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06/05/2022 | FRANCE | N°19NC02023

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 06 mai 2022, 19NC02023


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I. La société Architectures Scaranello a demandé au tribunal administratif de Besançon, par une demande enregistrée sous le n°1601843, de condamner l'OPH Dole du Jura Habitat à lui payer une indemnité de résiliation du marché de maîtrise d'œuvre relatif à la construction d'un foyer-logement de trente-trois places et d'un service d'accueil de jour à Dôle, d'un montant de 11 051,83 euros hors taxe (HT) avec intérêts au taux légal à compter du 23 août 2016, et à lui régler les sommes lui restant

dues au titre de ce marché, pour un montant de 23 280,60 euros HT, et au titre d'un ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I. La société Architectures Scaranello a demandé au tribunal administratif de Besançon, par une demande enregistrée sous le n°1601843, de condamner l'OPH Dole du Jura Habitat à lui payer une indemnité de résiliation du marché de maîtrise d'œuvre relatif à la construction d'un foyer-logement de trente-trois places et d'un service d'accueil de jour à Dôle, d'un montant de 11 051,83 euros hors taxe (HT) avec intérêts au taux légal à compter du 23 août 2016, et à lui régler les sommes lui restant dues au titre de ce marché, pour un montant de 23 280,60 euros HT, et au titre d'un marché complémentaire, pour un montant de 9 806,47 euros HT.

Par un jugement n° 1601843 du 26 avril 2019, le tribunal administratif de Besançon a condamné l'OPH Dôle du Jura Habitat à verser à la société Architectures Scaranello une somme de 941,80 euros.

II. L'Office public de l'habitat (OPH) Grand Dôle Habitat a demandé au tribunal administratif de Besançon, par une demande enregistrée sous le n° 1700994, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, à titre principal, de condamner " in solidum ", la société Architectures Scaranello, la société Batiserf, M. A... B..., la société Bureau Michel Forgue (BMF) et la société Qualiconsult à lui verser une somme de 221 786,24 euros hors taxe (HT), assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2016 et de leur capitalisation et, subsidiairement, de condamner, d'une part, " in solidum " la société Architectures Scaranello, la société Batiserf, M. A... B..., la société Bureau Michel Forgue (BMF) à lui verser une somme de 166 339,98 euros HT, assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2016 et de leur capitalisation et, d'autre part, la société Qualiconsult à lui verser une somme de 55 446,56 euros HT, assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2016 et de leur capitalisation.

Par un jugement n° 1700994 du 26 avril 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire enregistrés les 26 juin 2019 et 3 août 2020, sous le n° 19NC02014, l'OPH Grand Dôle Habitat, représenté par la SCP Chaton, Grillon, Brocard, Gire, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1601843 du tribunal administratif de Besançon du 26 avril 2019 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Architectures Scaranello devant le tribunal administratif ou, subsidiairement, de fixer le solde du décompte à la somme de 165 387,58 euros à son crédit ;

3°) de mettre à la charge des intimés le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le motif de la résiliation du marché de maîtrise d'œuvre prononcée par le maître d'ouvrage du fait de l'arrêt de l'exécution des prestations en application des articles 23 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) et 20 du cahier des clauses administratives générales applicables au marché de prestation intellectuelles (CCAG-PI), résultant d'un événement lié au marché et non au titulaire, excluait toute possibilité de faute contractuelle de ce dernier ;

- le solde du marché sera fixé à la somme de 165 397,58 euros (166 339,38 + 941,80), incluant l'indemnisation des préjudices résultant des manquements de la maîtrise d'œuvre à ses obligations contractuelles.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 septembre 2019, la société Architectures Scaranello, représentée par la SELARL Nicolier Associés, conclut au rejet de la requête de l'OPH Grand Dôle Habitat et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'appelant sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

II. Par une requête et un mémoire enregistrés les 27 juin 2019 et 3 août 2020, sous le n° 19NC02023, l'OPH Grand Dôle Habitat, représenté par la SCP Chaton, Grillon, Brocard, Gire, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1700994 du tribunal administratif de Besançon du 26 avril 2019 à l'exception du rejet des conclusions dirigées contre la société Qualiconsult du fait de son désistement de son appel à son encontre ;

2°) de condamner, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, d'une part, " in solidum " la société Architectures Scaranello, la société Batiserf, M. A... B... et la société Bureau Michel Forgue (BMF) à lui verser une somme de 166 339,98 euros HT, assortie des intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2016 et de leur capitalisation. ;

3°) de mettre à la charge des intimés le versement d'une somme de 1 000 euros chacun sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

- sa requête est recevable dès lors que le décompte de liquidation du marché de maîtrise d'œuvre, dans lequel il avait inscrit au débit du titulaire les sommes qu'il réclame sur le fondement de sa responsabilité contractuelle, n'était pas devenu définitif à la date d'introduction de sa demande de première instance ;

- le maître d'œuvre a commis des manquements de nature à engager sa responsabilité contractuelle en établissant un dossier de permis de construire qui ne respectait pas les règles et les principes de sécurité applicables aux établissement recevant du public (ERP) de type J et en ne sollicitant pas du maître de l'ouvrage les informations nécessaires à l'accomplissement de sa mission ;

- les membres du groupement ont engagé solidairement leur responsabilité contractuelle dès lors que le contrat ne comporte pas de répartition des tâches ; en tout état de cause, la société Architectures Scaranello sera condamnée en qualité de mandataire solidaire du groupement conjoint ;

- les manquements du maître d'œuvre, qui ont entrainé un refus du permis de construire et la nécessité de modifier le projet afin qu'il tienne compte des règles de sécurité applicables aux ERP de type J, représentant un surcoût estimé de 364 100 euros HT, lui ont causé un préjudice dont il est fondé à demander réparation auprès des membres du groupement de maîtrise d'œuvre à hauteur de 166 339,68 euros ;

- le juge des référés du tribunal administratif de Besançon a condamné la société Qualiconsult à lui verser une provision de 55 446,56 euros par une ordonnance n° 1901384 devenue définitive ; raison pour laquelle il se désiste de toute conclusion à son encontre ;

- les conclusions reconventionnelles de la société Qualiconsult sont irrecevables dès lors qu'elle porte sur un litige distinct.

Par des mémoires en défense enregistrés les 22 août 2019 et 27 août 2020, la société Bureau Michel Forgue (BMF), représentée par la SCP Mayer, Blondeau, Giacomoni, Duchamp, Martinval, conclut, à titre principal, au rejet de la requête de l'OPH Grand Dôle Habitat, à titre subsidiaire, à la réduction des demandes de l'OPH Grand Dôle Habitat et à la condamnation solidaire de la société Architectures Scaranello et de la société Qualiconsult à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre, y compris au titre des frais irrépétibles et au rejet des conclusions de la société Architectures Scaranello et de la société Qualiconsult à son encontre et, dans tous les cas, à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de de l'OPH Grand Dôle Habitat ou, si mieux n'aime à la cour, à la charge des sociétés Architectures Scaranello et Qualiconsult, " in solidum ", sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de l'OPH Grand Dôle Habitat est irrecevable dès lors qu'il a déjà sollicité le paiement de la somme qu'il demande en l'inscrivant au débit du maître d'œuvre dans le décompte de liquidation du marché résilié ; il ne peut pas présenter la même demande dans deux procédures distinctes, l'une portant sur la contestation du décompte de liquidation et l'autre portant sur les prétendues conséquences de l'exécution de ses obligations contractuelles par le maître d'œuvre ; il ne peut y avoir de jonction avec l'instance d'appel relative au jugement statuant sur la contestation du décompte de liquidation du marché de maître d'œuvre dès lors qu'il n'y a pas identité de parties ;

- le refus de permis de construire et la découverte en cours d'exécution du marché de maîtrise d'œuvre des modifications à apporter au projet pour le rendre compatible avec la réglementation en matière de sécurité applicable aux ERP de type J résultent de la seule carence du maître de l'ouvrage à qui il appartenait de définir précisément, dans son programme, les besoins et les objectifs de l'opération ;

- à supposer que la faute de la maîtrise d'œuvre soit reconnue, le groupement momentané d'entreprises titulaires du marché était conjoint et non solidaire de sorte que chaque membre ne peut répondre que de ses propres défaillances ; or l'OPH Grand Dôle Habitat ne démontre pas l'existence d'une faute contractuelle imputable à la société BMF, qui n'était pas en charge de la conception architecturale du projet et n'est pas intervenue dans l'élaboration du dossier de permis de construire ;

- subsidiairement, l'OPH Grand Dôle Habitat ne justifie pas du montant de son préjudice ;

- subsidiairement, la société Architectures Scaranello, en tant qu'architecte chargé de la conception du projet et d'une mission d'assistance lors du dépôt du permis de construire, et la société Qualiconsult, sur le fondement de leurs fautes respectives, seront condamnées à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;

- la société Qualiconsult ne précise pas le fondement des conclusions reconventionnelles présentées à son encontre.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 septembre 2019, la société Architectures Scaranello, représentée par la SELARL Nicolier Associés, conclut, à titre principal, au rejet de la requête de l'OPH Grand Dôle Habitat, à titre subsidiaire, à la condamnation de la société Qualiconsult à la garantir intégralement du montant des condamnations qui viendraient à être prononcées à son encontre et, à titre infiniment subsidiaire, à la condamnation de la société Batiserf, la société BMF et M. A... B... à la garantir à hauteur de 40 % du montant des condamnations qui viendraient à être prononcées à son encontre et, à ce qu'une somme de 7 000 euros soit mise à la charge de l'OPH Grand Dôle Habitat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le maître de l'ouvrage ne saurait lui reprocher aucune faute dès lors qu'elle a suivi le classement du bâtiment défini et préconisé par le contrôleur technique, la société Qualiconsult, et que le classement en ERP de type J résulte d'informations qui ne lui avaient pas été transmises par le maître de l'ouvrage avant le dépôt du permis de construire ;

- le maître de l'ouvrage n'avait pas mentionné dans le programme des travaux que le bâtiment à construire était destiné à accueillir des personnes en situation de handicap mais des personnes connaissant des difficultés sociales ;

- l'équipe de maîtrise d'œuvre a réalisé le dossier d'avant-projet définitif (APD) en suivant le classement du bâtiment en habitation collective de 2ème catégorie conformément aux préconisations du contrôleur technique, la société Qualiconsult, dans son avis du 31 juillet 2014 sans que le maître de l'ouvrage n'émette d'observation ;

- le modèle de notice sécurité incendie transmise le 25 février 2015 par le contrôleur technique indique que le bâtiment se compose, au rez-de-chaussée, d'un ERP relevant de la 5ème catégorie destiné à accueillir des activités de type S, L, N, R et W et, au premier et deuxième étages, d'un foyer-logement ;

- lorsque le maître d'œuvre a déposé le permis de construire, sur la base de l'avant-projet définitif, il était lié par le classement de l'ouvrage émanent du contrôleur public et ne pouvait le remettre en cause ;

- l'OPH Grand Dôle Habitat ne justifie pas de l'existence et du chiffrage de son préjudice, ni du lien de causalité avec l'erreur de classement du bâtiment et son appel est irrecevable sur ce chef de demande dès lors qu'il se borne à renvoyer à ses écritures de première instance ;

- l'abandon du projet n'est pas lié à l'incidence financière du classement du bâtiment en ERP de type J ;

- il était techniquement possible de modifier le projet en respectant les normes de sécurité applicables aux ERP de type J en conservant le terrain d'assiette initialement choisi ;

- subsidiairement, la faute commise par la société Qualiconsult, à l'origine de l'erreur dans le classement du bâtiment, est de nature à justifier qu'elle soit condamnée à la garantir de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre ;

- très subsidiairement, si la cour reconnaissait une faute de la maîtrise d'œuvre celle-ci ne pourrait qu'être commune, la vérification de la compatibilité du projet avec la réglementation en matière de sécurité relevant de la responsabilité de tous, et imputée à chacun des membres en fonction du pourcentage de répartition des honoraires.

Par des mémoires en défense enregistrés les 18 octobre 2019 et 28 août 2020, M. B... A..., représenté par la SELARL Durlot, Henry, conclut au rejet de la requête de l'OPH Grand Dôle Habitat et des conclusions d'appel en garantie de la société Architectes Scaranello et de la société Qualiconsult, subsidiairement, à la condamnation de la société Architectes Scaranello et de la société Qualiconsult à le garantir de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre et, dans tous les cas, à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de de l'OPH Grand Dôle Habitat et de la société Architectures Scaranello sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la demande de l'OPH Grand Dôle Habitat est irrecevable dès lors qu'il a déjà sollicité le paiement de la somme qu'il demande en l'inscrivant au débit du maître d'œuvre dans le décompte de liquidation du marché résilié ; il ne peut pas présenter la même demande dans deux procédures distinctes, l'une portant sur la contestation du décompte de liquidation et l'autre portant sur les prétendues conséquences de l'exécution de ses obligations contractuelles par le maître d'œuvre ; il ne peut y avoir de jonction avec l'instance d'appel relative au jugement statuant sur la contestation du décompte de liquidation du marché de maître d'œuvre dès lors qu'il n'y a pas identité de parties ;

- il ressort des pièces versées aux débats que le maître de l'ouvrage n'avait pas mentionné dans le programme des travaux que le bâtiment à construire était destiné à accueillir des personnes en situation de handicap ;

- il ne saurait être condamné solidairement avec les autres membres du groupement momentané d'entreprises dès lors qu'il s'agit d'un groupement conjoint et que le maître de l'ouvrage ne démontre l'existence d'aucune faute de nature à engager sa responsabilité individuelle au titre de sa mission de bureau d'études " fluides " ; les appels en garantie formés à son encontre seront également rejetés en l'absence de démonstration d'une quelconque faute qui lui serait imputable ;

- l'OPH Grand Dôle Habitat ne justifie pas de l'existence et du chiffrage de son préjudice ;

- subsidiairement, la société Architectures Scaranello, en tant qu'architecte chargé de s'assurer de la compatibilité de l'ouvrage conçu avec la destination souhaitée par le maître de l'ouvrage, et la société Qualiconsult, chargé des missions d'accessibilité aux personnes handicapées et de l'attestation relative à la vérification de cette accessibilité, sur le fondement de leurs fautes respectives, seront condamnées à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 décembre 2019 et 1er septembre 2020, la société Batiserf ingénierie, représentée par la SELARL Germain Perray, conclut au rejet de la requête de l'OPH Grand Dôle Habitat et des conclusions d'appel en garantie de la société Architectures Scaranello et de la société Qualiconsult ainsi qu'à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'OPH Grand Dôle Habitat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, subsidiairement, à la condamnation de la société Architectures Scaranello et de la société Qualiconsult à la garantir de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à leur charge solidaire sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de l'OPH Grand Dôle Habitat est irrecevable dès lors qu'il a déjà sollicité le paiement de la somme qu'il demande en l'inscrivant au débit du maître d'œuvre dans le décompte de liquidation du marché résilié ; il ne peut pas présenter la même demande dans deux procédures distinctes, l'une portant sur la contestation du décompte de liquidation et l'autre portant sur les prétendues conséquences de l'exécution de ses obligations contractuelles par le maître d'œuvre ; il ne peut y avoir de jonction avec l'instance d'appel relative au jugement statuant sur la contestation du décompte de liquidation du marché de maîtrise d'œuvre dès lors que le cumul des deux actions pourrait aboutir à une même condamnation ;

- le maître de l'ouvrage n'a pas fourni à la maîtrise d'œuvre les informations lui permettant de déterminer le classement du bâtiment en ERP de type J et n'a pas donné suite aux avis suspendus du contrôleur technique lui demandant de lui confirmer que le foyer n'accueillera pas de personnes âgées ou en situation de handicap ;

- il était techniquement et financièrement possible de modifier le projet en respectant les normes applicables aux ERP de type J tout en conservant le terrain d'assiette initialement choisi ;

- elle ne saurait être condamnée solidairement avec les autres membres du groupement momentané d'entreprises dès lors qu'il s'agit d'un groupement conjoint et que le maître de l'ouvrage ne démontre l'existence d'aucune faute de nature à engager sa responsabilité individuelle au titre de sa mission de bureau d'études " structure " ; les appels en garantie formés à son encontre seront également rejetés en l'absence de démonstration d'une quelconque faute qui lui serait imputable ;

- l'OPH Grand Dôle Habitat ne justifie pas de l'existence et du chiffrage de son préjudice ;

- subsidiairement, la société Architectures Scaranello, en tant qu'architecte, et la société Qualiconsult, auteur de la notice de sécurité erronée, seront condamnées à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 28 juillet et 1er septembre 2020, la société Qualiconsult, représentée par la SCP Raffin et Associés, conclut, à titre principal, au rejet de la requête de l'OPH Grand Dôle Habitat, à la condamnation de celui-ci à lui rembourser la somme de 56 094,14 euros qu'elle lui a versée en exécution du jugement n° 1901384 du juge des référés du tribunal administratif de Besançon en date du 7 janvier 2020 et au rejet des conclusions présentées à son encontre par les autres parties, à titre subsidiaire, à la condamnation " in solidum " de la société Architectures Scaranello, de la société Batiserf, de M. A... B... et de la société BMF à la garantir de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre et à lui rembourser la somme de 56 094,14 euros qu'elle a versée à l'OPH Grand Dôle Habitat en exécution du jugement n° 1901384 du juge des référés du tribunal administratif de Besançon en date du 7 janvier 2020, à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de l'OPH Grand Dôle Habitat et à ce que l'OPH Grand Dôle Habitat soit condamné à lui verser une indemnité de 10 000 euros au titre de l'abus de droit d'ester en justice.

Elle soutient que :

- la requête d'appel est tardive et, dès lors, irrecevable ;

- contrairement à ce que prétend l'OPH Grand Dôle Habitat, le décompte de liquidation du marché de contrôle n'est pas devenu définitif ;

- elle n'a commis aucune faute dans l'accomplissement de sa mission contractuelle ; elle a émis des avis suspendus qui n'ont pas été suivis d'effets ;

- l'OPH Grand Dôle Habitat ne peut en tout état de cause solliciter une indemnisation correspondant au surcoût lié à la passation d'un marché complémentaire dès lors que cette somme aurait été prise en charge par le maître de l'ouvrage si la destination du bâtiment avait été correctement déterminée dès l'origine ;

- subsidiairement, le groupement de maîtrise d'œuvre sera condamné à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre ;

- compte-tenu du caractère manifestement abusif de l'action du maître de l'ouvrage, il sera condamné à lui verser une indemnité de 10 000 euros au titre de l'abus du droit d'ester en justice ;

- elle est fondée à demander la condamnation de l'OPH Grand Dôle Habitat à lui rembourser la somme de 56 094,14 euros qu'elle lui a versée en exécution du jugement n° 1901384 du juge des référés du tribunal administratif de Besançon en date du 7 janvier 2020 alors que la créance n'était pas fondée en l'absence de faute contractuelle de nature à engager sa responsabilité.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1983 ;

- l'arrêté du 21 décembre 1993 précisant les modalités techniques d'exécution des éléments de mission de maîtrise d'œuvre confiés par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picque, première conseillère,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me Tronche pour l'OPH Grand Dôle Habitat, Me Benhalima pour la société Qualiconsult et Me Henry pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Le 28 janvier 2014, l'Office public de l'habitat (OPH) Dôle du Jura Habitat, devenu l'OPH Grand Dôle Habitat, a conclu avec un groupement momentané d'entreprises conjoint, composé de la société Architectures Scaranello, architecte et mandataire solidaire, de la société Batiserf, bureau d'études techniques (BET) " structure ", de M. A... B..., BET " fluides " et de la société Bureau Michel Forgue (BMF), ingénieur conseil en économie de la construction, un marché de maîtrise d'œuvre pour la construction d'un foyer-logement de trente-trois places et d'un service d'accueil de jour à Dôle. Le marché de contrôle technique a été confié à la société Qualiconsult. Le 29 juin 2015, le maire de la commune de Dôle a refusé la délivrance du permis de construire du projet, à la suite d'un avis défavorable de la commission de sécurité incendie en date du 27 mai 2015 fondé sur le non-respect de la réglementation applicable aux établissements recevant du public (ERP) de type J. Le 30 juin 2016, par deux décisions distinctes, le directeur général de l'OPH Grand Dôle Habitat a résilié les marchés de maîtrise d'œuvre et de contrôle technique au motif de l'arrêt de l'exécution des prestations, sur le fondement de l'article 20 de cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de prestations intellectuelles (CCAG-PI). Le représentant du pouvoir adjudicateur a joint à ces décisions les décomptes de liquidation des marchés résiliés, faisant apparaitre des soldes négatifs, résultant de l'inscription de sommes au débit des titulaires sur le fondement de leur responsabilité contractuelle. La société Architectures Scaranello, agissant seule, a contesté le décompte de liquidation du marché de maîtrise d'œuvre. Par un jugement n° 1601843 du 26 avril 2019, le tribunal administratif de Besançon a condamné l'OPH à verser à la société Architectures Scaranello une somme de 941,80 euros au titre du solde du marché résilié. Parallèlement, l'OPH Grand Dôle Habitat a demandé au tribunal administratif de Besançon, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, de condamner " in solidum ", la société Architectures Scaranello, la société Batiserf, M. A... B..., la société BMF et la société Qualiconsult à lui verser une somme de 221 786,24 euros hors taxe (HT). Par un jugement n° 1700994 du 26 avril 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté les demandes de l'OPH. Par deux requêtes, nos 19NC02014 et 19NC02023, qu'il y a lieu de joindre, l'OPH Grand Dôle Habitat demande l'annulation des jugements nos 1601843 et 1700994 du 26 avril 2019.

Sur le désistement partiel de l'OPH Grand Dôle Habitat à l'encontre de la société Qualiconsult :

2. Dans son mémoire enregistré le 3 août 2020, l'OPH Grand Dôle Habitat déclare se désister des conclusions de sa requête n° 19NC02023 dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Besançon n° 1700994 du 26 avril 2019 en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires dirigées contre la société Qualiconsult, ainsi que de ses conclusions tendant à la condamnation de cette société à lui verser une indemnité sur le fondement de sa responsabilité contractuelle pour faute. Un tel désistement partiel étant pur et simple, rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte.

Sur la recevabilité de la requête de l'OPH Grand Dôle Habitat :

3. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le jugement n° 1700994 du 26 avril 2019 a été notifié à l'OPH Grand Dôle Habitat le 29 avril 2019. Par suite, sa requête, enregistrée le 26 juin 2019, dans le délai d'appel de deux mois, n'est pas tardive. La fin de non-recevoir opposée par la société BMF doit, dès lors, être écartée.

4. En deuxième lieu, si la société BMF, M. B... A... et la société Batiserf soutiennent que les conclusions de l'OPH Grand Dôle Habitat tendant à leur condamnation sur le fondement de leur responsabilité contractuelle pour faute sont irrecevables, ce moyen ne relève pas de la recevabilité de la requête d'appel mais de la recevabilité de la demande de première instance, qu'il appartient au juge d'appel d'apprécier dans le cadre de l'examen du bien-fondé de l'appel.

5. En dernier lieu, contrairement à ce que soutient la société Architectures Scaranello, la requête, par renvoi à la demande de première instance, est suffisamment motivée en ce qui concerne en particulier la réalité et l'étendue de son préjudice, sur lesquelles les premiers juges ne se sont pas prononcés.

Sur la responsabilité contractuelle des membres du groupement de maîtrise d'œuvre et de la société Qualiconsult :

En ce qui concerne le bien-fondé des conclusions indemnitaires :

Quant à la responsabilité des sociétés Architectures Scaranello, Batiserf, BMF et de M. A... B... :

6. Aux termes de l'article 3 du décret n° 93-1268 du 29 novembre 1983 : " Les études d'esquisses (ESQ) ont pour objet : " a) de proposer une ou plusieurs solutions d'ensemble, traduisant les éléments majeurs du programme, d'en indiquer les délais de réalisation et d'examiner leur compatibilité avec la partie de l'enveloppe financière prévisionnelle retenue par le maître de l'ouvrage et affectée aux travaux (...) ". Selon l'article 4 du même décret : " Les études d'avant-projet comprennent des études d'avant-projet sommaire (APS) et des études d'avant-projet définitif (APD) ". L'annexe 1 à l'arrêté du 21 décembre 1993 précisant les modalités techniques d'exécution des éléments de mission de maîtrise d'œuvre confiés par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé précise que les APS ont notamment pour objet de " vérifier la compatibilité de la solution retenue avec les contraintes du programme et du site ainsi qu'avec les différentes réglementations, notamment celles relatives à l'hygiène et à la sécurité " tandis que les APD portent notamment sur le " respect des différentes réglementations, notamment celles relatives à l'hygiène et à la sécurité " et " l'établissement des dossiers et les consultations relevant de la compétence de la maîtrise d'œuvre et nécessaires à l'obtention du permis de construire et des autres autorisations administratives, ainsi que l'assistance au maître de l'ouvrage au cours de leur instruction ".

7. Il résulte de l'instruction que l'arrêt de l'exécution des prestations du marché de maîtrise d'œuvre par l'OPH Grand Dôle Habitat est motivé par le rejet de la demande de permis de construire du bâtiment envisagé, lequel a révélé l'incompatibilité du projet résultant des APS et APD avec les prescriptions applicables aux ERP de type J, et le surcoût qu'aurait entrainé sa modification pour satisfaire à cette réglementation.

8. D'une part, si l'OPH Grand Dôle Habitat recherche la responsabilité contractuelle de Batiserf, de BMF et de M. A... B... en raison de cette erreur de conception, il ne démontre pas qu'ils auraient contribué à l'erreur commise dans la classification de l'ERP qui a conduit au refus du permis de construire et à l'abandon du projet contractuellement prévu. Par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, les conclusions indemnitaires formées contre Batiserf, BMF et M. A... B... ne peuvent être que rejetées.

9. D'autre part, il résulte de l'instruction que l'avis de concours de maîtrise d'œuvre indiquait que le projet portait sur la " construction d'un foyer-logement de trente-trois places et (d'un) service d'accueil de jour - 85-89 avenue de Landon, ETAPES, 39100 Dôle ". Le programme indiquait : " 1.2 Les grands principes du projet : foyer logement et service d'accueil de jour : (...) - le foyer logement est un lieu de résidences de personnes (...). L'espace chambre/studio doit être distinct de l'espace administrative et des salles collectives (...). Le projet de ce présent concours est de regrouper les structures Gévot et Emergences du fait de la localisation des ateliers de l'ESAT (le lieu de travail des résidents se trouve à Dôle). Un service d'accueil de jour (SAJ) sera également créé. (...) 2.1. Eléments généraux : (...) Le bâtiment regroupe deux services distincts (...). Le service d'accueil de jour est un service bien différencié du foyer-logement. Cependant une mutualisation de certaines pièces entre le SAJ et le FL peut être envisagé (les usagers n'étant pas présents sur le site aux mêmes horaires). Cette mutualisation peut concerner certaines salles d'activité, salle à manger, salon et/ou cuisine. Toutefois le SAJ doit constituer un seul ensemble ". Il résulte par ailleurs du compte-rendu de la visite du site effectuée le 18 juillet 2013, que les sociétés candidates, dont la société Architectures Scaranello, ont été informées, en présence de la directrice de l'ETAPES, établissement d'accueil pour personnes handicapées, que " le bâtiment créé sera classé comme ERP de type J ". Dans ces conditions, contrairement à ce qu'elle soutient, la société Architectures Scaranello disposait, pour la réalisation des esquisses et des études d'avant-projet, d'informations suffisamment précises sur les besoins du maître de l'ouvrage et les contraintes du programme et, notamment sur le classement du bâtiment projeté en ERP de type J. Par suite, en concevant, au stade des études d'avant-projet, notamment destinées au dossier de permis de construire, un ouvrage ne comportant pas les dispositifs techniques nécessaires à un établissement de ce type, la société Architectures Scaranello a commis une faute contractuelle de nature à engager sa responsabilité.

10. Toutefois, il ressort des avis émis par la société Qualiconsult le 31 juillet 2014, sur les études d'avant-projet sommaire, et le 25 février 2015, sur les études d'avant-projet définitif, que le contrôleur technique a, à deux reprises, suspendu ses avis sur le type de public à accueillir, le nombre total d'occupant et la notice de sécurité en interrogeant l'OPH Grand Dôle Habitat sur le type de personnes accueillies et en lui demandant de lui confirmer qu'il ne s'agissait pas de personnes âgées et de personnes en situation de handicap physique. Ces avis auraient dû alerter le maître de l'ouvrage sur l'incompatibilité du projet conçu par la société Architectures Scaranello avec les contraintes de son programme, ce qui aurait pu lui permettre d'interrompre plus tôt le marché. Dans ces conditions, l'OPH Grand Dôle Habitat, qui n'a pas répondu aux questions du contrôleur technique, a commis une négligence fautive qui a contribué, au moins en partie, à ses préjudices. Elle est de nature à exonérer la responsabilité de la société Architectures Scaranello à hauteur de 30 %.

Quant à l'indemnisation :

11. L'OPH Grand Dôle Habitat est seulement fondé à demander l'indemnisation des préjudices résultant directement de la faute contractuelle commise par la société Architectures Scaranello dans la conception du projet.

12. Il résulte de l'instruction, et notamment du tableau de l'état des versements certifié par le comptable public, que l'OPH Grand Dôle Habitat a exposé en vain le paiement des prestations de maîtrise d'œuvre d'un projet incompatible avec le programme qu'elle avait défini pour un montant 127 862,93 euros. En revanche, l'office ne peut prétendre à être indemnisé des dépenses relatives au marché de contrôle technique, aux études de sols, au diagnostic amiante, aux frais de géomètre, aux frais de reproduction et de publication aux journaux officiels, aux indemnités du jury de concours et des candidats, aux frais de démolition de la maison et de l'entrepôt, qui auraient dû être engagées indépendamment de la faute commise par la société Architectures Scaranello. Enfin, l'OPH Grand Dôle Habitat ne démontre pas, par la production d'un simple tableau, la réalité du préjudice des frais de gestion liés aux dépenses de personnel qui auraient été exposées en vain du fait de la faute de l'architecte. Par suite le préjudice subi par l'OPH Grand Dôle Habitat doit être fixé à la somme de 127 862,93 euros.

13. Toutefois, l'OPH ne saurait prétendre à une double indemnisation de ce préjudice. Par suite, il y a lieu de déduire de la somme de 127 862,93 euros fixée au point précédent, celle de 55 446,56 euros inscrite dans le décompte définitif de liquidation du marché conclu entre la requérante et la société Qualiconsult, et destinée à réparer le même préjudice.

14. Enfin, au regard du partage de responsabilité précédemment retenu, l'indemnisation due à l'OPH Grand Dôle Habitat par la société Architectures Scaranello doit donc être fixée à la somme de 50 691,46 euros.

Quant aux intérêts :

15. L'OPH Grand Dôle Habitat a droit aux intérêts de la somme de 50 691,46 euros à compter de la date d'enregistrement de sa requête au greffe du tribunal administratif de Besançon, soit le 1er juin 2017.

Quant aux intérêts des intérêts :

16. La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année. En ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière. La capitalisation des intérêts a été demandée le 1er juin 2017. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 1er juin 2018, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

17. Il résulte de ce qui précède que l'OPH Grand Dôle Habitat est uniquement fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande indemnitaire dirigée contre la société Architectures Scaranello et la condamnation de cette dernière à lui verser la somme de 50 691,46 euros augmentée des intérêts et leur capitalisation. L'article 1er du jugement n° 1700994 du 26 avril 2019 du tribunal administratif de Besançon doit être réformé dans cette mesure.

Quant aux appels en garantie :

18. En premier lieu, alors qu'il résulte de l'instruction que la société Qualiconsult a déjà versé à l'OPH Grand Dôle Habitat la somme de 55 446,56 euros au titre du même préjudice que celui que la société Architectures Scaranello est condamnée à indemniser, cette dernière, dont la faute est établie, ne démontre pas que cette société aurait commis une faute quasi-délictuelle de nature à justifier qu'elle prenne en charge tout ou partie la condamnation prononcée à son encontre.

19. En second lieu, la société Architectures Scaranello ne démontre pas la faute quasi-délictuelle qu'auraient commise Batiserf, BMF et M. A... B....

20. Il résulte de ce qui précède que les conclusions d'appel en garantie de la société Architectures Scaranello ne peuvent être que rejetées.

En ce qui concerne les conclusions reconventionnelles de la société Qualiconsult :

21. En premier lieu, la société Qualiconsult demande, pour la première fois en appel, la condamnation de l'OPH Grand Dôle Habitat à lui rembourser la somme de 56 094,14 euros qu'elle lui a versée à titre de provision en exécution du jugement n° 1901384 du juge des référés du tribunal administratif de Besançon en date du 7 janvier 2020. Toutefois cette somme est comprise dans le décompte de liquidation du marché conclu entre la société Qualiconsult et l'OPH Grand Dôle Habitat, qui est devenu définitif. Les conclusions de la société Qualiconsult doivent donc, sans qu'il soit besoin d'examiner leur recevabilité, être rejetées.

22. En second lieu, les conclusions de la société Qualiconsult tendant à la condamnation de l'OPH Grand Dôle Habitat pour recours abusif ne sont assorties d'aucune justification. Elles doivent, par suite, être rejetées.

Sur le décompte de résiliation de la société Architectures Scaranello :

23. Aux termes de l'article 20 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de prestations intellectuelles issu de l'arrêté du 16 septembre 2009 (CCAG-PI) : " Lorsque les prestations sont scindées en plusieurs parties techniques à exécuter distinctement, le pouvoir adjudicateur peut décider, au terme de chacune de ces parties, soit de sa propre initiative, soit à la demande du titulaire, de ne pas poursuivre l'exécution des prestations, dès lors que les deux conditions suivantes sont remplies : - les documents particuliers du marché prévoient expressément cette possibilité ; - chacune de ces parties techniques est clairement identifiée et assortie d'un montant. / La décision d'arrêter l'exécution des prestations ne donne lieu à aucune indemnité. / L'arrêt de l'exécution des prestations entraîne la résiliation du marché ". Selon l'article 23 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du marché : " Conformément à l'article 20 du CCAG-PI, le maître de l'ouvrage se réserve la possibilité d'arrêté l'exécution des prestations au terme de chacune des phases techniques pour chaque élément de mission défini à l'article 1.3 du présent CCAP ".

24. D'autre part, aux termes de l'article 31.3 du CCAG-PI : " Lorsque l'arrêt de l'exécution des prestations est prononcé en application de l'article 20, le pouvoir adjudicateur résilie le marché. / La résiliation n'ouvre droit pour le titulaire à aucune indemnité ". Aux termes de l'article 34 : "34. 1. La résiliation fait l'objet d'un décompte de résiliation, qui est arrêté par le pouvoir adjudicateur et notifié au titulaire. / 34. 2. Le décompte de résiliation qui fait suite à une décision de résiliation prise en application des articles 31 et 33 comprend : 34. 2. 1. Au débit du titulaire : - le montant des sommes versées à titre d'avance, d'acompte, de règlement partiel définitif et de solde ; - la valeur, fixée par le marché et ses avenants éventuels, des moyens confiés au titulaire que celui-ci ne peut restituer, ainsi que la valeur de reprise des moyens que le pouvoir adjudicateur cède à l'amiable au titulaire ; - le montant des pénalités. / 34. 2. 2. Au crédit du titulaire : 34. 2. 2. 1. La valeur des prestations fournies au pouvoir adjudicateur, à savoir : - la valeur contractuelle des prestations reçues, y compris, s'il y a lieu, les intérêts moratoires ; - la valeur des prestations fournies éventuellement à la demande du pouvoir adjudicateur telles que le stockage des fournitures. 34. 2. 2. 2. Les dépenses engagées par le titulaire en vue de l'exécution des prestations qui n'ont pas été fournies au pouvoir adjudicateur, dans la mesure où ces dépenses n'ont pas été amorties antérieurement ou ne peuvent pas l'être ultérieurement, à savoir : - le coût des matières et objets approvisionnés en vue de l'exécution du marché ; - le coût des installations, matériels et outillages réalisés en vue de l'exécution du marché ; - les autres frais du titulaire se rapportant directement à l'exécution du marché. 34. 2. 2. 3. Les dépenses de personnel dont le titulaire apporte la preuve qu'elles résultent directement et nécessairement de la résiliation du marché. 34. 2. 2. 4. Si la résiliation est prise en application de l'article 33, une somme forfaitaire calculée en appliquant un pourcentage à la différence entre le montant hors TVA non révisé du marché et le montant hors TVA non révisé des prestations réceptionnées. Dans le silence du marché, ce pourcentage est de 5 %. Le montant ainsi calculé sera révisé à la date d'effet de la résiliation conformément aux dispositions du marché. 34. 2. 2. 5. Plus généralement tous préjudices subis du fait de la résiliation par le titulaire et éventuellement ses sous-traitants et fournisseurs ".

En ce qui concerne l'indemnité due par la société Architectures Scaranello sur le fondement de sa faute contractuelle :

25. La circonstance que le maître de l'ouvrage résilie le marché de maîtrise d'œuvre au motif de l'arrêt de l'exécution des prestations ne fait pas obstacle à ce que celui-ci inscrive dans le décompte de liquidation la créance dont il s'estime détenteur à raison de la faute commise par le titulaire dans l'exécution du contrat. Par suite, l'OPH Grand Dôle Habitat est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon a considéré que la résiliation du marché de maîtrise d'œuvre prononcée du fait de l'arrêt de l'exécution des prestations, parce qu'elle procède d'un événement lié au marché et non à son titulaire, excluait toute possibilité d'inscrire dans le décompte une somme due au titre d'une faute contractuelle de ce dernier.

26. Par conséquent, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 6 à 15, il y a lieu d'inscrire, dans le décompte de liquidation du marché de maîtrise d'œuvre en litige, la somme de 50 691,46 euros due par la société Architectures Scaranello à l'OPH Grand Dôle Habitat sur le fondement de sa responsabilité contractuelle.

En ce qui concerne le solde du décompte de liquidation :

27. Compte tenu des sommes à porter au débit du titulaire (71 489,69 euros HT, soit 85 787,63 euros TTC au titre des sommes versées + 50 691,46 euros à titre d'indemnisation hors intérêts), et des sommes à porter à son crédit (72 274,54 euros HT, soit 86 729,43 TTC), le solde du marché en litige s'élève à la somme de 49 749,66 euros hors intérêts en défaveur de la société Architectures Scaranello.

28. Il en résulte que l'OPH Grand Dôle Habitat est fondé à demander l'annulation de l'article 1er du jugement n° 1601843 du tribunal administratif de Besançon et le rejet de la demande de la société Architectures Scaranello tendant au paiement du solde de son marché devant le tribunal administratif de Besançon.

Sur les frais liés aux instances :

29. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'OPH Grand Dôle Habitat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Architectures Scaranello demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Architectures Scaranello le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l'OPH Grand Dôle Habitat au titre des deux instances, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

30. D'autre part, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'OPH Grand Dôle Habitat la somme de 500 euros chacun à verser à la société BMF, la société Batiserf, M. A... B... et à la société Qualiconsult sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement partiel, dans la limite précisée au point 2 du présent arrêt, des conclusions de la requête n° 19NC02023 présentée par l'OPH Grand Dôle Habitat.

Article 2 : La société Architectures Scaranello est condamnée à verser à l'OPH Grand Dôle Habitat une somme de 50 691,46 euros avec intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2017. Les intérêts échus à la date du 1er juin 2018 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : Le surplus des conclusions indemnitaires de l'OPH Grand Dôle Habitat est rejeté.

Article 4 : Le jugement n° 1700994 du tribunal administratif de Besançon du 26 avril 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : L'article 1er du jugement n° 1601843 du tribunal administratif de Besançon du 26 avril 2019 est annulé et la demande de la société Architectures Scaranello rejetée.

Article 6 : La société Architectures Scaranello versera à l'OPH Grand Dôle Habitat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : L'OPH Grand Dôle Habitat versera à la société BMF, à la société Batiserf, à M. A... B... et à la société Qualiconsult, chacun, la somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 8 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 9 : Le présent arrêt sera notifié à l'OPH Grand Dôle Habitat, à la société Architectures Scaranello, à la société Batiserf, à la société Bureau Michel Forgue, à M. A... B... et la société Qualiconsult.

Délibéré après l'audience du 22 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- Mme Roussaux, première conseillère.

- Mme Picque, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mai 2022

La rapporteure,

Signé : A.-S. PicqueLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : N. Basso

La République mande et ordonne au préfet du Jura en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N. Basso

2

Nos 19NC02014, 19NC02023


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC02023
Date de la décision : 06/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Anne-Sophie PICQUE
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : DURLOT HENRY

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-05-06;19nc02023 ?
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