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30/11/2022 | FRANCE | N°21NC02412

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 30 novembre 2022, 21NC02412


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 26 janvier 2021 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé.

Par un jugement n° 2101191 du 26 juillet 2021, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une

requête enregistrée le 30 août 2021, M. B... C..., représenté par la Selarl Antoine et BMC Associé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 26 janvier 2021 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé.

Par un jugement n° 2101191 du 26 juillet 2021, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 août 2021, M. B... C..., représenté par la Selarl Antoine et BMC Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de de Châlons-en-Champagne du 26 juillet 2021 ;

2°) d'annuler les décisions du 26 janvier 2021 prises à son encontre par le préfet de la Marne ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur la décision de refus de titre de séjour :

- sa demande aurait dû être enregistrée comme une demande de renouvellement et non comme une première demande ;

- le préfet a commis une erreur d'appréciation en estimant que sa présence en France représentait une menace pour l'ordre public ;

- le préfet a inexactement apprécié sa situation au regard du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sa décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision doit être annulée par voie de conséquence ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de la Marne qui a produit des pièces sans présenter de mémoire en défense.

M. B... C... été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Picque, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C..., ressortissant brésilien né le 8 décembre 1990, est entré en France au cours de l'année 2004 selon ses déclarations. Il a bénéficié de titres de séjour à compter du mois de juin 2012, annuellement renouvelés et dont le dernier est arrivé à expiration le 30 novembre 2017. Alors qu'il était incarcéré depuis le 28 juin 2017, M. B... C... a demandé, le 18 janvier 2019, la régularisation de sa situation administrative. Par un arrêté du 26 janvier 2021, le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de l'admettre exceptionnellement au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé. M. B... C... relève appel du jugement n° 2101191 du 26 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors en vigueur : " La demande est présentée par l'intéressé dans les deux mois de son entrée en France. S'il y séjournait déjà, il présente sa demande : (...) 4° Soit dans le courant des deux derniers mois précédant l'expiration de la carte de séjour dont il est titulaire, sauf s'il est titulaire du statut de résident de longue durée-UE accordé par la France en application des articles L. 314-8, L. 314-8-1 et L. 314-8-2. / A l'échéance de ce délai et en l'absence de présentation de demande de renouvellement de sa carte de séjour, il justifie à nouveau des conditions requises pour l'entrée sur le territoire national lorsque la possession d'un visa est requise pour la première délivrance de la carte de séjour ".

3. Il est constant que M. B... C... a présenté la demande de titre de séjour en litige le 18 janvier 2019, alors que sa dernière carte de séjour temporaire était expirée depuis le 30 novembre 2017. Si le requérant, qui était alors incarcéré, soutient qu'il avait transmis " à temps " l'ensemble des documents nécessaires au renouvellement de son titre de séjour au service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP) et que ce service n'a ensuite pas relayé sa demande aux services de la préfecture dans les délais, il n'apporte en tout état de cause aucune pièce au soutien de cette allégation. Par suite, c'est sans erreur de droit ni erreur d'appréciation que le préfet de la Marne s'est estimé saisi d'une demande de première délivrance de carte de séjour.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

5. D'une part, il ressort des pièces du dossier et en particulier du bulletin n°2 du casier judiciaire de M. B... C..., que ce dernier a fait l'objet, le 15 octobre 2017, d'une première condamnation à une peine d'emprisonnement de six mois avec sursis pour des faits de violence aggravée et rébellion commis le 23 août 2015, le 26 janvier 2017, d'une deuxième condamnation à une peine d'emprisonnement de six mois pour des faits de refus d'obtempérer et mise en danger d'autrui lors de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur commis le 18 octobre 2016, le 26 janvier 2017, d'une troisième condamnation à une peine d'un an d'emprisonnement pour des faits de violence avec usage ou menace d'une arme commis le 9 février 2014, le 28 juin 2017, d'une quatrième condamnation à une peine d'un an d'emprisonnement pour des faits d'acquisition non autorisée, détention non autorisée, importation non autorisée, transport non autorisé et importation en contrebande de stupéfiants du 25 au 26 juin 2017 et, enfin, le 20 octobre 2017, d'une cinquième condamnation à une peine de huit mois d'emprisonnement pour des faits de violence aggravée commis le 6 octobre 2017. Dans ces condition, compte tenu de la nature et de la réitération des infractions commises par M. B... C..., condamné à un total de quarante-quatre mois d'emprisonnement, dont trente-huit mois fermes, et de leur caractère récent à la date de la décision attaquée, c'est par une exacte application des dispositions précédemment citées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité administrative a pu estimer que sa présence en France constituait une menace pour l'ordre public et refuser, pour ce motif, de lui délivrer une carte temporaire de séjour.

6. D'autre part, il est constant qu'à la date de la décision attaquée M. B... C..., qui est arrivé sur le territoire à l'âge de 14 ans, avait sa résidence habituelle en France depuis 17 ans, essentiellement dans le département de la Guyane, et qu'il y a séjourné régulièrement entre sa majorité et le 30 novembre 2017. Alors que son père est décédé, sa mère, son frère et sa sœur séjournent régulièrement en France. Il est également père d'un enfant français né à Cayenne le 16 juin 2016. Cependant, nonobstant l'ancienneté du séjour et les attaches familiales de M. B... C... en France, compte tenu de la nature et de la gravité des délits commis par l'intéressé, rappelés au point précédent, et en l'absence de preuve de ce qu'il contribuerait, à la hauteur de ses facultés, à l'entretien et à l'éducation de son enfant mineur, le préfet de la Marne, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, n'a pas porté au droit de M. B... C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but d'ordre public en vue duquel elle a été prise.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision d'obligation de quitter le territoire doit être annulée par voie de conséquence ne peut qu'être écarté.

8. En second lieu, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en prononçant la mesure d'éloignement en litige le préfet aurait apprécié de façon manifestement inexacte les conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. B... C....

Sur la décision fixant le pays de destination :

9. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, en tout état de cause, être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Marne.

Délibéré après l'audience du 27 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Agnel, président,

- M. Sibileau, premier conseiller

- Mme Picque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 novembre 2022.

La rapporteure,

Signé : A.-S. PicqueLe président,

Signé : M. A...

Le greffier,

Signé : J.-Y. Gaillard

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

J.-Y. Gaillard

2

N° 21NC02412


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC02412
Date de la décision : 30/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. AGNEL
Rapporteur ?: Mme Anne-Sophie PICQUE
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : METIDJI TALBI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-11-30;21nc02412 ?
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