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22/12/2022 | FRANCE | N°20NC03561

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 22 décembre 2022, 20NC03561


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) La Maille Française a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la restitution des crédits d'impôt recherche collections au titre des années 2016 et 2017. Elle a également demandé la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignés au titre des années 2013, 2014, 2015 et 2016.

Par un jugement n°s 1807345 et 1903055 du 13 octobre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a re

jeté les demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 décembre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) La Maille Française a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la restitution des crédits d'impôt recherche collections au titre des années 2016 et 2017. Elle a également demandé la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignés au titre des années 2013, 2014, 2015 et 2016.

Par un jugement n°s 1807345 et 1903055 du 13 octobre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 décembre 2020, la SAS La Maille Française, représentée par Me Ackermann, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la restitution des crédits d'impôts demandés et la décharge des impositions supplémentaires contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a été privée de la garantie prévue à l'article L. 59 D du livre des procédures fiscales alors qu'elle avait expressément demandé la saisine du comité consultatif et que cet organisme était bien compétent pour émettre un avis ;

- l'activité qu'elle exerce au cours des exercices litigieux est industrielle au sens du II de l'article 244 quater B du code général des impôts et elle remplit donc les conditions pour bénéficier du crédit d'impôt correspondant ; la circonstance qu'elle a recours à la sous-traitance ne saurait l'exclure du bénéfice de ce dispositif.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 avril 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... ;

- et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS La Maille Française exerce une activité de distribution en gros de produits de textile et d'habillement. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur l'année 2013 en ce qui concerne le crédit d'impôt recherche collections et sur les années 2014 à 2016 en ce qui concerne l'ensemble de ses déclarations. A l'issue des opérations de contrôle, l'administration a remis en cause son éligibilité au crédit d'impôt recherche collections au titre des années 2013 à 2016, selon la procédure contradictoire de rectification, par une proposition de rectification du 11 décembre 2017 et l'a assujettie, après avoir confirmé ces redressements par une lettre du 13 février 2018 en réponse aux observations de la société, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de ces années. Par ailleurs, le service a refusé à la société le remboursement du crédit d'impôt collections qu'elle avait sollicité au titre des années 2016 et 2017. Les réclamations préalables de la société ont fait l'objet de décisions de rejet des 28 septembre 2018 et 7 mars 2019. La SAS La Maille Française relève appel du jugement du 13 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires et à la restitution du crédit d'impôt recherche collections des années 2016 et 2017.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article 1653 F du code général des impôts : " I. - Il est institué un comité consultatif du crédit d'impôt pour dépenses de recherche ". Aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis (...) du comité consultatif prévu à l'article 1653 F du même code ". Aux termes de l'article L. 59 D du même livre: " Le comité consultatif prévu à l'article 1653 F du code général des impôts intervient lorsque le désaccord porte sur la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt défini à l'article 244 quater B du même code. Ce comité peut, sans trancher une question de droit, se prononcer sur les faits susceptibles d'être pris en compte pour l'examen de cette question de droit ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le désaccord opposant la SAS La Maille Française à l'administration portait sur la question de savoir si l'activité exercée était industrielle et non sur la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte dans l'assiette du crédit d'impôt. Cette question de qualification juridique n'entre pas dans la compétence du comité consultatif en application des dispositions ci-dessus reproduites de l'article L. 59 D du livre des procédures fiscales. Par suite, la société requérante ne saurait utilement soutenir qu'en refusant de saisir cet organisme, en dépit de sa demande, l'administration l'aurait privée d'une garantie.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

4. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. - Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) II. - Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : h) Les dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections exposées par les entreprises industrielles du secteur textile-habillement-cuir et définies comme suit : 1° Les dépenses de personnel afférentes aux stylistes et techniciens des bureaux de style directement et exclusivement chargés de la conception de nouveaux produits et aux ingénieurs et techniciens de production chargés de la réalisation de prototypes ou d'échantillons non vendus ; 2° Les dotations aux amortissements des immobilisations créées ou acquises à l'état neuf qui sont directement affectées à la réalisation d'opérations visées au 1° ; 3° Les autres dépenses de fonctionnement exposées à raison de ces mêmes opérations ; ces dépenses sont fixées forfaitairement à 75 p. 100 des dépenses de personnel mentionnées au 1° ; 4° Les frais de dépôt des dessins et modèles. 5° Les frais de défense des dessins et modèles, dans la limite de 60 000 € par an ". Revêtent un caractère industriel, au sens de ces dispositions, les entreprises du secteur textile-habillement-cuir exerçant une activité de fabrication ou de transformation de biens corporels mobiliers qui nécessite d'importants moyens techniques. Par ailleurs, en adoptant les dispositions du II de l'article 244 quater B du code général des impôts citées ci-dessus, le législateur a entendu, par l'octroi d'un avantage fiscal, soutenir l'industrie manufacturière en favorisant les systèmes économiques intégrés qui allient la conception et la fabrication de nouvelles collections. Il en résulte que le bénéfice du crédit d'impôt recherche est ouvert, sur le fondement de ces dispositions, aux entreprises qui exercent une activité industrielle dans le secteur du textile, de l'habillement et du cuir lorsque les dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections sont exposées en vue d'une production dans le cadre de cette activité. Il appartient au juge de l'impôt de constater, au vu de l'instruction dont a fait l'objet le litige qui lui est soumis, qu'une entreprise remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir de l'avantage fiscal institué par l'article 244 quater B du code général des impôts.

5. Il résulte de l'instruction et il ressort de ses écritures que la société requérante assure la conception des articles, procède à l'acquisition des matières premières et assure la distribution des produits finis, la fabrication étant entièrement confiée à des sous-traitants. Il en résulte que la société requérante, alors même qu'elle conserve la propriété de la matière première qu'elle confie à ses sous-traitants, n'a recours à aucun matériel et outillage et n'assure pas elle-même la fabrication ou la transformation des produits qu'elle vend. Dès lors, son activité ne revêt pas un caractère industriel au sens des dispositions ci-dessus rappelées. Par suite, elle n'est pas fondée, sur le terrain de la loi fiscale, à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale lui a refusé le bénéfice du crédit d'impôt recherche prévus en faveur des entreprises du secteur du textile, de l'habillement et du cuir qui exposent des dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections.

6. Le bénéfice de la doctrine administrative sous référence BOI-BIC-RICI-10-10-40 n° 20 au 1er juin 2016, ainsi que l'instruction administrative qui l'a précédée, est réservé aux entreprises exerçant une activité industrielle. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la société requérante n'exerce aucune activité industrielle. Par suite, elle ne saurait se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de ces instructions, lesquelles maintiennent à certaines conditions le bénéfice du crédit d'impôt aux entreprises industrielles qui ont également recours à la sous-traitance, dans les prévisions desquelles elle n'entre pas.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS La Maille Française n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS La Maille Française est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS La Maille Française et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 décembre 2022.

Le rapporteur,

Signé : M. AgnelLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. SCHRAMM

N° 20NC03561 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC03561
Date de la décision : 22/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : CABINET KPMG AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-12-22;20nc03561 ?
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