La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/02/2023 | FRANCE | N°22NC00257

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 28 février 2023, 22NC00257


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 12 juin 2020 par laquelle le préfet du Jura a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2001942 du 7 mai 2021, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 février 2022, M. C... A..., représenté par Me Amblard, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besanço

n du 7 mai 2021 ;

2°) d'annuler la décision en date du 12 juin 2020 par laquelle le préfet du Jura a ref...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 12 juin 2020 par laquelle le préfet du Jura a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2001942 du 7 mai 2021, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 février 2022, M. C... A..., représenté par Me Amblard, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 7 mai 2021 ;

2°) d'annuler la décision en date du 12 juin 2020 par laquelle le préfet du Jura a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet du Jura, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " ou " salarié " d'une durée d'un an, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans le même délai ;

4°) de condamner l'État à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, moyennant la renonciation de son avocat à percevoir la contribution versée par l'État au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- l'arrêté du 12 juin 2020 est entaché d'incompétence ;

- cet arrêté ne vise pas l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration et par conséquent, le prive de son droit à connaître la base légale de la décision ;

- le préfet du Jura s'est irrégulièrement estimé en situation de compétence liée ;

- l'arrêté du 12 juin 2020 méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le préfet du Jura a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mai 2022, le préfet du Jura conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 13 décembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Sibileau, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., ressortissant sénégalais né le 17 avril 1999, est entré en France le 13 août 2016 à l'âge de 17 ans sous couvert d'un titre de séjour espagnol. A sa majorité, il s'est vu délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant. Le 21 février 2020, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 2° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet du Jura, par un arrêté du 12 juin 2020, a rejeté sa demande. M. A... relève appel du jugement du 7 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, eu égard au caractère réglementaire des arrêtés de délégation de signature, soumis à la formalité de publication, le juge peut, sans méconnaître le principe du caractère contradictoire de la procédure, se fonder sur l'existence de ces arrêtés alors même que ceux-ci ne sont pas versés au dossier. Il est constant que l'arrêté du 12 juin 2020 a été signé pour le préfet du Jura par M. B... D..., sous-préfet de Dole. Le préfet du Jura a, par un arrêté du 17 février 2020, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour, donné délégation de signature à M. Justin Babilotte, secrétaire général de la préfecture, aux fins de prendre les mesures de la nature de celles contenues dans l'arrêté attaqué. M. B... D..., sous-préfet de Dôle disposait d'une délégation de signature prise par un arrêté du 17 février 2020 pour signer, en cas d'absence ou d'empêchement de M. E..., les décisions contestées. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le secrétaire général n'aurait pas été absent ou empêché à la date du 12 juin 2020. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté manque en fait et doit, dès lors, être écarté.

3. En deuxième lieu, s'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué vise l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 dont les dispositions sont notamment reprises à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, cette erreur de visa n'est pas par elle-même de nature à entacher cette décision d'illégalité. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient l'appelant, l'arrêté contesté, qui comporte l'exposé des faits et des considérations de droit sur lesquels il se fonde, est suffisamment motivé. Le préfet du Jura a visé l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a mentionné dans son arrêté que le contrat de travail à temps partiel conclu par M. A... ne lui procure pas une rémunération suffisante car elle ne correspond qu'à la moitié du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) ainsi que la circonstance que l'appelant ne produit pas d'élément et de documents suffisants justifiant de considérations humanitaires particulières. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Jura n'aurait pas procédé à un examen complet de sa situation personnelle ou qu'il s'est irrégulièrement estimé en situation de compétence liée.

4. En troisième lieu, M. A... ne peut utilement se prévaloir d'une méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que ce n'est pas sur ce fondement qu'il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour et que le préfet, qui n'y était pas tenu, n'a pas non plus examiné sa demande sur ce fondement.

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. M. A... soutient résider en France depuis l'âge de seize ans, que son parcours scolaire est sérieux, qu'il justifie d'un engagement en équipe de sports important, qu'il entretient depuis quatre ans une relation amoureuse avec une ressortissante française avec laquelle il vit d'ailleurs depuis un an. Il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A... qui a bénéficié d'une succession de titres de séjour étudiant ne pouvait ignorer la précarité de sa situation, qu'il ne vit avec une ressortissante française que depuis un an selon ses déclarations, qu'il n'établit pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine et que l'emploi dont il se prévaut ne lui procure qu'une rémunération inférieure à la moitié du SMIC. Par suite, compte tenu des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de l'intéressé en France, l'arrêté litigieux du 12 juin 2020 n'a pas porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris. Ainsi, le préfet du Jura n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle de l'intéressé.

7. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions présentées par M. A... à fin d'annulation doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, celles présentées à fin d'injonction et au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet du Jura.

Délibéré après l'audience du 2 février 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Goujon-Fischer, président-assesseur,

- M. Sibileau, premier conseiller,

- Mme Barrois, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 février 2023.

Le rapporteur,

Signé : J.-B. SibileauLe président,

Signé : J. -F. Goujon-Fischer

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 22NC00257


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NC00257
Date de la décision : 28/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GOUJON-FISCHER
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste SIBILEAU
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : AMBLARD

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-02-28;22nc00257 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award