Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Holding LLD a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de rétablir son déficit reportable de l'année 2013 et de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignés au titre des années 2014 et 2015.
Par un jugement n° 1804720 du 27 octobre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 29 janvier 2021, la SARL Holding LLD, représentée par Me Leloup, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rétablir le déficit reportable de l'année 2013 et de prononcer, en droits et pénalités, la décharge des impositions contestées au titre des années 2014 et 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les avances sans intérêts consenties à M. A... au cours des années 2010 et 2011 ne sauraient être regardées comme constitutives d'un acte anormal de gestion dès lors qu'elles s'inscrivent dans l'ensemble de ses relations financières avec son dirigeant dans lesquelles ce dernier est lui-même amené à accorder des avances sans intérêts, ce qui a été le cas en 2009, 2012, 2013 et 2014 ;
- c'est à tort que l'administration a estimé que les quatre emprunts bancaires souscrits afin de rembourser le compte courant de M. A... ne relevaient pas d'une gestion commerciale normale alors que l'intérêt pour l'entreprise de ces prêts doit s'analyser au jour de leur souscription en 2005, 2006 et 2008, c'est-à-dire au cours d'exercices prescrits au sens de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales de sorte que cette appréciation ne pouvait plus être remise en cause afin de refuser la déduction des intérêts versés au cours des exercices 2013 et 2014 ; en tout état de cause, la décision de gestion de financer son activité par des avances consenties par son dirigeant ne saurait être remise en cause par l'administration, dès lors que cette pratique est conforme à son intérêt et plus avantageuse que des concours bancaires ; enfin, les intérêts afférents à des emprunts bancaires externes, en l'absence d'avances de son dirigeant, auraient été de toute manière déductibles ;
- c'est à tort que l'administration a réintégré dans le bénéfice imposable de la SCI La Rose les intérêts d'un emprunt de 250 000 euros que cette dernière a souscrit au cours de l'année 2013 alors que la décision de gestion prise par cette société de financer son activité par des avances de son dirigeant ne saurait être remise en cause par l'administration ; enfin, les intérêts afférents à des emprunts bancaires externes en l'absence d'avances de son dirigeant, auraient été de toute manière déductibles ;
- c'est à tort que l'administration a estimé que la cession de créance qu'elle détenait sur la SCI LEL n'était pas justifiée et a en conséquence réintégré dans le bénéfice imposable de cette dernière société le montant des intérêts d'un emprunt de 35 000 euros souscrit en 2014, alors qu'une cession de créance peut être établie par tout moyen, sans que les formalités de l'article 1690 du code civil s'imposent, et qu'en l'occurrence cette opération résulte de la convention d'apports en comptes courants au sein du groupe et a été régulièrement comptabilisée par les intéressés ;
- l'administration n'a pas rapporté la preuve que le loyer de 500 euros réclamé par la SCI LEL à M. A... pour la location de sa maison serait insuffisant alors que les comparables choisis par le service ne sont pas pertinents dès lors qu'ils ne présentent pas les mêmes caractéristiques et dès lors que le loyer pratiqué est cohérent avec sa situation géographique et le marché local ;
- l'administration n'a pas rapporté la preuve que le loyer réclamé par la SCI LEL à M. A... pour la location du bâtiment affecté à son activité professionnelle individuelle était insuffisant en se bornant à constater une augmentation de la surface à la suite de travaux réalisés en 2009 alors que les comparables qu'elle a elle-même produits démontrent qu'il s'agit d'un loyer normal pour ce type de local et de surface dans la commune de Soufflenheim et alors que les travaux réalisés n'ont pas augmenté la surface de vente ;
- la somme de 1 375 euros figurant au crédit du compte courant de M. A... en janvier 2013 constitue le remboursement d'un loyer que ce dernier avait payé à tort pour son compte à la SCI LEL ; il ne s'agit donc pas d'un passif injustifié ;
- les pénalités appliquées doivent être déchargées dès lors que les redressements ne sont pas fondés.
Par un mémoire enregistré le 4 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B... ;
- et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Holding LLD, dont les bénéfices sont imposables de plein droit à l'impôt sur les sociétés, a été créée en 1998 et a pour gérant M. C... A..., également associé. Elle a pour activité la gestion de ses participations dans des sociétés civiles immobilières de gestion lesquelles donnent en location des locaux commerciaux. C'est ainsi que la SARL Holding LLD détient 99 % du capital des SCI LEL, SCI La Rose, SCI HD et SCI CD, sur les résultats desquelles elle est imposable en application de l'article 218 bis du code général des impôts, ces bénéfices étant eux-mêmes déterminés en ce qui concerne sa part selon les règles propres aux bénéfices industriels et commerciaux en vertu du I de l'article 238 bis K du même code. La SARL Holding LLD a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant concerné la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014, ayant donné lieu à des rehaussements de ses bénéfices imposables portées à sa connaissance, selon la procédure contradictoire de rectification prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, par une proposition de rectification du 27 juillet 2016. Une proposition de rectification du même jour a été adressée à la société à la suite d'un contrôle sur pièces ayant donné lieu à un rehaussement de son bénéfice imposable de l'année 2015 selon la procédure contradictoire de rectification. La SARL Holding LLD a refusé ces rectifications le 10 octobre 2016 et le service a partiellement admis ses observations par deux lettres du 3 novembre 2016, sa position étant confirmée à la suite d'une entrevue avec le supérieur hiérarchique du 2 mars 2017 et avec l'interlocuteur départemental le 26 juin suivant. La commission départementale des impôts directs a rendu un avis favorable aux redressements le 26 juin 2017. Les suppléments d'impôt sur les sociétés ont été mis en recouvrement le 14 décembre 2017 et la réclamation préalable de la société du 5 avril 2018 a donné lieu à une décision de rejet du 30 mai 2018. La SARL Holding LLD relève appel du jugement du 27 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant au rétablissement de son déficit reportable de l'année 2013 et la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés des années 2014 et 2015.
Sur le bien-fondé des impositions :
2. Il résulte des articles 38 et 39 du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code, que le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale. Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt. Il appartient en règle générale à l'administration, qui n'a pas à se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour invoquer ce caractère anormal.
En ce qui concerne les avances sans intérêts consenties à M. C... A... :
3. Le service a constaté qu'au cours des exercices déficitaires 2010 et 2011, la société requérante avait consenti à son gérant des avances en compte courant sans lui réclamer d'intérêts. Il a estimé que cet avantage ne correspondait pas à une gestion commerciale normale et a, en conséquence, reconstitué le montant des intérêts qui auraient dû être réclamés à M. A..., sur la base des positions débitrices de son compte courant, au titre de ces deux années, calculés au taux de 3,82 % et 3,99 %, respectivement, taux correspondant à la moyenne des taux effectifs moyens pratiqués pour des prêts à taux variable aux entreprises d'une durée supérieure à deux ans. L'administration a en conséquence réintégré les montants des intérêts ainsi calculés dans les résultats des années 2010 et 2011, occasionnant une réduction du déficit reportable constaté au 31 décembre 2012 et aboutissant ainsi à un rehaussement du bénéfice de l'année 2013.
4. Les prêts sans intérêts accordés par une entreprise au profit d'un de ses dirigeants ou de ses associés, ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages l'entreprise a agi dans son propre intérêt. S'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer que les avantages consentis à un dirigeant ou un associé par une entreprise constituent un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties. Dans l'hypothèse où l'entreprise apporte une telle justification, il incombe ensuite à l'administration, si elle s'y croit fondée, d'apporter la preuve de ce que cette contrepartie est dépourvue d'intérêt pour l'entreprise ou que sa rémunération est excessive.
5. Si la société requérante soutient qu'il convient d'apprécier de manière globale les relations financières entretenues par elle avec son gérant auprès de qui elle a l'habitude de se financer et qui lui a consenti des apports financiers en compte courant sans lui réclamer d'intérêts, notamment au cours des années 2009, 2012, 2013 et 2014, une telle circonstance ne saurait constituer une contrepartie de nature à justifier l'absence d'intérêts aux avances par elle consenties. En tout état de cause, il résulte de l'instruction que les positions créditrices du compte courant d'associé de M. A... au cours des années antérieures et postérieures aux années 2010 et 2011 résultent, non pas d'avances de trésorerie, mais des apports faits par l'intéressé des créances qu'il détenait sur les SCI La Rose, LEL, HD et CD, correspondant au solde de ses comptes courants dans ces sociétés, la SARL Holding LLD, substituée à M. A... en tant que créancier de ces sociétés, se retrouvant à raison de ces écritures, débitrice à son égard. Dans ces conditions, la SARL Holding LLD n'est pas fondée à soutenir qu'elle avait eu intérêt à ne pas réclamer de rémunération pour les avances qu'elle a consenties à son gérant à raison des avances sans intérêts que ce dernier lui aurait lui-même accordées. Par suite, en l'absence de toute contrepartie, l'administration était fondée à considérer que ces avances sans intérêts étaient constitutives d'un acte anormal de gestion.
En ce qui concerne la déduction d'intérêts sur emprunts :
6. En premier lieu, il résulte de l'instruction qu'à la suite des écritures ci-dessus analysée par lesquelles M. A... a transféré à la SARL Holding LLD les créances qu'il détenait sur les SCI La Rose, LEL, HD et CD, à raison des avances en compte courant qu'il leur avait consenties, son compte courant dans les écritures de la société requérante s'est retrouvé fortement créditeur. Afin de rembourser à M. A... les soldes de ce compte courant, la société requérante a souscrit auprès d'établissements bancaires quatre emprunts d'un montant respectif de 300 000 euros le 3 août 2005, de 380 000 euros le 6 juillet 2006, de 200 000 euros le 17 juin 2008 et de 200 000 euros le 24 octobre 2014, ces sommes ayant été versées à l'intéressé selon les modalités détaillées dans le jugement attaqué. La SARL Holding LLD a déduit les intérêts de ces emprunts de ses résultats. Estimant que le fait de reprendre les créances que lui avait apportées M. A..., d'en devenir ainsi le débiteur puis de s'endetter afin de lui rembourser les soldes de son compte courant ne relevait pas d'une gestion commerciale normale, le service, après avoir analysé les écritures du compte courant ainsi qu'il ressort de l'annexe à la proposition de rectification du 27 juillet 2016, a réintégré dans les bénéfices imposables des années 2010 à 2014 la fraction des intérêts des emprunts dans la mesure où ces derniers avaient servi à financer l'apport de ces créances par M. A....
7. Si la société requérante soutient que l'existence de la cession par M. A... des créances qu'il détenait sur les quatre SCI est établie, notamment par l'existence des conventions dites " d'avances en compte courant " conclues avec elles le 2 janvier 2008, au demeurant dépourvues de date certaine et produites après les opérations de contrôle, elle ne justifie pas, en tout état de cause, de son intérêt à reprendre ces créances fut-ce afin de centraliser la trésorerie du groupe. Contrairement à ce qu'elle soutient, en l'absence de ces écritures, elle ne se serait pas retrouvée endettée dans cette mesure sans aucune contrepartie dès lors que l'apport de ces créances ne lui a permis de dégager aucun avantage de trésorerie. Elle n'est dès lors pas fondée à soutenir qu'en l'absence de ces opérations elle aurait supporté des frais financiers identiques qui auraient été déductibles. Il résulte de ces éléments que la SARL Holding LLD n'a accepté de recevoir les créances apportées par M. A... qu'afin de permettre à celui-ci d'obtenir le remboursement des avances qu'il avait consenties aux quatre SCI lesquelles ne disposaient pas des moyens financiers pour y procéder. Par suite, c'est à juste titre que l'administration a refusé la déduction des intérêts d'emprunts litigieux, dans la seule mesure où ils ont été souscrits afin de financer ce remboursement, comme ne se rapportant pas à une gestion commerciale normale.
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due ".
9. Afin d'apprécier la déductibilité des intérêts d'emprunts comptabilisés au cours des exercices 2010 à 2014, l'administration était en droit d'examiner les contrats de prêts souscrits au cours des années 2005, 2006 et 2008 afin de déterminer dans quelle mesure ils avaient souscrits dans le cadre d'une gestion commerciale normale. En procédant à la réintégration d'une fraction des intérêts dans les bénéfices des exercices 2010 à 2014, non prescrits, l'administration n'a pas méconnu les dispositions ci-dessus reproduites de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales.
En ce qui concerne les rectifications issues du rehaussement des bénéfices provenant de la SCI La Rose :
10. Par proposition de rectification du 27 juillet 2016, le service a réintégré dans les bénéfices de la SCI La Rose, sur lesquels la SARL Holding LLD est imposée ainsi qu'il a été dit, une fraction des intérêts déduits au cours des exercices 2013, 2014 et 2015 au titre d'un emprunt souscrit le 12 juillet 2013 pour la somme de 270 000 euros. Il résulte de l'instruction et notamment des termes du contrat de prêt, que cet emprunt avait été souscrit afin de rembourser à la SARL Holding LLD le solde créditeur de son compte courant d'associé. Il n'est cependant pas contesté que ce prêt n'a pas été affecté à cet objet puisqu'aucun remboursement n'a été effectué au profit de la SARL Holding LLD mais qu'au contraire, le capital a été appréhendé à hauteur de 250 000 euros par M. A... le 18 juillet 2013 par le débit de son compte courant d'associé dans la SCI La Rose. L'administration a en conséquence considéré que les intérêts de ce prêt n'avaient pas été exposés dans cette mesure dans l'intérêt de la SCI La Rose mais supportés au seul profit de M. A.... Si la société requérante soutient que cette opération s'inscrit dans la politique du groupe consistant à se financer à des conditions avantageuses auprès de ses associés, en l'occurrence M. A..., plutôt qu'auprès d'établissements bancaires, il résulte de l'instruction que le compte courant de M. A... à la suite de cette opération s'est retrouvé débiteur, de sorte que l'existence d'avances antérieures n'est pas établie et qu'en utilisant le prêt obtenu pour les besoins privé de ce dernier, la SCI La Rose est demeurée débitrice à l'égard de la SARL Holding LLD sans se libérer de sa dette à son égard. Dès lors, en l'absence de toute contrepartie pour la SCI La Rose, l'administration a rapporté la preuve que cette opération est constitutive d'un acte anormal de gestion.
En ce qui concerne les rectifications issues du rehaussement des bénéfices provenant de la SCI LEL :
11. Par deux propositions de rectification du 27 juillet 2016, le service a réintégré, à la suite d'une vérification de comptabilité et d'un contrôle sur pièces, dans les bénéfices de la SCI LEL, sur lesquels la SARL Holding LLD est imposée ainsi qu'il a été dit, diverses sommes.
S'agissant des intérêts d'un emprunt de 35 000 euros :
12. La SCI LEL a souscrit au cours de l'année 2013 un emprunt bancaire de 35 000 euros affecté à la réalisation de travaux d'installation d'une chaudière et de toiture. Les fonds ont été débloqués par l'établissement bancaire le 2 janvier 2014 et aussitôt reversés à hauteur de 23 000 euros au profit de M. A..., le reste du capital étant prélevé par la SCI La Rose. En l'absence de réalisation des travaux auxquels l'emprunt était affecté et de l'utilisation des fonds au profit de tiers sans contrepartie, l'administration, regardant l'opération comme constitutive d'un acte anormal de gestion, a estimé que les intérêts du prêt n'avaient pas été supportés dans l'intérêt de l'exploitation et les a réintégrés dans le bénéfice imposable de l'année 2014.
13. La société requérante soutient que la cause des paiements effectués par la SCI LEL au profit de M. A... et de la SCI La Rose repose sur une cession des créances qu'elle détenait sur la SCI LEL au profit de M. A... et de la SCI La Rose. Toutefois, la SARL Holding LLD n'identifie pas la créance qu'elle aurait détenue sur la SCI LEL et qu'elle aurait ensuite cédée à M. A... et à la SCI La Rose et n'en précise ni la nature, ni la date, ni le montant. Si afin d'établir l'existence de cette cession de créance la société requérante entend se prévaloir de l'existence de conventions d'avances en compte courant conclues entre les SCI du groupe et la SARL Holding LLD, lesdites conventions stipulent une centralisation des comptes courants d'associés au niveau de la société mère rendant celle-ci débitrice des soldes créditeurs des comptes courants d'associés et libérant ainsi les SCI filiales de leurs dettes à l'égard des associés. Il en résulte que ces conventions ne sauraient justifier le schéma inverse dans lequel la SARL Holding LLD aurait cédé les créances qu'elle détiendrait sur les filiales à M. A.... Par suite, l'administration a rapporté la preuve que les versements effectués par la SCI LEL au profit de M. A... et de la SCI La Rose sont dépourvues de toute cause et contrepartie et qu'en conséquence, l'emprunt souscrit afin de financer ces paiements ne correspond pas à une gestion commerciale normale. Par suite, c'est à juste titre que le service a réintégré dans le bénéfice imposable de l'année 2014 les intérêts de cet emprunt d'un montant de 782 euros comme n'ayant pas été supportés dans l'intérêt de l'exploitation.
S'agissant du loyer de la maison d'habitation de M. C... A... :
14. La SCI LEL a donné en location à M. C... A... depuis l'année 1999 un immeuble d'habitation situé 6, Grand Rue à Soufflenheim, moyennant un loyer mensuel de 500 euros, composé de 10 pièces principales comprenant 7 chambres, cuisine, salle d'eau, annexe, d'une surface habitable de 230 m². Le service a estimé que ce loyer était anormalement bas. Il a en conséquence procédé à une évaluation d'un loyer normal pour une telle maison d'habitation sur la base du loyer au m² pratiqué pour un appartement de 48 m² situé à la même adresse, construit en 2009, loué au fils de D... A..., ajusté au prorata de la valeur locative des deux immeubles retenue pour la taxe foncière, aboutissant à un loyer mensuel de 1 000 euros.
15. Il incombe à l'administration, en vertu des règles rappelées au point 2 ci-dessus, d'établir le caractère anormalement bas d'un loyer consenti par une entreprise. En l'espèce, il n'est pas contesté que M. C... A... occupe le logement litigieux pour les besoins de sa résidence personnelle depuis l'année 1999 sans aucune réévaluation du loyer. En admettant que cet immeuble datant de 1870 ne soit pas conforme aux dernières normes d'habitabilité et de performances énergétiques, qu'il se situe dans un secteur résidentiel moins prisé que d'autres dans la métropole strasbourgeoise et que son rez-de-chaussée se trouve occupé par le commerce exploité par M. A..., il n'en demeure pas moins qu'un loyer mensuel de 500 euros pour une maison de 10 pièces et de 230 m² paraît anormalement bas. Par suite, l'administration doit être regardée comme ayant apporté la preuve que le loyer réclamé par la SCI LEL à M. A... ne correspond pas à une gestion commerciale normale. En procédant à la détermination du loyer qui aurait dû être pratiqué selon la méthode ci-dessus analysée, l'administration n'en a pas fait une évaluation exagérée. Si la société requérante soutient qu'il existe plusieurs biens comparables dans le secteur concerné qui ne trouvent pas preneurs pour des loyers de l'ordre de celui que la SCI LEL avait réclamé à M. A..., elle n'en justifie pas en invoquant seulement le cas d'un immeuble de 130 m² que la SCI La Rose tenterait vainement de louer pour un loyer mensuel de 400 euros sans autre précision. Par suite c'est à juste titre que l'administration a inclus dans les bénéfices imposables de la SCI LEL des années 2013 et 2014 la différence entre les loyers qu'elle aurait dû normalement percevoir et ceux qu'elle a effectivement encaissés de M. A....
S'agissant du loyer du local loué à l'entreprise individuelle A... :
16. Suivant le bail commercial du 25 mars 1999, la SCI LEL a donné en location à M. A..., pour les besoins de son commerce de chaussures, vêtements, bazar, tabacs, loto, presse, un immeuble comprenant un magasin de vente avec réserve situé 6 Grand Rue à Soufflenheim, outre, attenant au premier local, un entrepôt, atelier, garage situé 2 rue des Potiers, le tout d'une surface de 264 m² moyennant le loyer mensuel de 914,69 euros hors taxes (HT). Suivant un avenant au bail commercial du 25 août 2009, la SCI LEL a donné en location à M. A... de nouveaux locaux, comprenant des garages, entrepôts, atelier, aire de lavage, bureaux et sanitaires, situés dans un nouveau bâtiment construit par elle à la même adresse pour une superficie de 278 m². Le loyer de l'ensemble de ces bâtiments, d'une surface de 542 m² désormais, a été porté à 1 150 euros mensuels HT seulement. En constatant ce doublement des surfaces louées et en démontrant que le loyer ainsi stipulé ne garantissait un taux de rentabilité que de 1,94 % seulement au regard des investissements réalisés, l'administration rapporte la preuve du caractère anormalement bas du loyer réclamé qui aurait dû s'établir à 1 829,38 euros HT. La circonstance que l'augmentation de la superficie n'a pas entraîné une augmentation d'autant de la surface de vente est sans incidence sur le montant du loyer. Si la société requérante soutient que le loyer stipulé est conforme aux loyers pratiqués dans le secteur, elle n'en justifie pas. Par suite, la SARL Holding LLD n'est pas fondée à demander que la somme de 8 152 euros soit déduite des bénéfices de la SCI LEL des années 2013 et 2014 sur lesquels elle a été imposée.
S'agissant d'un passif injustifié de 1 375 euros au titre de l'année 2013 :
17. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts relatif à la détermination des bénéfices industriels et commerciaux : " 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ". Aux termes de l'article 54 du même code applicable aux contribuables soumis à un régime réel d'imposition : " Les contribuables mentionnés à l'article 53 A sont tenus de représenter à toute réquisition de l'administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration ". Pour l'application de ces dispositions, applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du code général des impôts, il appartient au contribuable de justifier l'inscription d'une dette au passif du bilan de son entreprise.
18. Il ressort de la proposition de rectification du 27 juillet 2016, adressée à la SCI LEL à la suite de la vérification de sa comptabilité, que cette société a encaissé la somme de 1 375 euros au cours de l'année 2013 qui lui a été versée par M. A... et qui est venue créditer son compte courant. Afin de justifier cette écriture, la société a fait valoir qu'elle avait été amenée à réclamer par erreur à M. A... deux fois le même loyer et que ce paiement effectué par erreur lui avait été crédité sur son compte courant. Si l'administration estime que cette justification n'est pas établie dès lors que cette erreur de paiement n'a pas été retrouvée dans les écritures de l'entreprise individuelle de M. A... à l'occasion de la vérification de sa comptabilité, il y a lieu d'admettre qu'en l'espèce, dès lors que la somme a bien été versée par l'intéressée, l'écriture d'apport à son compte courant a suffisamment été justifiée. Par suite, la SARL Holding LLD est fondée à demander que la somme de 1 375 euros soit déduite du bénéfice de la SCI LEL de l'année 2013 sur lequel elle a été imposée.
Sur les pénalités :
19. Les suppléments d'impôt sur les sociétés litigieux ont été uniquement assortis de l'intérêt de retard prévu par l'article 1727 du code général des impôts. La réduction ci-dessus prononcée a également pour conséquence la réduction à due concurrence des intérêts de retard. Le bien-fondé des autres rectifications ayant été établi ci-dessus, la SARL Holding LLD n'est par suite pas fondée à demander la décharge des intérêts de retard les ayant assorties.
20. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Holding LLD est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a refusé de faire droit à ses conclusions tendant à la décharge, en droits et pénalités, du supplément d'impôt sur les sociétés consécutif à la rectification visée aux points 17 à 18 ci-dessus.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à titre principal dans la présente instance, verse à la SARL Holding LLD une somme au titre des frais exposés par elle.
D E C I D E :
Article 1er : Il est déduit du bénéfice imposable de la SARL Holding LLD la somme de 1 375 euros au titre de l'année 2013.
Article 2 : La SARL Holding LLD est déchargée du supplément d'impôt sur les sociétés et des majorations en litige dans la mesure de la réduction des bases d'impositions décidée à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 27 octobre 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Holding LLD et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 26 janvier 2023, à laquelle siégeaient :
M. Martinez, président de chambre,
M. Agnel, président assesseur,
Mme Brodier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 février 2023.
Le rapporteur,
Signé : M. AgnelLe président,
Signé : J. Martinez
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
N° 21NC00303
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