La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/03/2022 | FRANCE | N°20NC01326

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 10 mars 2022, 20NC01326


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 26 novembre 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a ordonné son transfert aux autorités allemandes.

Par un jugement n° 1909387 du 20 décembre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 juin 2020, M. B... A..., représenté par Me Sabatakakis, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1909387 du tr

ibunal administratif de Strasbourg du 20 décembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 26 novembre 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a ordonné son transfert aux autorités allemandes.

Par un jugement n° 1909387 du 20 décembre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 juin 2020, M. B... A..., représenté par Me Sabatakakis, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1909387 du tribunal administratif de Strasbourg du 20 décembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une attestation de demande d'asile suivant la procédure normale dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocate en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il est fondé sur des pièces produites à l'audience et qu'il ne vise pas ;

- l'arrêté contesté méconnaît l'autorité de la chose jugée ;

- il méconnaît l'article 23 du règlement (UE) n° 604-2013 du 26 juin 2013, dès lors que le préfet n'a pas saisi les autorités allemandes d'une demande de reprise en charge à la suite de sa nouvelle demande de protection internationale présentée le 14 août 2019, et que la France est ainsi devenue l'Etat responsable de sa demande d'asile ;

- il n'a pas, dans le cadre du réexamen de sa demande, reçu les informations prévues par l'article 4 du règlement (UE) n° 604-2013 du 26 juin 2013.

Par lettre du 26 novembre 2020, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour est susceptible de relever d'office le moyen tiré de ce que, la France étant devenue responsable de l'examen de la demande de protection internationale de M. A... à l'expiration du délai de six mois défini à l'article 29 du règlement (UE) n° 604-2013 du 26 juin 2013, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de transfert contestée.

Par un mémoire, enregistré le 9 décembre 2020, la préfète du Bas-Rhin informe la cour de ce que la décision contestée a été exécutée le 3 janvier 2020.

Par un mémoire, enregistré le 17 février 2021, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision en date du 7 avril 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Vidal, présidente, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant afghan, est entré en France une première fois le 9 décembre 2018 pour y demander l'asile. Le 15 janvier 2019, il a été remis aux autorités allemandes, auprès desquelles il avait antérieurement sollicité l'asile, et qui l'ont repris en charge. M. A... est néanmoins revenu en France, et y a une nouvelle fois déposé une demande d'asile le 3 juillet 2019. Le 22 juillet 2019, les autorités allemandes ont à nouveau accepté de le reprendre en charge, et le 2 août 2019, le préfet du Bas-Rhin a pris la décision de le leur remettre. A la suite de l'annulation de cette décision par un jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 13 août 2019, le préfet du Bas-Rhin a, une nouvelle fois, par un arrêté du 26 novembre 2019, décidé de transférer M. A... aux autorités allemandes. M. A..., qui a été remis aux autorités allemandes le 3 janvier 2020, relève appel du jugement du 20 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " (...) Lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile (...) ". Selon l'article L. 741-2 de ce code : " Lorsque l'examen de la demande d'asile relève de la compétence de la France, l'étranger introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat. L'autorité administrative compétente informe immédiatement l'office de l'enregistrement de la demande et de la remise de l'attestation de demande d'asile. / L'office ne peut être saisi d'une demande d'asile que si celle-ci a été préalablement enregistrée par l'autorité administrative compétente et si l'attestation de demande d'asile a été remise à l'intéressé ".

3. Par son jugement du 13 août 2019, qui était devenu définitif à la date de l'arrêté contesté, le tribunal administratif de Strasbourg, après avoir annulé le précédent arrêté de transfert, du 6 août 2019, a ordonné au préfet du Bas-Rhin de procéder à l'enregistrement de la demande d'asile de M. A... tout en indiquant il est vrai dans ses motifs que l'exécution du jugement impliquait " seulement un examen de la demande de l'intéressé " et qu'il y avait lieu " en conséquence d'enjoindre le préfet du Bas-Rhin d'enregistrer sa demande d'asile ". Toutefois, l'enregistrement de la demande d'asile de M. A... ordonné dans le dispositif du jugement implique nécessairement, au regard des dispositions précitées, que la France est responsable de l'examen de cette demande d'asile. Par suite, le préfet du Bas-Rhin ne pouvait, sans méconnaître l'autorité de chose jugée attachée au dispositif du jugement du 13 août 2019, décider de transférer M. A... aux autorités allemandes.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens qu'il soulève, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande, et, par suite, à demander l'annulation du jugement attaqué et celle de l'arrêté contesté.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Le présent arrêt implique nécessairement que M. A... soit mis à même de déposer sa demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et que, par suite, outre l'enregistrement de sa demande d'asile, déjà ordonné par le jugement du 13 août 2019, il lui soit remis une attestation de demande d'asile. Il y a lieu d'ordonner à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer cette attestation dans un délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.

Sur les frais de l'instance :

6. M. A... est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Sabatakakis de la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1909387 du tribunal administratif de Strasbourg du 20 décembre 2019 et l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 26 novembre 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la préfète du Bas-Rhin de délivrer à M. A... une attestation de demande d'asile dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Sabatakakis, avocate de M. A..., la somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Sabatakakis renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 :Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

N° 20NC01326 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NC01326
Date de la décision : 10/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: Mme Sylvie VIDAL
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : SABATAKAKIS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-03-10;20nc01326 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award