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09/06/2022 | FRANCE | N°20NC03821

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 09 juin 2022, 20NC03821


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... C... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 27 mai 2020 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 2001594 du 15 octobre 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requ

te, enregistrée le 29 décembre 2020, M. A... C..., représenté par Me Sgro, demande à la cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... C... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 27 mai 2020 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 2001594 du 15 octobre 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 décembre 2020, M. A... C..., représenté par Me Sgro, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 octobre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 mai 2020 ;

3°) de faire injonction au préfet de Meurthe-et-Moselle de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Concernant l'arrêté pris dans son ensemble :

- il a été signé par une autorité incompétente ;

Concernant la décision portant refus de titre de séjour :

- elle méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il est le père d'une enfant française avec laquelle il entretient des relations régulières et qu'il contribue financièrement à son entretien et à son éducation ;

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'il n'a pas sollicité de titre de séjour sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que son épouse est de nationalité française depuis le 4 janvier 2020, qu'ils cohabitent ensemble depuis octobre 2019 et que cette dernière est enceinte ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- au regard de l'article 21 de la convention de Schengen du 14 juin 1985 et des dispositions des articles L. 211-2-1 et L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et le préfet ne pouvait pas valablement exciper des conditions de son entrée en France en 2014 pour lui refuser le titre de séjour sollicité en 2020 ;

- sa demande de titre de séjour valait implicitement demande de visa de long séjour, lequel ne pouvait lui être refusé ; l'absence irrégulière de visa ne pouvait motiver le refus de titre de séjour qui lui a été opposé ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle viole les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Concernant la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision portant obligation de quitter le territoire est illégale en raison de l'illégalité entachant la décision de refus de séjour ;

- en prenant cette décision, le préfet porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Concernant la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité entachant la décision portant obligation de quitter le territoire ;

- en prenant cette décision, le préfet porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 décembre 2021, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... C... ne sont pas fondés.

M. A... C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 15 décembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E... A... C..., ressortissant marocain, né en 1993, a déclaré être entré en France le 22 août 2014, muni de son passeport marocain en cours de validité revêtu d'un visa de long séjour délivré par les autorités consulaires italiennes au Maroc. En 2016, il a rencontré une ressortissante française avec laquelle il a eu une enfant, B..., née le 22 août 2017. Le 22 août 2016, la demande de titre de séjour qu'il a présentée en se prévalant de sa vie privée et familiale a fait l'objet d'un refus implicite. En décembre 2017, l'intéressé a formulé une nouvelle demande de titre de séjour en se prévalant des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en sa qualité de père de l'enfant B.... Cette demande a fait l'objet d'un refus qui lui a été opposé par le préfet de Meurthe-et-Moselle le 28 novembre 2018. Le 4 janvier 2020, M. A... C... a contracté mariage avec une autre ressortissante française et le 7 janvier 2020, il a de nouveau sollicité un titre de séjour en se prévalant de sa qualité de conjoint français. Par un arrêté du 27 mai 2020, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé le séjour en France de M. A... C..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être renvoyé passé ce délai. Le recours gracieux formé par l'intéressé a été rejeté par une décision préfectorale du 17 juin 2020 qui n'a pas été contestée. M. A... C... relève appel du jugement du 15 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 27 mai 2020.

Sur le moyen commun aux décisions attaquées :

2. Le requérant se borne à reprendre en appel, avec la même argumentation qu'en première instance, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges.

Sur les autres moyens propres à la contestation de la décision portant refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, aux termes du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier, particulièrement de sa demande de titre de séjour datée du 6 janvier 2020, que contrairement à ce qu'il affirme, M. A... C... n'a pas sollicité de titre du séjour sur le fondement des dispositions précitées du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il s'est borné à faire état dans sa demande de sa nouvelle situation maritale sans faire référence au lien qu'il entretiendrait avec sa fille française et sans mentionner les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas examiné la demande de l'intéressé sur le fondement de ces dispositions. La circonstance, invoquée en appel, tirée de ce que le préfet, dans sa décision de rejet du 17 juin 2020 du recours gracieux présenté par M. A... C... contre l'arrêté en litige, évoque la situation de ce dernier au regard des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est sans incidence sur la légalité du refus opposé au titre de séjour qui n'a pas été examiné sur le fondement de ces mêmes dispositions. Par suite, le moyen tiré de ce que le refus de séjour en litige serait contraire aux dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être qu'écarté comme inopérant.

5. En deuxième lieu, d'une part, aux termes du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) ". Et aux termes de l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux articles L. 313-20, L. 313-21, L. 313-23, L. 313-24, L. 313-27 et L. 313-29 sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1. Le cas échéant, la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux articles L. 313-20, L. 313-21, L. 313-24, L. 313-27 et L. 313-29 peut être délivrée par l'autorité diplomatique ou consulaire, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ". Et aux termes de l'article L. 211-2-1 du même code : " La demande d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois donne lieu à la délivrance par les autorités diplomatiques et consulaires d'un récépissé indiquant la date du dépôt de la demande. Tout étranger souhaitant entrer en France en vue d'y séjourner pour une durée supérieure à trois mois doit solliciter auprès des autorités diplomatiques et consulaires françaises un visa de long séjour. La durée de validité de ce visa ne peut être supérieure à un an. Dans les conditions définies par décret en Conseil d'Etat, ce visa confère à son titulaire les droits attachés à une carte de séjour temporaire ou à la carte de séjour pluriannuelle prévue aux articles L. 313-20 et L. 313-21. Le visa de long séjour ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. Le visa de long séjour est délivré de plein droit au conjoint de Français qui remplit les conditions prévues au présent article. Les autorités diplomatiques et consulaires sont tenues de statuer sur les demandes de visa de long séjour formées par les conjoints de Français et les étudiants dans les meilleurs délais. Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour ". Il résulte de ces dispositions que la délivrance d'une carte de séjour temporaire à un étranger en qualité de conjoint de ressortissant français est subordonnée à la production d'un visa pour un séjour supérieur à trois mois et que l'octroi d'un tel visa par l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour est subordonné à la justification d'une entrée régulière sur le territoire français.

6. D'autre part, aux termes de l'article 21 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 : " 1. Les étrangers titulaires d'un titre de séjour délivré par une des Parties Contractantes peuvent, sous le couvert de ce titre ainsi que d'un document de voyage, ces documents étant en cours de validité, circuler librement pendant une période de trois mois au maximum sur le territoire des autres Parties Contractantes, pour autant qu'ils remplissent les conditions d'entrée visées à l'article 5, paragraphe 1, points a), c) et e), et qu'ils ne figurent pas sur la liste de signalement nationale de la Partie Contractante concernée./2. Le paragraphe 1 s'applique également aux étrangers titulaires d'une autorisation provisoire de séjour, délivrée par l'une des Parties Contractantes et d'un document de voyage délivré par cette Partie Contractante. /3. Les Parties Contractantes communiquent au Comité Exécutif la liste des documents qu'ils délivrent valant titre de séjour ou autorisation provisoire de séjour et document de voyage au sens du présent article. /4. Les dispositions du présent article s'appliquent sans préjudice des dispositions de l'article 22. ". Aux termes de l'article 22 de la même convention : " I- Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans des conditions fixées par chaque Partie contractante, aux autorités compétentes de la Partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. / Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque Partie contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la Partie contractante sur lequel ils pénètrent ". Aux termes de l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'article L. 531-1 est applicable à l'étranger qui, en provenance du territoire d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, est entré ou a séjourné sur le territoire métropolitain sans se conformer aux dispositions des articles 19, paragraphe 1 ou 2, 20, paragraphe 1, ou 21, paragraphe 1 ou 2, de cette convention ou sans souscrire, au moment de l'entrée sur ce territoire, la déclaration obligatoire prévue par l'article 22 de la même convention, alors qu'il était astreint à cette formalité. ". Aux termes de l'article R. 211-32 du même code: " La déclaration obligatoire mentionnée à l'article L. 531-2 est, sous réserve des dispositions de l'article R. 212-6, souscrite à l'entrée sur le territoire métropolitain par l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne et qui est en provenance directe d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ". L'article R. 212-6 du même code dispose que : " L'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse n'est pas astreint à la déclaration d'entrée sur le territoire français : / 1° S'il n'est pas assujetti à l'obligation du visa pour entrer en France en vue d'un séjour d'une durée inférieure ou égale à trois mois ; / 2° Ou s'il est titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, d'une durée supérieure ou égale à un an, qui a été délivré par un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ; toutefois, la déclaration doit être souscrite par les résidents d'Etats tiers qui sont désignés par arrêté du ministre chargé de l'immigration ". La déclaration prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen, et dont l'obligation figure à l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un Etat partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire.

7. Si les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile subordonnent la délivrance de la carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " au conjoint d'un Français à certaines conditions, dont celle d'être en possession d'un visa de long séjour qui, au demeurant, ne peut être refusé que dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code susvisé, elles n'impliquent pas que celui-ci fasse l'objet d'une demande expresse distincte de celle du titre de séjour sollicité auprès de l'autorité préfectorale, compétente pour procéder à cette double instruction. Il ressort des pièces du dossier que M. A... C... établit, par la copie de son passeport, revêtu d'un visa Schengen, délivré par les autorités italiennes à Casablanca, valable du 19 juin au 30 décembre 2014, et d'un tampon apposé par les autorités italiennes le 14 août 2014 à- Milan, être entré régulièrement dans l'espace Schengen à cette date. Toutefois, il n'établit pas s'être déclaré aux autorités françaises à la suite du franchissement de la frontière entre l'Italie et la France, comme le prévoit clairement les articles L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En tout état de cause, et comme l'ont retenu les premiers juges, le mariage de M. A... C... avec une ressortissante française est intervenu le 4 janvier 2020, soit trois jours avant sa demande de titre de séjour du 7 janvier 2020, formulée sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Or, le requérant ne justifie d'une vie commune avec sa compagne que depuis le 15 octobre 2019, soit depuis sept mois à la date de la décision attaquée. Par conséquent, dès lors que le requérant ne remplissait pas les conditions posées par le dernier alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de Meurthe-et-Moselle a pu, à bon droit, lui refuser le titre sollicité sur le fondement du 4° du L. 313-11 du même code au motif qu'il ne justifiait de la production d'un visa long séjour.

8. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ".

9. M. A... C... se prévaut de son entrée sur le territoire français en 2014 et de la présence régulière en France de son père et de ses deux frères et du fait que sa mère et sa sœur ont présenté des demandes de titres de séjour. Il fait également valoir qu'il a transféré en France le centre de ses intérêts personnels et familiaux dès lors qu'il est le père d'une enfant française avec laquelle il entretiendrait des relations stables et régulières et qu'il est marié avec une ressortissante française qui va accoucher de leur premier enfant en mars 2021. Toutefois, s'il ressort des pièces du dossier que le requérant est entré régulièrement dans l'espace Schengen en août 2014, à l'âge de 21 ans, comme cela a été dit au point 7 du présent arrêt, il ne démontre pas être entré en France à cette même date. Il s'est d'ailleurs maintenu irrégulièrement sur le territoire français pendant deux ans avant d'effectuer des démarches pour régulariser sa situation administrative. Par ailleurs, comme indiqué au point 7 du présent arrêt, son mariage avec une ressortissante française est récent et à la date de la décision contestée, il ne justifiait d'une communauté de vie avec elle que depuis sept mois seulement. En outre, les circonstances que le père de l'intéressé et ses deux frères résident régulièrement en France et que sa mère et sa sœur ont formé des demandes de titres de séjour, ne sauraient suffire à lui ouvrir un droit au séjour en France, alors qu'il ne justifie aucunement des liens qu'il entretient avec son père et ses frères et que par deux décisions du 30 juin 2020, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de délivrer à sa mère et à sa sœur les titres de séjour qu'elles sollicitaient. Enfin, M. A... C... ne saurait soutenir qu'en prenant la décision contestée le préfet a porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale dès lors qu'à la date de la décision contestée, il ne justifiait d'une communauté de vie avec son épouse que depuis sept mois et qu'il ne démontre pas qu'il entretient une relation avec son enfant française. Dans ces conditions, eu égard au caractère récent de son mariage et à la possibilité pour lui d'obtenir un visa adapté auprès des autorités consulaires françaises dans son pays d'origine, la décision contestée n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable doivent être écartés. Pour les mêmes raisons, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation du requérant.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

11. M. A... C... se prévaut du fait qu'il est le père d'une enfant française née le 22 août 2017 et que son épouse va accoucher de leur enfant en mars 2021. Toutefois, et comme indiqué précédemment, à la date de la décision attaquée, le requérant ne justifiait pas s'occuper et participer à l'éducation de son enfant française et son épouse n'était pas enceinte. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

12. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... C... justifie de considération humanitaire ou de motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'aile. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant refus de séjour en France serait contraire à ces dispositions doit être écarté.

Sur les autres moyens propres à la contestation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

13. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit précédemment, le refus de délivrer un titre de séjour à M. A... C... n'est pas entaché d'illégalité. Par suite, le moyen, invoqué par voie d'exception, tiré de son illégalité pour contester les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination doit être écarté.

14. En second lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; ".

15. Pour les mêmes raisons que celles indiquées aux points 9 et 11 du présent arrêt, M. A... C... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 6 ° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

16. En troisième lieu, pour les mêmes raisons que celles indiquées au point 9 et 11 du présent arrêt, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... C... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 mai 2020 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'il présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de Meurthe-et-Moselle.

Délibéré après l'audience du 19 mai 2022, à laquelle siégeaient :

M.Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Stenger, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juin 2022.

La rapporteure,

Signé : L. D...

Le président,

Signé : J. MARTINEZ

La greffière,

Signé : C. SCHRAMM

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. SCHRAMM

N° 20NC03821 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC03821
Date de la décision : 09/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : SGRO

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-06-09;20nc03821 ?
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