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27/09/2022 | FRANCE | N°21NC02056

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 27 septembre 2022, 21NC02056


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C..., a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 23 février 2021 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 60 jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2101671 du 24 juin 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 juillet 2021, M. C.

.., représenté par Me Eca, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 24 juin 2021 du tri...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C..., a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 23 février 2021 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 60 jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2101671 du 24 juin 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 juillet 2021, M. C..., représenté par Me Eca, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 24 juin 2021 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 février 2021 du préfet de la Moselle ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour et, durant cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de cinquante euros par jour de retard, à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat, Me Eca, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté préfectoral est entaché d'un vice d'incompétence ;

- le refus de titre de séjour est signé par M. D... tandis que la décision portant obligation de quitter le territoire français est signée par Mme B..., qui ne sont pas, ni l'un ni l'autre, préfet de la Moselle ;

- il n'est pas établi que le préfet était absent ou empêché ;

- l'arrêté préfectoral méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur d'appréciation car il ne pourra pas bénéficier d'un accès effectif aux soins dans son pays d'origine ;

- les médicaments administrés sont rares ou inexistants et chers en Albanie ;

- son état de santé s'est aggravé depuis l'avis du 4 mars 2020 du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- il a besoin d'une tierce personne dans les actes de la vie quotidienne ; sa mère, qui réside en France, s'occupe de lui ;

- le préfet s'est estimé en compétence liée avec l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- l'arrêté préfectoral est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2022, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il s'en remet à ses écritures de première instance et soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 8 juillet 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 4 août 2022 à midi.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 février 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant albanais né en 2001, est entré en France le 1er octobre 2015 selon ses déclarations. Le 27 janvier 2019, il a sollicité son admission au séjour en se prévalant de son état de santé. Par un arrêté du 23 février 2021, le préfet de la Moselle a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de soixante jours et a fixé le pays de destination. M. C... relève appel du jugement du 24 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté préfectoral.

Sur la légalité de l'arrêté du 23 février 2021 :

2. En premier lieu, d'une part, contrairement à ce que soutient le requérant, l'arrêté préfectoral a uniquement été signé par M. Delcayrou, secrétaire général de la préfecture de la Moselle. Si le requérant a également été destinataire d'un courrier du même jour signé par Mme B..., celui-ci constitue seulement le document à remettre à la direction zonale de la police aux frontières ou à l'administration des douanes lorsqu'il quittera la frontière. D'autre part, par un arrêté du 31 décembre 2020 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le 4 janvier 2021, le préfet de la Moselle a donné délégation à M. Olivier Delcayrou, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer tous arrêtés et décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Moselle à l'exception de certaines catégories d'actes au nombre desquelles ne figurent pas les décisions en matière de séjour des ressortissants étrangers. Enfin, il n'est pas établi que le déléguant n'aurait pas été absent ou empêché. Ainsi, le moyen tiré de 1'incompétence du signataire de l'arrêté préfectoral attaqué doit être écarté comme manquant en fait.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans sa version applicable au litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".

4. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte-tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié.

5. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

6. Dans son avis du 4 mars 2020, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a estimé que l'état de santé de M. C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'au vu des éléments du dossier et à la date de l'avis, son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine.

7. Il ressort des pièces du dossier que le requérant souffre de décompensation psychotique et poursuit un traitement médicamenteux à base notamment de cyamémazine, rispéridone et zopiclone. Pour contester l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration selon lequel le défaut de prise en charge ne devrait pas entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, le requérant produit des ordonnances ainsi qu'une attestation du centre hospitalier universitaire de Tirana qui précise le manque de médicament et de spécialisation pour sa situation. Enfin, il produit un certificat médical et une attestation d'une infirmière selon lesquels il a besoin d'une aide humaine pour les gestes du quotidien. Toutefois, ces seuls éléments, ne remettent pas en cause l'appréciation portée par le préfet sur la gravité de l'état de santé de M. C.... Aussi, en l'absence de conséquence d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé en cas de défaut de prise en charge de sa maladie, le requérant ne saurait utilement faire état de ce qu'il ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine Dès lors, M. C... ne remplit pas les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article par le préfet de la Moselle doit être écarté.

8. En troisième lieu, il ne ressort ni des termes des arrêtés attaqués ni des pièces du dossier que le préfet se serait cru en situation de compétence liée au regard de l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

9. En dernier lieu, il ne ressort également pas des pièces du dossier que le préfet de la Moselle aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction, sous astreinte, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

Délibéré après l'audience du 13 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Goujon-Fischer, président,

- Mme Roussaux, première conseillère,

- M. Marchal, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 septembre 2022.

La rapporteure,

Signé : S. Roussaux

Le président,

Signé : J-F Goujon-Fischer

La greffière,

Signé : E. Delors

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

E. Delors

2

N° 21NC02056


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21NC02056
Date de la décision : 27/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GOUJON-FISCHER
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : ECA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-09-27;21nc02056 ?
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