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14/02/2023 | FRANCE | N°20NC01005

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 14 février 2023, 20NC01005


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... et Mme B... D... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision implicite du 20 avril 2017 par laquelle le préfet de la Moselle a refusé de prendre les dispositions nécessaires pour que l'association du club canin

d'Hayange-Ranguevaux respecte les prescriptions du règlement sanitaire départemental et l'article L. 214-6-1 du code rural et de la pêche maritime et d'enjoindre au préfet de faire respecter ces dispositions.

Par un jugement n° 1703834 du 24

février 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision implicit...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... et Mme B... D... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision implicite du 20 avril 2017 par laquelle le préfet de la Moselle a refusé de prendre les dispositions nécessaires pour que l'association du club canin

d'Hayange-Ranguevaux respecte les prescriptions du règlement sanitaire départemental et l'article L. 214-6-1 du code rural et de la pêche maritime et d'enjoindre au préfet de faire respecter ces dispositions.

Par un jugement n° 1703834 du 24 février 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision implicite du 20 avril 2017 du préfet de la Moselle et a enjoint à ce dernier de faire respecter les dispositions en cause du règlement sanitaire départemental et les articles L. 153-4 et L. 214-6-1 du code rural et de la pêche maritime dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 avril 2020, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1703834 du tribunal administratif de Strasbourg du 24 février 2020 ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme D....

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier car il méconnait les dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 741-2 du code de justice administrative car il ne mentionne pas dans ses visas l'arrêté préfectoral ayant approuvé le règlement sanitaire départemental (RSD) dont il est fait application, ni même ce règlement ;

- c'est à tort que les premiers juges ont admis la recevabilité de la requête dirigée contre le refus du préfet de mettre en œuvre le RSD ; il ressort des termes des articles L. 1311-2 et L. 1311-4 du code de la santé publique que la compétence du préfet pour assurer le respect des règlements sanitaires départementaux n'existe que dans le cas d'urgence et notamment pour les dangers pour la santé publique ;

- le tribunal a commis une erreur de droit et une erreur de qualification juridique des faits en considérant que les dispositions de l'article 153.4 du RSD relatif à l'implantation des élevages étaient applicables au club canin :

. il n'est pas établi que le club canin disposerait de bâtiments d'élevage, ni même, qu'à les supposer existants, ces bâtiments auraient été implantés postérieurement à l'installation de M. et Mme D... ;

. si cet article définit les règles de distance entre les " bâtiments renfermant des animaux " et les immeubles habités, aucun bâtiment durable ne renferme d'animal ;

. les activités menées par le club canin ne sauraient être assimilées à un élevage ; l'article 153-1 du RSD ne définit d'ailleurs pas le terme d'élevage ;

. les animaux n'y sont présents qu'aux heures de préparation des épreuves et concours ;

- les activités du club canin, constitué sous forme associative, ne sont pas soumises aux obligations déclaratives visées à l'article L. 214-6-l du code rural et de la pêche maritime ; l'adhésion à une association et le versement corollaire de cotisations ne peuvent être regardés comme constitutifs d'un acte de commerce.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2020, M. et Mme D..., représentés par Me Mertz conclut au rejet de la requête d'appel du ministre de l'agriculture et de l'alimentation et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est régulier ;

- l'article L. 214-6-1 du code rural et de la pêche maritime a été méconnu car aucune déclaration n'a été effectuée par le club canin et aucune certification professionnelle ou de formation n'a été produite à l'administration ;

- les articles L. 1311-2 et L. 1311-4 du code de la santé publique dont se prévaut le ministre en appel sont sans rapport avec leur demande de première instance ;

- face à l'inertie du maire de la commune et du président de la communauté d'agglomération, ils n'avaient pas d'autres choix que de se tourner vers le préfet afin que celui-ci fasse respecter les règles en vigueur ;

- l'association dispose de bâtiments durables et pérennes qui ont été construits lors de son installation en 2015, soit après leur installation dans leur maison en 1997 ;

- l'association est un club de dressage canin actif depuis le 23 avril 2012 et non pas un simple groupe d'adhérents ; elle exerce à titre commercial de sorte que les dispositions de l'article L. 214-6-1 du code rural et de la pêche maritime lui sont applicables ;

- les bâtiments qui accueillent les animaux doivent être considérés comme destinés à l'entretien de ceux-ci et donc à de l'élevage.

Par une ordonnance du 26 août 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 3 octobre 2022 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement sanitaire départemental de la Moselle ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Roussaux, première conseillère,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me Mertz, représentant M. et Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme D..., qui résident dans la commune de Ranguevaux, se plaignent de nuisances causées par le club canin d'Hayange-Ranguevaux, dont le terrain se trouve à proximité de leur habitation. Par courrier du 20 février 2017, M. et Mme D... ont demandé au préfet de la Moselle de prendre les mesures nécessaires pour que l'association respecte les dispositions de l'article 153.4 du règlement sanitaire départemental (RDS) de Moselle et celles de l'article L. 214-6-1 du code rural et de la pêche maritime. M. et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du préfet de la Moselle par laquelle il a implicitement rejeté leur demande. Par jugement du 24 février 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cette décision. Le ministre de l'agriculture et de l'alimentation relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le refus de faire respecter l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental de Moselle :

2. Aux termes de l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental (RSD) de Moselle : " Sans préjudice de l'application des documents d'urbanisme existant dans la commune ou de cahiers des charges de lotissement, l'implantation des bâtiments renfermant des animaux doit respecter les règles suivantes :-les élevages porcins à lisier(...) ;- les autres élevages, à l'exception des élevages de type familial et de ceux de volailles et de lapins, ne peuvent être implantés à moins de 50 mètres des immeubles habités ou habituellement occupés par des tiers, des zones de loisirs et de tout établissement recevant du public à l'exception des installations de camping à la ferme ;- les élevages de volailles et de lapins (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier et plus particulièrement de l'article 4 du statut de l'association du club canin d'Hayange-Ranguevaux, que celle-ci a pour objet de conseiller et guider ses adhérents dans l'éducation de leurs chiens et d'assurer la promotion et la bonne pratique des activités reconnues par la société Centrale Canine pour permettre le développement des aptitudes des chiens aux épreuves canines. Elle n'exerce ainsi pas une activité d'élevage. M. et Mme D... n'apportent par ailleurs aucune pièce de nature à établir que dans les faits cette association pratiquerait une activité d'élevage. Par suite, ils ne pouvaient pas utilement demander au préfet d'intervenir afin que l'article 153-4 du RSD de Moselle, qui s'applique aux activités d'élevage, soit respecté. Le préfet n'a ainsi en tout état de cause pas méconnu les dispositions précitées en refusant d'intervenir. Il en résulte que le ministre de l'agriculture et de l'alimentation est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a, par le jugement contesté, annulé la décision de refus du préfet.

En ce qui concerne le refus du préfet de demander à l'association du club canin d'Hayange-Ranguevaux de déclarer son activité :

4. Aux termes de l'article L. 214-6-1 du code rural et de la pêche maritime : " I.-La gestion d'une fourrière ou d'un refuge, ainsi que l'exercice à titre commercial des activités de transit ou de garde, d'éducation, de dressage et de présentation au public de chiens et de chats : 1° Font l'objet d'une déclaration au préfet ; (...) ".

5. Si M. et Mme D... font valoir que l'association du club canin d'Hayange-Ranguevaux exerce une activité commerciale, la seule circonstance qu'elle dispose d'un numéro SIREN ne saurait suffire à l'établir. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier, dont les statuts de l'association, que cette dernière exercerait, tant au regard de son objet que de ses ressources, une activité commerciale. Par suite, au regard des éléments du dossier, le préfet n'a pas méconnu les dispositions précitées en refusant d'intervenir. Le ministre de l'agriculture et de l'alimentation est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a, par le jugement contesté, annulé la décision de refus du préfet d'intervenir.

6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement, que le ministre de l'agriculture et de l'alimentation est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision implicite de rejet du préfet de la Moselle du 20 avril 2017 et lui a enjoint de faire respecter les dispositions de l'article 153-4 du RSD et celles de l'article L. 214-6-1 du code rural et de la pêche maritime. Le jugement doit par suite être annulé et la demande de M. et Mme D... rejetée.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. et Mme D... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg n° 1703834 du 24 février 2020 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. et Mme D... devant le tribunal administratif de Strasbourg et leurs conclusions en appel présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., à Mme B... D... et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Copie en sera délivré au préfet de la Moselle.

Délibéré après l'audience du 24 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- Mme Roussaux, première conseillère,

- Mme Picque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 février 2023.

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : M. C...

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

M. C...

2

N° 20NC01005


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC01005
Date de la décision : 14/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : MERTZ

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-02-14;20nc01005 ?
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