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31/12/2021 | FRANCE | N°19NC03685

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 31 décembre 2021, 19NC03685


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'enjoindre à la commune d'Aiglemont de lui verser l'indemnité d'administration et de technicité dont elle a été privée au titre des mois d'avril et mai 2017 et mars 2018, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la date du présent jugement.

Par un jugement n° 1802390 du 5 novembre 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a enjoint la commune d'Aiglemont de verser à Mme C..., dans les deux

mois suivant la notification du jugement, le montant de l'indemnité d'administra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'enjoindre à la commune d'Aiglemont de lui verser l'indemnité d'administration et de technicité dont elle a été privée au titre des mois d'avril et mai 2017 et mars 2018, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la date du présent jugement.

Par un jugement n° 1802390 du 5 novembre 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a enjoint la commune d'Aiglemont de verser à Mme C..., dans les deux mois suivant la notification du jugement, le montant de l'indemnité d'administration et de technicité dont cette dernière a été privée au titre du mois de mars 2018, à due proportion des trois jours d'absence correspondant au congé de maladie dont l'intéressée avait bénéficié du 7 au 9 mars 2018.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 décembre 2019, la commune d'Aiglemont, représentée par Me Bazin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 novembre 2019 en tant qu'il prononce l'injonction précitée ;

2°) de rejeter l'ensemble des demandes présentées par Mme C... en première instance ;

3°) de mettre à la charge de Mme C... les dépens et, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 200 euros.

La commune soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que la suppression de l'indemnité d'administration et de technicité au terme de soixante jours d'absence est contraire à l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 dès lors que cette indemnité, qui est modulée en fonction de la manière de servir de l'agent, comme le prévoit l'article 5 du décret du 14 janvier 2002, peut être nulle ;

- c'est également à tort que les premiers juges ont estimé que la minoration appliquée à l'indemnité d'administration et de technicité servie à Mme C... au titre du mois de mars 2018 était irrégulière parce qu'elle n'était pas proportionnelle à ses trois jours d'absence.

La requête a été transmise à Mme C... qui n'a pas produit de défense.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991

- le décret n° 2002-61 du 14 janvier 2002 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stenger,

- et les conclusions de Mme Haudier, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 23 janvier 2004 la commune d'Aiglemont a fixé le régime indemnitaire de ses agents en précisant que les primes et indemnités qui leur sont versées mensuellement sont attribuées par l'autorité territoriale selon leur valeur professionnelle. Par un arrêté du 30 juin 2014, le maire de la commune a octroyé à Mme C..., agent territorial d'animation deuxième classe, une indemnité d'administration et de technicité fixée à un montant annuel de 464,30 euros, versée mensuellement, affectée d'un coefficient 8 à compter du 1er juillet 2014. Par une nouvelle délibération du 14 novembre 2016, la commune d'Aiglemont a décidé de modifier la délibération précitée en prévoyant l'application d'une minoration de 1/60ème par jour d'absence à compter du 1er janvier 2017. En mars 2018, Mme C... a bénéficié d'un congé de maladie pour une durée de trois jours. En application de la délibération du conseil municipal du 14 novembre 2016, l'intéressée a fait l'objet, au titre du mois de mars 2018, d'une diminution de l'indemnité d'administration et de technicité qu'elle perçoit, à raison de 1/60ième de cette prime par jour d'absence. Par un courrier du 17 juillet 2018, elle a notamment demandé, en vain, à la commune d'Aiglemont que la diminution de la prime de mars 2018 soit calculée au prorata temporis des jours d'absence. La commune d'Aiglemont relève appel du jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 5 novembre 2019 en tant qu'il lui a enjoint de verser à Mme C... le montant de l'indemnité d'administration et de technicité dont cette dernière a été privée au titre du mois de mars 2018, à due proportion des trois jours d'absence à titre de congé de maladie dont l'intéressée a bénéficié du 7 au 9 mars 2018.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire ". Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 : " le fonctionnaire en activité a droit (...) 2° à des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une durée de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois : ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence ". Aux termes de l'article 88 de la même loi : " L'assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale ou le conseil d'administration d'un établissement public local fixe, par ailleurs, les régimes indemnitaires dans la limite de ceux dont bénéficient les différents services de l'Etat ". Aux termes de l'article 2 du décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 pris pour l'application du premier alinéa de l'article 88 de la loi du

26 janvier 1984 susvisée : " L'assemblée délibérante de la collectivité ou le conseil d'administration de l'établissement fixe, dans les limites prévues à l'article 1er, la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités applicables aux fonctionnaires de ces collectivités ou établissements. (...) / L'autorité investie du pouvoir de nomination détermine, dans cette limite, le taux individuel applicable à chaque fonctionnaire ". Aux termes de l'article 2 du décret n° 2002-61 du 14 janvier 2002 relatif à l'indemnité d'administration et de technicité : " Cette indemnité peut être attribuée : - aux fonctionnaires de catégorie C (...) ". Aux termes de l'article 5 de ce décret : " L'attribution individuelle de l'indemnité d'administration et de technicité est modulée pour tenir compte de la manière de servir de l'agent dans l'exercice de ses fonctions ".

3. Comme indiqué au point 1 du présent arrêt, par une délibération du 14 novembre 2016, dont l'illégalité était invoquée par Mme C... devant le tribunal administratif, par la voie de l'exception, la commune d'Aiglemont a décidé de modifier la délibération 23 janvier 2004 fixant le régime indemnitaire du personnel en prévoyant l'application d'une minoration de 1/60ème par jour d'absence à compter du 1er janvier 2017, après avoir rappelé que " les primes et indemnités qui sont versées mensuellement sont attribuées selon la valeur professionnelle des agents ". Les critères ainsi rappelés dans la délibération en litige, relatifs à la valeur professionnelle des agents et au temps de travail effectif des agents sont conformes aux dispositions précitées de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 et de l'article 5 du décret du 14 janvier 2002. L'indemnité d'administration et de technicité, qui est liée à l'exercice effectif des fonctions, ne saurait être regardée comme constituant un élément du traitement devant être maintenu dans le cas où les agents qui en bénéficient sont absents pour congés de maladie ou pour cause d'évènements familiaux. Dès lors, la règle de minoration d'1/60ème par jour d'absence, retenue dans la délibération en litige, ne saurait être regardée comme instituant un abattement total de toute prime mensuelle au-delà de soixante jours d'arrêt cumulés dans l'année. Par suite, la commune d'Aiglemont est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne s'est fondé sur ce motif pour l'enjoindre à verser à Mme C... le montant de l'indemnité d'administration et de technicité dont cette dernière a été privée au titre du mois de mars 2018.

4. Il appartient, cependant, à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme C... devant le tribunal administratif et la cour administrative d'appel.

Sur les autres moyens relatifs à l'indemnité d'administration et de technicité versée à Mme C... au titre du mois de mars 2018 :

5. En premier lieu, la délibération du 14 novembre 2016, qui est un acte règlementaire, n'est pas au nombre des actes qui doivent être motivés en vertu de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Au surplus, et contrairement à ce que soutient la requérante, elle comporte les considérations de droit et de fait qui constituent son fondement, notamment la règle de minoration précitée d'1/60ème par jour d'absence qui est suffisamment précise pour apprécier le mode de calcul de la retenue effectuée sur la prime mensuelle des agents. Par suite, le moyen tiré du vice de forme doit être écarté.

6. En deuxième lieu, la circonstance qu'il est indiqué de manière contradictoire sur la délibération du 14 novembre 2016 qu'elle a été déposée en préfecture des Ardennes le 21 novembre 2016, alors qu'elle n'a été réceptionnée que le 1er décembre 2016 est sans incidence sur la légalité de cet acte. Par suite, ce moyen doit être écarté.

7. En troisième lieu, par un arrêté du 30 juin 2014, le maire a octroyé à l'intéressée l'indemnité d'administration et de technicité pour un montant annuel de 464,30 euros, sur lequel a été appliqué un coefficient de 8 à compter du 1er juillet 2014, soit 3714,4 euros correspondant à un versement mensuel de 309,53 euros. Il est constant que Mme C... a bénéficié en mars 2018 d'un congé de maladie du 7 au 9 mars inclus, soit trois jours calendaires. Or, il ressort des écritures de la commune, particulièrement du mémoire en défense qu'elle a produit en première instance, que la réduction de l'indemnité en litige appliquée par la commune au titre du mois de mars 2018 correspond au calcul suivant : 3.714,36 euro x 3 jours /60 = 185,72 euro. Ce dernier montant, qui correspond donc à une minoration à due proportion de trois jours d'absence, a été déduit de l'indemnité d'administration et de technicité mensuelle versée pour le mois de mars 2018 à Mme C..., soit une indemnité servie de 123,81 euros, correspondant au montant de son indemnité d'administration et de technicité mensuelle de 309,53 euros moins la minoration retenue de 185,72 euros, tel que cela apparaît d'ailleurs sur son bulletin de salaire au titre de mars 2018. Par suite, la commune d'Aiglemont a pu légalement, sur le fondement de la délibération susvisée du 14 novembre 2016, appliquer la minoration précitée à l'indemnité d'administration et de technicité versée au mois de mars 2018 à Mme C....

8. Il résulte de tout ce qui précède que la commune d'Aiglemont est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne lui a enjoint de verser à Mme C... le montant de l'indemnité d'administration et de technicité dont cette dernière a été privée au titre du mois de mars 2018, à due proportion des trois jours d'absence à titre de congé de maladie dont l'intéressée a bénéficié du 7 au 9 mars 2018.

Sur l'application des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative :

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... la somme que la commune demande sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1802390 du 5 novembre 2019 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est annulé en tant qu'il a enjoint à la commune d'Aiglemont de verser à Mme C... le montant de l'indemnité d'administration et de technicité dont cette dernière a été privée au titre du mois de mars 2018, à due proportion des trois jours d'absence correspondant au congé de maladie dont celle-ci avait bénéficié du 7 au 9 mars 2018.

Article 2 : La demande présentée sur ce point par Mme C... devant le tribunal administratif est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune d'Aiglemont est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au maire de la commune d'Aiglemont, à Mme B... A... née C....

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N° 19NC03685


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC03685
Date de la décision : 31/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. - Rémunération. - Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : SCP BLOCQUAUX ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 11/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-12-31;19nc03685 ?
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