La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/02/2022 | FRANCE | N°20NC02356

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 03 février 2022, 20NC02356


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, par huit requêtes distinctes, d'annuler d'une part, les arrêtés du directeur territorial de l'Office national des forêts des 9 mars 2017, 6 juin 2017, 4 décembre 2017, 5 mars 2018, 9 avril 2018, 12 avril 2018, 11 mai 2018, 22 juin 2018 et 22 août 2018, par lesquels celui-ci a décidé de le placer en disponibilité d'office pour raison de santé à titre transitoire et a suspendu son traitement et, d'autre part, les décisions par lesquelles il

lui aurait interdit d'exercer une autre activité professionnelle.

Par un j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, par huit requêtes distinctes, d'annuler d'une part, les arrêtés du directeur territorial de l'Office national des forêts des 9 mars 2017, 6 juin 2017, 4 décembre 2017, 5 mars 2018, 9 avril 2018, 12 avril 2018, 11 mai 2018, 22 juin 2018 et 22 août 2018, par lesquels celui-ci a décidé de le placer en disponibilité d'office pour raison de santé à titre transitoire et a suspendu son traitement et, d'autre part, les décisions par lesquelles il lui aurait interdit d'exercer une autre activité professionnelle.

Par un jugement commun n°1701997, 1704170, 1800434, 1802242, 1803074, 1803384, 1804570, 1806454 du 24 avril 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête n° 1701997 et a rejeté le surplus des conclusions des autres requêtes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 14 août 2020,

le 26 avril, 10 décembre 2021 et le 5 janvier 2022, M. A..., représenté par Me Schaeffer, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 24 avril 2020 en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à ses demandes ;

2°) d'annuler l'ensemble des décisions susvisées ;

3°) de mettre à la charge de l'Office national des forêts, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 4 000 euros.

M. A... soutient que :

- les décisions contestées ont été signées par une autorité incompétente ;

- le tribunal a commis une erreur de droit en considérant que ces décisions, qui prononcent sa mise en disponibilité, n'étaient pas prises en considération de sa personne et par suite ne devaient pas être précédées de la formalité instituée par l'article 65 de la loi du 25 avril 1905 ;

- les décisions de le placer en disponibilité d'office sont entachées d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 27 du décret du 14 mars 1986 faute d'avoir été précédées de l'avis du comité médical ;

- contrairement à ce qu'ont retenu l'Office national des forêts (ONF) et le tribunal administratif de Strasbourg, il n'avait pas épuisé ses droits à congés de maladie prévus par l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 ;

- en application de l'article 48 du décret du 14 mars 1986 le renouvellement de la mise en disponibilité d'office ne pouvait être effectué que deux fois alors qu'il est intervenu à sept reprises ;

- l'avis du comité médical aurait dû lui être communiqué ;

- l'ONF a commis un détournement de pouvoir.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 décembre 2021, l'Office national des forêts conclut, à titre principal, au rejet de la requête en raison de sa tardiveté et à titre subsidiaire, à son rejet comme non fondée. L'office demande en outre que soit mise à la charge de M. A... une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête de M. A... est irrecevable dès lors qu'elle a été enregistrée tardivement au-delà du délai d'appel qui expirait le 25 juin 2020 ;

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une lettre en date du 22 novembre 2021, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de relever d'office la tardiveté de la requête dès lors qu'elle a été introduite

après l'expiration du délai de recours de droit commun de deux mois à compter de la notification du jugement de première instance, et que les dispositions de l'article 2 de l'ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 prévoyant le report des délais de recours pendant la période d'urgence sanitaire n'étaient pas applicables, compte tenu de la date d'expiration du délai de recours le 25 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 modifiée relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stenger,

- et les conclusions de Mme Haudier, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

Sur la requête de M. A... :

1. Aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 à R. 751-4-1. / Si le jugement a été signifié par huissier de justice, le délai court à dater de cette signification à la fois contre la partie qui l'a faite et contre celle qui l'a reçue. ".

2. Aux termes l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 : " Par dérogation aux dispositions de l'article L. 3131-13 du code de la santé publique, l'état d'urgence sanitaire est déclaré pour une durée de deux mois à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi. L'état d'urgence sanitaire entre en vigueur sur l'ensemble du territoire national. Toutefois, un décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé peut en limiter l'application à certaines des circonscriptions territoriales qu'il précise. La prorogation de l'état d'urgence sanitaire au-delà de la durée prévue au premier alinéa du présent article ne peut être autorisée que par la loi. Il peut être mis fin à l'état d'urgence sanitaire par décret en conseil des ministres avant l'expiration du délai fixé au même premier alinéa. ". Aux termes de l'article 13 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 : " Lorsqu'une partie est représentée par son avocat, la notification prévue à l'article R. 751-3 du code de justice administrative est valablement accomplie par l'expédition de la décision à son mandataire ". Aux termes de l'article 15 de la même ordonnance : " I.- Les dispositions de l'article 2 de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 susvisée relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période sont applicables aux procédures devant les juridictions de l'ordre administratif. "

3. Aux termes de l'article 1er de l'ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période, dans sa rédaction applicable à la date d'enregistrement de la requête : " I. ' Les dispositions du présent titre sont applicables aux délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 inclus ". Aux termes de l'article 2 de la même ordonnance : " Tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d'office, application d'un régime particulier, non avenu ou déchéance d'un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période mentionnée à l'article 1er sera réputé avoir été fait à temps s'il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois. (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 24 avril 2020 a été valablement notifié à l'avocat de M. A... le 24 avril 2020, en application des dispositions précitées de l'article 13 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020. Cette notification mentionnait qu'en application des dispositions combinées de l'article 15 de l'ordonnance n°2020-305 du 25 mars 2020 précité et des articles 1 et 2 de l'ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période, les appels contre les décisions des tribunaux administratifs, qui auraient dû être accomplis pendant la période comprise entre le 12 mars 2020 et la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire seront réputés avoir été faits à temps s'ils ont été effectués dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois. Elle précisait également que : " Ces dispositions sont applicables aux délais qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l'article 4 de la loi n°2020-290 du 23 mars 2020. ". Il résulte de ces dernières dispositions, combinées à celles de l'article 4 de la loi du 23 mars 2020, que la date d'expiration de la période permettant de bénéficier du report des délais échus était le 23 juin 2020, soit un mois après la cessation de l'état d'urgence sanitaire fixée par ladite loi au 23 mai 2020. La durée de ce délai n'a pas été modifiée par les dispositions de l'ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020, ni n'a été réduite, contrairement à ce que soutient le requérant, par l'article 2 de l'ordonnance n°2020-666 du 3 juin 2020 relative aux délais applicables en matière financière et agricole pendant l'état d'urgence sanitaire, qui ne s'applique pas au cas d'espèce. Le requérant ne saurait dès lors utilement soutenir que la prétendue modification du délai fixé à l'article 1er de l'ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 contrevient aux stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et au principe de non-rétroactivité des actes administratifs. Dans ces conditions, la notification précitée du 24 avril 2020 a donc fait courir le délai d'appel de deux mois imparti par les dispositions ci-dessus rappelées pour relever appel dont le terme expirait le 25 juin 2020, soit après la date du 23 juin 2020 fixée par l'article 1er de l'ordonnance n° 2020-306. Dès lors, les dispositions de l'article 2 de la même ordonnance sur le report des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire étaient inapplicables en l'espèce. Or, au cas particulier, bien que la lettre de notification du jugement mentionnait expressément qu'elle faisait courir le délai d'appel de deux mois à compter de sa réception, la requête n'a été enregistrée au greffe de la cour que le 14 août 2020, soit après l'expiration du délai d'appel précité. Par suite, l'appel étant tardif et donc irrecevable, la requête de M. A... ne peut qu'être rejetée dans toutes ses conclusions, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les conclusions présentées par l'Office national des forêts tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande présentée sur ce fondement par l'Office national des forêts.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'Office national des forêts tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à l'Office national des forêts.

Délibéré après l'audience du 13 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Stenger, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 février 2022.

La rapporteure,

Signé : L. STENGER Le président,

Signé : J. MARTINEZ

La greffière,

Signé : C. SCHRAMM

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation et à la ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui les concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. SCHRAMM

2

N° 20NC02356


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC02356
Date de la décision : 03/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Disponibilité.

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés - Congés de maladie.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : SCHAEFFER

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-02-03;20nc02356 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award