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07/07/2022 | FRANCE | N°20NC03531

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 07 juillet 2022, 20NC03531


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 15 juin 2020 par lequel le préfet de l'Aube lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2001300 du 5 novembre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Proc

édure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 décembre 2020, M. B... A..., représenté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 15 juin 2020 par lequel le préfet de l'Aube lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2001300 du 5 novembre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 décembre 2020, M. B... A..., représenté par Me Gaffuri, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2001300 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 5 novembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube de lui délivrer une carte de séjour temporaire, subsidiairement de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocate en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;

- le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence en se croyant, à tort, tenu de rejeter sa demande de titre de séjour du seul fait de l'avis défavorable de la Direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Grand Est ;

- la décision de refus de séjour a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- elle est illégale du fait de l'illégalité des motifs de fait et de droit du refus de reconnaissance de la qualité de réfugié ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 avril 2021, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 4 février 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention franco-béninoise relative à la circulation et au séjour des personnes entre la République française et la République du Bénin du 21 décembre 1992 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience

Le rapport de M. Rees, président, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

Sur la légalité de la décision de refus de séjour :

1. En premier lieu, l'arrêté contesté comporte un énoncé des considérations de droit et de fait propres à la situation personnelle de M. A... sur lesquelles le préfet s'est fondé pour refuser de lui délivrer un titre de séjour. Il est ainsi régulièrement motivé.

2. En deuxième lieu, la motivation de la décision permet de vérifier que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation de M. A....

3. En troisième lieu, aux termes de l'article 5 de la convention relative à la circulation et au séjour des personnes entre la République française et la République du Bénin : " Les ressortissants de chacun des États contractants désireux d'exercer sur le territoire de l'autre État une activité professionnelle salariée doivent en outre, pour être admis sur le territoire de cet État, justifier de la possession: 1° d'un certificat de contrôle médical établi dans les deux mois précédant le départ : - en ce qui concerne l'entrée au Bénin, après un examen subi sur le territoire français, par un médecin agréé par le consulat du Bénin en accord avec les autorités françaises; - en ce qui concerne l'entrée en France, après un examen subi sur le territoire du Bénin, par un médecin agréé par le consulat de France en accord avec les autorités béninoises; 2° d'un contrat de travail visé par le ministère du travail dans les conditions prévues par la législation de l'État d'accueil ".

4. D'une part, il est constant que le contrat de travail à durée déterminée produit par M. A... à l'appui de sa demande d'admission au séjour en vue d'exercer une activité professionnelle salariée n'a pas été visé par la Direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Grand Est. L'intéressé ne remplissant ainsi pas les conditions prévues par les stipulations précitées, le préfet a pu légalement refuser de lui délivrer un titre de séjour sur leur fondement. D'autre part, il ressort des énonciations mêmes de l'arrêté contesté que le préfet n'a pas limité son examen de la situation du requérant à cette seule considération. Par conséquent, le moyen tiré de ce qu'il aurait commis une erreur de droit en se croyant tenu de rejeter la demande d'admission au séjour de l'intéressé au seul motif de l'absence de production d'un contrat de travail visé manque en fait.

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicables : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., ressortissant béninois né en 1988, est entré en France en juillet 2017 pour y suivre une formation, soit moins de trois ans avant la décision contestée. Il se prévaut de la présence de ses deux filles mineures, mais elles l'y ont rejoint, l'une en décembre 2018, l'autre dans le courant de l'année 2019, à son initiative. Il ne fait état d'aucune autre attache personnelle ou familiale en France. Il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 29 ans. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a refusé de l'admettre au séjour. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations et des dispositions précitées doit être écarté.

7. A plus forte raison, dès lors qu'il est fondé sur les mêmes considérations, doit également être écarté le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de M. A....

Sur la légalité de la décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, en vertu du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable, la décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français n'a pas, en cas de refus de délivrance d'un titre de séjour, à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. Ainsi qu'il a été dit au point 1, la décision de refus de séjour est régulièrement motivée. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

9. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour.

10. En troisième lieu, le moyen tiré de ce que la décision serait illégale du fait de l'illégalité des motifs de fait et de droit du refus de reconnaissance de la qualité de réfugié n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé.

11. En quatrième lieu, pour la même raison que celle indiquée au point 7, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de M. A... ne peut qu'être écarté.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

12. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour.

13. En second lieu, en se bornant à faire état d'un avis de recherche qui aurait été émis à son encontre en août 2019 et de ce qu'il aurait déposé une demande d'asile, M. A... n'apporte aucun élément de nature à démontrer qu'il pourrait, en cas de retour dans son pays d'origine, y être exposé à des traitements prohibés par les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable.

14. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A..., ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction, d'astreinte et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.

Délibéré après l'audience du 16 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Rees, président,

- M. Goujon-Fischer, premier conseiller,

- Mme Barrois, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 juillet 2022.

Le président-rapporteur,

Signé : P. Rees L'assesseur le plus ancien,

dans l'ordre du tableau,

Signé : J.F. Goujon-Fischer

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

N° 20NC03531


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NC03531
Date de la décision : 07/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. REES
Rapporteur ?: M. Philippe REES
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : GAFFURI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-07-07;20nc03531 ?
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