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22/12/2022 | FRANCE | N°21NC01617

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 22 décembre 2022, 21NC01617


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Samson a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Haute-Marne à lui verser la somme de 46 934,04 euros, augmentée de la révision des prix et des intérêts moratoires, correspondant au solde du décompte général et définitif du lot " charpente métallique " du marché public de travaux de construction du centre de secours et d'incendie de Joinville, et de mettre à la charge du SDIS de la Haute-Marne u

ne somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Samson a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Haute-Marne à lui verser la somme de 46 934,04 euros, augmentée de la révision des prix et des intérêts moratoires, correspondant au solde du décompte général et définitif du lot " charpente métallique " du marché public de travaux de construction du centre de secours et d'incendie de Joinville, et de mettre à la charge du SDIS de la Haute-Marne une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1902498 du 6 avril 2021, le tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 juin 2021, la société Samson, représentée par Me Broglin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 6 avril 2021 ;

2°) de condamner le SDIS de la Haute-Marne à lui verser la somme de 46 934,04 euros, augmentée de la révision des prix et des intérêts moratoires, correspondant au solde du décompte général et définitif du lot " charpente métallique " du marché public de travaux de construction du centre de secours et d'incendie de Joinville ;

3°) de mettre à la charge du SDIS de la Haute-Marne une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a transmis son projet de décompte final au maître d'œuvre et au représentant du pouvoir adjudicateur le 26 juin 2018 et elle produit les accusés de réception qui démontrent que le SDIS l'a réceptionné le 14 février 2019 et que, à défaut de transmission du décompte général dans le délai de trente jours, elle a notifié au maître d'ouvrage son projet de décompte général le 24 mars 2019 ; le SDIS devait donc lui notifier le décompte général et définitif au plus tard le 4 avril 2019 ; la notification de celui-ci le 26 avril 2019 était tardive dès lors qu'à cette date était intervenu le décompte général et définitif tacite en application de l'article 13.4.4 du CCAG-Travaux ;

- si le tribunal administratif a considéré qu'aucun décompte général et définitif tacite n'était intervenu, c'est à tort qu'il a rejeté ses conclusions, présentées subsidiairement, contre le décompte général du 26 avril 2019 ; contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, le courrier du 24 mai 2019 a bien le caractère d'un mémoire en réclamation qui comporte le motif et le montant réclamé par elle ;

- le refus du maître d'ouvrage d'intégrer une somme de 20 000 euros dans le décompte à son crédit au titre de l'actualisation des prix n'est pas justifié ;

- les décision du maître d'ouvrage d'intégrer des sommes de 1 000 et 5 096,60 euros dans le décompte à son débit au titre de réfaction n'est pas justifiée ;

- le décompte du marché doit être fixé à la somme de 139 200 euros TTC, hors actualisation des prix et intérêts moratoire, portant le solde à une somme de 46 934,04 euros en sa faveur, hors révision des prix et intérêts moratoires.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 août 2021, le SDIS de la Haute-Marne, représenté par Me Bluteau, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Samson.

Il soutient que :

- la société Samson n'est pas recevable à se prévaloir pour la première fois en appel de la transmission d'un projet de décompte final en date du 14 février 2019 alors qu'elle n'en a pas fait état dans sa réclamation préalable du 24 mai 2019, à supposer que celle-ci soit recevable ;

- au surplus, le courrier daté du 14 février 2019 ne saurait être qualifié de projet de décompte final dès lors qu'il revêt la forme d'une simple facture datée du 26 juin à laquelle un solde a été ajouté sans justification et dont le montant ne correspond pas à la somme réclamée dans sa demande de paiement final et au contentieux ;

- au surplus, le document du 22 mars 2019 établi par la société Samson ne peut être regardé comme un projet de décompte général établi par le titulaire du marché en application de l'article 13.4.4 du CCAG-Travaux dès lors qu'il ne contient pas le document daté du 14 février 2019 ; il s'agit en réalité de la demande de paiement final ;

- la société Samson n'apporte toujours pas en appel la preuve de la transmission initiale du projet de décompte final daté du 26 juin 2018 ;

- ainsi que l'ont retenu les premiers juges, la société Samson n'a formé aucun mémoire en réclamation en bonne et due forme ; le courrier du 24 mai 2019 ne comporte que des termes vagues et lacunaires et il n'a pas été adressé simultanément au maître d'œuvre ;

- le décompte général qu'elle a notifié au titulaire le 26 avril 2019 est devenu définitif le 26 mai 2019 en application de l'article 13.4.5 du CCAG-Travaux ; la société requérante n'est donc pas recevable à le remettre en cause ;

- subsidiairement, contrairement à ce qui est soutenu, les réfactions sont fondées ;

- subsidiairement, le moyen qui critique pour la première fois le refus d'intégrer une révision des prix à hauteur de 20 000 euros est irrecevable.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- la loi n° 2013-100 du 31 décembre 2013, et en particulier son article 37 ;

- le décret n° 2013-269 du 29 mars 2013, et en particulier son article 1er ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picque, première conseillère,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me Bieder représentant le SDIS de la Haute-Marne.

Considérant ce qui suit :

1. Le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Haute-Marne a entrepris la construction d'un centre de secours et d'incendie à Joinville et a confié la maîtrise d'œuvre de l'opération à la société Karine Millet Architecte. Par un acte d'engagement du 9 septembre 2016, le lot n° 3 " charpente métallique " du marché de travaux a été confié à la société Samson, pour un montant global et forfaitaire de 116 000 euros hors taxe (HT), soit 139 200 euros toutes taxes comprises (TTC). La date d'achèvement des travaux a été fixée au 14 mars 2018 et ceux-ci ont été réceptionnés sous réserves le 12 juin 2018, en application de l'article 41.5 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux (CCAG Travaux). Dans un procès-verbal du 22 juin 2018, la maître d'œuvre a constaté que les travaux et prestations ayant fait l'objet de réserves avaient été exécutés. La décision de levée des réserves signée par le maître d'ouvrage est intervenue le 24 janvier 2019. Un différend est né entre la société Samson et le SDIS de la Haute-Marne en ce qui concerne le paiement final des travaux. Le 29 avril 2019, la titulaire a reçu le décompte général signé par le représentant du pouvoir adjudicateur. Estimant qu'un décompte général et définitif tacite était préalablement intervenu en application de l'article 13.4.4 du CCAG Travaux, la société Samson, dans un courrier du 24 mai 2019, a contesté cette notification. Aucune réponse expresse n'ayant été donnée à ce courrier, le titulaire du marché de travaux a saisi le tribunal administratif de de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à la condamnation du maître d'ouvrage à lui verser la somme de 46 934,04 euros TTC au titre du solde du marché. Elle relève appel du jugement n° 1902498 du 6 avril 2021 par lequel les premiers juges ont rejeté sa demande comme irrecevable en accueillant la fin de non-recevoir contractuelle tirée de l'absence de mémoire en réclamation au sens de l'article 50.1.1 du CCAG Travaux.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article 13.3.1 du CCAG Travaux, approuvé par l'arrêté du 8 septembre 2009 dans sa rédaction issue de l'arrêté du 3 mars 2014, applicable au marché en litige : " Après l'achèvement des travaux, le titulaire établit le projet de décompte final, concurremment avec le projet de décompte mensuel afférent au dernier mois d'exécution des prestations ou à la place de ce dernier. / Ce projet de décompte final est la demande de paiement finale du titulaire. (...) ". Aux termes des stipulations de l'article 13.3.2 du même cahier : " Le titulaire transmet son projet de décompte final, simultanément au maître d'œuvre et au représentant du pouvoir adjudicateur, par tout moyen permettant de donner une date certaine, dans un délai de trente jours à compter de la date de notification de la décision de réception des travaux telle qu'elle est prévue à l'article 41.3 ou, en l'absence d'une telle notification, à la fin de l'un des délais de trente jours fixés aux articles 41.1.3 et 41.3. / Toutefois, s'il est fait application des dispositions de l'article 41.5, la date du procès-verbal constatant l'exécution des travaux visés à cet article est substituée à la date de notification de la décision de réception des travaux comme point de départ des délais ci-dessus. (...) ". Aux termes des stipulations de l'article 13.3.3 du même cahier : " Le maître d'œuvre accepte ou rectifie le projet de décompte final établi par le titulaire. Le projet accepté ou rectifié devient alors le décompte final. (...) ". Aux termes des stipulations de l'article 13.4.1 du même cahier : " Le maître d'œuvre établit le projet de décompte général, qui comprend : / - le décompte final ; / - l'état du solde, établi à partir du décompte final et du dernier décompte mensuel, dans les mêmes conditions que celles qui sont définies à l'article 13.2.1 pour les acomptes mensuels ; / - la récapitulation des acomptes mensuels et du solde. (...) ". Aux termes des stipulations de l'article 13.4.2 du même cahier : " Le projet de décompte général est signé par le représentant du pouvoir adjudicateur et devient alors le décompte général. / Le représentant du pouvoir adjudicateur notifie au titulaire le décompte général à la plus tardive des deux dates ci-après ; / - trente jours à compter de la réception par le maître d'œuvre de la demande de paiement finale transmise par le titulaire ; / - trente jours à compter de la réception par le représentant du pouvoir adjudicateur de la demande de paiement finale transmise par le titulaire. (...) " Aux termes des stipulations de l'article 13.4.4 du même cahier : " Si le représentant du pouvoir adjudicateur ne notifie pas au titulaire le décompte général dans les délais stipulés à l'article 13.4.2, le titulaire notifie au représentant du pouvoir adjudicateur, avec copie au maître d'œuvre, un projet de décompte général signé, composé : / - du projet de décompte final tel que transmis en application de l'article 13.3.1 ; / - du projet d'état du solde hors révision de prix définitive, établi à partir du projet de décompte final et du dernier projet de décompte mensuel, faisant ressortir les éléments définis à l'article 13.2.1 pour les acomptes mensuels ; / - du projet de récapitulation des acomptes mensuels et du solde hors révision de prix définitive. / Dans un délai de dix jours à compter de la réception de ces documents, le représentant du pouvoir adjudicateur notifie le décompte général au titulaire. Le décompte général et définitif est alors établi dans les conditions fixées à l'article 13.4.3. / Si, dans ce délai de dix jours, le représentant du pouvoir adjudicateur n'a pas notifié au titulaire le décompte général, le projet de décompte général transmis par le titulaire devient le décompte général et définitif. Le délai de paiement du solde, hors révisions de prix définitives, court à compter du lendemain de l'expiration de ce délai. / Le décompte général et définitif lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne les montants des révisions de prix et des intérêts moratoires afférents au solde. Le cas échéant, les révisions de prix sont calculées dans les conditions prévues à l'article 13.4.2. (...) ".

3. Il résulte de la combinaison de ces stipulations que, même si elle intervient après l'expiration du délai de trente jours prévu à l'article 13.3.2 du CCAG Travaux, courant soit à compter de la réception des travaux soit, si, comme en l'espèce, il est fait application de l'article 41.5, à compter de la date du procès-verbal constatant l'exécution des travaux visés à cet article, la réception, par le maître d'ouvrage et le maître d'œuvre, du projet de décompte final, établi par le titulaire du marché, est le point de départ du délai de trente jours prévu à l'article 13.4.2, dont le dépassement peut donner lieu à l'établissement d'un décompte général et définitif tacite dans les conditions prévues par l'article 13.4.4. L'expiration du délai de trente jours prévu à l'article 13.4.2 étant appréciée au regard de la plus tardive des dates de réception du projet de décompte final respectivement par le maître d'ouvrage et le maître d'œuvre, ce délai ne peut pas courir tant que ceux-ci n'ont pas tous deux reçus le document en cause. Lorsque ce délai est expiré, le titulaire notifie au maître d'ouvrage un projet de décompte général. Le maître de l'ouvrage dispose alors d'un délai de dix jours à compter de sa réception pour notifier le décompte général au titulaire. A défaut, le projet de décompte général transmis par le titulaire devient le décompte général et définitif du marché.

4. Il résulte de l'instruction, et notamment d'éléments valablement produits pour la première fois en appel, que, le 14 février 2019, la société Samson a adressé au SDIS de la

Haute-Marne et à la maître d'œuvre une facture n° 1061/1804 intitulée " décompte général et définitif " datée du 26 juin 2018. Ce document, au regard de son contenu, présente les caractéristiques d'un projet de décompte final tel que prévu par l'article 13.3.1 du CCAG Travaux. La maître d'œuvre a reçu cette demande de paiement final le 16 février 2019 et, compte tenu du délai normal d'acheminement du courrier, le représentant du pouvoir adjudicateur, qui a signé l'accusé de réception, doit être regardé comme l'ayant reçu au plus tard à cette même date. Il appartenait dès lors au maître d'ouvrage, qui au surplus ne conteste pas avoir reçu le projet de décompte général établi par le maître d'œuvre le 19 février 2019, de notifier à la société Samson le décompte général dans un délai de trente jours à compter de cette date. Le 22 mars 2019, ne s'étant pas vue notifier le décompte général, la société Samson a transmis au SDIS de la Haute-Marne, par lettre recommandée avec accusé de réception, un projet de décompte général signé qu'elle a également adressé au maître d'œuvre. Contrairement à ce qui est soutenu, celui-ci est notamment composé du projet de décompte final transmis en application de l'article 13.3.1. En particulier, la circonstance que celui-ci soit présenté sous une forme différente et inclut, à tort, la révision des prix sur dernier décompte mensuel, n'est pas de nature à faire obstacle à sa qualification de décompte général et par suite à ce qu'il devienne, du fait de l'écoulement du temps, définitif selon les modalités prévues par l'article 13.4.4 du CCAG Travaux précité. En l'absence de notification du décompte général par le SDIS à la société Samson dans le délai de dix jours à compter de la réception du projet de décompte général établi par le titulaire, dont il n'est pas contesté qu'elle est intervenue le 24 mars 2019, ce dernier est devenu, le 4 avril 2019, le décompte général et définitif tacite du marché.

5. D'autre part, aux termes des stipulations de l'article 50.1.1 du CCAG Travaux, applicable au marché en litige : " Si un différend survient entre le titulaire et le maître d'œuvre, sous la forme de réserves faites à un ordre de service ou sous toute autre forme, ou entre le titulaire et le représentant du pouvoir adjudicateur, le titulaire rédige un mémoire en réclamation. / Dans son mémoire en réclamation, le titulaire expose les motifs de son différend, indique, le cas échéant, les montants de ses réclamations et fournit les justifications nécessaires correspondant à ces montants. Il transmet son mémoire au représentant du pouvoir adjudicateur et en adresse copie au maître d'œuvre. / Si la réclamation porte sur le décompte général du marché, ce mémoire est transmis dans le délai de trente jours à compter de la notification du décompte général. / Le mémoire reprend, sous peine de forclusion, les réclamations formulées antérieurement à la notification du décompte général et qui n'ont pas fait l'objet d'un règlement définitif. ". Selon l'article 50.3.1 du même cahier : " A l'issue de la procédure décrite à l'article 50.1, si le titulaire saisit le tribunal administratif compétent, il ne peut porter devant cette juridiction que les chefs et motifs énoncés dans les mémoires en réclamation ".

6. Un mémoire du titulaire du marché ne peut être regardé comme une réclamation au sens du 1.1 de l'article 50 du CCAG Travaux que s'il comporte l'énoncé d'un différend et expose, de façon précise et détaillée, les chefs de la contestation en indiquant, d'une part, les montants des sommes dont le paiement est demandé et, d'autre part, les motifs de ces demandes, notamment les bases de calcul des sommes réclamées.

7. Il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit au point 1, que le 29 avril 2019, la société Samson a reçu de la part du SDIS de la Haute-Marne un document présenté comme étant le décompte général du marché. Dans son courrier daté du 24 mai 2019 adressé au maître de l'ouvrage, la société Samson a contesté cette notification au motif qu'à cette date son projet de décompte général du 22 mars 2019 était devenu le décompte général et définitif tacite du marché et lui a demandé de procéder au règlement de la somme de 46 934,04 euros correspondant au solde de celui-ci, en produisant le document en pièce jointe. Un tel mémoire, qui comporte l'énoncé du différent, expose le chef de contestation et comporte les justifications des sommes réclamées, constituent une réclamation au sens des stipulations de l'article 50.1.1 du CCAG Travaux.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la société Samson est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté comme irrecevable, au motif qu'elle n'avait pas été précédée d'une réclamation au sens des stipulations de l'article 50.1.1 du CCAG Travaux, sa demande tendant à condamnation du SDIS de la Haute-Marne à lui verser la somme de 46 934, 04 euros correspondant au solde du marché. Il s'ensuit que le jugement est irrégulier et doit être annulé.

9. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société Samson devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne.

Sur la demande de la société Samson tendant au paiement du solde du marché :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée en défense:

10. Il résulte des dispositions de l'article L. 227-6 du code de commerce, en vertu desquels la société par actions simplifiées est représentée à l'égard des tiers par un président, désigné dans les conditions prévues par les statuts, et investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société dans la limite de l'objet social, que cette personne a de plein droit qualité pour agir en justice au nom de la société.

11. Il résulte de l'instruction que le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a été saisi par une demande présentée par un avocat pour la société Samson, qui est une société par actions simplifiées, " représentée par son président ". Par suite, la fin de non-recevoir tirée de l'absence du président de la société pour la représenter en justice doit être écartée.

En ce qui concerne le solde du marché et la révision des prix :

12. Il résulte des dispositions précédemment citées de l'article 13.4.4 que le décompte général et définitif tacite lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne les montants des révisions de prix et des intérêts moratoires afférents au solde, qui, le cas échéant, sont calculées dans les conditions prévues à l'article 13.4.2.

13. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que la société Samson est fondée à se prévaloir du décompte général et définitif tacite né le 4 avril 2014. En l'absence de contestation du montant des révisions de prix par le SDIS de la Haute-Marne, le solde, arrêté à la somme de 46 934,04 euros en la faveur du titulaire, ne peut plus être remis en cause.

14. Il résulte de tout ce qui précède que la société Samson est fondée à demander la condamnation du SDIS à lui verser la somme de 46 934,04 euros TTC, qui, ainsi qu'il a été dit, comporte la révision finale des prix.

En ce qui concerne les intérêts moratoires :

15. Aux termes de l'article 37 de la loi du 28 janvier 2013 : " Les sommes dues en principal par un pouvoir adjudicateur, y compris lorsqu'il agit en qualité d'entité adjudicatrice, en exécution d'un contrat ayant pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d'exploitation, ou la délégation d'un service public sont payées, en l'absence de délai prévu au contrat, dans un délai fixé par décret qui peut être différent selon les catégories de pouvoirs adjudicateurs. / Le délai de paiement prévu au contrat ne peut excéder le délai fixé par décret ". Aux termes de l'article 1er du décret du 29 mars 2013 : " Le délai de paiement prévu au premier alinéa de l'article 37 de la loi du 28 janvier 2013 susvisée est fixé à trente jours pour les pouvoirs adjudicateurs, y compris lorsqu'ils agissent en tant qu'entité adjudicatrice ".

16. La société Samson, en l'absence de précision quant au taux demandé, a droit aux intérêts moratoires au taux légal sur la somme de 46 934,04 euros à compter du 4 mai 2019, date à laquelle le délai de paiement du solde du décompte général et définitif tacite du marché, intervenu le 4 avril 2019, est arrivé à échéance.

Sur les frais d'instance :

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société Samson, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le SDIS de la Haute-Marne demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de ce dernier le versement de la somme de 1 500 euros à la société Samson sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1902498 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 6 avril 2021 est annulé.

Article 2 : Le service départemental d'incendie et de secours de la Haute-Marne versera à la société Samson la somme de 46 934,04 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts au taux légal à compter du 4 mai 2019.

Article 3 : Le service départemental d'incendie et de secours de la Haute-Marne versera à la société Samson une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions du service départemental d'incendie et de secours de la Haute-Marne sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Samson et au service départemental d'incendie et de secours de la Haute-Marne

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- Mme Samson-Dye, présidente assesseure,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 décembre 2022.

La rapporteure,

Signé : A.-S. PicqueLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : M. A....

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Marne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

M. A....

2

N° 21NC01617


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC01617
Date de la décision : 22/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Anne-Sophie PICQUE
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : BROGLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-12-22;21nc01617 ?
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