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29/12/2022 | FRANCE | N°19NC03616

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 29 décembre 2022, 19NC03616


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme K... H..., M. et Mme F... J... à l'Antoine et M. et Mme L... M... ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 7 août 2017 par lequel le maire de la commune de Le G... a accordé à Mme I... B... un permis de construire pour le changement d'affectation d'un bâtiment de stockage ainsi que pour l'extension d'un bâtiment existant.

Par un jugement n° 1701735 du 5 décembre 2019, le tribunal administratif de Besançon a annulé l'arrêté du 7 août 2017 du maire de

la commune de Le G....

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistré...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme K... H..., M. et Mme F... J... à l'Antoine et M. et Mme L... M... ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 7 août 2017 par lequel le maire de la commune de Le G... a accordé à Mme I... B... un permis de construire pour le changement d'affectation d'un bâtiment de stockage ainsi que pour l'extension d'un bâtiment existant.

Par un jugement n° 1701735 du 5 décembre 2019, le tribunal administratif de Besançon a annulé l'arrêté du 7 août 2017 du maire de la commune de Le G....

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2019 sous le n° 19NC03616, et deux mémoires, enregistrés le 15 septembre 2020 et le 22 février 2021, Mme I... B..., représentée par Me Brocherieux, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 7 août 2017 ;

2°) de rejeter les conclusions présentées par M. et Mme H..., M. et Mme J... à l'Antoine et M. et Mme M... ;

3°) de mettre à la charge solidaire de ces derniers une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 27 août 2020 et le 8 janvier 2021, M. et Mme H..., M. et Mme J... à l'Antoine et M. et Mme M..., représentés par Landbeck, demandent à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête d'appel de Mme B... et de confirmer le jugement du tribunal administratif de Besançon ;

2°) à titre subsidiaire, d'infirmer le jugement du tribunal administratif de Besançon en ce qu'il n'a pas retenu les autres moyens soulevés devant lui ;

3°) en toute hypothèse, de mettre à la charge de Mme B... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une lettre du 28 janvier 2022, la cour a informé les parties qu'elle était susceptible de surseoir à statuer, en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, dans l'attente de la délivrance d'un permis de construire régularisant les vices tirés, d'une part, de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et, d'autre part, de la méconnaissance de l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Jura.

Par un mémoire, enregistré le 1er février 2022, Mme B... a présenté des observations en réponse à ce courrier.

Par un mémoire, enregistré le 3 février 2021, M. et Mme H..., M. et Mme J... à l'Antoine et M. et Mme M... ont présenté des observations en réponse à ce courrier.

Par un arrêt n°s 19NC03616, 20NC00333 du 8 mars 2022, la cour administrative d'appel de Nancy a sursis à statuer sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et a accordé un délai de quatre mois à Mme B... et à la commune de Le G... pour justifier de la délivrance d'un acte destiné à régulariser l'illégalité dont est entaché l'arrêté du 7 août 2017, soit la méconnaissance de la distance minimale imposée par l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Jura.

Par un mémoire, enregistré le 5 juillet 2022, Mme B... fait valoir que le vice a été régularisé par un arrêté du préfet du Jura du 1er juillet 2022 accordant une dérogation à la règle de distance prévue à l'article 153-4 du règlement sanitaire du Jura et maintient ainsi ses précédentes conclusions.

Par des mémoires enregistrés le 29 août 2022 et le 29 septembre 2022, M. et Mme H..., ainsi que M. et Mme M... maintiennent leurs conclusions.

Ils font valoir que :

- la commune de Le G... n'a pas produit d'acte destiné à régulariser l'arrêt du 8 mars 2022, de sorte que la requête d'appel doit être rejetée ;

- ils ont présenté un recours gracieux contre l'arrêté du préfet, de sorte que la cour doit attendre la position du préfet sur ce recours et le cas échant le résultat d'un éventuel recours contre cet arrêté devant le tribunal administratif de Besançon.

S'agissant de la dérogation accordée par le préfet du Jura :

- ils renvoient à leurs recours gracieux pour justifier que l'arrêté préfectoral ne peut régulariser la situation ;

- l'avis de la chambre d'agriculture mentionne à tort une position favorable du maire, alors qu'aucune pièce ne le justifie ; de plus, contrairement à ce qu'indique cet avis, le projet aggravera l'exposition à de potentielles nuisances ; enfin, c'est à tort que l'avis retient que le logement est historiquement lié à l'activité agricole, alors notamment que l'exploitation n'a débuté qu'en 2013 ;

- l'article 164 du règlement sanitaire départemental du Jura impose, pour bénéficier d'une dérogation, que les intéressés s'engagent préalablement par écrit à se conformer aux prescriptions, qui leur seront ordonnées, or Mme B... ne s'est nullement engagée à respecter ces prescriptions ;

- l'arrêté mentionne que M. C... est un ancien employé de M. D..., mais cette ancienne qualité ne peut nullement fonder une dérogation pour le futur ; l'arrêté ne précise pas que Mme A... habite également sur place ;

- la dérogation pourrait, ainsi que le prévoit l'article 164 du règlement sanitaire départemental du Jura, être retirée en cas de contravention et cela notamment après que le permis ait acquis un caractère définitif, de sorte que cette dérogation ne peut permettre une quelconque régularisation du permis initialement accordé.

S'agissant de la dérogation accordée par la commune de Le G... :

- l'arrêté municipal du 22 septembre 2022 accordant une dérogation à Mme B... à la règle de distance prévue à l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Jura a été produit après le délai imparti par la cour ;

- il est à tort présenté comme venant compléter l'arrêté préfectoral ;

- il ne peut déroger au règlement sanitaire départemental ;

- il est illégal pour les mêmes raisons que celles préalablement exposées pour l'arrêté préfectoral.

Par un mémoire enregistré le 29 septembre 2022, M. et Mme J... à l'Antoine déclarent se désister de l'instance.

M. et Mme H..., ainsi que M. et Mme M... ont présenté un mémoire enregistré le 28 novembre 2020, par lequel ils concluent aux mêmes fins par les mêmes moyens. Ce mémoire n'a pas été communiqué.

Par une lettre du 29 novembre 2022, la cour a informé les parties qu'elle était susceptible de surseoir à statuer, en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, dans l'attente de la délivrance d'un permis de construire régularisant le vice tiré de l'absence de proposition préalable du directeur départemental des affaires sanitaires et sociales à l'adoption de la dérogation préfectorale sur le fondement de l'article 164 du règlement sanitaire départemental du Jura.

Par un mémoire, enregistré le 1er décembre 2022, M. et Mme H..., ainsi que M. et Mme M... ont présenté des observations en réponse à ce courrier.

Par un mémoire, enregistré le 2 décembre 2022, Mme B... a présenté des observations en réponse à ce courrier.

II. Par une requête enregistrée le 7 février 2020 sous le n° 20NC00333, et un mémoire, enregistré le 30 mars 2021, la commune de Le G..., représentée par Me Lhomme, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 7 août 2017 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. et Mme H..., M. et Mme J... à l'Antoine et M. et Mme M... ;

3°) de mettre à la charge solidaire de ces derniers une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions à fin d'annulation présentées en première instance par M. et Mme H... et autres étaient irrecevables dès lors qu'ils n'avaient pas intérêt à agir et encore moins un intérêt commun à agir justifiant le dépôt d'une requête collective ;

- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, il n'existait aucun risque d'inondation sur les parcelles intéressant le permis de construire litigieux s'opposant à la délivrance du permis.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 27 août 2020 et le 27 juillet 2021, M. et Mme H..., M. et Mme J... à l'Antoine ainsi que M. et Mme M..., représentés par Me Landbeck, demandent à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête d'appel de la commune de Le G... et de confirmer le jugement du tribunal administratif de Besançon ;

2°) à titre subsidiaire, d'infirmer le jugement du tribunal administratif de Besançon en ce qu'il n'a pas retenu les autres moyens soulevés devant lui ;

3°) en toute hypothèse, de mettre à la charge de la commune de Le G... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- ils avaient intérêt à agir et pouvaient présenter une requête collective pour demander l'annulation du permis de construire litigieux ;

- les autres moyens soulevés par la commune de Le G... ne sont pas fondés ;

- en toute hypothèse les moyens soulevés en première instance et tirés, d'une part, de ce que le dossier de demande ne satisfait pas aux exigences des articles R. 431-8 et R. 431-9 du code de l'urbanisme, et, d'autre part, de ce que l'arrêté méconnaît les articles 153-2 et 153-4 du règlement sanitaire départemental, justifient l'annulation de l'arrêté litigieux.

Par une lettre du 28 janvier 2022, la cour a informé les parties qu'elle était susceptible de surseoir à statuer, en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, dans l'attente de la délivrance d'un permis de construire régularisant les vices tirés, d'une part, de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et, d'autre part, de la méconnaissance de l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Jura.

Par un mémoire, enregistré le 1er février 2022, Mme B... a présenté des observations en réponse à ce courrier.

Par un mémoire, enregistré le 3 février 2021, la commune de Le G... a présenté des observations en réponse à ce courrier.

Par un arrêt n°s 19NC03616, 20NC00333 du 8 mars 2022, la cour administrative d'appel de Nancy a sursis à statuer sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et a accordé un délai de quatre mois à Mme B... et à la commune de Le G... pour justifier de la délivrance d'un acte destiné à régulariser l'illégalité dont est entaché l'arrêté du 7 août 2017, soit la méconnaissance de la distance minimale imposée par l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Jura.

Par des pièces et un mémoire, enregistrés le 7 juillet 2022 et le 22 septembre 2022, la commune de Le G... fait valoir que le vice a été régularisé par l'adoption d'un arrêté du préfet du Jura du 1er juillet 2022 accordant à Mme B... une dérogation à la règle de distance prévue à l'article 153-4 du règlement sanitaire du Jura, ainsi que par l'adoption d'un arrêté du maire de la commune de Le G... du 20 septembre 2022 accordant également une dérogation à cette règle de distance et maintient ainsi ses précédentes conclusions, sauf sa demande sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative qu'elle ramène à la somme de 3 000 euros.

Par des mémoires enregistrés le 29 août 2022 et le 29 septembre 2022, M. et Mme H..., ainsi que M. et Mme M... maintiennent leurs conclusions.

Ils font valoir que :

- la commune de Le G... n'a pas produit d'acte destiné à régulariser l'arrêt du 8 mars 2022, de sorte que la requête d'appel doit être rejetée ;

- ils ont présenté un recours gracieux contre l'arrêté du préfet, de sorte que la cour doit attendre la position du préfet sur ce recours et le cas échant le résultat d'un éventuel recours contre cet arrêté devant le tribunal administratif de Besançon.

S'agissant de la dérogation accordée par le préfet du Jura :

- ils renvoient à leurs recours gracieux pour justifier que l'arrêté préfectoral ne peut régulariser la situation ;

- l'avis de la chambre d'agriculture mentionne, à tort, une position favorable du maire, alors qu'aucune pièce ne le justifie ; de plus, contrairement à ce qu'indique cet avis, le projet aggravera l'exposition à de potentielles nuisances ; enfin, c'est à tort que l'avis retient que le logement est historiquement lié à l'activité agricole, alors notamment que l'exploitation n'a débuté qu'en 2013 ;

- l'article 164 du règlement sanitaire départemental du Jura impose, pour bénéficier d'une dérogation, que les intéressés s'engagent préalablement par écrit à se conformer aux prescriptions, qui leur seront ordonnées ; or, Mme B... ne s'est nullement engagée à respecter ces prescriptions ;

- l'arrêté mentionne que M. C... est un ancien employé de M. D..., mais cette ancienne qualité ne peut nullement fonder une dérogation pour le futur ; l'arrêté ne précise pas que Mme A... habite également sur place ;

- la dérogation pourrait, ainsi que le prévoit l'article 164 du règlement sanitaire départemental du Jura, être retirée en cas de contravention et cela notamment après que le permis ait acquis un caractère définitif, de sorte que cette dérogation ne peut permettre une quelconque régularisation du permis initialement accordé.

S'agissant de la dérogation accordée par la commune de Le G... :

- l'arrêté municipal du 22 septembre 2022 accordant une dérogation à Mme B... à la règle de distance prévue à l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Jura a été produit après le délai imparti par la cour ;

- il est à tort présenté comme venant compléter l'arrêté préfectoral ;

- il ne peut déroger au règlement sanitaire départemental ;

- il est illégal pour les mêmes raisons que celles préalablement exposées pour l'arrêté préfectoral.

Par un mémoire enregistré le 29 septembre 2022, M. et Mme J... à l'Antoine déclarent se désister de l'instance.

M. et Mme H..., ainsi que M. et Mme M... ont présenté un mémoire enregistré le 29 novembre 2020, par lequel ils concluent aux mêmes fins par les mêmes moyens. Ce mémoire n'a pas été communiqué.

Par une lettre du 29 novembre 2022, la cour a informé les parties qu'elle était susceptible de surseoir à statuer, en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, dans l'attente de la délivrance d'un permis de construire régularisant le vice tiré de l'absence de proposition préalable du directeur départemental des affaires sanitaires et sociales à l'adoption de la dérogation préfectorale sur le fondement de l'article 164 du règlement sanitaire départemental du Jura.

Par un mémoire, enregistré 1er décembre 2022, M. et Mme H..., ainsi que M. et Mme M... ont présenté des observations en réponse à ce courrier.

Par un mémoire, enregistré le 1er décembre 2022, la commune de Le G... a présenté des observations en réponse à ce courrier.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de l'urbanisme ;

- le règlement sanitaire départemental du Jura ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- et les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 7 août 2017, le maire de la commune de Le G... a délivré un permis de construire à Mme B... autorisant, d'une part, le changement de destination d'un bâtiment de stockage en six boxes équins, ainsi que, d'autre part, la réalisation d'une extension de 18 mètres carrés à ce bâtiment de stockage pour réaliser deux autres boxes. M. et Mme H... et autres ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler cet arrêté. Par un jugement n° 1701735 du 5 décembre 2019, le tribunal administratif de Besançon a annulé l'arrêté du 7 août 2017 du maire de la commune de Le G.... Après avoir joint les requêtes présentées par Mme B... et par la commune de Le G... tendant à l'annulation de ce jugement, la cour administrative d'appel de Nancy, par un arrêt du 8 mars 2022, a retenu que l'arrêté du 7 août 2017 était illégal, car le projet ne respectait pas la distance minimale imposée par l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Jura. La cour a, en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sursis à statuer sur les requêtes de Mme B... et de la commune de Le G... jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois imparti à ces requérantes pour justifier de la délivrance d'un acte destiné à régulariser cette illégalité.

2. Mme G... a présenté, pour justifier de la régularisation de l'illégalité, un arrêté du préfet du Jura du 1er juillet 2022 lui accordant une dérogation à la règle de distance prévue à l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Jura. La commune de Le G... a produit, en plus de cet arrêté, un arrêté de son maire visant à accorder une dérogation à Mme B... à la règle de distance mentionnée ci-dessus et devant être regardée comme délivrant un permis de régularisation au vu des dérogations accordées.

Sur le désistement de M. et Mme J... à l'Antoine :

3. M. et Mme J... à l'Antoine ont, par des mémoires enregistrés le 29 septembre 2022, déclaré se désister des instances en cours. Ils doivent être regardés comme entendant renoncer au bénéfice du jugement attaqué par lequel le tribunal administratif de Besançon a, sur leur demande, annulé le permis de construire délivré à Mme B.... Toutefois, eu égard aux effets qui s'attachent à l'annulation d'un acte administratif, la circonstance que la personne qui a poursuivi et obtenu cette annulation déclare ultérieurement renoncer à se prévaloir du jugement intervenu est sans influence sur une telle annulation, qui ne peut être regardée comme ayant disparu du seul fait de cette renonciation. Il suit de là que, ce permis de construire ayant été annulé par un jugement du tribunal administratif de Besançon, les requêtes de Mme B... et de la commune de le G..., qui tendent à ce que la cour annule ce jugement pour ainsi revenir sur l'annulation prononcée, conservent leur objet. En tout état de cause, M. et Mme H..., ainsi que M. et Mme M..., qui ont également la qualité d'intimé, ont entendu maintenir leurs conclusions tendant au rejet des requêtes d'appel.

Sur le sursis à statuer sollicité par M. et Mme H... et M. et Mme M... :

4. M. et Mme H..., ainsi que M. et Mme M... sollicitent qu'il soit sursis à statuer sur les requêtes de Mme B... et de la commune de Le G... jusqu'à ce que le préfet du Jura statue sur leur recours gracieux. Pour autant, il ressort des pièces du dossier que ce recours a été notifié le 29 août 2022 au préfet, de sorte que, à la date du présent arrêt, il a nécessairement été statué sur cette demande par une décision explicite ou implicite. Si les intimés ont également introduit une action devant le tribunal administratif contre la dérogation préfectorale accordée, une telle contestation devrait être introduite dans le cadre de la même instance que celle ayant sursis à statuer en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, soit devant la cour. Par suite, la demande de sursis à statuer doit, en tout état de cause, être rejetée.

Sur la légalité du permis de construire de régularisation :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence de communication d'une mesure de régularisation par la commune de Le G... :

5. Il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la commune de Le G... a communiqué, par des productions enregistrées le 7 juillet 2022 et le 22 septembre 2022, l'arrêté du préfet du Jura du 1er juillet 2022 et l'arrêté du maire de Le G... du 20 septembre 2022. Le moyen doit ainsi, en tout état de cause, être écarté comme manquant en fait.

En ce qui concerne les moyens relatifs à la dérogation accordée par le préfet du Jura :

6. En premier lieu, aux termes de l'article 164 du règlement sanitaire départemental du Jura : " Sous réserve de la législation et de la réglementation en vigueur, le préfet peut, dans des cas exceptionnels et sur proposition du directeur départemental des affaires sanitaires et sociales accorder des dérogations au présent règlement par des arrêtés paris en application de son pouvoir réglementaire. / Dans ce cas, les intéressés doivent prendre l'engagement écrit de se conformer aux prescriptions qui leur seront ordonnées. Toute contravention comportera déchéance complète du bénéfice de la dérogation, sans préjudice des sanctions prévues à l'article L. 1336-4 (L.45) du code de la santé publique, et éventuellement aux articles L. 1324-3 (L.46) et L.47 dudit code, ainsi qu'aux autres réglementations applicables ".

7. Alors que la dérogation accordée par le préfet du Jura ne mentionne pas l'existence d'une proposition préalable du directeur départemental des affaires sanitaires et sociales, ni Mme B..., ni la commune de Le G... n'établissent, ni d'ailleurs n'allèguent, que cette dérogation aurait été adoptée sur proposition préalable de ce directeur. Par suite, M. et Mme H..., ainsi que M. et Mme M... sont fondés à soutenir que cette dérogation a été adoptée au terme d'une procédure irrégulière en l'absence d'une telle proposition.

8. En deuxième lieu, les éventuelles prescriptions dont le préfet assortit une dérogation aux exigences du règlement sanitaire départemental s'imposent au bénéficiaire quand bien même ce dernier ne s'est pas engagé par écrit à les respecter. Par suite, s'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B..., qui a sollicité la délivrance de cette dérogation, se soit engagée préalablement par écrit à se conformer aux éventuelles prescriptions édictées par l'autorité préfectorale, ainsi que l'imposait pourtant l'article 164 précité, cette irrégularité n'a pas été susceptible de priver les intéressés d'une garantie, ni d'exercer une influence sur le sens de la dérogation accordée. Le moyen doit par suite être écarté.

9. En troisième lieu, M. et Mme H..., ainsi que M. et Mme M... se prévalent de différentes erreurs de fait et d'appréciation qui entacheraient l'avis émis le 30 juin 2022 par la chambre d'agriculture du Jura. Pour autant, de tels moyens sont inopérants dès lors qu'ils visent à remettre en cause non la régularité, mais le bien-fondé d'un avis purement consultatif et qui ne liait ainsi pas l'autorité préfectorale.

10. En quatrième lieu, si l'activité d'élevage de chevaux n'a débuté qu'à compter de l'année 2013, il ressort des pièces du dossier que le père de Mme B... accueillait sur la parcelles des équidés depuis 1972. Par suite, quand bien même le nombre de chevaux accueillis se serait récemment accru, le préfet a pu, sans entacher la dérogation accordée d'une erreur de fait, indiquer qu'aucune nuisance n'a été identifiée sur le site depuis quarante ans.

11. En cinquième lieu, il ressort des pièces du dossier que l'un des occupants du logement en cause est M. C.... Alors que, contrairement à ce que soutiennent les intimés, l'arrêté mentionne également la présence dans le logement de Mme A..., épouse de M. C..., il était loisible au préfet de prendre en compte le lien de M. C... avec les activités agricoles menées par la famille de Mme B... pour apprécier la possibilité d'accorder exceptionnellement une dérogation à la règle de distance prévue à l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Jura. Le moyen doit par suite être écarté.

12. En sixième lieu, ainsi qu'il a été précisé au point 9 du présent arrêt, le site du projet de Mme B... accueille depuis quarante ans des équidés et une activité d'élevage y est menée depuis 2013. Il ressort de plus des pièces du dossier et notamment des mentions non contestées de l'arrêté du préfet et de l'avis de la chambre d'agriculture que le logement litigieux, qui est situé au sein d'un ancien corps de ferme et est occupé par les parents de Mme B..., anciens éleveurs, ainsi qu'un ancien employé du père de la pétitionnaire et sa compagne, mais devant néanmoins quitter prochainement les lieux, est implanté à proximité rapprochée des écuries de l'exploitation. Or le projet litigieux, dont rien ne permet de considérer qu'il impliquerait une augmentation du nombre de chevaux accueillis, porte sur la réalisation d'un lieu d'accueil des équidés plus éloigné du logement que les actuelles écuries et n'aggrave ainsi pas les nuisances potentielles liées à l'activité d'élevage. Dans ces conditions, les intimés ne sont pas fondés à soutenir que le préfet aurait, en accordant la dérogation litigieuse, commis une erreur d'appréciation au regard de l'article 164 du règlement sanitaire départemental du Jura.

13. En septième lieu, la circonstance que les dérogations délivrées sur le fondement de l'article 164 du règlement sanitaire départemental du Jura puissent faire l'objet d'un retrait ne s'oppose pas par elle-même à ce qu'elles puissent permettre, dans le cadre d'une procédure initiée sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, de régulariser un permis de construire.

En ce qui concerne les moyens relatifs à l'arrêté du maire de Le G... du 20 septembre 2022 :

14. En premier lieu, le juge ayant sursis à statuer dans le cadre de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ne saurait ensuite se fonder sur la circonstance que les mesures de régularisation lui ont été adressées alors que le délai qu'il avait fixé dans sa décision avant dire droit était échu pour ne pas en tenir compte dans son appréciation de la légalité du permis attaqué. Par suite, les intimés ne sont pas fondés à soutenir que la dérogation accordée par la commune ne peut être prise en compte, car elle a été produite après l'expiration du délai de quatre mois prévu par l'arrêt du 8 mars 2022 de la cour administrative de Nancy.

15. En deuxième lieu, le fait que la commune de le G... aurait à tort présenté dans ses écritures contentieuses l'arrêté du maire comme complétant la dérogation accordée par le préfet est sans incidence sur la légalité de cet arrêté.

16. En troisième lieu, si les intimés indiquent vouloir opposer les mêmes moyens que ceux soulevés à l'encontre de la dérogation accordée par le préfet du Jura, ces moyens visent, d'une part, à remettre en cause la procédure, les mentions et les conditions de délivrance propres à la dérogation accordée par le préfet et ne peuvent donc être utilement invoqués pour contester la délivrance de la dérogation édictée par le maire de Le G..., qui ne suit pas la même procédure, ne porte pas les mêmes mentions et ne répond pas aux mêmes conditions de délivrance. D'autre part, les moyens soulevés visent à remettre en cause le bien-fondé de l'avis de la chambre d'agriculture du Jura et sont, ainsi qu'il a été exposé au point 9 du présent arrêt, inopérants.

17. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime : " Lorsque des dispositions législatives ou réglementaires soumettent à des conditions de distance l'implantation ou l'extension de bâtiments agricoles vis-à-vis des habitations et immeubles habituellement occupés par des tiers, la même exigence d'éloignement doit être imposée à ces derniers à toute nouvelle construction et à tout changement de destination précités à usage non agricole nécessitant un permis de construire, à l'exception des extensions de constructions existantes. (...) / Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, une distance d'éloignement inférieure peut être autorisée par l'autorité qui délivre le permis de construire, après avis de la chambre d'agriculture, pour tenir compte des spécificités locales. Une telle dérogation n'est pas possible dans les secteurs où des règles spécifiques ont été fixées en application du deuxième alinéa ".

18. Les dispositions précitées de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime ont pour objet de conditionner la délivrance d'un permis de construire une habitation à proximité d'un bâtiment agricole au respect, par effet de réciprocité, des règles de distances imposées à l'implantation d'un bâtiment agricole par rapport aux habitations existantes. Ainsi, la dérogation prévue au quatrième alinéa de ce même article permet seulement à l'autorité délivrant un permis de construire pour une habitation d'aménager la règle de distance à respecter avec un bâtiment agricole préexistant. Au contraire, elle ne permet pas à une autorité chargée de statuer sur une demande pour la construction d'un bâtiment agricole de déroger aux règles de distances imposées par rapport à des habitations. Par suite, les intimés sont fondés à soutenir que le maire de la commune de Le G... ne pouvait accorder, au projet agricole de Mme B..., une dérogation sur le fondement du quatrième alinéa de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime, pour déroger à la règle de distance imposée par l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Jura.

Sur les conséquences de ces illégalités :

19. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé ".

20. Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires ayant conduit à l'adoption de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, que, lorsque le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme dont l'annulation est demandée sont susceptibles d'être régularisés, le juge administratif doit, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation, sauf à ce qu'il fasse le choix de recourir à l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, si les conditions posées par cet article sont réunies, ou que le bénéficiaire de l'autorisation lui ait indiqué qu'il ne souhaitait pas bénéficier d'une mesure de régularisation. Il n'en va pas différemment lorsque l'autorisation d'urbanisme contestée devant le juge est une mesure de régularisation qui lui a été notifiée dans le cadre de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

21. L'arrêté du maire de Le G... du 20 septembre 2022 doit être regardé comme délivrant à Mme B... un permis de régularisation, d'une part, sur le fondement de la dérogation accordée par le préfet du Jura en application de l'article 164 du règlement sanitaire départemental du Jura et, d'autre part, sur le fondement des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime. Si, ainsi qu'il a été précisé au point 18, le maire de la commune de le G... ne pouvait légalement se fonder sur les dispositions de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime pour accorder une dérogation à Mme B..., il résulte de l'instruction qu'il aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur le motif tiré de la régularisation du vice par la dérogation délivrée par le préfet du Jura. Or, si la dérogation du préfet du Jura est, comme mentionné au point 7 du présent arrêt, entachée d'un vice de procédure du fait de l'absence de proposition préalable du directeur départemental des affaires sanitaires et sociales, l'illégalité dont reste ainsi affecté le permis de construire peut être régularisée sans apporter au projet un bouleversement tel qu'il changerait sa nature. Ainsi, il y a lieu de surseoir à statuer sur les présentes requêtes et d'impartir à Mme B... et à la commune de Le G... un nouveau délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt pour justifier d'un acte destiné à régulariser cette illégalité. Cet acte pourra notamment prendre la forme d'un permis de régularisation délivré par le maire de la commune de le G... à la suite de l'adoption, sur proposition préalable du directeur départemental des affaires sanitaires et sociales, d'une nouvelle dérogation du préfet sur le fondement de l'article 164 du règlement sanitaire départemental du Jura.

D E C I D E :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur les requêtes de Mme B... et de la commune de Le G....

Article 2 : Mme B... et la commune de Le G... devront justifier, dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, de la délivrance d'un acte destiné à régulariser l'illégalité dont reste entaché le permis de construire du 7 août 2017.

Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme I... B..., à la commune de Le G..., à M. et Mme K... H..., à M. et Mme F... J... à l'Antoine, à M. et Mme L... M... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au préfet du Jura.

Délibéré après l'audience du 6 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- Mme Haudier, présidente-assesseure,

- M. Marchal, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2022.

Le rapporteur,

Signé : S. E...

Le président,

Signé : Ch. WURTZ

Le greffier,

Signé : F. LORRAIN

La République mande et ordonne au préfet du Jura, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N°s 19NC03616, 20NC00333 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC03616
Date de la décision : 29/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme SAMSON-DYE
Rapporteur ?: M. Swann MARCHAL
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : BROCHERIEUX - GUERRIN-MAINGON

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-12-29;19nc03616 ?
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