La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/04/2023 | FRANCE | N°21NC03110

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 04 avril 2023, 21NC03110


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy, d'une part, d'annuler l'arrêté du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt du 18 mai 2015, complété par une décision du même jour dite de " notification de situation administrative ", en tant que ces décisions procèdent à son reclassement au 4ème échelon de son grade dans le corps des ingénieurs de l'agriculture et de l'environnement, avec un niveau de rémunération correspondant à l'indice brut 574 et une ancienneté

conservée au 22 juin 2013, et fixent son niveau de rémunération ainsi que la déc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy, d'une part, d'annuler l'arrêté du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt du 18 mai 2015, complété par une décision du même jour dite de " notification de situation administrative ", en tant que ces décisions procèdent à son reclassement au 4ème échelon de son grade dans le corps des ingénieurs de l'agriculture et de l'environnement, avec un niveau de rémunération correspondant à l'indice brut 574 et une ancienneté conservée au 22 juin 2013, et fixent son niveau de rémunération ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux formé contre cet arrêté et, d'autre part, d'enjoindre à l'administration de procéder à la reconstitution de sa situation administrative en lui faisant bénéficier d'une reprise d'ancienneté de 19 ans, 3 mois et 18 jours et en prenant en compte sa rémunération antérieure à taux plein augmentée du montant de sa prime spéciale de résultats 2014 pour calculer sa rémunération de référence.

Par un jugement n° 1502855 du 21 février 2017, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 17NC00973 du 14 mai 2019, la cour administrative d'appel de Nancy a annulé l'arrêté et la décision du 18 mai 2015 en tant qu'ils fixent à l'indice 574 le traitement personnel de l'intéressée dans le grade d'ingénieur de l'agriculture et de l'environnement, enjoint au ministre de l'agriculture et de l'alimentation de fixer le traitement personnel de Mme A... de façon à ce qu'il corresponde effectivement à l'indice le plus proche de celui qui permet à l'intéressée d'obtenir un traitement mensuel brut égal à 70 % de sa rémunération mensuelle antérieure, en prenant en compte le solde de la prime de service et de résultats versée en juillet 2014 dans cette rémunération antérieure servant de référence pour le calcul du traitement, et a réformé le jugement attaqué dans cette mesure.

Par une décision nos 432608, 432686 du 9 décembre 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt du 14 mai 2019 de la cour administrative d'appel de Nancy, a renvoyé l'affaire à la cour, a condamné l'Etat à verser à Mme A... la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre du pourvoi n° 432608 et a rejeté le surplus des conclusions.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 avril 2017 et des mémoires enregistrés les 6 juillet 2017, 14 décembre 2017, 22 juin 2018 et 25 février 2019, ainsi que par un mémoire enregistré après renvoi du Conseil d'Etat le 11 octobre 2022, Mme A..., représentée par Me des Villettes, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy n° 1502855 du 21 février 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt du 18 mai 2015, complété par la décision du même jour dite de " notification de situation administrative ", en tant que ces décisions procèdent à son reclassement au 4ème échelon du corps des ingénieurs de l'agriculture et de l'environnement avec une ancienneté conservée au 22 juin 2013 et un niveau de rémunération fixé, à titre personnel, à l'indice brut 574, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux formé contre cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à l'administration de procéder à son reclassement en retenant, à la date de sa nomination dans le corps des ingénieurs, une ancienneté de services publics de 19 ans, 3 mois et 18 jours ;

4°) d'enjoindre à l'administration de fixer un indice de rémunération à temps plein permettant de déterminer son traitement mensuel brut au plus proche d'un traitement égal à 70 % de la moyenne des six meilleures rémunérations mensuelles antérieures versées au cours des douze derniers mois de son activité d'agent contractuel et prenant en compte le solde de la prime spéciale de résultat versé en juillet 2014 ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

En ce qui concerne la reprise de son ancienneté :

- l'administration a commis une erreur de droit car les modalités de son reclassement auraient dû être fixées en application des dispositions de l'article 7 du décret du 23 décembre 2006 relatif aux règles du classement d'échelon consécutifs à la nomination dans certains corps de catégorie A de la fonction publique de l'Etat en prenant en compte l'ensemble de ses années de services au sein de l'office national des forêts (ONF), et en particulier la période comprise entre le 15 février 1996 et le 31 décembre 2006, dès lors que les fonctions qu'elle a exercées se rattachaient aux missions de service public administratif de l'ONF et qu'elle devait donc en réalité être regardée, au titre de cette période, comme ayant eu la qualité d'agent public :

* du 15 février 1996 au 31 août 2002, sur son poste d'adjoint au chef de la subdivision de Saint-Dié à la direction régionale de Lorraine, elle a exercé des missions relevant du service public administratif car elle était assermentée par arrêté du 18 avril 1996 et devait veiller à la conservation des forêts ; l'exercice d'une seule mission suffit à la faire regarder comme ayant exercé en qualité d'agent public ; en tout état de cause, ses autres activités relevaient des missions de service public administratif de l'ONF puisqu'il s'agissait de mission de conservation et de surveillance de la forêt ; l'établissement des plans d'aménagement constitue une activité de service public administratif ;

* du 1er septembre 2002 au 31 décembre 2006, sur son poste de responsable de production suivi application aménagement, à l'agence de Saint-Dié : elle était toujours investie des missions de conservation des bois et forêts fixées aux termes de son arrêté d'assermentation qui ressortent de prérogatives de puissance publique ; ses autres missions, telles que décrites dans son dossier de reconnaissance des acquis de l'expérience relevaient également du service public administratif de l'ONF ; la circonstance qu'elle a fait l'objet d'un contrat de droit public à compter du 1er janvier 2007 alors que ses fonctions n'avaient pas changé, démontre qu'elle exerçait déjà des missions de service public administratif ;

* elle aurait donc dû bénéficier d'une ancienneté de 11 ans, 5 mois et 21 jours et être reclassée à l'échelon 7 de son grade et à l'indice majoré 581 ;

En ce qui concerne le calcul de sa rémunération :

- le mode de calcul de l'administration méconnait les articles 1er et 2 de l'arrêté du 29 juin 2007 fixant le pourcentage et les éléments de rémunération pris en compte pour le maintien partiel de la rémunération de certains agents non titulaires accédant à un corps soumis aux dispositions du décret n° 2006-1827 du 23 décembre 2006 ; elle a perçu après sa nomination seulement 64 % de sa rémunération à temps partiel, alors qu'à quotité de travail inchangée, son nouveau traitement brut après titularisation ne peut être inférieur à 70 % de la rémunération mensuelle brute effectivement perçue avant sa titularisation, calculée sur la base des six meilleures rémunérations mensuelles perçues par l'agent dans son dernier emploi au cours de la période de douze mois précédant sa titularisation ;

- la prime spéciale de résultats perçue en juillet 2014 doit être prise en compte dans la rémunération servant de référence pour le calcul du complément prévu par le II de l'article 12 du décret du 23 décembre 2006.

Par des mémoires enregistrés le 15 décembre 2017 et 29 juin 2018, ainsi que par un mémoire enregistré le 4 novembre 2022 après renvoi par le Conseil d'Etat, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire conclut au rejet de la requête de Mme A....

Il s'en remet, dans le dernier état de ses dernières écritures, à la sagesse de la juridiction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code forestier ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 ;

- le décret n° 2006-8 du 4 janvier 2006 ;

- le décret n° 2006-1827 du 23 décembre 2006 ;

- l'arrêté du 29 juin 2007 fixant le pourcentage et les éléments de rémunération pris en compte pour le maintien partiel de la rémunération de certains agents non titulaires accédant à un corps soumis aux dispositions du décret n°2006-1827 du 23 décembre 2006 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A... a été employée par l'Office national des forêts (ONF) pour exercer les fonctions d'ingénieur forestier, sous couvert d'un contrat de droit privé du 15 février 1996 au 31 décembre 2006, cet engagement ayant été renouvelé, à compter du 1er janvier 2007, par un contrat de droit public. Par un arrêté du ministre de l'agriculture du 18 mai 2015 complété par une décision du même jour dite de " notification de situation administrative " procédant à son reclassement, Mme A... a été nommée dans le corps des ingénieurs de l'agriculture et de l'environnement, à la suite de sa réussite au concours réservé aux agents non titulaires pour l'accès à ce corps. Par un jugement du 21 février 2017, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande de Mme A... tendant, d'une part, à l'annulation partielle de l'arrêté du 18 mai 2015 et de la décision du même jour précisant son ancienneté, en tant que ces décisions la reclassent au 4ème échelon de son grade avec une ancienneté au 22 août 2013 et fixent le montant de son traitement à l'indice brut 574 et, d'autre part, à l'annulation de la décision implicite du ministre rejetant le recours gracieux par lequel elle sollicitait une meilleure prise en compte de l'ancienneté acquise en qualité d'agent contractuel et de son niveau de rémunération antérieur à sa nomination dans le corps des ingénieurs de l'agriculture et de l'environnement. Par un arrêt n° 17NC00973 du 14 mai 2019, la cour administrative d'appel de Nancy a, sur appel de Mme A..., annulé l'arrêté du ministre du 18 mai 2015 et la décision du même jour en tant qu'ils fixent à 574 le traitement personnel de l'intéressée dans le grade d'ingénieur de l'agriculture et de l'environnement et annulé, dans la même mesure, la décision implicite rejetant son recours gracieux. Par une décision du 9 décembre 2021, le Conseil d'Etat, statuant en contentieux sur les pourvois introduits par Mme A... et par le ministre, a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel du 14 mai 2019 et lui a renvoyé l'affaire.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la reprise d'ancienneté de Mme A... :

2. Aux termes de l'article L. 221-1 du code forestier, dont les dispositions étaient précédemment codifiées à l'article L. 121-1 du même code : " L'Office national des forêts est un établissement public national à caractère industriel et commercial ". Lorsqu'un établissement public tient de la loi la qualité d'établissement public industriel et commercial, ses activités présentent un caractère industriel et commercial, à l'exception de celles de ses activités qui, telles la réglementation, la police ou le contrôle, ressortissent par leur nature de prérogatives de puissance publique et ne peuvent donc être exercées que par un service public administratif.

3. D'autre part, aux termes de l'article 18 du décret du 4 janvier 2006 relatif au statut particulier du corps des ingénieurs de l'agriculture et de l'environnement : " Le classement lors de la nomination en qualité d'ingénieur stagiaire ou titulaire est déterminé conformément aux dispositions du décret n° 2006-1827 du 23 décembre 2006 relatif aux règles du classement d'échelon consécutif à la nomination dans certains corps de catégorie A de la fonction publique de l'Etat, à l'exception de ses articles 4, 5 et 6. ".

4. Enfin, aux termes du I de l'article 3 du décret du 23 décembre 2006 relatif aux règles du classement d'échelon consécutifs à la nomination dans certains corps de catégorie A de la fonction publique de l'Etat : " Une même personne ne peut bénéficier de l'application de plus d'une des dispositions des articles 4 à 10. Une même période ne peut être prise en compte qu'au titre d'un seul de ces articles. / Les personnes qui, compte tenu de leur parcours professionnel antérieur, relèvent des dispositions de plusieurs des articles mentionnés à l'alinéa précédent sont classées en application des dispositions de l'article correspondant à leur dernière situation. / Ces agents peuvent toutefois, dans un délai maximal de six mois à compter de la notification de la décision prononçant leur classement dans les conditions prévues à l'alinéa précédent, demander que leur soient appliquées les dispositions d'un autre de ces articles qui leur sont plus favorables. ". Aux termes du I de l'article 7 de ce même décret: " Les agents qui justifient (...) de services d'agent public non titulaire, autres que des services accomplis en qualité d'élève ou de stagiaire, sont classés à un échelon déterminé en prenant en compte une fraction de leur ancienneté de services publics civils dans les conditions suivantes : / 1° Les services accomplis dans des fonctions du niveau de la catégorie A sont retenus à raison de la moitié de leur durée jusqu'à douze ans et des trois quarts de cette durée au-delà de douze ans (...) ". Aux termes de l'article 9 de ce décret : " Les personnes qui justifient de l'exercice d'une ou plusieurs activités professionnelles accomplies sous un régime juridique autre que celui d'agent public, dans des fonctions et domaines d'activité susceptibles d'être rapprochés de ceux dans lesquels exercent les membres du corps dans lequel ils sont nommés, sont classées à un échelon déterminé en prenant en compte, dans la limite de sept années, la moitié de cette durée totale d'activité professionnelle.(...) ".

5. Afin de se prononcer sur la reprise d'ancienneté de Mme A... par l'administration pour l'application des dispositions précitées du décret du 23 décembre 2006, il convient de rechercher si l'intéressée, dans l'exercice de ses fonctions d'ingénieur forestier au sein de l'Office national des forêts, participait directement à l'exécution des missions de service public administratif dont se trouve également investi l'office nonobstant sa qualification par la loi d'établissement public à caractère industriel et commercial. Pour l'application du décret du 23 décembre 2006, la circonstance qu'une partie de ses missions la faisait participer aux missions de service public administratif de l'office suffit à faire regarder l'intéressée comme exerçant comme agent public.

6. Pour reclasser Mme A... au 4ème échelon du grade d'ingénieur de l'agriculture et de l'environnement et déterminer sa reprise d'ancienneté dans cet échelon, l'administration a pris en compte, d'une part, les services accomplis en qualité d'agent contractuel de droit privé du 15 février 1996 au 31 décembre 2006, dans les conditions prévues par les dispositions précitées de l'article 9 du décret du 23 décembre 2006, et, d'autre part, les services effectués du 1er janvier 2007 au 31 mai 2015 en qualité d'agent contractuel de droit public, dans les conditions prévues par l'article 7 du même décret. Constatant que l'application des dispositions de l'article 9 lui était plus favorable, l'administration a reclassé la requérante en tenant compte de la seule ancienneté conservée au titre des services accomplis en qualité d'agent contractuel de droit privé.

7. Mme A... soutient que son reclassement devait intervenir sur le fondement des seules dispositions de l'article 7 du décret du 23 décembre 2006 en prenant en compte l'ensemble de ses années de services du 15 février 1996 au 31 mai 2015, qu'elle estime avoir accomplies en qualité d'agent public.

8. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des contrats de travail de Mme A..., que celle-ci a exercé ses fonctions au sein de l'ONF en qualité d'agent contractuel sous régime de droit privé, depuis son recrutement le 15 février 1996 jusqu'au 31 décembre 2006, puis, à compter de cette date, en qualité d'agent contractuel de droit public jusqu'à sa nomination dans le corps des ingénieurs le 1er juin 2015.

9. Mme A... a assuré ses fonctions du 15 février 1996 au 31 août 2002, en qualité d'ajointe au chef de la division de Saint-Dié des Vosges. La description des missions figurant dans le dossier de reconnaissance des acquis de l'expérience professionnelle révèle que Mme A... participait à la rédaction des procès-verbaux d'infraction et proposait des transactions pour les infractions forestières. Mme A... a ensuite exercé du 1er septembre 2002 au 23 décembre 2006 les missions de responsable du pôle " suivi et application des aménagements ". Mme A..., qui était assermentée afin de dresser des procès-verbaux d'infraction, était notamment amenée, dans le cadre des fonctions de vérification de la conformité de la gestion à la réglementation, à proposer des actions préventives ou correctives en cas de non-conformité. Ces missions relèvent de prérogatives de puissance publique. La circonstance qu'une partie des missions exercées par Mme A... la faisaient participer aux missions de service public administratif suffit à la faire regarder comme exerçant comme agent public au cours de ces périodes.

10. Ainsi, Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration n'a pas retenu l'ensemble des services accomplis en tant qu'agent public du 15 février 1996 au 31 mai 2015 pour procéder à son reclassement et à la reprise de son ancienneté.

En ce qui concerne la fixation du traitement de Mme A... à l'indice brut 574 :

11. Aux termes du II de l'article 12 du décret du 23 décembre 2006 : " Les agents qui avaient, avant leur nomination, la qualité d'agent non titulaire de droit public et qui sont classés en application de l'article 7 à un échelon doté d'un traitement dont le montant est inférieur à celui de la rémunération qu'ils percevaient avant leur nomination conservent à titre personnel le bénéfice d'un traitement représentant une fraction conservée de leur rémunération antérieure, jusqu'au jour où ils bénéficient dans leur nouveau grade d'un traitement au moins égal au montant ainsi déterminé. (...) / La fraction mentionnée ci-dessus et les éléments de la rémunération antérieure pris en compte sont fixés par arrêté des ministres chargés de la fonction publique et du budget. / La rémunération antérieure prise en compte pour l'application des dispositions des alinéas précédents est celle qui a été perçue par l'agent intéressé au titre du dernier emploi occupé par lui avant sa nomination dans lequel il justifie d'au moins six mois de services effectifs au cours des douze mois précédant cette nomination ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté précité du 29 juin 2007 : " Le traitement maintenu, à titre personnel, en application du II de l'article 12 du décret du 23 décembre 2006 susvisé est celui qui correspond à l'indice majoré le plus proche de celui qui permet à l'intéressé d'obtenir un traitement mensuel brut égal à 70 % de sa rémunération mensuelle antérieure ". Aux termes de l'article 2 du même arrêté : " La rémunération mensuelle antérieure prise en compte pour l'application de l'article 1er est la moyenne des six meilleures rémunérations mensuelles perçues par l'agent dans son dernier emploi, au cours de la période de douze mois précédant la nomination dans un corps de catégorie A. (...) ". Aux termes de l'article 3 de cet arrêté : " Le traitement déterminé en application de l'article 1er ne peut être inférieur à celui correspondant à l'échelon auquel l'agent est classé lors de sa nomination en application de l'article 7 du décret du 23 décembre 2006 susvisé ".

12. Il résulte du I de l'article 7 et du II de l'article 12 du décret n° 2006-1827 du 23 décembre 2006 et des articles 1er et 2 de l'arrêté du 29 juin 2007 pris pour son application, dont l'objet est de garantir une rémunération minimale aux agents titularisés dans certains corps de catégorie A de la fonction publique de l'Etat, qu'à quotité de travail inchangée, le traitement brut effectivement perçu par un agent postérieurement à sa titularisation ne peut être inférieur à 70 % de la rémunération moyenne mensuelle brute effectivement perçue avant cette titularisation, calculée sur la base des six meilleures rémunérations mensuelles perçues par l'agent dans son dernier emploi au cours de la période de douze mois précédant sa titularisation.

13. Il ressort des pièces du dossier qu'après avoir classé Mme A... au 4ème échelon du grade d'ingénieur de l'agriculture et de l'environnement, l'administration a constaté que le traitement mensuel correspondant à cet échelon, soit 1 967,87 euros, était inférieur à la rémunération mensuelle perçue par l'intéressée avant sa titularisation, que l'administration avait évaluée au montant de 3 207,86 euros. Retenant un montant de référence de 2 245,50 euros correspondant à 70 % de la rémunération mensuelle antérieure de la requérante, l'administration a maintenu son traitement à titre personnel à l'indice brut 574, soit l'indice le plus proche de celui qui permet d'obtenir un traitement mensuel brut égal à 70 % de sa rémunération mensuelle antérieure.

14. Toutefois, à quotité de travail inchangée, Mme A... exerçant ses fonctions à temps partiel selon une quotité de 90 % depuis le 1er janvier 2014, le maintien à l'indice brut 574 n'assure à l'intéressée qu'un traitement mensuel de 2 053,20 euros, représentant seulement 64 % de sa rémunération mensuelle moyenne antérieure telle que déterminée par l'administration.

15. De surcroît, et ainsi qu'il a été dit, la rémunération antérieure servant au calcul du montant de référence doit être évaluée au regard des six meilleures rémunérations mensuelles perçues dans le dernier emploi au cours des douze mois précédent la titularisation. Le ministre de l'agriculture devait donc tenir compte du solde de la prime de service et de résultats versé à Mme A... au mois de juillet 2014, pendant la période de référence prise en compte pour le calcul de sa rémunération mensuelle antérieure, alors même que ce solde lui a été accordé au titre de l'année 2013. La requérante est donc fondée à soutenir que le défaut d'intégration de cette prime pour déterminer sa rémunération antérieure est illégal.

16. Par suite, Mme A... est fondée à soutenir que la décision fixant sa rémunération à l'indice brut 574 méconnait les dispositions mentionnées aux points 11 et 12 car elle ne lui assure pas un traitement mensuel brut égal à 70 % de l'ensemble de sa rémunération mensuelle antérieure.

17. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

18. Eu égard aux motifs de l'annulation prononcée, il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'une part, de procéder au reclassement de Mme A... en retenant, à la date de sa nomination dans le corps des ingénieurs, une ancienneté de services publics depuis le 15 février 1996, et d'autre part, de fixer son traitement à l'indice le plus proche de celui qui permet à l'intéressée d'obtenir un traitement mensuel brut égal à 70 % de sa rémunération mensuelle antérieure intégrant le solde de la prime de service et de résultats versé en juillet 2014.

Sur les frais liés au litige :

19. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Mme A... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêté du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt du 18 mai 2015 et la décision du même jour dite de " notification de situation administrative ", sont annulés en tant que ces décisions procèdent au reclassement de Mme A... au 4ème échelon de son grade dans le corps des ingénieurs de l'agriculture et de l'environnement, avec un niveau de rémunération correspondant à l'indice brut 574 et une ancienneté conservée au 22 juin 2013, et fixent son niveau de rémunération ainsi. La décision implicite rejetant le recours gracieux formé par Mme A... contre l'arrêté précité est annulée.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nancy n° 1502855 du 21 février 2017 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'agriculture et la souveraineté alimentaire d'une part, de procéder au reclassement de Mme A... en retenant, à la date de sa nomination dans le corps des ingénieurs, une ancienneté de services publics depuis le 15 février 1996, et d'autre part, de fixer son traitement à l'indice le plus proche de celui qui permet à l'intéressée d'obtenir un traitement mensuel brut égal à 70 % de sa rémunération mensuelle antérieure intégrant le solde de la prime de service et de résultats versé en juillet 2014.

Article 4 : L'Etat versera à Mme A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'agriculture et la souveraineté alimentaire.

Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Samson-Dye, présidente,

- Mme Roussaux, première conseillère,

- M. Denizot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 avril 2023.

La rapporteure,

Signé : S. C...La présidente,

Signé : A. Samson-Dye

La greffière,

Signé : N. Basso

La République mande et ordonne au préfet au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N. Basso

2

N° 21NC03110


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC03110
Date de la décision : 04/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme SAMSON-DYE
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : GARANT des VILLETTES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-04-04;21nc03110 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award