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30/03/2022 | FRANCE | N°19NC01435

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 30 mars 2022, 19NC01435


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une protestation électorale, M. A... Chantier a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les élections des représentants des locataires au sein du conseil d'administration de l'Office public d'habitation (OPH) de la Meuse qui se sont déroulées le 19 novembre 2018.

Par un jugement n° 1803305 du 14 mars 2019, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa protestation.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire respectivement enregistrés le 14 mai 2019 et

le 26 octobre 2020, M. Chantier, représenté par Me Schmitt demande à la cour :

1°) d'annul...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une protestation électorale, M. A... Chantier a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les élections des représentants des locataires au sein du conseil d'administration de l'Office public d'habitation (OPH) de la Meuse qui se sont déroulées le 19 novembre 2018.

Par un jugement n° 1803305 du 14 mars 2019, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa protestation.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire respectivement enregistrés le 14 mai 2019 et le 26 octobre 2020, M. Chantier, représenté par Me Schmitt demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 14 mars 2019 ;

2°) d'annuler les élections des représentants des locataires au sein du conseil d'administration de l'Office public d'habitation (OPH) de la Meuse qui se sont déroulées le 19 novembre 2018 ;

3°) de mettre à la charge de l'OPH de la Meuse le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce que le tribunal n'a pas soulevé d'office le moyen tiré de l'incompétence du directeur général de l'OPH pour rejeter sa liste ;

- la date de dépôt des candidatures pouvait réglementairement intervenir jusqu'au 8 octobre 2018 soit au plus tard six semaines avant la date de l'élection, dès lors, la date du 14 septembre 2018 ne pouvait légalement et régulièrement être opposée à l'enregistrement de sa liste ;

- la liste déposée au nom de l'association Familles B... était recevable puisque l'association indépendante des locataires OPH de la Meuse était affiliée à la fédération Familles B... par l'intermédiaire de l'union nationale des locataires indépendants.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 9 décembre 2019 et le 2 juin 2021, le directeur de l'office public de l'habitat de la Meuse représenté par la SCP Gossin et Horber, conclut à titre principal, à l'irrecevabilité de la demande de première instance au motif qu'elle ne contient aucun moyen relatif à l'annulation de l'élection et à titre subsidiaire, au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. Chantier sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Barrois, première conseillère,

- les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique.

- et les observations de Me Fort, substituant Me Gossin, pour l'OPH de la Meuse.

Considérant ce qui suit :

1. M. Chantier, président de l'association des locataires indépendants de l'OPH de la Meuse, a présenté une première liste pour l'élection des représentants des locataires au sein du conseil d'administration de l'OPH de la Meuse le 11 septembre 2018, complétée le 28 septembre suivant. Par une décision du 26 septembre 2018, le directeur général de l'OPH de la Meuse a rejeté comme irrecevable la liste de l'association des locataires indépendants de l'OPH de la Meuse. M. Chantier fait appel du jugement du 14 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'élection du 19 novembre 2018 au conseil d'administration de l'OPH de la Meuse.

Sur la régularité du jugement :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 421-12 du code de la construction et de l'habitat : " Le directeur général dirige l'activité de l'office dans le cadre des orientations générales fixées par le conseil d'administration. " et de l'article R. 421-18 de ce même code : " Il passe tous actes et contrats au nom de l'office et le représente dans tous les actes de la vie civile. ".

3. D'autre part, il résulte de l'article 7 du protocole local relatif au déroulement des élections du 5 juillet 2018, adopté le 3 septembre suivant, que l'OPH de la Meuse se prononce sur la recevabilité des listes de candidature. Dès lors que le directeur général en vertu des dispositions précitées a compétence pour passer tous actes au nom de l'office, il pouvait donc se prononcer sur la recevabilité des listes de candidature. Par suite et contrairement à ce que soutient M. Chantier, le tribunal n'a pas entaché son jugement d'irrégularité en ne soulevant pas d'office un moyen d'ordre public tiré de l'incompétence du directeur général.

Sur la fin de non-recevoir soulevée par l'OPH de la Meuse :

4. L'OPH de la Meuse soutient que la demande de première instance de M. Chantier est irrecevable au motif qu'elle ne contenait aucun moyen au soutien de ses conclusions à fin d'annulation de l'élection du 19 novembre 2018. Il résulte des termes mêmes de la requête de première instance que plusieurs moyens assortis de précisions suffisantes étaient soulevés au soutien de la demande d'annulation de M. Chantier. Par suite, l'OPH n'est pas fondé à soutenir que cette demande de première instance était irrecevable.

Sur la protestation électorale de M. Chantier :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 421-9 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version applicable au litige : " Les représentants des locataires au conseil d'administration de l'office sont élus sur des listes de candidats composées alternativement d'un candidat de chaque sexe et présentées par des associations œuvrant dans le domaine du logement. Ces associations doivent être affiliées à une organisation nationale siégeant à la Commission nationale de concertation, au Conseil national de l'habitat ou au Conseil national de la consommation et indépendantes de tout parti politique ou organisation à caractère philosophique, confessionnel, ethnique ou racial et ne pas poursuivre des intérêts collectifs qui seraient en contradiction avec les objectifs du logement social fixés par le code de la construction et de l'habitation, et notamment par les articles L. 411 et L. 441, ou du droit à la ville défini par la loi n° 91-662 du 13 juillet 1991 d'orientation pour la ville. ". Il résulte de ces dispositions que le législateur a nécessairement entendu exiger que cette affiliation soit directe, excluant ainsi toute possibilité d'affiliation indirecte, par l'intermédiaire d'une association tierce. Le directeur général de l'OPH de la Meuse, qui n'a donc pas ajouté à la loi des conditions qu'elle ne prévoit pas en exigeant une " affiliation directe ", était ainsi fondé à ne pas autoriser l'association requérante à participer à l'élection des représentants des locataires au conseil d'administration de l'OPH de la Meuse, intervenue le 19 novembre 2018, au motif qu'elle n'était pas affiliée directement à une organisation nationale siégeant à l'un des trois organes mentionnés à l'article susvisé, dès lors qu'elle n'était affiliée à la Fédération nationale Familles B..., membre du Conseil national de la consommation, que par l'intermédiaire de l'Union nationale des locataires indépendants (UNLI), ainsi que cela ressortait notamment des termes d'une attestation d'affiliation en date du 13 septembre 2018 émanant du président de la Fédération Familles B.... Dès lors, M. Chantier n'est pas fondé à soutenir que l'association des locataires indépendants qu'il préside devait être regardée comme étant régulièrement affiliée à une organisation nationale siégeant à l'un des organes mentionnés à l'article L. 421-9 du code de la construction et de l'habitation. Il en résulte que sa liste de candidature était irrecevable pour ce seul motif.

6. En second lieu, aux termes des huitième et dixième alinéas de l'article R. 421-7 du code de la construction et de l'habitation: " 3° Au plus tard deux mois avant la date de l'élection, une lettre-circulaire de l'office fournissant toutes indications utiles sur la date des élections, la procédure électorale et les conditions requises des candidats est portée par voie d'affichage à la connaissance des personnes mentionnées au 1° ", du neuvième alinéa du même article : " Les listes de candidats, présentées par des associations remplissant les conditions prévues à l'article L. 421-9, comportent chacune six noms pour un conseil d'administration de dix-sept membres, huit noms pour un conseil d'administration de vingt-trois membres ou dix noms pour un conseil d'administration de vingt-sept membres. Elles doivent parvenir à l'office au plus tard six semaines avant la date de l'élection. Un mois au moins avant cette dernière date, l'office porte ces listes à la connaissance des personnes mentionnées au 1°. (...) " et du dixième alinéa du même article : " 4° Les modalités pratiques de l'élection sont arrêtées par le conseil d'administration. Le scrutin a lieu entre le 15 novembre et le 15 décembre. ".

7. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le délai dont disposent les associations remplissant les conditions prévues à l'article L. 421-9 précité du code de l'habitation et de la construction pour la présentation des listes de candidats expire six semaines au plus tard avant la date fixée pour l'élection. Aucune disposition du code de la construction et de l'habitation ou d'un autre texte n'habilite le conseil d'administration d'un office public de l'habitat à déroger au délai fixé par l'article R. 421-7 de ce code, notamment pas les dispositions du 4° de l'article R. 421-7 du code de la construction et de l'habitation qui concernent les pouvoirs dont dispose l'office pour définir les modalités pratiques de l'élection. Par suite, en fixant une date limite d'enregistrement des candidatures différente de celle prévue par les dispositions précitées dans son protocole d'accord local du 5 juillet 2018 adopté par délibération du conseil d'administration du 3 septembre 2018, et alors que le refus d'enregistrement d'une candidature n'est pas détachable des opérations électorales, l'Office public de l'habitat de la Meuse, qui était incompétent pour prendre une telle décision, a entaché les opérations électorales du 19 novembre 2018 d'irrégularité.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. Chantier, qui était recevable à attaquer les opérations électorales contestées, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa protestation tendant à l'annulation du scrutin litigieux.

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'OPH de la Meuse le versement de la somme de 1 500 euros à M. Chantier sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions de l'OPH de la Meuse, partie perdante, présentées sur le fondement de ces mêmes dispositions doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1803305 du 14 mars 2019 du tribunal administratif de Nancy est annulé.

Article 2 : Les élections des représentants des locataires au sein du conseil d'administration de l'Office public d'habitation (OPH) de la Meuse qui se sont déroulées le 19 novembre 2018 sont annulées.

Article 3 : L'OPH de la Meuse versera 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à M. Chantier.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Chantier est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de L'OPH de la Meuse présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... Chantier et au directeur de l'office public de l'habitat de la Meuse.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Vidal, présidente de chambre,

- M. Rees, président-assesseur,

- Mme Barrois, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 mars 2022.

La rapporteure,

Signé : M. Barrois La présidente,

Signé : S. Vidal

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne à la préfète de la Meuse en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 19NC01435


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19NC01435
Date de la décision : 30/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

28-07-02 Élections et référendum. - Élections diverses. - Conseils d'administration des organismes de logement à loyer modéré.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: Mme Marion BARROIS
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : SCP GOSSIN - HORBER

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-03-30;19nc01435 ?
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