à une catégorie d'activité ne concernant dans son département qu'une seule société, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'activité de la société Burda Druck France, qui porte sur des publications hebdomadaires, pour l'échéance la plus courte, à bimestrielles, de revues et périodiques relatifs à différents domaines sans lien avec l'information quotidienne, nécessite le recours à un travail le dimanche pour satisfaire un besoin journalier de la population. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 3134-7 du code du travail est écarté.

5. En troisième lieu, il ne ressort pas des termes de la décision du 14 décembre 2016 que le préfet du Haut-Rhin se serait estimé lié par les dispositions de l'ordonnance du 22 mars 1895 énumérant à titre indicatif les activités visées par l'ancien article 105 du code local des professions, repris à l'article L. 3134-7 du code du travail. Il en résulte que ce moyen est écarté.

6. En dernier lieu, la société requérante ne peut utilement soutenir que la décision en cause entrainerait une distorsion de concurrence car elle serait la seule du secteur d'activité de l'impression des revues hebdomadaires ou mensuelles implantée en Alsace à subir les restrictions au travail dominical, en se prévalant de la situation de ses concurrents, qui sont établis dans des départements soumis à une législation distincte de celle des départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, et qui ne se trouvent dès lors pas dans une situation identique à la sienne.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Burda Druck France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Burda Druck France est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Burda Druck France et au ministre du travail du plein emploi et de l'insertion.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

Délibéré après l'audience du 23 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- M. Sibileau, premier conseiller,

- Mme Barrois, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 avril 2023.

La rapporteure,

Signé : M. BarroisLe président,

Signé : M. A...

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 20NC00622


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00622
Date de la décision : 13/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: Mme Marion BARROIS
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : ORION AVOCAT ET CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-04-13;20nc00622 ?
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