Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 12 juin 2020 par lequel le préfet de la Marne a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français.
Par un jugement n° 2001474 du 6 novembre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ce recours.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 février 2021, M. A..., représenté par Me Hami-Znati, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 6 novembre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 juin 2020 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, moyennant la renonciation de son avocat à percevoir la contribution versée par l'État au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- sur la décision portant refus de titre de séjour : elle est entachée d'incompétence ; elle est insuffisamment motivée ; elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle méconnaît l'article 9 du code civil ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- sur la décision portant obligation de quitter le territoire français : elle est entachée d'incompétence ; elle est entachée d'un vice de procédure tenant à ce qu'il n'a pas été informé qu'il pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; elle est entachée d'un vice de procédure tenant à ce qu'il n'a pas été mis en mesure de faire valoir ses observations ; elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 9 du code civil ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité affectant la décision portant refus de titre de séjour ;
- sur la décision fixant le pays de renvoi : elle est entachée d'incompétence ; elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 9 du code civil.
Par une ordonnance du 9 juin 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 24 juin 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Sibileau, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant chinois né le 18 août 1991, déclare être entré en France le 25 mars 2016 sous couvert d'un visa C Schengen. Il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le 21 avril 2020. Le préfet de la Marne, par un arrêté du 12 juin 2020, a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 6 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur la légalité de l'arrêté pris dans son ensemble :
2. En premier lieu, M. Denis Gaudin, secrétaire général de la préfecture de la Marne et signataire de l'arrêté attaqué, a reçu, par un arrêté du préfet de la Marne du 24 mars 2020 régulièrement publié le jour même au recueil des actes administratifs de l'Etat dans la Marne, délégation à l'effet de signer tous actes relevant de la compétence de l'Etat dans le département, à l'exception de certains au nombre desquels ne figurent pas les décisions prises en matière de police des étrangers. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de ce signataire doit être écarté comme manquant en fait.
3. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient l'appelant, l'arrêté contesté, qui comporte l'exposé des faits et des considérations de droit sur lesquels il se fonde, est suffisamment motivé.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. / Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article ".
5. M. A... se prévaut de sa présence ininterrompue en France depuis bientôt cinq ans, de démarches actives tendant à son insertion socio-professionnelle en France, de la présence de sa mère résidant régulièrement en France comme de l'état de santé préoccupant de celle-ci ainsi que de la présence d'un demi-frère disposant de la nationalité française. Ces éléments ne sauraient toutefois être regardés comme des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiant l'admission exceptionnelle au séjour de M. A.... Il s'ensuit qu'il n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Marne aurait entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 précité.
6. En quatrième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes des dispositions de l'article 9 du code civil : " Chacun a droit au respect de sa vie privée ".
7. M. A... soutient vivre depuis cinq ans en France, que sa conduite est irréprochable, qu'il fait preuve d'une intégration parfaite notamment par sa maîtrise de la langue française et de ses recherches d'emploi, que sa mère dont l'état de santé est fragile réside régulièrement en France, qu'il a créé des relations personnelles et amicales stables et intenses. Il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A... est en France depuis à peine un peu plus de quatre ans, que son séjour a largement été irrégulier et qu'il n'a pas d'enfant ou de partenaire en France. Par suite, compte tenu des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de l'intéressé en France, l'arrêté litigieux du 12 juin 2020 n'a pas porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Dès lors, le préfet de la Marne n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni en tout état de cause les dispositions de l'article 9 du code civil. De surcroît, le préfet n'a pas non plus commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé.
Sur l'obligation de quitter le territoire :
8. En premier lieu, lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche, qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer que, en cas de rejet de sa demande, il pourra faire l'objet, le cas échéant, d'une mesure d'éloignement du territoire français. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure tenant à ce que M. A... n'a pas été informé qu'il pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement doit être écarté.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". M. A... ne peut donc pas utilement soutenir qu'il aurait dû être mis en mesure de présenter ses observations préalablement à l'édiction de la décision attaquée.
10. En troisième lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité. La décision portant obligation de quitter le territoire français n'ayant pas été prise sur le fondement d'une décision portant refus de titre de séjour illégale, le moyen tiré d'une telle exception d'illégalité ne peut, dès lors, qu'être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de la Marne.
Délibéré après l'audience du 27 octobre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Agnel, président de chambre,
- M. Sibileau, premier conseiller,
- Mme Picque, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 novembre 2022.
Le rapporteur,
Signé : J.-B. SibileauLe président,
Signé : M. B...
Le greffier,
Signé : J.-Y. Gaillard
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
J.-Y. Gaillard
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N° 21NC00504